La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/1997 | SUISSE | N°4C.469/1995

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 mai 1997, 4C.469/1995


123 III 306

48. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 6 mai 1997 dans la
cause X. contre Association de Développement de Colombier et Etat de
Neuchâtel (recours en réforme)
A.- a) Par convention du 17 juin 1930, l'Etat de Neuchâtel a
concédé à la Société d'Embellissement et d'Organisation des Plages du
Lac S.A. (ci-après: la Société d'Embellissement), à Colombier, une
parcelle de grève pour l'exploitation d'une plage librement ouverte
au public au bord du lac de Neuchâtel. Cette société obtenait
notamment le droit d'él

ever une station de couchettes-abris,
d'exercer la police et la surveillance de la grève, de p...

123 III 306

48. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 6 mai 1997 dans la
cause X. contre Association de Développement de Colombier et Etat de
Neuchâtel (recours en réforme)
A.- a) Par convention du 17 juin 1930, l'Etat de Neuchâtel a
concédé à la Société d'Embellissement et d'Organisation des Plages du
Lac S.A. (ci-après: la Société d'Embellissement), à Colombier, une
parcelle de grève pour l'exploitation d'une plage librement ouverte
au public au bord du lac de Neuchâtel. Cette société obtenait
notamment le droit d'élever une station de couchettes-abris,
d'exercer la police et la surveillance de la grève, de prendre toutes
Extrait des considérants:
3.- Le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage répond
du dommage causé par des vices de construction ou par le défaut
d'entretien (art. 58 al. 1 CO). La cour cantonale a considéré le
plongeoir, avec ses deux plates-formes, comme un ouvrage; les parties
ne lui en font pas grief, si bien que cette question n'est plus
litigieuse. Seules restent dès lors à examiner les deux autres
conditions spécifiques de la responsabilité causale établie par cette
disposition, à savoir la propriété de l'ouvrage et le défaut, lato
sensu, affectant celui-ci.
a) aa) La notion de propriétaire, dans l'acception de ce terme
propre à l'art. 58 CO, fait l'objet de controverses au sein de la
doctrine et a donné lieu à une abondante jurisprudence. Un arrêt
récent expose l'état de la question. Aussi convient-il de s'y référer
(ATF 121 III 448). Selon cet arrêt, le sujet de la responsabilité
découlant de la propriété de l'ouvrage est défini, en principe, par
la propriété de la chose. Telle est la règle générale et il faut s'y
tenir car une extension de la qualité pour résister à une action
fondée sur l'art. 58 CO ne peut être admise qu'avec retenue, vu la
teneur claire de cette disposition légale et eu égard à la sécurité
du droit. Ce n'est donc qu'exceptionnellement qu'il se justifiera de
faire abstraction du critère formel de la propriété pour prendre en
considération la maîtrise effective exercée sur la chose (consid. 2d
p. 451). Quant au moment déterminant pour résoudre le problème de la
légitimation passive, il est celui de la survenance de l'atteinte aux
droits de la victime; c'est la personne qui était «propriétaire» à
cette époque qui devra être recherchée, même si le défaut doit être
imputé à son prédécesseur ou si l'ouvrage a été transféré à un tiers
au moment de l'ouverture de l'action (DESCHENAUX/TERCIER, La
responsabilité civile, 2e éd., n. 20 ad § 12).
bb) Appliquée au cas particulier, la jurisprudence du Tribunal
fédéral en la matière s'oppose à ce que l'on attribue la qualité de
propriétaire de l'ouvrage litigieux à la défenderesse. Sans doute
celle-ci a-t-elle été au bénéfice, durant plusieurs décennies, d'une
concession octroyée par l'Etat pour l'exploitation d'une plage ouverte
4.- Que la défenderesse ne réponde pas en vertu de l'art. 58 CO du
dommage subi par le demandeur ne signifie pas encore qu'elle ne doive
pas le faire à un autre titre. Un fondement juridique différent à
envisager est l'art. 41 CO, qui régit la responsabilité délictuelle.
a) Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui,
soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu
de le réparer (art. 41 al. 1 CO). Selon la jurisprudence du Tribunal
fédéral, un acte est illicite s'il enfreint un devoir légal général
