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08/10/1993 | SUISSE | N°4C.195/1993

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 08 octobre 1993, 4C.195/1993


119 II 361

74. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 8 octobre 1993 dans
la cause Compagnie d'assurances X. contre dame B. (recours en réforme)
A.- Le 18 août 1987, B., médecin-dentiste indépendant, a été
percuté par un véhicule automobile alors qu'il circulait à bicyclette
à Genève; il est décédé sur place. La Compagnie d'assurances X. a
admis que l'accident était dû à la faute exclusive du détenteur du
véhicule automobile, dont elle couvre la responsabilité civile. Elle
n'a cependant pas pu s'entendre avec la femme et l

es enfants de la
victime au sujet du montant des indemnités réclamées par eux et leur
a ver...

119 II 361

74. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 8 octobre 1993 dans
la cause Compagnie d'assurances X. contre dame B. (recours en réforme)
A.- Le 18 août 1987, B., médecin-dentiste indépendant, a été
percuté par un véhicule automobile alors qu'il circulait à bicyclette
à Genève; il est décédé sur place. La Compagnie d'assurances X. a
admis que l'accident était dû à la faute exclusive du détenteur du
véhicule automobile, dont elle couvre la responsabilité civile. Elle
n'a cependant pas pu s'entendre avec la femme et les enfants de la
victime au sujet du montant des indemnités réclamées par eux et leur
a versé hors procès la somme de 80'000 francs.

B.- Par jugement du 16 janvier 1992, le Tribunal de première
instance du canton de Genève, admettant partiellement l'action
introduite par les survivants contre la Compagnie d'assurances X., a
condamné la défenderesse à payer, outre le montant de 700 francs pour
le dommage matériel, les sommes de 886'640 francs, 63'443 francs et
65'487 francs, respectivement, à la veuve et aux deux enfants de la
victime, à titre de perte de soutien, ainsi qu'une indemnité pour
tort moral de 20'000 francs à dame B. et de 10'000 francs à chaque
enfant, le tout avec intérêts et sous imputation des 80'000 francs
déjà versés.
Statuant le 23 avril 1993, sur appel de la défenderesse, la Cour de
justice civile du canton de Genève a ramené à 423'392 fr. 40 le
montant alloué à la veuve pour couvrir sa perte de soutien et rejeté
les conclusions prises à ce titre par les enfants du de cujus. A cet
égard, elle a estimé à 200'000 francs le revenu annuel déterminant du
défunt
Extrait des considérants:
4.- La défenderesse reproche à la Cour de justice d'avoir violé le
droit fédéral en renonçant à imputer les prestations de
l'assurance-accidents complémentaire sur l'indemnité pour perte de
soutien.
En vertu de l'art. 41 LAA, dès la survenance de l'éventualité
assurée, l'assureur est subrogé, jusqu'à concurrence des prestations
légales, aux droits de l'assuré et de ses survivants contre tout
tiers responsable de l'accident. Comme cela ressort expressément du
texte de cette disposition, l'étendue du droit de recours est
déterminée par le montant des prestations légales de
l'assurance-accidents (Message du Conseil fédéral du 18 août 1976, in
FF 1976 III 202). En d'autres termes, la LAA ne prévoit pas de
subrogation pour les prestations complémentaires de l'assureur
(GHÉLEW/RAMELET/RITTER, Commentaire de la loi sur
l'assurance-accidents, p. 161, ch. 2; MAURER, Schweizerisches
Unfallversicherungsrecht, p. 544 et p. 564 ad note de pied 1465;
RUSCONI, Le recours de l'assureur dans la loi fédérale sur
l'assurance-accidents, in Publications juridiques du Touring Club
Suisse, no 7, p. 25 ss, 28; STEIN, Der Regress gemäss
Unfallversicherungsgesetz, in dernier op. cit., p. 41; SCHAER,
Grundzüge des Zusammenwirkens von Schadensausgleichssystemen, p. 235,
note
5.- a) La défenderesse fait valoir, par ailleurs, qu'il était
contraire au droit fédéral de ne pas prendre en considération le
revenu de la veuve pour déterminer le besoin de soutien effectif de
celle-ci. A cet égard, la Cour de justice constate que la
demanderesse, âgée de 41 ans au moment du décès de son mari,
n'exerçait plus d'activité lucrative depuis quelques années et
consacrait tout son temps à sa famille qui comprenait, en plus des
deux enfants demandeurs, deux autres enfants issus d'un premier
mariage. Elle retient en outre que, si la demanderesse a néanmoins
accepté de travailler pour le compte d'un tiers ..., c'est, sur le
conseil de son médecin, pour surmonter le drame familial qu'elle
avait vécu. Dès lors, compte tenu de ce que le salaire de la femme
constitue un acquêt (sic) et du fait que la demanderesse participe à
l'entretien des enfants de son premier mariage, il n'y a pas lieu
d'imputer une partie de ce salaire sur la perte de soutien, de l'avis
des juges précédents. Ceux-ci ne tiennent pas non plus compte de
l'activité déployée par la demanderesse dans un autre établissement
public genevois, étant donné que ce commerce n'a pu survivre que
grâce à une mise de fonds de 400'000 francs de l'intéressée,
effectuée postérieurement au moment déterminant pour le calcul de la
perte de soutien.
b) Contrairement au dommage qui résulte d'une invalidité, celui qui
dérive de la perte de soutien ne doit pas être calculé de façon
concrète jusqu'au jour du jugement rendu en dernière instance
cantonale et de façon abstraite pour la période postérieure
seulement; le calcul abstrait doit être fait au jour du décès,
attendu que l'on ne sait pas si, sans l'accident, la victime aurait
vécu jusqu'à la date du jugement. Cela ne signifie pas que le juge
doive faire abstraction, dans l'appréciation de la perte de soutien,
des faits postérieurs à la mort du soutien. Mais il doit faire preuve
de retenue dans l'appréciation de ces faits (ATF 97 II 123 consid. 6
p. 131; voir aussi l'ATF 113 II 323 consid. 3a p. 333); il ne
saurait, en particulier, apprécier les circonstances existant au
moment du jugement de façon unilatérale, dans l'intérêt d'une seule
partie. Aussi le fait qu'une veuve, qui n'avait pas exercé d'activité
lucrative jusque-là, ait pris un emploi rémunéré après le décès de
son mari ne justifie-t-il pas à lui seul une réduction de l'indemnité
pour perte de soutien qu'elle réclame (ATF 59 II 461 consid. 2b p.
464); inversement, s'agissant du devoir qui est fait au lésé de
diminuer son dommage, il n'est pas déterminant qu'une veuve renonce,
pour des motifs d'ordre subjectif, à exercer


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.195/1993
Date de la décision : 08/10/1993
1re cour civile

Analyses

Perte de soutien; imputation des prestations d'assurance et du salaire de la veuve (art. 45 CO, art. 72 et 96 LCA, art. 41 LAA). 1. La LAA ne prévoyant pas de subrogation pour les prestations complémentaires de l'assureur, le problème de l'imputation de ces prestations doit être résolu au regard de la LCA. Critère de distinction entre assurance contre les dommages et assurance de sommes. Les prestations versées en cas de décès d'une personne appartiennent généralement - comme c'est ici le cas - à cette dernière catégorie (consid. 4). 2. Le fait qu'une veuve prenne un emploi rémunéré après le décès de son mari ne justifie pas à lui seul une réduction de l'indemnité pour perte de soutien qu'elle réclame (consid. 5).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1993-10-08;4c.195.1993 ?
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