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25/02/1994 | SUISSE | N°2A.299/1992

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 février 1994, 2A.299/1992


120 Ib 1

1. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 25 février
1994 dans la cause A. K. contre Tribunal administratif du canton de
Vaud et Office cantonal de contrôle des habitants et de police des
étrangers (recours de droit administratif)
A.- A. K., d'origine tunisienne, est arrivé en Suisse le 26 août
1988, au bénéfice d'une autorisation de séjour pour suivre des études.
Le 8 septembre 1989, l'Office cantonal de contrôle des habitants et
de police des étrangers du canton de Vaud (ci-après: l'Office
cantonal des ét

rangers) a refusé de lui délivrer une autorisation de
séjour et lui a imparti un délai de...

120 Ib 1

1. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 25 février
1994 dans la cause A. K. contre Tribunal administratif du canton de
Vaud et Office cantonal de contrôle des habitants et de police des
étrangers (recours de droit administratif)
A.- A. K., d'origine tunisienne, est arrivé en Suisse le 26 août
1988, au bénéfice d'une autorisation de séjour pour suivre des études.
Le 8 septembre 1989, l'Office cantonal de contrôle des habitants et
de police des étrangers du canton de Vaud (ci-après: l'Office
cantonal des étrangers) a refusé de lui délivrer une autorisation de
séjour et lui a imparti un délai de départ échéant le 8 octobre 1989.
Le 26 septembre 1989, A. K. a épousé J. C., de nationalité suisse.
Il a alors obtenu une autorisation de séjour lui permettant de
travailler. La femme d'A. K. aurait quitté son mari en mai 1991.
Le 11 mars 1992, l'Office cantonal des étrangers a refusé de
renouveler l'autorisation de séjour d'A. K.
Par arrêt du 17 septembre 1992, le Tribunal administratif du canton
de Vaud a rejeté le recours déposé par A. K. Il a retenu que
l'autorisation de séjour d'A. K. était fondée sur son mariage et que
cette justification avait disparu avec la séparation des époux. Il
ajoutait qu'il n'existait pas d'autres raisons de renouveler
l'autorisation de séjour de l'intéressé.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A. K.
demande au Tribunal fédéral que l'arrêt rendu par le Tribunal
administratif du canton de Vaud soit réformé en ce sens que
l'autorisation de séjour qu'il a requise lui soit délivrée. Il
invoque les art. 8 et 14 CEDH, du fait qu'il a eu une fille avec N.
T., Suissesse domiciliée à L.
Extrait des considérants:
1.- d) Le recourant se réclame de l'art. 8 CEDH. Un étranger peut,
selon les circonstances, se prévaloir du droit au respect de sa vie
privée et familiale garanti par cette disposition pour s'opposer à
l'éventuelle séparation de sa famille et obtenir ainsi une
autorisation de séjour. Encore faut-il pour pouvoir invoquer l'art. 8
CEDH que la relation entre l'étranger et une personne de sa famille
ayant le droit de s'établir en Suisse (nationalité suisse ou
autorisation d'établissement) soit étroite et effective (ATF 119 Ib
91 consid. 1c p. 93; 118 Ib 145 consid. 4 p. 152 et 153 consid. 1c p.
157; 116 Ib 353 consid. 1b p. 355). Ainsi, l'art. 8 CEDH s'applique
lorsqu'un étranger peut faire valoir une relation intacte avec son
enfant bénéficiant du droit de résider en Suisse, même si ce dernier
n'est pas placé sous son autorité parentale ou sous sa garde du point
de vue du droit de famille (ATF 119 Ib 81 consid. 1c p. 84; 118 Ib
153 consid. 1c p. 157; 115 Ib 97 consid. 2e p. 99; arrêt de la Cour
européenne des droits de l'homme du 21 juin 1988 en la cause
Berrehab, Série A, vol. 138, p. 14, par. 21). Dans une décision du 15
octobre 1986 en la cause K. contre Royaume-Uni, la Commission
européenne des droits de l'homme a déclaré que "la primauté des
rapports d'un parent naturel avec son enfant, constitutive d'une vie
de famille, ressort clairement des termes des articles 8 et 12 de la
Convention et de l'article 2 du Protocole additionnel" (Décisions et
rapports 50/1987 p. 199, 216). Au surplus, il n'y a pas lieu de faire
une différence selon que l'enfant de l'étranger est naturel ou
légitime (HAEFLIGER, Die Europäische Menschenrechtskonvention und die
Schweiz, Berne 1993, p. 207/208; WILDHABER, Internationaler Kommentar
zur Europäischen Menschenrechtskonvention, n. 352 ad art. 8;