en portant atteinte soit à un droit absolu du lésé (Erfolgsunrecht),
soit à son patrimoine; dans ce dernier cas, la norme violée doit
avoir pour but de protéger le lésé dans les droits atteints par
l'acte incriminé (Verhaltensunrecht; ATF 119 II 127 consid. 3; 117 II
315 consid. 4d et les arrêts cités). Quant à la faute, elle peut
consister, notamment, dans le fait de créer ou de laisser subsister
un état de choses dangereux pour autrui sans prendre toutes les
mesures commandées par les circonstances afin d'empêcher un dommage
de se produire (ATF 112 II 138 consid. 3a, 439 consid. 1c; sur le
rôle du principe général désigné en allemand par le terme
«Gefahrensatz», voir aussi: BREHM, op.cit., n. 51 ad art. 41 CO et
les références). Pour le surplus, il sied de rappeler, en
considération de la présente cause, que le juge civil n'est point lié
par l'acquittement prononcé au pénal pour décider s'il y a eu faute
commise (art. 53 CO) et, plus généralement, que l'acte illicite
imputable à un organe engage la responsabilité de la personne morale
(art. 55 al. 2 CC).
b) En l'espèce, la convention du 28 décembre 1977 passée entre le
défendeur et la défenderesse octroyait à cette dernière une
concession qui ne comprenait pas la plage aménagée sur les nouvelles
rives du lac de Neuchâtel. Il n'en reste pas moins que la
défenderesse n'a pas demandé au défendeur de s'occuper de l'entretien
du plongeoir, mais a continué d'y pourvoir, comme elle l'avait fait
durant des décennies. Elle n'a pas démonté l'ouvrage litigieux ni
n'en a interdit l'accès, sans doute parce qu'elle trouvait un intérêt
à laisser subsister
5.- a) La cour cantonale a admis que le demandeur avait pris un
risque mais que son comportement ne pouvait être qualifié de
téméraire. Considérant au surplus que la faute des enfants et des
adolescents doit être envisagée avec une certaine indulgence, elle a
réduit d'1/5 l'indemnité qu'elle a allouée au lésé.
Sur ce point, la défenderesse fait grief aux juges précédents
d'avoir violé l'art. 44 al. 1 CO. La faute exclusive ou à tout le
moins prépondérante du demandeur devrait conduire au refus de toute
indemnité, voire à une réduction de 5/6.
Le défendeur allègue, de son côté, que la gravité de la faute du
demandeur était telle qu'elle a entraîné la rupture du lien de
causalité entre le vice de construction de l'ouvrage et le dommage.
b) Ni l'une ni l'autre des parties ne conteste, à juste titre,
qu'un lien de causalité adéquate entre le vice de construction,
respectivement l'acte illicite, et le dommage subséquent ait jamais
existé dans le cas particulier. En effet, d'après le cours ordinaire
des choses et
9.- a) Les deux défendeurs critiquent enfin, quant à son principe
et à son importance, la réparation du préjudice moral qui a été
accordée au demandeur. Ce dernier s'est vu allouer, à ce titre, la
somme de 120'000 fr., laquelle a été ramenée à 50'400 fr. après
déduction d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 69'600 fr.
qui avait été versée au lésé en application de la Loi fédérale sur
l'assurance-accidents (LAA, RS 832.20). La cour cantonale expose, à
cet égard, que le fait d'être condamné à l'immobilité dans une chaise
roulante sa vie durant est une des plus graves atteintes qui soient,
que le demandeur était très jeune au moment de l'accident, qu'il a
besoin en permanence de l'aide de


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.469/1995
Date de la décision : 06/05/1997
1re cour civile

Analyses

Responsabilité solidaire de l'auteur d'un acte illicite et du propriétaire d'un ouvrage (art. 41 et 58 CO). Plongeoir exposant ses usagers à un grave danger: notion de propriétaire de cette installation (consid. 3); fondement juridique de la responsabilité d'une association qui s'occupe en fait de l'entretien du plongeoir (consid. 4); causalité adéquate et faute concomitante du lésé (consid. 5). Tort moral et droit préférentiel du lésé (art. 47 CO, art. 41 LAA). Le montant à concurrence duquel l'assureur est subrogé doit être réduit du pourcentage correspondant à la faute concomitante du lésé (consid. 9).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1997-05-06;4c.469.1995 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award