124 V 47
7. Arrêt du 22 janvier 1998 dans la cause D. contre Caisse
nationale suisse d'assurance en cas d'accidents et Tribunal des
assurances du canton de Vaud
A.- Par décision du 30 janvier 1996, notifiée à l'assuré le 6
février suivant, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
d'accidents (ci-après: CNA) a maintenu le droit de D., né en 1961, de
nationalité turque, à une rente d'invalidité de 10%, au-delà du 31
juillet 1991.
Par acte du 2 mars 1996, remis à un bureau de poste en Turquie le 8
mars suivant et parvenu à la CNA le 13 mars, D. a fait opposition à
cette décision. Le 26 juin 1996, considérant que l'opposition était
tardive, la CNA l'a déclarée irrecevable.
B.- D. a recouru contre la décision sur opposition de la CNA devant
le Tribunal des assurances du canton de Vaud.
Considérant en droit:
1.- Le recours de droit administratif est dirigé contre le
jugement par lequel le Tribunal des assurances du canton de Vaud a
rejeté le recours formé par D. contre la décision du 26 juin 1996 de
la CNA déclarant irrecevable l'opposition formée contre sa décision
du 30 janvier 1996. Aussi l'objet du litige consiste-t-il uniquement
dans la décision de l'intimée de ne pas entrer en matière sur
l'opposition du recourant. Le Tribunal fédéral des assurances doit
donc se borner à examiner si c'est à bon droit que l'autorité
cantonale a rejeté le recours. Il ne saurait en revanche examiner le
fond du litige, comme le voudrait le recourant.
C'est pourquoi, dans la mesure où D. demande au Tribunal fédéral
des assurances une rente d'invalidité plus élevée que celle qui lui a
été allouée par l'intimée, ses conclusions sont irrecevables.
2.- a) Les décisions rendues en vertu de la LAA peuvent être
attaquées, dans les trente jours, par voie d'opposition, auprès de
l'institution qui les a notifiées (art. 105 al. 1 LAA), soit, en
l'espèce, la CNA. Le délai commence à courir le lendemain de la
communication (art. 20 PA en liaison avec l'art. 96 LAA).
3.- Le Tribunal fédéral des assurances n'étant pas lié par les
motifs du recours (art. 114 al. 1 in fine et 132 OJ), il y a lieu de
constater d'office que la notification à l'assuré de la décision de
rente du 30 janvier 1996 était irrégulière ce qui, conformément à la
loi, ne peut entraîner aucun préjudice pour l'intéressé (art. 38 PA).
a) La notification d'une décision administrative ou d'un acte
judiciaire constitue un acte de puissance publique dont l'exécution
incombe aux autorités locales (ATF 105 Ia 311 consid. 3b, 103 III 4
consid. 2). C'est pourquoi, lorsque la signification doit intervenir
à l'étranger, il convient de procéder par la voie diplomatique ou
consulaire (ATF 103 III 4 consid 2; RDAT 1993 I no 68 p. 175; SJ 1993
p. 72). Il ne sera fait exception à cette règle que si une convention
internationale le prévoit expressément (POUDRET, Commentaire de la
loi fédérale d'organisation judiciaire, Berne 1990, vol. I, p. 170
sv., n. 6.5 ad art 29). La signification irrégulière d'un acte
judiciaire est dépourvue d'effet (ATF 105 Ia 311 consid. 3b).
La notification directe, à l'étranger, par la poste est un acte
d'autorité publique sur territoire étranger. Une autorité judiciaire
ou un organisme de l'Etat d'envoi ne peut y procéder qu'avec le
consentement de l'Etat de destination (ATF 105 Ia 311 consid. 3b in
initio, 103 III 4 consid. 2b).
b) Contrairement à ce que semble croire la CNA, la Convention de
sécurité sociale entre la Suisse et la République de Turquie du 1er
mai 1969
4.- Par ailleurs, l'indication des voies de droit au pied de la
décision du 30 janvier 1996 était incomplète, car elle se bornait à
mentionner qu'une opposition écrite devait être adressée à la
Direction de la CNA, Division des accidents, à Lucerne. Or, l'intimée
aurait dû, pour respecter ses obligations d'organisme de droit public
agissant dans l'exercice de ses compétences décisionnelles, également
mentionner que l'assuré avait le droit de s'exprimer en turc (art. 27
ch. 1 de la convention turco-suisse) et qu'il pouvait aussi adresser
son opposition à l'Institut des assurances sociales à Ankara,
conformément à l'art. 28 de la convention, en liaison avec l'art. 1
al. 1 et l'art. 25 al. 1 de l'Arrangement administratif (cf. DUC, La
convention turco-suisse en matière d'assurances sociales, in:
L'évolution récente du droit privé en Turquie et en Suisse, dans le
vol. 6 de la collection Recueil des travaux présentés aux Journées
juridiques turco-suisses 1985, Zurich 1987, p. 202).
Il n'est toutefois pas nécessaire de trancher le point de savoir si
cette informalité a eu pour conséquence le dépassement du délai
d'opposition par
5.- Sur le vu de ce qui précède, il y a lieu d'annuler le jugement
attaqué et la décision sur opposition litigieuse et de renvoyer la
cause à l'intimée, afin qu'elle se prononce au fond sur l'opposition
formée le 2 mars 1996 par l'assuré contre la décision du 30 janvier
précédent.