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31/01/1995 | SUISSE | N°6S.694/1994

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 31 janvier 1995, 6S.694/1994


121 IV 18

4. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 31 janvier
1995 dans la cause G. contre Procureur général du canton de Genève
(pourvoi en nullité)
A.- Le 23 juin 1993 vers 18 ou 19 heures, Marie reçut dans son
appartement à Genève G., qui apportait de l'héroïne qu'ils
consommèrent ensemble. Dès son arrivée, G. remarqua que Marie n'était
pas dans son état normal et celle-ci lui déclara qu'elle avait déjà
consommé de l'héroïne dans l'après-midi. Environ un quart d'heure
après avoir prisé la drogue, Mari

e fut saisie d'un malaise. G. ne fit
pas appel à un médecin. Il expliqua plus tard qu'il avait déjà ...

121 IV 18

4. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 31 janvier
1995 dans la cause G. contre Procureur général du canton de Genève
(pourvoi en nullité)
A.- Le 23 juin 1993 vers 18 ou 19 heures, Marie reçut dans son
appartement à Genève G., qui apportait de l'héroïne qu'ils
consommèrent ensemble. Dès son arrivée, G. remarqua que Marie n'était
pas dans son état normal et celle-ci lui déclara qu'elle avait déjà
consommé de l'héroïne dans l'après-midi. Environ un quart d'heure
après avoir prisé la drogue, Marie fut saisie d'un malaise. G. ne fit
pas appel à un médecin. Il expliqua plus tard qu'il avait déjà vu une
fois Marie s'endormir de cette façon et qu'il savait qu'elle avait
peur des médecins et souhaitait éviter des frais.
Vers 23 heures, B. arriva à son tour dans l'appartement et les deux
hommes tentèrent en vain de réveiller Marie en lui passant de l'eau
sur le visage et en lui donnant des claques. Il fut retenu que G.,
qui était lui-même toxicomane, savait qu'une surdose d'héroïne
pouvait entraîner la mort et qu'il se rendait compte que Marie allait
mal à la suite de l'absorption d'héroïne, ayant observé que sa
respiration était saccadée et qu'elle avait les mains froides. Les
deux hommes choisirent de ne pas faire appel à un médecin et fumèrent
ensemble de la drogue. Vers minuit, G., qui tenait à ne pas manquer
le dernier bus, quitta les lieux, en laissant un message à
l'attention de Marie et en donnant son numéro de téléphone à B. pour
le cas où un problème surviendrait.
Marie décéda dans la nuit en raison de la surdose d'héroïne qu'elle
avait consommée, alors que l'issue fatale aurait pu être évitée si
elle avait reçu sans retard des soins médicaux.

B.- Par arrêt du 29 avril 1994, la Cour correctionnelle avec jury
du canton de Genève a condamné G., pour omission de prêter secours et
infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants, à la peine de douze
mois d'emprisonnement avec sursis pendant quatre ans, cette peine
étant complémentaire à une peine prononcée antérieurement.
Statuant par arrêt du 2 novembre 1994, la Cour de cassation
cantonale a rejeté le pourvoi formé par le condamné.
Considérant en droit:
1.- (Recevabilité)
2.- a) Le recourant soutient que les faits constatés par
l'autorité cantonale ne constituent pas une omission de prêter
secours au sens de l'art. 128 al. 1 CP.
La nouvelle teneur de l'art. 128 CP (RO 1989 p. 2451) est entrée en
vigueur le 1er janvier 1990 (RO 1989 p. 2456); les faits reprochés au
recourant ayant eu lieu postérieurement, la nouvelle disposition est
applicable (art. 2 al. 1 CP).
Le nouvel article 128 CP prévoit notamment que celui qui n'aura pas
prêté secours à une personne en danger de mort imminent, alors que
l'on pouvait raisonnablement l'exiger de lui, étant donné les
circonstances, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.
Il s'agit d'un délit d'omission (TRECHSEL, Kurzkommentar StGB, art.
128 no 4; JOSÉ HURTADO POZO, Droit pénal, partie spéciale I, Fribourg
1988 p. 167 no 373; LAURENT MOREILLON, Omission de porter secours,
RPS 112 (1994) p. 237), qui réprime une mise en danger abstraite
(TRECHSEL, op.cit., art. 128 no 4; MOREILLON, op.cit., p. 238;
REHBERG/SCHMID, Strafrecht III, 6e éd., p. 41), sans exiger de
résultat (TRECHSEL, op.cit., art. 128 no 4; REHBERG/SCHMID, op.cit.,
p. 41; MOREILLON, op.cit., p. 237). Cette disposition met à la charge
de toute personne qui est en mesure de le faire l'obligation générale
de porter secours à autrui en cas d'urgence (FF 1985 II 1048;
STRATENWERTH, Bes. Teil I, 5e éd., p. 90 no 61; REHBERG/SCHMID,
op.cit., p. 40; HURTADO POZO, op.cit., p. 167 no 373; MOREILLON,
op.cit., p. 243 et 245), sans créer une position de garant
(MOREILLON, op.cit., p. 238, 245 et 250; CORBOZ, L'homicide par
négligence, SJ 1994 p. 214 s. et les références citées; cf.
également: REHBERG/SCHMID, op.cit., p. 44; HURTADO POZO, op.cit., p.
169).
Le secours qui doit être prêté se limite aux actes que l'on peut
raisonnablement exiger de l'auteur compte tenu des circonstances (FF
1985 II 1048; STRATENWERTH, op.cit., p. 93 no 70; REHBERG/SCHMID,
op.cit., p. 43; HURTADO POZO, op.cit., p. 168 no 378; TRECHSEL,
op.cit., art. 128 no 12; MOREILLON, op.cit., p. 246). Seuls sont
exigés les actes de secours
3.- (frais judiciaires).


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.694/1994
Date de la décision : 31/01/1995
Cour de cassation pénale

Analyses

Art. 128 al. 1 CP; omission de prêter secours. Conditions de la répression, généralités. Le danger de mort imminent est réalisé lorsque, à la suite de la consommation d'une surdose d'héroïne, une personne risque de perdre la vie en quelques heures (consid. 2b/aa). L'obligation de prêter secours incombe à quiconque se trouve dans le logement de la personne en danger; dans les circonstances d'espèce, il suffisait de requérir par téléphone une aide médicale (consid. 2b/aa). Intention (consid. 2b/bb).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1995-01-31;6s.694.1994 ?
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