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13/12/1995 | SUISSE | N°4C.272/1995

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 13 décembre 1995, 4C.272/1995


121 III 467

90. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 13 décembre 1995
dans la cause I. S.A. contre C. et Caisse de chômage X. (recours en
réforme)
A.- Le 1er janvier 1991, I. S.A. a engagé C. en qualité de fondé
de pouvoir, chargé de la direction de l'entreprise, moyennant un
salaire mensuel de 7'200 fr. brut plus une gratification annuelle
correspondant à un mois de salaire.
Le 6 mai 1993, l'administration d'I. S.A. a informé C. que la
direction de la société serait assumée à partir du 17 mai par un
tiers, et que son

salaire serait réduit à 7'000 fr., treize fois
l'an. C. ayant refusé cette décision, I. S.A...

121 III 467

90. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 13 décembre 1995
dans la cause I. S.A. contre C. et Caisse de chômage X. (recours en
réforme)
A.- Le 1er janvier 1991, I. S.A. a engagé C. en qualité de fondé
de pouvoir, chargé de la direction de l'entreprise, moyennant un
salaire mensuel de 7'200 fr. brut plus une gratification annuelle
correspondant à un mois de salaire.
Le 6 mai 1993, l'administration d'I. S.A. a informé C. que la
direction de la société serait assumée à partir du 17 mai par un
tiers, et que son salaire serait réduit à 7'000 fr., treize fois
l'an. C. ayant refusé cette décision, I. S.A., par pli recommandé du
26 mai 1993, l'a licencié avec effet immédiat, en invoquant une
dénonciation d'une Commission paritaire, des prélèvements effectués
par le travailleur dans la caisse de la société pour des besoins
personnels, une protection accordée à un concurrent, l'inobservation
d'instructions et une mauvaise administration journalière d'I. S.A.
C. a contesté ces motifs; il a travaillé jusqu'au 4 juin 1993 et
perçu son salaire, qui était alors mensuellement de 8'150 fr. brut,
jusqu'au 30 juin 1993. Le 7 juin 1993, il s'est annoncé à
l'assurance-chômage.
C. a ouvert action contre I. S.A. et lui a réclamé la somme de
76'950 fr., montant porté ultérieurement à 89'650 fr., à titre de
salaire pour la période contractuelle de congé, d'indemnité égale à
six mois de salaire pour congé abusif et de remboursement de frais.
I. S.A. s'est opposée à l'action. La Caisse de chômage X. a demandé
à pouvoir être subrogée aux droits du demandeur à concurrence des
prestations qu'elle lui avait versées.
Par jugement du 22 novembre 1993, le Tribunal des prud'hommes a
condamné la défenderesse à payer au demandeur, à titre de salaire,
40'750 fr. en capital, sous déduction des charges sociales, dont
15'630 fr. 60 à rétrocéder à la Caisse de chômage X., ainsi que
24'530 fr. en capital représentant une indemnité pour licenciement
abrupt de 24'450 fr. égale à trois mois de salaire et un
remboursement de frais, par 80 fr.
Sur appel principal de la défenderesse et appel incident du
demandeur, la Chambre d'appel de la juridiction des prud'hommes du
canton de Genève, par arrêt du 4 avril 1995, préalablement, a débouté
la défenderesse de sa
Extrait des considérants:
3.- a) L'art. 337 CO dispose que l'employeur peut résilier
immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs et doit
motiver sa décision par écrit si l'autre partie le demande (al. 1).
Sont notamment considérées comme de justes motifs toutes les
circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent
pas d'exiger de celui qui a donné le congé la continuation des
rapports de travail (al. 2).
b) La Chambre d'appel a considéré que les motifs avancés par la
défenderesse n'étaient pas fondés, notamment celui relatif aux
prélèvements, portant sur un total de 9'000 fr., opérés par le
demandeur dans la caisse de la société qui l'employait, prélèvements
qui au reste avaient été tous remboursés par le demandeur.
Les magistrats cantonaux ont retenu que les prélèvements ne se
rapportaient en réalité qu'à une somme de 3'500 fr. que le demandeur
a retirée pour des besoins familiaux, quand bien même il avait reçu
pour instruction de ne pas opérer de prélèvements personnels. Ce
fait, compte tenu de l'ensemble des circonstances, à savoir la bonne
foi de l'intéressé, les motifs du prélèvement et le remboursement
