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01/10/1999 | SUISSE | N°2P.68/1998

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 01 octobre 1999, 2P.68/1998


125 I 474

44. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 1er
octobre 1999 dans la cause MediService SA contre Conseil d'Etat du
canton de Vaud (recours de droit public)
A.- La société MediService SA (ci-après: MediService), dont le
siège social est à Zuchwil (Soleure), a été inscrite au Registre du
commerce le 13 février 1997. Son but social est la vente de
médicaments par la poste et/ou par des entreprises de transports
privées ainsi que, à ces fins, les achats, les dispensations de
médicaments, les livraisons, l'élabo

ration des données, l'exécution
des prestations, l'établissement de listes et une surveil...

125 I 474

44. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 1er
octobre 1999 dans la cause MediService SA contre Conseil d'Etat du
canton de Vaud (recours de droit public)
A.- La société MediService SA (ci-après: MediService), dont le
siège social est à Zuchwil (Soleure), a été inscrite au Registre du
commerce le 13 février 1997. Son but social est la vente de
médicaments par la poste et/ou par des entreprises de transports
privées ainsi que, à ces fins, les achats, les dispensations de
médicaments, les livraisons, l'élaboration des données, l'exécution
des prestations, l'établissement de listes et une surveillance de la
consommation des médicaments (présente, rétrospective, future).
Extrait des considérants:
1.- d) Lorsque le recours est dirigé, comme en l'occurrence,
contre un arrêté de portée générale, la qualité pour recourir, au
sens de l'art. 88 OJ, est reconnue à toute personne dont les intérêts
juridiquement
2.- La recourante soutient que la disposition litigieuse viole
l'art. 2 Disp. trans. Cst. en étant contraire à la loi fédérale du 6
octobre 1995 sur le marché intérieur (LMI; RS 943.02), soit aux art.
2 et 3 LMI.
a) En vertu du principe de la force dérogatoire du droit fédéral
(art. 2 Disp. trans. Cst.), les cantons ne sont pas autorisés à
légiférer dans les domaines exhaustivement réglementés par le droit
fédéral. Dans les autres domaines, ils peuvent édicter des règles de
droit qui ne violent ni le sens ni l'esprit du droit fédéral, et qui
n'en compromettent pas la réalisation (ATF 125 II 56 consid. 2b p.
58, 315 consid. 2a p. 316; 124 I 107 consid. 2a p. 109; 123 I 313
consid. 2b p. 316). Dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes
fondé sur l'art. 2 Disp. trans. Cst., le Tribunal fédéral examine
librement la conformité de la règle de droit cantonal avec le droit
fédéral (ATF 125 II 440 consid. 1d p. 443; 123 I 313 consid. 2b p.
317; 122 I 18 consid. 2b/aa p. 20 et les références citées);
toutefois, il n'annule la disposition cantonale en cause que si elle
n'est pas susceptible d'une interprétation conforme au droit fédéral
(ATF 125 II 440 consid. 1d p. 443; 123 I 313 consid. 2b p. 317; 122 I
343 consid. 3a p. 345 et les références citées).
b) L'arrêté attaqué du 28 janvier 1998 a été adopté avant
l'échéance du délai d'adaptation de deux ans prévu à l'art. 11 al. 1
LMI, soit le 1er juillet 1998, mais après l'entrée en vigueur, le 1er
juillet 1996, de ladite loi, de sorte que les dispositions
matérielles de celle-ci sont applicables en l'espèce (cf. ATF 123 I
313 consid. 3 p. 318/319; voir aussi THOMAS COTTIER/BENOÎT MERKT, La
fonction fédérative de la liberté du commerce et de l'industrie et la
loi sur le marché intérieur suisse: l'influence du droit européen et
du droit international économique, in Etudes Aubert, Bâle 1996, p.
449 ss, spéc. p. 464).
c) La loi sur le marché intérieur garantit à toute personne ayant
son siège ou son établissement en Suisse l'accès libre et non
discriminatoire au marché afin qu'elle puisse exercer une activité
lucrative sur tout le territoire suisse (art. 1 al. 1 LMI). Par
activité lucrative au sens de ladite loi, on entend toute activité
ayant pour but un gain et bénéficiant de la protection de la liberté
du commerce et de l'industrie (art. 1 al. 3 LMI). Ainsi, selon l'art.
2 al. 1 LMI, toute personne a le droit d'offrir des marchandises, des
services et des prestations de travail sur tout le territoire suisse
pour autant que l'exercice de l'activité lucrative en question soit
licite dans le canton ou la commune où elle a son siège ou son
établissement.
3.- Selon la jurisprudence relative aux libertés fondamentales, en
particulier à la liberté du commerce et de l'industrie, le principe