VILLIGER, Handbuch der Europäischen Menschen rechtskonvention, Zurich
1993, n. 559/560, p. 328/329).
Dans le cas particulier, le recourant a eu avec une Suissesse une
fille, A., qu'il a reconnue, mais sur laquelle il n'a pas l'autorité
parentale. Par convention du 3 août 1992, il s'est engagé à
contribuer à l'entretien de cette enfant, obligation qu'il respecte.
Il ne vit pas avec sa fille, mais la voit régulièrement. Dans la
mesure où l'arrêt attaqué a des incidences sur ses liens avec sa
fille, le recourant peut se prévaloir de
3.- a) L'arrêt attaqué influe incontestablement sur la relation du
recourant avec sa fille. Or cette relation peut être qualifiée
d'étroite et d'effective. En effet, selon le dossier, le père a
reconnu son enfant dix jours après la naissance. Il s'est engagé à
lui verser une pension alimentaire jusqu'à sa majorité et il respecte
cette obligation. En outre, bien qu'il ne vive pas avec l'enfant A.,
il a établi avec elle des contacts étroits, puisqu'il lui rend
régulièrement visite - un week-end sur deux et une fois par semaine
en moyenne.
En refusant de prolonger l'autorisation de séjour de l'intéressé,
l'autorité intimée n'empêche pas, il est vrai, les relations entre
père et fille, mais elle les complique. Elle rend en particulier très
difficiles les contacts directs dont ils bénéficient lorsque le
recourant va voir l'enfant A. Dans l'arrêt Berrehab précité (p. 14,
par. 22/23), la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que la
possibilité pour un ressortissant marocain d'exercer son droit de
visite sur son enfant résidant aux Pays-Bas était plutôt théorique.
Elle en a conclu que le refus d'accorder une nouvelle autorisation de
séjour au père et la mesure d'expulsion en résultant constituaient
des ingérences dans l'exercice d'un droit garanti par l'art. 8 par. 1
CEDH. Dans le cas particulier, il faut admettre, compte tenu de la
distance séparant la Suisse de la Tunisie et du coût des
déplacements, que l'arrêt entrepris porte atteinte à la vie familiale
du recourant au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH. Il convient dès lors
d'examiner si ledit arrêt trouve sa justification dans l'art. 8 par.
2 CEDH.
b) Une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie
privée et familiale n'est possible selon l'art. 8 par. 2 CEDH que
"pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle
constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est
nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au
bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la
prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de
la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui".
La Suisse pratique une politique restrictive en matière de séjour
des étrangers, en particulier pour assurer un rapport équilibré entre
l'effectif de la population suisse et celui de la population
étrangère résidante, ainsi que pour améliorer la situation du marché
du travail et assurer un équilibre optimal en matière d'emploi (cf.
art. 16 de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des
étrangers du 26 mars 1931 - LSEE; RS 142.20 - et 1er de l'ordonnance
limitant le nombre des étrangers


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.299/1992
Date de la décision : 25/02/1994
2e cour de droit public

Analyses

Art. 8 CEDH; autorisation de séjour pour le père étranger d'une enfant suisse. L'art. 8 CEDH s'applique lorsqu'un étranger peut faire valoir une relation intacte avec son enfant bénéficiant du droit de résider en Suisse, même si ce dernier n'est pas placé sous son autorité parentale ou sous sa garde (consid. 1d). Le recourant et sa fille entretiennent une relation étroite et effective. L'arrêt attaqué porte atteinte à la vie familiale du recourant, au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH. L'art. 8 par. 2 CEDH admet une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée et familiale dans certains cas, notamment lorsqu'il s'agit d'appliquer une politique restrictive en matière de séjour des étrangers. L'octroi - ou le refus - d'une autorisation de séjour fondée sur l'art. 8 CEDH doit être décidé sur la base d'une pesée de tous les intérêts publics et privés en présence (consid. 3).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1994-02-25;2a.299.1992 ?
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