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14/08/1995 | SUISSE | N°4A.1/1995

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 14 août 1995, 4A.1/1995


121 III 324

66. Arrêt de la Ire Cour civile du 14 août 1995 dans la cause
Banque X. contre E. et consorts et Département de la justice, de la
santé et de la sécurité du canton de Neuchâtel (recours de droit
administratif)
A.- La société en nom collectif Y. a été inscrite au registre du
commerce le 15 octobre 1941. Le 1er janvier 1980, elle a été
transformée en une société en commandite. E. en était l'associé
gérant indéfiniment responsable et H. l'associé commanditaire pour
une commandite de 350'000 fr. En 1991, dame C. es

t entrée dans la
société en tant que commanditaire pour une commandite de 20'000 fr.
La sociét...

121 III 324

66. Arrêt de la Ire Cour civile du 14 août 1995 dans la cause
Banque X. contre E. et consorts et Département de la justice, de la
santé et de la sécurité du canton de Neuchâtel (recours de droit
administratif)
A.- La société en nom collectif Y. a été inscrite au registre du
commerce le 15 octobre 1941. Le 1er janvier 1980, elle a été
transformée en une société en commandite. E. en était l'associé
gérant indéfiniment responsable et H. l'associé commanditaire pour
une commandite de 350'000 fr. En 1991, dame C. est entrée dans la
société en tant que commanditaire pour une commandite de 20'000 fr.
La société en commandite a été dissoute suite à la reprise de la
totalité de ses actifs et passifs par la SI Z. SA Les trois associés
précités ont fait apport à la nouvelle société anonyme de leurs fonds
propres respectifs dans la société en commandite, totalisant 470'000
fr., contre remise de 470 actions nominatives de 1'000 fr. chacune,
entièrement libérées. La société en commandite Y. a été radiée du
registre du commerce le 15 février 1994.

B.- Le 9 mai 1994, la Banque X. a requis la réinscription de la
société en commandite Y. au registre du commerce. Elle entendait, en
effet, obtenir la mainlevée de l'opposition dont avait été frappé un
commandement de payer, portant sur la somme de 300'000 fr., qu'elle
avait fait notifier à ladite société.
L'associé indéfiniment responsable et les commanditaires ayant
conclu au rejet de la requête, le préposé au registre du commerce a
transmis le dossier au Département de la justice, de la santé et de
la sécurité du
Considérant en droit:
1.- Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les
créanciers sociaux peuvent obtenir la réinscription d'une société
radiée s'ils rendent leur créance vraisemblable et établissent qu'ils
ont un intérêt à la réinscription. Cette dernière condition n'est pas
remplie quand ils peuvent recouvrer leur créance par une autre voie
ou lorsque la société n'a plus d'actifs réalisables (ATF 115 II 276
consid. 2; 110 II 396 consid. 2; 100 Ib 37 consid. 1 et les arrêts
cités).
Pour savoir si l'autorité intimée a refusé à tort d'admettre la
requête de la recourante, en application de cette jurisprudence, il
convient d'examiner quelle est l'incidence, sur les droits des
créanciers sociaux à l'égard tant de la société que des associés
indéfiniment responsables et des commanditaires, de la reprise, par
une société anonyme, de tout l'actif et le passif d'une entreprise
exploitée en la forme d'une société en commandite.
2.- En vertu de l'art. 181 CO, celui qui acquiert un patrimoine ou
une entreprise avec actif et passif devient responsable des dettes
envers les créanciers, dès que l'acquisition a été portée par lui à
leur connaissance ou qu'il l'a publiée dans les journaux (al. 1).
Toutefois, l'ancien débiteur reste solidairement obligé pendant deux
ans avec le nouveau (al. 2). Dans la décision attaquée, le
Département, se référant à l'ATF 87 I 301 ss, précise que l'art. 181
al. 2 CO n'est pas applicable lorsque, comme en l'espèce, une société
en commandite est liquidée par la reprise de ses actifs et passifs
par une autre corporation. La recourante conteste le bien-fondé d'une
telle opinion, suivie en cela par l'Office fédéral du registre du
commerce. En revanche, l'intimé se range à l'avis du Département,
lequel se montre cependant moins catégorique dans sa réponse
3.- a) La reprise cumulative de dette, au sens de l'art. 181 al. 2
CO, liée au transfert de tous les actifs et passifs de la société en
commandite dissoute à la société anonyme nouvellement constituée, ne
saurait toutefois fonder à elle seule l'intérêt du créancier à la
réinscription de la société radiée. Encore faudrait-il pour cela que
ladite société ait un actif réalisable qui, par hypothèse, n'aurait
été découvert qu'après le transfert des autres actifs à la société
anonyme et la radiation de la société en commandite (cf., mutatis
mutandis, l'ATF 78 I 451, 455). Or, la recourante ne prétend pas
qu'un élément de l'actif de la société dissoute aurait échappé à ce
transfert et le dossier cantonal ne fournit pas le moindre indice
allant dans ce sens. De ce point de vue, l'intérêt de la recourante à
la réinscription de la société radiée n'est, dès lors, pas établi.
b) Par ailleurs, il est loisible à la recourante de rechercher
personnellement l'associé indéfiniment responsable de la société
radiée, du moment que celle-ci a été dissoute (art. 604 CO).
S'agissant d'un cas de reprise par un tiers, elle dispose pour ce
faire du délai de deux ans prévu par l'art. 592 al. 2 in fine CO,
auquel renvoie l'art. 619 al. 1 CO. Il va de soi que l'introduction
d'une action contre l'associé indéfiniment
4.- La recourante, qui succombe, devra supporter les frais de la
présente procédure (art. 156 al. 1 OJ). Elle devra en outre verser
des dépens à l'intimé E. qui a conclu à juste titre au rejet du
recours. En revanche, les deux autres intimés, qui ne se sont pas
déterminés sur celui-ci, n'ont pas droit à des dépens.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4A.1/1995
Date de la décision : 14/08/1995
1re cour civile

Analyses

Société en commandite; réinscription au registre du commerce (art. 181, 592 al. 2, art. 604, 608 al. 1, art. 610 al. 2 et art. 619 CO). En cas de reprise de l'actif et du passif d'une société en commandite par une société anonyme nouvellement constituée, la première reste solidairement obligée avec la seconde pendant deux ans, conformément à l'art. 181 al. 2 CO (consid. 2). Dans la même hypothèse, qui n'est pas visée par l'art. 610 al. 2 CO, un commanditaire répond solidairement avec la société anonyme des dettes de la société en commandite dissoute, mais sa responsabilité est limitée au montant de sa commandite. Partant, un créancier de la société en commandite radiée ne peut pas faire valoir un intérêt à la réinscription de celle-ci (consid. 3).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1995-08-14;4a.1.1995 ?
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