effectué, ne constituait pas un juste motif de licenciement immédiat,
d'autant plus que les supérieurs respectifs du demandeur, qui
contrôlaient périodiquement la "petite caisse", n'avaient pas à
l'époque formulé d'observations.
A propos des prélèvements effectués par le demandeur dans la caisse
de la défenderesse, la recourante se contente d'alléguer que
l'autorité cantonale a minimisé la gravité du comportement de son
employé et se réfère à des témoignages non repris dans l'arrêt
attaqué, et cela sans même tenter de
4.- a) Au cours de l'instruction de la cause devant la Chambre
d'appel, la défenderesse a invoqué, comme nouveau motif de
licenciement, les infractions pénales commises par le demandeur dans
le canton de Vaud, et a fait valoir que, si elle en avait eu
connaissance au moment où elle a congédié abruptement l'employé, elle
aurait pu s'en prévaloir.
b) Sous l'empire de l'ancien droit, le Tribunal fédéral avait admis
que l'art. 352 aCO (qui correspondait à la teneur de l'actuel art.
337 CO) n'interdisait pas au juge de prendre en considération des
circonstances qui existaient à l'époque de la déclaration de
résiliation, mais qui n'étaient pas connues de l'auteur de celle-ci,
et cela surtout si les motifs découverts après coup relevaient de la
personne ou de l'attitude du partenaire (ATF 92 II 184 consid. 4c et
d p. 188).
Toujours à la lumière de la même disposition, le Tribunal fédéral a
jugé ultérieurement qu'un nouveau motif, qui n'existait pas lors de
la résiliation, pouvait être invoqué postérieurement à la
notification de la résiliation pour autant cependant qu'il était en
étroite corrélation avec le motif déjà invoqué ou s'il formait un
tout avec ce dernier; la juridiction fédérale a précisé qu'un motif
important qui surviendrait postérieurement, mais qui ne serait pas en
corrélation avec un motif précédent, ne pourrait pas guérir
("heilen") une résiliation donnée antérieurement sans justes motifs
(ATF non publié du 26 juin 1990 dans la cause E. AG, consid. 1d/bb,
cité dans l'ATF du 15 juillet 1992 dans la cause C. publié in: SJ
1993 p. 368). Dans ce dernier arrêt du 15 juillet 1992, au consid.
2c/aa, le Tribunal fédéral a encore ajouté ce qui suit: "Il
n'apparaît pas que la question doive être résolue différemment avec
l'entrée en vigueur du nouveau droit du travail même si, il est vrai,
ce dernier prévoit la motivation du congé par l'employeur (voir
STREIFF/VON KAENEL, Arbeitsvertrag, n. 19 ad art. 337 CO)."
Au sujet du nouvel article 337 CO, le Tribunal fédéral a relevé, à
l'ATF 119 II 162 consid. 1 p. 164, que le Conseil fédéral écrivait
dans son message du 9 mai 1984 que la possibilité d'invoquer a
posteriori des motifs qui n'étaient pas connus au moment de la
résiliation était déjà exclue par
5.- a) Il convient tout d'abord de réaffirmer avec force qu'il est
exclu d'invoquer comme justes motifs de congé immédiat des
circonstances qui sont survenues après la déclaration de résiliation
du contrat. Le Tribunal fédéral l'avait dit au consid. 5a de l'arrêt
susrappelé du 22 février 1994 dans la cause SEGH (publié in: SJ 1995
p. 802). En revanche, contrairement à l'avis exprimé par le Conseil
fédéral dans son Message, lequel a été suivi par une partie
importante de la doctrine, il y a lieu d'admettre qu'il est possible,
sous certaines conditions restrictives, de se prévaloir après coup
d'une circonstance qui existait déjà au moment de la déclaration de
licenciement abrupt, mais que l'auteur de celle-ci ne connaissait pas
et


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.272/1995
Date de la décision : 13/12/1995
1re cour civile

Analyses

Contrat de travail. Résiliation immédiate (art. 337 CO). S'il est exclu d'invoquer comme justes motifs de congé immédiat des circonstances qui sont apparues après la déclaration de résiliation du contrat, il est possible, sous certaines conditions restrictives, de se prévaloir après coup de circonstances antérieures à la résiliation immédiate que la partie qui a donné le congé ne connaissait pas et ne pouvait pas connaître.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1995-12-13;4c.272.1995 ?
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