119 V 271
38. Arrêt du 25 mai 1993 dans la cause U. contre Caisse cantonale
neuchâteloise de compensation et Tribunal administratif du canton de
Neuchâtel
A.- Astrid U. bénéficie d'une demi-rente de l'assurance-invalidité
depuis le 1er juin 1987 et de prestations complémentaires depuis le
1er juin 1988.
Au mois de juin 1992, la Caisse cantonale neuchâteloise de
compensation (ci-après: la caisse) apprit qu'un changement était
intervenu dans la situation économique de son assurée: cette dernière
n'exerçait plus d'activité lucrative et percevait des indemnités
journalières de l'assurance-chômage pour un montant de 12'460 francs
par an.
La caisse procéda alors à une révision du cas et, par décision du
26 juin 1992, elle réduisit le montant mensuel de la prestation
complémentaire de 830 à 566 francs, avec effet au 1er juillet
suivant. Dans le calcul du revenu annuel déterminant, la caisse prit
en considération le montant total des indemnités de chômage,
conformément aux directives édictées à ce sujet par l'Office fédéral
des assurances sociales (ci-après: l'OFAS); à ce montant, elle
ajouta, au titre de revenu de la fortune mobilière, une somme de 263
francs correspondant au rendement hypothétique de la valeur de rachat
- 5'000 francs - d'une assurance sur la vie souscrite par l'assurée.
B.- Astrid U. recourut contre cette décision devant le Tribunal
administratif du canton de Neuchâtel. Elle conclut à l'annulation de
Considérant en droit:
1.- a) Aux termes de l'art. 3 al. 1 LPC, le revenu déterminant
pour les prestations complémentaires comprend notamment les
ressources en espèces ou en nature provenant de l'exercice d'une
activité lucrative (let. a), le produit de la fortune mobilière et
immobilière ainsi qu'une part de la fortune nette dans la mesure où
elle dépasse certaines limites (let. b), les rentes, pensions et
autres prestations périodiques (let. c), les ressources et parts de
fortune dont un ayant droit se dessaisit (let. f).
b) Conformément à l'al. 2 de la même disposition, une somme
forfaitaire est déduite du revenu annuel provenant de l'exercice
d'une activité lucrative et le solde n'est pris en compte qu'à raison
des deux tiers; il s'agit là du revenu dit privilégié.
2.- En l'espèce, le litige porte sur le point de savoir si c'est à
bon droit que la caisse et les premiers juges ont d'une part nié la
qualification de revenu privilégié des indemnités de chômage et
d'autre part assimilé le rendement hypothétique produit par la valeur
de rachat d'une assurance sur la vie à un revenu de la fortune
mobilière.
3.- a) L'art. 3 al. 2 LPC ne mentionne expressément que le revenu
provenant de l'exercice d'une activité lucrative.
Une prise en compte de prestations d'assurance en tant que revenu
privilégié irait donc manifestement au-delà de ce qui ressort d'une
interprétation strictement littérale de cette disposition.
4.- Quant au rendement hypothétique de la valeur de rachat de
l'assurance-vie souscrite par la recourante, c'est à tort qu'il en a
été tenu compte comme produit de la fortune mobilière au sens de
l'art. 3 al. 1 let. b LPC.
a) Cette manière de procéder révèle une méconnaissance des
propriétés actuarielles des assurances sur la vie: dans ces
assurances, en particulier celles pour lesquelles il est certain que
l'événement assuré se réalisera, et qui ont par conséquent une valeur
de rachat légale (selon l'art. 90 al. 2 LCA), il est tenu compte,
dans la détermination de la prime, de l'intérêt produit par la
réserve mathématique; au contraire toutefois de ce qui se produit
pour les comptes d'épargne bancaires, cet intérêt n'est pas versé
périodiquement au preneur d'assurance, mais est obligatoirement
accumulé auprès de l'assureur: le titulaire du contrat d'assurance -
ou l'ayant droit - n'en bénéficie effectivement qu'à l'échéance du
contrat. Il est par conséquent erroné de tenir compte, dans le revenu
de la fortune mobilière d'un bénéficiaire de prestations
complémentaires, des intérêts produits par la réserve mathématique ou
par la valeur de rachat (qui constitue une fraction de celle-ci) au
titre de "rendement hypothétique" d'une assurance sur la vie.
L'on peut encore noter, bien que cela ne soit pas déterminant,
qu'en droit fiscal les intérêts et participations aux excédents
provenant d'assurances sur la vie ne sont pas davantage imposés comme
revenu de la fortune mobilière.
b) Il convient par ailleurs de relever que la non-perception des
intérêts pendant la durée du contrat ne constitue à l'évidence pas un
dessaisissement au sens de l'art. 3 al. 1 let. f LPC: l'assuré ne
renonce pas à ces intérêts, dès lors qu'il les touchera intégralement
à l'échéance de l'assurance.
Par conséquent, ces intérêts n'avaient pas à être inclus dans les
revenus de l'assurée; le recours se révèle donc fondé sur ce point et
il y a lieu de renvoyer le dossier de la cause à l'administration
pour qu'elle fixe le revenu déterminant conformément au présent
considérant.