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02/09/1993 | SUISSE | N°5C.210/1992

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 02 septembre 1993, 5C.210/1992


119 II 421

84. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 2 septembre 1993
dans la cause P. contre L. (recours en réforme)
A.- P. est propriétaire des parcelles contiguës nos 1872 et 2454,
la première d'une surface de 267 m2, comprenant une
habitation-grange-écurie (153 m2) et un jardin-place (114 m2), la
seconde d'une surface de 25 m2 en nature de passage.
Au début de 1983, P. a commandé à L. des travaux en vue de
transformer en habitation la grange située sur la parcelle no 1872.
Au mois de mai de la même année, elle a toutefois

interrompu ces
travaux. Sur requête de L., le conservateur du registre foncier a
pro...

119 II 421

84. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 2 septembre 1993
dans la cause P. contre L. (recours en réforme)
A.- P. est propriétaire des parcelles contiguës nos 1872 et 2454,
la première d'une surface de 267 m2, comprenant une
habitation-grange-écurie (153 m2) et un jardin-place (114 m2), la
seconde d'une surface de 25 m2 en nature de passage.
Au début de 1983, P. a commandé à L. des travaux en vue de
transformer en habitation la grange située sur la parcelle no 1872.
Au mois de mai de la même année, elle a toutefois interrompu ces
travaux. Sur requête de L., le conservateur du registre foncier a
procédé, le 24 août 1983, à l'inscription provisoire d'une hypothèque
légale des artisans et entrepreneurs sur ladite parcelle, à
concurrence de 18'300 francs.

B.- Par jugement du 24 septembre 1992, le Tribunal cantonal du
canton du Valais a condamné P. à verser à L. une somme de 17'476 fr.
50 avec intérêts à 5% l'an dès le 23 juillet 1983 et ordonné
l'inscription définitive de l'hypothèque légale sur les parcelles nos
1872 et 2454.
Le 24 août 1988, en cours de procédure, P. avait en effet requis le
conservateur du registre foncier, qui a donné suite à sa demande, de
modifier la limite séparant les deux biens-fonds. Depuis cette date,
la parcelle no 1872 ne comprend plus que la grange (43 m2) sur
laquelle les travaux ont porté et une place (3 m2); la parcelle no
2454 contient pour sa part une habitation (74 m2) et un jardin (172
m2). Ce changement de limite a eu pour effet de diminuer de 221 m2 la
superficie de l'ancienne parcelle no 1872.

