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02/05/1995 | SUISSE | N°B.76/1995

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 mai 1995, B.76/1995


121 III 85

22. Extrait de l'arrêt de la Chambre des poursuites et des
faillites du 2 mai 1995 dans la cause X. (recours LP)
A.- Dans le cadre d'une procédure pénale, Y. s'est vu saisir par
le magistrat instructeur, en vue de confiscation (art. 58 CP), un
véhicule automobile immatriculé à son nom. Ce véhicule fut alors
entreposé dans les locaux du Service cantonal genevois des
Automobiles et de la Navigation (SAN). Par arrêt du 15 juin 1994, la
Cour correctionnelle du canton de Genève a condamné Y. à une peine
d'emprisonnement pour

abus de confiance, ordonné la restitution à
celui-ci de la voiture saisie, dont il n'av...

121 III 85

22. Extrait de l'arrêt de la Chambre des poursuites et des
faillites du 2 mai 1995 dans la cause X. (recours LP)
A.- Dans le cadre d'une procédure pénale, Y. s'est vu saisir par
le magistrat instructeur, en vue de confiscation (art. 58 CP), un
véhicule automobile immatriculé à son nom. Ce véhicule fut alors
entreposé dans les locaux du Service cantonal genevois des
Automobiles et de la Navigation (SAN). Par arrêt du 15 juin 1994, la
Cour correctionnelle du canton de Genève a condamné Y. à une peine
d'emprisonnement pour abus de confiance, ordonné la restitution à
celui-ci de la voiture saisie, dont il n'avait pas été établi qu'elle
avait été acquise au moyen des fonds détournés, et réservé pour le
surplus les droits des parties civiles. Le séquestre pénal a été
formellement levé le 13 juillet 1994 par le Procureur général.
Entre-temps, les 16/17, 23 et 24 juin, les parties civiles ont
obtenu du Président du Tribunal de première instance de Genève des
ordonnances autorisant le séquestre de la voiture en cause au
préjudice de Y., sur la base de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP. Ces
séquestres ont été validés par des poursuites. Avisé des séquestres,
le SAN a revendiqué un droit de gage et de rétention sur ledit
véhicule pour le loyer échu et futur. Ce droit n'a pas été contesté
par les parties concernées dans le délai qui leur fut alors imparti
sur la base de l'art. 106 LP.
Le 28 juillet 1994, Me X. a déclaré revendiquer la propriété de la
voiture pour le compte de son étude, en faisant valoir que cette
dernière, représentée par lui-même, avait acquis le véhicule le 16
juin 1994 pour un prix qui fut compensé à due concurrence par les
honoraires dont Y. était débiteur à son égard. L'Office des
poursuites de Genève/Rhône-Arve a dès lors imparti aux créanciers
poursuivants, en application de l'art. 109 LP, un délai de dix jours
pour intenter action contre l'étude de Me X., afin de faire écarter
le droit de propriété que celle-ci revendiquait.
Sur plainte des créanciers, l'autorité de surveillance du canton de
Genève a annulé les avis de fixation de délai qui leur avaient ainsi
été adressés et a invité l'office des poursuites à procéder
conformément à l'art. 107 LP, c'est-à-dire à impartir à Me X. le
délai pour faire reconnaître son droit en justice. Me X. a vainement
recouru à la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal
fédéral contre cette décision.
Extrait des considérants:
2.- Le recourant invoque une violation des règles sur la
répartition des rôles entre les parties au procès de tierce
opposition (art. 106 ss LP) lorsque le bien revendiqué se trouve en
la possession du quart détenteur (cf. ATF 120 III 83).
a) En pareil cas, le rôle des parties dépend de la question de
savoir pour le compte de qui le détenteur possède: si c'est pour le
compte exclusif du débiteur, il appartient au tiers revendiquant
d'ouvrir action; si le quart détenteur possède pour son propre
compte, ou conjointement avec le débiteur, ou encore pour le compte
du tiers revendiquant et du débiteur, il incombe au créancier d'agir
(ATF 120 III 83 consid. 3a p. 85; GILLIÉRON, Poursuite pour dettes,
faillite et concordat, 3e éd., Lausanne 1993, p. 211 et les
références; FRITZSCHE/WALDER, Schuldbetreibung und Konkurs nach
schweizerischem Recht, vol. I, 3e éd., Zurich 1984, § 26 n. 7).
b) Il est établi qu'aux dates déterminantes, savoir les 16/17, 23
et 24 juin, le SAN détenait le véhicule litigieux à la suite du
séquestre pénal opéré au préjudice du débiteur Y., la levée de cette
mesure, décidée le 15 juin, n'étant formellement intervenue que le 13
juillet. Ce service exerçait donc alors, en qualité de dépositaire
(YVONNE BERCHER, Le séquestre pénal, thèse Lausanne 1992, p. 160), la
mainmise de l'Etat sur le bien séquestré en vue d'empêcher que son
propriétaire ou son détenteur puisse en disposer ou en jouir (R.
HAUSER, Kurzlehrbuch des schweizerischen Strafprozessrechts, 1978, p.
173; PHILIPPE DE GRAFFENRIED, Actes de la police judiciaire, thèse
Lausanne 1981, p. 117). Le débiteur a néanmoins disposé de son
véhicule en le vendant le 16 juin à l'étude du recourant, alors que
l'arrêt du 15 juin ordonnant sa restitution n'était à l'évidence pas
encore devenu définitif (cf. art. 321 et 338 ss CPP/GE). La question
de la validité de cette vente n'a toutefois pas à être examinée ni
tranchée ici. Quoi qu'il en soit de toute façon, lorsque la chose
remise au dépositaire est vendue après coup, la situation au point de
vue de la possession n'est pas modifiée par ce seul fait; elle ne
l'est qu'à partir du moment où l'avis aux tiers prévu par l'art. 924
al. 2 CC a été donné (C. JÄGER, Commentaire de la LP, n. 2 ad art.
106, édition française p. 371 et les références). Or, selon la
décision attaquée, le recourant n'a nullement allégué avoir informé
le SAN du changement de propriétaire prétendument intervenu le 16
juin. Aussi est-ce à bon droit que l'autorité cantonale de
surveillance a retenu que le débiteur apparaissait, vis-à-vis de ce
service de l'Etat, comme étant la seule personne légitimée à prendre
ou reprendre


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.76/1995
Date de la décision : 02/05/1995
Chambre des poursuites et des faillites

Analyses

Jugement pénal ordonnant la restitution à l'accusé d'une voiture automobile saisie en vue de confiscation (art. 58 CP) et déposée à la fourrière cantonale. Vente du véhicule sans tradition au sens de l'art. 924 CC et séquestre civil avant la levée formelle du séquestre pénal. Revendication de la part de l'acheteur et de la fourrière cantonale, sans que les droits de celle-ci soient contestés. Répartition du rôle des parties au procès de tierce intervention (art. 106 ss LP). Faute d'avoir été avisé du changement de possesseur (art. 924 al. 2 CC), le dépositaire - en l'occurrence la fourrière cantonale - peut considérer l'accusé et débiteur comme étant la seule personne légitimée à prendre ou reprendre possession de la voiture litigieuse dès la levée du séquestre pénal. Dans la mesure où ses propres droits ne sont pas en cause, ce quart détenteur n'exerce la possession que pour le débiteur; il appartient dès lors au tiers revendiquant, c'est-à-dire en l'espèce à l'acheteur, d'intenter action pour faire reconnaître son droit au sens de l'art. 107 LP (consid. 2).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1995-05-02;b.76.1995 ?
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