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29/06/1994 | SUISSE | N°P.64/93

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 juin 1994, P.64/93


120 V 187

27. Arrêt du 29 juin 1994 dans la cause Office fédéral des
assurances sociales contre L., J. et Tribunal des assurances du
canton de Vaud
A.- a) L., née en 1914, et sa soeur J., née en 1915, ont conclu
avec la compagnie d'assurance sur la vie Patria (ci-après: la Patria)
deux polices d'assurance-vie par lesquelles cette compagnie
s'obligeait à verser aux assurées, à partir du mois d'août 1985, des
rentes viagères d'un montant mensuel de 585 fr. 65 pour L. et de 398
fr. 85 pour J., moyennant le paiement de primes uniques de


respectivement 105'000 francs et 75'000 francs.
Par acte du 31 janvier 1986, les pr...

120 V 187

27. Arrêt du 29 juin 1994 dans la cause Office fédéral des
assurances sociales contre L., J. et Tribunal des assurances du
canton de Vaud
A.- a) L., née en 1914, et sa soeur J., née en 1915, ont conclu
avec la compagnie d'assurance sur la vie Patria (ci-après: la Patria)
deux polices d'assurance-vie par lesquelles cette compagnie
s'obligeait à verser aux assurées, à partir du mois d'août 1985, des
rentes viagères d'un montant mensuel de 585 fr. 65 pour L. et de 398
fr. 85 pour J., moyennant le paiement de primes uniques de
respectivement 105'000 francs et 75'000 francs.
Par acte du 31 janvier 1986, les prénommées ont déclaré remettre en
gage à la Banque cantonale vaudoise tous les objets mobiliers
(titres, papiers-valeurs, livrets d'épargne et de dépôt, polices
d'assurance, etc.) en mains de cette dernière, en garantie des dettes
actuelles et futures contractées par P., fils de J. et neveu de L. Le
10 février suivant, elles ont en outre remis en nantissement à cette
banque les deux polices d'assurance-vie conclues auprès de la Patria.
b) J. a bénéficié d'une prestation complémentaire à sa rente de
vieillesse à partir du 1er novembre 1990. Saisie d'une demande de L.
tendant à l'octroi d'une telle prestation, la Caisse cantonale
vaudoise de compensation (ci-après: la caisse) a nié le droit de la
prénommée à une prestation en espèces, mais elle a pris en charge le
paiement de ses cotisations d'assurance-maladie.
La Banque cantonale vaudoise ayant requis la réalisation des gages
garantissant ses créances envers P., le produit du rachat des polices
de rente viagère en faveur de L. et de J. - soit respectivement
58'734 francs et 43'491 francs - a été versé à la banque précitée le
29 avril 1992. En outre, le 25 mai 1992, la Patria a confirmé à la
Banque cantonale vaudoise qu'elle lui verserait, en sa qualité de
créancière-gagiste, une rente annuelle de 5'221 fr. 50 (excédents
compris), payable dès le 27 août 2001 en cas de vie de L. et une
rente annuelle de 3'595 fr. 90 (excédents compris), payable dès le 27
août 2002, en cas de vie de J.
Considérant en droit:
1.- Est tout d'abord litigieux, en l'espèce, le point de savoir si
le nantissement d'une police d'assurance-vie auprès du créancier d'un
tiers, en vue de garantir le paiement de la dette contractée par ce
dernier,
2.- a) Selon l'art. 2 al. 1 LPC, les ressortissants suisses
domiciliés en Suisse qui peuvent prétendre une rente de
l'assurance-vieillesse et survivants, une rente ou une allocation
pour impotent de l'assurance-invalidité, doivent bénéficier de
prestations complémentaires si leur revenu annuel déterminant
n'atteint pas un certain montant.
b) Aux termes de l'art. 3 al. 1 let. f LPC, le revenu déterminant
le droit aux prestations complémentaires comprend les ressources et
parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi. Il y a lieu
d'admettre l'existence d'un dessaisissement au sens de cette
disposition lorsque l'assuré a renoncé à des éléments de revenu ou de
fortune sans obligation juridique et sans avoir reçu en échange une
contre-prestation équivalente (ATF 115 V 354 consid. 5c et les
références; RCC 1990 p. 374 consid. 3a).
3.- a) Les premiers juges ont considéré qu'en remettant en
nantissement les deux polices d'assurance-vie en garantie des
créances actuelles et futures que la Banque cantonale vaudoise
pourrait avoir contre P., les assurées ont accepté, en cas de
réalisation du gage, l'éventualité d'être privées des rentes viagères
dont elles bénéficiaient. Selon eux, ce nantissement ne doit
toutefois pas être assimilé à un dessaisissement; en effet, l'élément
décisif est en l'occurrence la conclusion de polices d'assurance
destinées à garantir aux assurées un certain niveau de vie jusqu'à la
fin de leur existence, la mise en gage desdites polices n'étant qu'un
élément en quelque sorte secondaire dans ce contexte.
b) Ce point de vue ne saurait être partagé. Tout acte juridique par
lequel une personne s'engage envers le créancier d'un tiers à
garantir le paiement de la dette contractée par ce tiers doit être
assimilé à un dessaisissement conditionnel au sens de l'art. 3 al. 1
let. f LPC. Sans doute, tant que la condition ne s'est pas réalisée,
le dessaisissement n'est-il que virtuel, mais cela ne change rien au
problème: toute libéralité peut être soumise à condition et ce qui
seul importe, c'est qu'au moment où l'on fixe le revenu déterminant
le droit éventuel d'un assuré à une prestation complémentaire, cet
assuré dispose ou ne dispose pas de la fortune et du revenu de
celle-ci qui doivent être pris en compte selon les règles légales.
Dès lors, peu importe la cause ou la nature juridique exacte de
l'engagement souscrit par l'assuré en faveur d'autrui.
4.- Lors du calcul des prestations complémentaires qui sont
l'objet des décisions litigieuses, la caisse a pris en compte les
valeurs de rachat des deux polices, comptées comme éléments de
fortune amortissables en vertu de l'art. 17a OPC-AVS/AI.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.64/93
Date de la décision : 29/06/1994
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 3 al. 1 let. f LPC: renonciation à un élément de revenu. - Tout acte juridique par lequel une personne remet en gage au créancier d'un tiers un bien ou une créance lui appartenant (i. c. une police d'assurance-vie), en vue de garantir le paiement de la dette contractée par ce tiers, constitue un dessaisissement conditionnel au sens de l'art. 3 al. 1 let. f LPC (consid. 3b et c). - En cas de nantissement d'une police d'assurance garantissant le paiement d'une rente viagère en contrepartie d'une prime unique, ce n'est pas la valeur de rachat de la police, comptée comme élément de fortune amortissable en vertu de l'art. 17a OPC-AVS/AI, qui doit être prise en compte, mais la rente viagère à laquelle le titulaire a renoncé, en tant qu'élément de revenu dont il s'est dessaisi (consid. 4).


Références :

29.06.1994 P 11/94


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1994-06-29;p.64.93 ?
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