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06/05/1993 | SUISSE | N°4P.212/1992

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 mai 1993, 4P.212/1992


119 Ia 81

13. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 6 mai 1993
dans la cause A., société en nom collectif, contre Commission
cantonale d'arbitrage en matière de conflits du travail du canton du
Valais (recours de droit public)
A.- Le 8 mai 1991, Dame T. s'est adressée au Service social de
protection des travailleurs et des relations du travail du canton du
Valais (ci-après: le Service) au sujet du conflit l'opposant à son
employeur, la société en nom collectif A. Elle a requis
l'intervention de la Commission cantonale d

'arbitrage en matière de
conflits du travail (ci-après: la Commission d'arbitrage), ...

119 Ia 81

13. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 6 mai 1993
dans la cause A., société en nom collectif, contre Commission
cantonale d'arbitrage en matière de conflits du travail du canton du
Valais (recours de droit public)
A.- Le 8 mai 1991, Dame T. s'est adressée au Service social de
protection des travailleurs et des relations du travail du canton du
Valais (ci-après: le Service) au sujet du conflit l'opposant à son
employeur, la société en nom collectif A. Elle a requis
l'intervention de la Commission cantonale d'arbitrage en matière de
conflits du travail (ci-après: la Commission d'arbitrage), en signant
un formulaire officiel dûment rempli à la main par le fonctionnaire
B. qui la recevait. Ce fonctionnaire a cité les parties pour une
audience de conciliation qui s'est tenue sous son autorité le 17 juin
1991 et n'a pas abouti. Il a conduit l'instruction puis convoqué les
parties pour le débat final fixé au 22 octobre 1991 devant la
Commission d'arbitrage dont il a assumé le greffe. Dans sa décision
rendue à l'issue des débats, la Commission d'arbitrage a rejeté les
exceptions préjudicielles de la défenderesse concernant
l'indépendance de la Commission d'arbitrage et la récusation du
greffier. Elle a condamné la défenderesse à payer d'une part à la
demanderesse un montant de 9'183.10 francs et d'autre part à la
Caisse publique cantonale valaisanne de chômage un montant de
6'124.95 francs avec intérêts à 5% l'an dès le 30 septembre 1991.
Le Tribunal cantonal du Valais a déclaré irrecevable l'appel
interjeté par la société A. contre cette décision.
Simultanément à l'appel cantonal, la société A. a formé un recours
de droit public dans lequel elle conclut à l'annulation de la
décision rendue le 22 octobre 1991 par la Commission d'arbitrage.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours en ce qui concerne le grief
tiré de la violation de l'art. 6 par. 1 CEDH.
Extrait des considérants:
1.- a) Instituée par les art. 29 à 34 de la loi valaisanne du 16
novembre 1966 sur le travail (RSV no 1751; LTr), la Commission
d'arbitrage est compétente pour trancher les contestations de droit
civil résultant du contrat de travail soumises à la procédure sommaire
3.- La recourante considère que la Commission d'arbitrage ne
répondrait pas aux exigences du droit conventionnel à cause de sa
subordination hiérarchique au gouvernement cantonal qui en désigne
les membres, et du rôle joué par son greffier dans le déroulement de
la procédure.
Aux termes de l'art. 6 par. 1 CEDH, toute personne a droit à ce que
sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai
raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la
loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et
obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute
accusation en matière pénale dirigée contre elle.
Est un "tribunal", au sens de cette norme, une autorité qui se
caractérise par son rôle juridictionnel, consistant à résoudre le
litige sur la base de normes juridiques à l'issue d'une procédure
organisée (ATF 115 Ia 186 consid. 4a, et les arrêts cités; cf. aussi
ACEDH Sramek du 22 octobre 1984, Série A, vol. 84 par. 36).
L'institution de tribunaux spéciaux n'est pas en soi contraire à
l'art. 6 par. 1 CEDH, pour autant que leur compétence et leur
organisation sont régies par un arrêté de portée générale et que des