de la proportionnalité se compose traditionnellement des règles
d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le
but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens
adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux
intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en
balance les effets de la mesure choisie sur la situation de
l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt
public (ATF 125 I 209 consid. 10d/aa p. 223; 123 I 112 consid. 4e p.
121; 122 I 236 consid. 4e/bb p. 246).
Lorsque le principe de la proportionnalité est appliqué dans le
cadre de la loi sur le marché intérieur, il doit être apprécié plus
spécifiquement au regard des buts poursuivis par cette loi, ainsi
qu'ils sont expressément mentionnés à l'art. 1 al. 2 LMI. Selon cette
disposition, la loi vise en particulier à faciliter la mobilité
professionnelle et les échanges économiques en Suisse, à soutenir les
efforts des cantons visant à harmoniser les conditions d'autorisation
d'accès au marché, à accroître la compétitivité de l'économie suisse
et à renforcer la cohésion économique de la Suisse. La liberté
d'accès au marché, telle qu'elle ressort de cette loi, a ainsi une
portée constitutive positive. En conséquence pèsent du même côté de
la balance des intérêts, tant le droit individuel à la liberté
d'accès au marché que la garantie institutionnelle d'un marché
intérieur unique. Du reste, dans son Message du 23 novembre 1994
concernant la loi fédérale sur le marché intérieur (FF 1995 I 1193
ss, spéc. p. 1246, voir aussi p. 1199/1200), le Conseil fédéral a
précisé que, "dans le cadre de l'examen de la proportionnalité, il
convient d'attribuer à l'idée du marché intérieur au moins autant de
valeur qu'au principe du fédéralisme, largement privilégié
jusqu'ici". Autrement dit, pour que la loi sur le marché intérieur
puisse atteindre ses buts, le principe de la proportionnalité doit
être appliqué strictement aux restrictions posées par un canton à
l'égard d'offreurs externes respectant les réglementations en vigueur
dans leur propre canton (VINCENT MARTENET/CHRISTOPHE RAPIN, Le marché
intérieur suisse, Berne 1999, p. 27/28; RHINOW/SCHMID/BIAGGINI,
Öffentliches Wirtschaftsrecht, Bâle/Francfort-sur-le-Main 1998, no 60
p. 159; KILIAN WUNDER, Die Binnenmarktfunktion der schweizerischen
Handels- und Gewerbefreiheit im Vergleich zu den Grundfreiheiten in
der Europäischen Gemeinschaft, thèse Bâle 1998, p. 158/159; FRITZ
GYGI/PAUL RICHLI, Wirtschaftsverfassungsrecht, 2e éd., Berne 1997, p.
15).
4.- a) aa) Selon l'art. 29 du règlement d'exécution du 25 mai 1972
de la Convention intercantonale sur le contrôle des médicaments du 3
juin 1971 (CICM; RS 812.101), à laquelle tous les cantons ont adhéré,
l'Office intercantonal du contrôle des médicaments classe les
substances médicamenteuses selon les modes de vente suivants: A
(vente dans les pharmacies sur ordonnance médicale à ne pas
renouveler sans l'autorisation du médecin); B (vente dans les
pharmacies sur ordonnance médicale renouvelable par le pharmacien); C
(vente dans les pharmacies sans ordonnance médicale); D (vente dans
les pharmacies et drogueries) et E (vente libre dans tous les
commerces).


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.68/1998
Date de la décision : 01/10/1999
2e cour de droit public

Analyses

Art. 88 OJ, art. 2 Disp. trans. Cst., art. 2 LMI et art. 3 LMI, vente de médicaments par correspondance. Champ d'application territorial d'une loi cantonale de police; qualité d'une personne domiciliée hors canton pour recourir contre un tel acte (consid. 1d). Contrôle abstrait des normes fondé sur l'art. 2 Disp. trans. Cst.; application de la loi fédérale sur le marché intérieur à un règlement cantonal, adopté le 28 janvier 1998, interdisant l'envoi postal régulier de médicaments par des pharmacies (consid. 2). Examen du principe de la proportionnalité dans le cadre de la loi fédérale sur le marché intérieur (consid. 3). Types de ventes de médicaments en interaction avec la poste et conditions de sécurité à respecter en la matière (consid. 4a). En l'espèce, le règlement vaudois interdisant à une pharmacie établie dans le canton de Soleure d'envoyer régulièrement des médicaments par la poste dans le canton de Vaud viole, au vu des conditions de sécurité imposées à cette pharmacie par le canton de Soleure, la liberté d'accès au marché garantie par l'art. 2 LMI (consid. 4b-f).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1999-10-01;2p.68.1998 ?
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