C.- Agissant par la voie du recours en réforme au Tribunal fédéral,
P. a demandé que l'inscription définitive de l'hypothèque légale ne
grève que la parcelle no 1872.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours dans la mesure où il était
recevable et a confirmé le jugement attaqué.
Extrait des considérants:
2.- Selon l'art. 837 al. 1 ch. 3 CC, les artisans et entrepreneurs
employés à des bâtiments ou autres ouvrages peuvent requérir
l'inscription d'une hypothèque légale sur l'immeuble pour lequel ils
ont fourni des matériaux et du travail ou du travail seulement, en
garantie de leurs créances contre le propriétaire ou un entrepreneur.
Il ressort de cette disposition que l'objet du droit de gage est
constitué par l'immeuble sur lequel ont porté les travaux du
créancier qui demande l'inscription de l'hypothèque légale
(PAUL-HENRI STEINAUER, Les droits réels, t. 3, Berne 1992, p. 216 n.
2874, ainsi que les auteurs cités, notamment RAINER SCHUMACHER, Das
Bauhandwerkerpfandrecht, 2e éd. 1982, no 315 et DIETER ZOBL, Das
Bauhandwerkerpfandrecht de lege lata und de lege ferenda, in RDS
101/1982 II, p. 120). L'étendue de la garantie se détermine d'après
les règles générales des art. 805 ss (STEINAUER, op.cit., p. 216 n.
2874e); ainsi, le gage frappe tout l'immeuble avec ses parties
intégrantes et ses accessoires (art. 805 al. 1 CC). Il n'est pas
limité à la seule plus-value des travaux effectués par l'entrepreneur
qui requiert l'inscription du droit de gage. Il porte sur la valeur
économique de tout l'immeuble, y compris celle du terrain
(SCHUMACHER, op.cit., nos 317 et 322). La plus-value résultant des
travaux de l'entrepreneur au bénéfice d'une hypothèque légale n'entre
en considération que pour déterminer l'étendue du privilège dont
celui-ci jouit, en cas de réalisation du gage, par rapport aux autres
créanciers de rang antérieur (art. 841 CC).
L'hypothèque des artisans et entrepreneurs est une hypothèque
légale indirecte dont l'inscription produit les effets ordinaires du
droit de gage immobilier en général et de l'hypothèque en
particulier. Les dispositions générales des art. 824 à 835 CC lui
sont applicables (SCHUMACHER, op.cit., no 325). Ainsi, si une partie
de l'immeuble grevé est vendue, le gage doit en principe être reporté
proportionnellement à la valeur des différentes nouvelles parcelles
(art. 833 al. 1 CC; ATF 68 II 200). En revanche, si les biens-fonds
issus de la division restent dans la propriété de la même personne ou
si les propriétaires des nouvelles parcelles s'engagent à payer la
totalité de la dette garantie comme débiteurs solidaires de celle-ci,
le droit de gage doit en principe être reporté dans sa totalité sur
tous les nouveaux immeubles (STEINAUER, op.cit., p. 110 no 2660a, p.
112 no 2664a et p. 136 nos 2708 et 2709; art. 87 al. 1, 1re phrase,
ORF [RS 211.432.1]). Dans cette seconde hypothèse, il y a
constitution d'un droit de gage collectif, ce qui est admissible
(art. 798 al. 1 CC). Cette solution protège
3.- Le Tribunal cantonal a considéré que la modification de limite
entre les deux parcelles contiguës propriété de la recourante,
intervenue en cours de procédure, correspondait à une division de
l'immeuble grevé et que la règle générale relative au parcellement
(art. 833 CC et 87 ORF) devait être appliquée à cette opération;
comme les nouvelles parcelles issues de la division appartenaient à
la même propriétaire, le droit de gage ne devait pas être réparti,
mais reporté sur chaque nouveau bien-fonds. Au surplus, le procédé en
cause constituait un abus de droit, car il ne pouvait avoir d'autre
but que de diminuer la garantie de l'entrepreneur.
La recourante fait grief au Tribunal cantonal de n'avoir pas
examiné "avec le détail voulu" certaines pièces du dossier, ce qui
l'aurait conduit à retenir à tort qu'elle avait l'intention de
diminuer les garanties accordées à l'entrepreneur. Elle soutient en
outre que, l'hypothèque légale des artisans et entrepreneurs étant
intimement liée à la plus-value apportée à l'immeuble par les
travaux, le droit de gage ne devrait porter que sur la parcelle ayant
bénéficié de la plus-value, dès lors que celle-ci est définie
juridiquement. Admettre le contraire reviendrait à donner à
l'entrepreneur la possibilité de réaliser les biens-fonds grevés pour
une valeur dépassant le montant de l'hypothèque.
a) Lorsqu'elle reproche au premier juge de n'avoir "pas examiné,
dans le détail voulu, les pièces justificatives qui ont permis au
conservateur du registre foncier de constituer les deux nouvelles
parcelles"


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.210/1992
Date de la décision : 02/09/1993
2e cour civile

Analyses

Hypothèque des artisans et entrepreneurs (art. 837 al. 1 ch. 3 CC). Parcellement (art. 833 CC et 87 ORF). Objet et effets de l'hypothèque légale. L'interdiction de l'hypothèque légale collective requise en raison de travaux effectués sur plusieurs immeubles appartenant au même propriétaire ne s'applique pas en cas de division ou d'agrandissement de la parcelle postérieurement à l'inscription du droit de gage (consid. 2). Il convient alors, s'il y a aliénation, de répartir la garantie proportionnellement entre les divers biens-fonds ou, si ceux-ci restent en main du même propriétaire, de la reporter sur les nouveaux immeubles (consid. 3).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1993-09-02;5c.210.1992 ?
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