motifs objectifs justifient leur mise en oeuvre et leur composition
(ATF 117 Ia 381 consid. 4b).
L'indépendance et l'impartialité à l'égard des autres pouvoirs
d'Etat et des parties que requiert le droit conventionnel de même que
l'art. 58 Cst. (ATF 115 Ia 187 consid. 4b, 114 Ia 54) doivent être
favorisées par des règles organiques, telles que le statut personnel
des membres de la juridiction concernée et les règles de procédure
qu'elle doit suivre pour rendre ses décisions (ACEDH Belilos, du 29
avril 1988, Série A, vol. 132 par. 64, Langborger, du 22 juin 1989,
Série A, vol. 155 par. 32). Le tribunal doit statuer sans recevoir
4.- Il convient d'examiner, en premier lieu, si le système établi
par le législateur valaisan aux art. 29 à 34 LTr répond à ces
exigences et, en second lieu, si celles-ci ont été respectées en
l'espèce. Ces garanties sont applicables au litige dont le règlement
est prévu dans ces dispositions du droit cantonal, car les différends
relatifs à la résiliation d'un contrat de travail portent sur des
droits de caractère civil au sens du droit conventionnel (ACEDH
Bucholz du 6 mai 1981, Série A, vol. 42 par. 46), et l'application de
l'art. 6 par. 1 CEDH en Suisse ne fait plus l'objet d'aucune réserve
(arrêt F., du 17 décembre 1992, destiné à la publication).
a) La Commission d'arbitrage est composée d'un président, juriste
de formation, d'un assesseur patronal et d'un assesseur ouvrier,
ainsi que de trois suppléants. Il s'agit là d'un tribunal spécial
établi par la loi pour trancher les contestations qui sont portées
devant lui suivant une procédure orale et accélérée et en principe
dans les trente jours. Nul ne prétend que la présence, aux côtés du
président juriste, de deux assesseurs proposés respectivement par les
milieux d'employeurs et d'employés soit de nature à porter atteinte à
l'indépendance et à l'impartialité de cette juridiction. Les membres
de celle-ci sont nommés par le Conseil d'Etat, et cela pour la
période administrative de quatre ans. Ce mode de nomination et la
soumission à réélection au terme d'un délai relativement court ne
suffisent pas pour conclure à la subordination de la Commission
d'arbitrage à l'égard du Conseil d'Etat. On doit en effet présumer la
capacité des membres d'un tribunal de s'élever au-dessus de telles
contingences lorsqu'ils sont appelés à rendre des décisions concrètes
dans l'exercice de leur charge. Au demeurant, l'Etat n'est partie à
la procédure. Qu'il soit investi des tâches de protection des
travailleurs n'est nullement décisif puisque la Commission
d'arbitrage statue en toute indépendance, sans recevoir
d'instructions et en appréciant librement les questions pertinentes
de fait et de droit qui se posent à elle (art. 32 al. 6 LTr). Il est,
partant, sans importance qu'elle ait son siège dans les locaux du
Service de protection des travailleurs, que ses décisions soient
rédigées sur un papier portant l'en-tête du Département compétent
dans ce domaine et que son compte bancaire soit le même que celui de
ce dernier. Ce sont là des modalités pratiques d'organisation dans
lesquelles on ne saurait voir un indice déterminant d'une
subordination quelconque dans l'exercice de tâches juridictionnelles.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.212/1992
Date de la décision : 06/05/1993
1re cour civile

Analyses

Art. 6 par. 1 CEDH; art. 29 ss de la loi valaisanne sur le travail (LTr). 1. Le recours de droit public est recevable en l'espèce (consid. 1a). 2. Notion de "tribunal indépendant et impartial" au sens de l'art. 6 par. 1 CEDH (consid. 3). 3. La Commission d'arbitrage est un tribunal spécial qui répond aux exigences de l'art. 6 par. 1 CEDH du point de vue de sa composition, de la désignation de ses membres et de son organisation (consid. 4a). 4. En l'espèce, l'art. 6 par. 1 CEDH n'a pas été violé dans la conduite de la procédure; en particulier, le rôle joué par le greffier n'a pas porté atteinte à l'indépendance et à l'impartialité de la Commission d'arbitrage (consid. 4b).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1993-05-06;4p.212.1992 ?
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