121 III 408
80. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 6 décembre 1995
dans la cause J. contre A. (recours en réforme)
A.- Par contrat du 16 juin 1988, A. a remis à bail à J. des locaux
à l'usage d'un café-restaurant, à Yverdon-les-Bains. Le bail était
conclu pour dix ans, du 1er septembre 1988 au 30 septembre 1998, puis
se renouvelait de cinq ans en cinq ans.
Durant l'été 1990, J. a cherché à remettre le café-restaurant. Il a
trouvé un amateur en la personne de M., avec lequel il a signé une
convention de remise de commerce. Les pourparlers ont eu lieu en
présence de A., qui n'a jamais déclaré s'opposer à la reprise du bail
par le nouveau tenancier. Ce dernier a pris possession des lieux le
1er novembre 1990. Pendant une année, il s'est acquitté régulièrement
du loyer, avant de cesser tout paiement à partir de novembre 1991.
Entre-temps, un litige était né entre J. et A.; ce dernier
contestait, en particulier, avoir jamais donné son accord au
transfert du bail. Le 18 janvier 1991, J. a saisi la Commission de
conciliation afin qu'il soit constaté, notamment, que le bail à loyer
avait été valablement transféré à M. et que le locataire était libéré
de toute obligation envers le bailleur sous réserve de l'art. 263 al.
4 CO.
B.- a) Le 11 février 1992, A. a fait notifier à J. un commandement
de payer les sommes de 5'055 fr., plus intérêts à 5% dès le 1er
novembre 1991 et 5'055 fr., plus intérêts à 5% dès le 1er décembre
1991, à titre de loyers de novembre et décembre 1991. Le Président du
Tribunal civil du district d'Yverdon a prononcé la mainlevée
provisoire de l'opposition formée par J.
Par requête du 21 avril 1992, celui-ci a ouvert action en
libération de dette devant le Tribunal des baux du canton de Vaud.
Dans une seconde requête du même jour, également dirigée contre A.,
il a conclu à ce qu'il soit constaté qu'il a valablement transféré le
bail à M. et qu'il est libéré de toute obligation envers le bailleur.
b) Peu auparavant, dans une lettre du 3 mars 1992 envoyée sous deux
plis séparés, A. avait mis en demeure J. et M. de payer dans les
trente jours la somme de 25'920 fr. 10 - représentant les loyers
impayés de novembre 1991 à
Extrait des considérants:
3.- En cas de transfert d'un bail portant sur un local commercial,
le locataire sortant est, en principe, libéré de ses obligations
envers le
4.- a) L'art. 263 CO a été introduit lors de la révision de 1990.
L'alinéa 4 de cette disposition n'est pas des plus clairs,
particulièrement dans sa version française. Il faut ainsi se référer
aux textes allemand et italien pour comprendre qu'en cas de bail de
durée indéterminée, le locataire sortant répond solidairement avec le
tiers jusqu'au prochain terme contractuel ou légal pour lequel il
pouvait dénoncer le contrat (Message du 27 mars 1985 concernant la
révision du droit du bail, in FF 1985 I, p. 1425; BARBEY, Le
transfert du bail commercial (art. 263 CO), in SJ 1992 p. 45;
LACHAT/MICHELI, Le nouveau droit du bail, 2e éd., p. 274; USPI,
Commentaire du bail à loyer, n. 34, p. 327; ZIHLMANN, Das neue
Mietrecht, p. 87).
L'art. 263 al. 4 CO ne précise pas non plus l'étendue de la
responsabilité solidaire du locataire transférant. Selon la majeure
partie des auteurs, il est débiteur de toutes les obligations
contractuelles dérivant du bail tel qu'il existait au moment du
transfert, qu'elles soient nées avant ou après cette date (HIGI,
Commentaire zurichois, n. 57 ad art. 263 CO; JACQUEMOUD-ROSSARI, Le
transfert du bail commercial, in 8e Séminaire sur le droit du bail,
Neuchâtel 1994, p. 18; contra: BARBEY, op.cit., p. 45 à 47); cela
signifie en particulier que le preneur sortant peut être
solidairement redevable envers le bailleur non seulement du loyer,
mais également, par exemple, des dommages-intérêts dus par le nouveau
locataire à la suite de dégâts que celui-ci a causés dans les locaux
loués (LACHAT/MICHELI, op.cit.,