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13/01/1994 | SUISSE | N°5A.3/1993

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 13 janvier 1994, 5A.3/1993


120 II 87

19. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 13 janvier 1994
dans la cause époux X. contre Département de justice et police du
canton de Genève (recours de droit administratif)
A.- Les époux X., de nationalité suisse, sont domiciliés en
Suisse, dans le canton de Genève. Dame X. dispose de la nationalité
américaine.
Le 20 février 1992, la Cour supérieure l'Etat de Washington (USA) a
prononcé l'adoption par les époux X. de l'enfant M., née le 24
janvier 1992.

B.- Par décision du 12 février 1993, le Dépar

tement de justice et
police du canton de Genève (ci-après: le Département) a rejeté la
requête de...

120 II 87

19. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 13 janvier 1994
dans la cause époux X. contre Département de justice et police du
canton de Genève (recours de droit administratif)
A.- Les époux X., de nationalité suisse, sont domiciliés en
Suisse, dans le canton de Genève. Dame X. dispose de la nationalité
américaine.
Le 20 février 1992, la Cour supérieure l'Etat de Washington (USA) a
prononcé l'adoption par les époux X. de l'enfant M., née le 24
janvier 1992.

B.- Par décision du 12 février 1993, le Département de justice et
police du canton de Genève (ci-après: le Département) a rejeté la
requête des époux X. tendant à la transcription du prononcé
d'adoption dans les registres suisses de l'état civil.

C.- Agissant en temps utile par la voie du recours de droit
administratif, les époux X. demandent au Tribunal fédéral d'annuler
la décision du Département et d'ordonner la transcription dans les
Extrait des considérants:
2.- Il n'existe aucun traité bi- ou multilatéral liant la Suisse
aux Etats-Unis d'Amérique dans le domaine de l'adoption
internationale, qu'il s'agisse de l'application du droit matériel ou
de la reconnaissance et l'exécution des décisions étrangères.
Partant, les conditions de la reconnaissance en Suisse de la décision
d'adoption rendue aux Etats-Unis sont régies par la LDIP (RS 291).
a) En vertu de l'art. 32 al. 1 et 2 LDIP, une décision ou un acte
étranger concernant l'état civil peut être transcrit, moyennant une
décision de l'autorité cantonale de surveillance, lorsqu'il satisfait
aux conditions générales prévues aux art. 25 à 27 LDIP. Ces
dispositions prévoient en substance qu'une décision étrangère est
reconnue en Suisse pour autant que les autorités judiciaires ou
administratives de l'Etat dont émane la décision étaient compétentes,
que la décision n'est plus susceptible de recours ordinaire et
qu'elle n'est pas manifestement incompatible avec l'ordre public
suisse. L'autorité suisse saisie ne saurait procéder à un examen au
fond de la décision dont la transcription est demandée (cf. VOLKEN,
in: HEINI/KELLER/SIEHR/VISCHER/VOLKEN, IPRG-Kommentar, Zurich 1993,
n. 16 ad art. 32 LDIP).
3.- Selon la jurisprudence, la réserve de l'ordre public est une
clause d'exception, dont l'application en matière de reconnaissance
et d'exécution de décisions étrangères est plus restrictive que dans
le domaine de l'application directe des règles de droit. La
reconnaissance de la décision étrangère constitue la règle, dont il
ne faut pas s'écarter sans de bonnes raisons (cf. ATF 116 II 625
consid. 4a; 109 Ib 232 consid. 2a; 103 Ib 74 consid. 3d et les arrêts
cités).
a) Il s'ensuit qu'en l'espèce, la reconnaissance de l'adoption
prononcée aux Etats-Unis ne saurait être refusée au motif qu'étant
intervenue quatre semaines seulement après la naissance de l'enfant
M., elle ne tiendrait compte ni du délai - impératif en droit suisse
- de six semaines pour le consentement et sa révocation, au sens de
l'art. 265b al. 1 CC, ni, a fortiori, du délai de deux ans de l'art.
264 CC - impératif lui aussi, cf. ATF 111 II 230 consid. 2 - relatif
à la durée des soins et de l'éducation que doivent avoir fournis à
l'enfant les
4.- Reste à examiner si les autorités américaines étaient
compétentes pour prononcer l'adoption de l'enfant M. Sur ce point,
l'art. 78 al. 1 LDIP admet la reconnaissance en Suisse d'adoptions
intervenues à l'étranger "lorsqu'elles ont été prononcées dans l'Etat
du domicile ou dans l'Etat national de l'adoptant ou des époux
adoptants".
En l'espèce, l'adoption a été prononcée dans un Etat qui n'est ni
celui de domicile des époux adoptants, ni leur Etat national, si l'on
tient compte de leur nationalité suisse commune.
a) La LDIP ne traite pas expressément du cas de double nationalité
d'un époux, pas plus qu'elle ne s'exprime au sujet des cas où les
époux sont, en outre, de nationalités étrangères différentes et que
l'adoption est prononcée dans l'Etat d'origine de l'un d'eux.
L'autorité cantonale, qui s'est ralliée à l'avis de l'autorité
fédérale, qu'elle avait consultée, estime que, dans cette dernière
hypothèse - qui n'est pas, toutefois, celle de l'espèce, les époux
ayant une nationalité suisse commune -, la compétence étrangère
devrait être reconnue en Suisse, sauf si les époux sont tous deux
domiciliés en Suisse. Dans ce cas, affirme-t-elle, l'adoption
prononcée dans l'autre Etat d'origine de l'un des époux adoptants ne
saurait être reconnue en Suisse et cela quand bien même les époux
procéderaient dans cet Etat étranger à une adoption conjointe. En
effet, conformément à l'art. 23 al. 2 LDIP, lorsqu'une personne a
plusieurs nationalités, celle de l'Etat avec lequel elle a les
relations les plus étroites est seule retenue pour déterminer le
droit applicable, à moins que la loi n'en dispose autrement. En
l'espèce, conclut-elle, les recourants sont l'un et l'autre de
nationalité suisse; ils sont domiciliés en Suisse; enfin, l'Etat avec
lequel ils entretiennent les relations les plus étroites est celui de
leur domicile, la Suisse (cf. dans ce sens, la circulaire précitée de
l'Office fédéral de la Justice). Appliqués au cas d'espèce, ces
critères conduisent à nier la compétence indirecte des autorités
américaines.
5.- Cette opinion ne saurait être suivie. Raisonner ainsi revient
à délimiter la portée de l'un des deux critères prévus à l'art. 78
al. 1 LDIP, celui de la nationalité, en faisant appel à l'autre,
celui du domicile, qui lui est étranger. Les considérations
complémentaires exposées dans les observations du Département fédéral
de justice et police au recours ne justifient pas un autre résultat.
Même si la LDIP se rattache en premier lieu au critère du domicile ou
de la résidence


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5A.3/1993
Date de la décision : 13/01/1994
2e cour civile

Analyses

Art. 78 al. 1 LDIP; reconnaissance d'une adoption conjointe étrangère et transcription dans les registres suisses de l'état civil; compétence indirecte des autorités étrangères. Une adoption conjointe effectuée dans l'Etat d'origine de l'épouse - double nationale - par des époux suisses et domiciliés en Suisse, satisfait aux conditions de l'art. 78 al. 1 combiné avec l'art. 23 al. 3 LDIP. Partant, rien ne s'oppose, toutes autres conditions remplies, à ce qu'elle soit reconnue en Suisse.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1994-01-13;5a.3.1993 ?
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