122 II 349
44. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 24 juin
1996 dans la cause Tranchet et consorts contre Etat de Genève et
Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement (recours de
droit administratif)
A.- Jean Tranchet et consorts sont copropriétaires, notamment, des
parcelles no 1735 et 1877 du registre foncier, sur le territoire de
la commune de Vernier. Ces terrains non bâtis, dont les surfaces
respectives sont de 3281 m2 et 3948 m2, sont situés à environ 1,5 à 2
km de l'extrémité sud-ouest de l'aéroport de Genève; ils ne se
trouvent pas dans le même quartier mais sont l'un et l'autre classés
dans la 5e zone résidentielle (zone de villas). La parcelle no 1877
est par ailleurs dans l'axe de la piste de l'aéroport, à 1950 m du
seuil de celle-ci; ainsi, tous les avions qui atterrissent à Genève
en direction du nord-est ("approche 05", vol aux instruments) la
survolent à une altitude de 108 m.
Le 16 octobre 1990, le Département fédéral des transports, des
communications et de l'énergie a conféré le droit d'expropriation au
canton de Genève, afin qu'il puisse faire ouvrir, par le Président de
la Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement (ci-après:
la Commission fédérale), une procédure destinée à statuer sur les
prétentions de Jean Tranchet et consorts en relation avec les
nuisances causées par l'exploitation de l'aéroport de Genève. Devant
la Commission fédérale, Jean
Extrait des considérants:
3.- (Indemnité pour l'expropriation formelle des droits de
voisinage - immissions de bruit - en ce qui concerne la parcelle no
1735. Condition de l'imprévisibilité remplie: cf. ATF 121 II 317
consid. 6c/aa p. 337; conditions de la spécialité et de la gravité
également. Dévaluation estimée à 15% et indemnité fixée à 123'040
fr.).
4.- La parcelle no 1877, classée comme la parcelle no 1735 en zone
résidentielle, est également exposée au bruit du trafic aérien. Les
mesures d'instruction opérées après le jugement du 12 juillet 1995
ont permis de constater que ce terrain, situé dans l'axe de la piste
(la ligne figurant cet axe sur les plans traverse la parcelle), était
en outre survolé par tous les avions se dirigeant vers l'aéroport de
Genève selon la trajectoire d'approche imposée (vol aux instruments)
en cas d'utilisation de la piste 05. Selon le jugement précité, le
Tribunal fédéral doit encore se prononcer sur "l'expropriation
formelle des droits de voisinage (immissions)". Même si l'intrusion
dans l'espace aérien d'un fonds n'est pas une "immission" au sens de
l'art. 684 CC (cf. infra, consid. 4b), il faut interpréter le
jugement précité en ce sens que le Tribunal fédéral doit déterminer
si et, le cas échéant, dans quelle mesure le survol de la parcelle
justifie l'octroi d'une indemnité d'expropriation. Cette question
doit être examinée en premier lieu (consid. 4a-b), avant celle des
immissions de bruit (consid. 4c).
a) Le jugement du 12 juillet 1995 (ATF 121 II 317 consid. 5b p.
332) rappelle que le propriétaire foncier a, en vertu de l'art. 667
al. 1 CC, le droit d'être protégé contre les dommages que pourrait
causer le survol de son fonds et son intérêt à jouir de l'espace
aérien lui permet en principe - sous réserve des restrictions
découlant notamment de la législation fédérale sur l'aviation - de se
défendre contre les activités de tiers qui seraient préjudiciables à
l'utilisation de son fonds.
aa) Aux termes de l'art. 667 al. 1 CC, la propriété du sol emporte
celle du dessus et du dessous, dans toute la hauteur et la profondeur
utiles à son exercice. C'est ainsi l'intérêt que présente l'exercice
du droit de propriété - notamment l'intérêt à s'opposer aux
agissements de tiers dans le volume du bien-fonds - qui définit
l'extension verticale de la propriété foncière. Cet intérêt doit
néanmoins être digne de protection (ATF 97 II 333 consid. 2); il
dépend de la situation de l'immeuble et d'autres circonstances
concrètes (ATF 93 II 170 consid. 5). Aussi la jurisprudence