119 Ib 56
6. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 8 mars 1993
dans la cause Hoirs de Ferdinand Marcos contre République des
Philippines et Office fédéral de la police (recours de droit
administratif)
A.- Dans le cadre d'une procédure d'entraide judiciaire ouverte à
la demande de la République des Philippines et concernant les avoirs
en Suisse de l'ex-président Ferdinand Marcos (décédé le 28 septembre
1989), l'Office fédéral de la police (ci-après l'OFP) a, le 23 mai
1991, désigné le canton de Zurich comme canton directeur au sens de
l'art. 80 EIMP, pour toutes les décisions restant à prendre
postérieurement à l'arrêt rendu dans cette cause le 21 décembre 1990
par le Tribunal fédéral (ATF 116 Ib 452). L'OFP a considéré que
l'exécution de la demande d'entraide nécessitait des investigations
dans plusieurs cantons, soit Fribourg, Genève et Zurich, et qu'il
convenait de simplifier et d'accélérer la procédure d'entraide.
Par lettre du 30 mai 1991, l'avocat à Genève des hoirs de feu
Ferdinand Marcos (soit Imelda Marcos, Ferdinand et Maria Victoria
Irène Marcos, ci-après: les hoirs Marcos) a déclaré former opposition
contre cette décision.
Le 13 novembre 1992, l'OFP a déclaré l'opposition irrecevable: des
procurations suffisantes n'avaient pas été déposées; par ailleurs,
les recourants n'avaient, malgré les demandes répétées de l'OFP, pas
indiqué en quoi résidait leur intérêt à s'opposer à la décision
attaquée; leur refus de collaborer sur ces deux points suffisait à
rendre irrecevable l'opposition, en application de l'art. 13 al. 2
PA. Cette solution s'imposait de toute façon, car l'opposition
n'était justifiée par aucun intérêt digne de protection. Cette
décision mentionne comme voie de droit le recours administratif
auprès du Département fédéral de justice et police.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, les hoirs
Marcos demandent au Tribunal fédéral d'annuler cette dernière
décision et celle du 23 mai 1991. Les hoirs Marcos ont également
interjeté un recours administratif auprès du Département fédéral de
justice et police.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours au sens des considérants.
Considérant en droit:
1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la
recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 118 Ib 139 consid.
2 et les arrêts cités).
a) Selon l'art. 29 al. 1 OJ, les mandataires doivent justifier de
leurs pouvoirs par une procuration jointe au dossier; la procuration
peut être exigée en tout temps. Une communauté héréditaire n'ayant pas
2.- a) Selon l'art. 24 al. 1 EIMP, quiconque est touché par une
mesure de l'Office fédéral et a un intérêt digne de protection à ce
qu'elle soit modifiée ou annulée peut former opposition. Cette
disposition a la même teneur que les art. 103 let. a OJ et 48 let. a
PA; elle doit être interprétée de la même manière. Selon la
jurisprudence, ni l'art. 103 let. a OJ, ni l'art. 48 let. a PA
n'exigent du recourant qu'il puisse se prévaloir d'un intérêt
juridiquement protégé; point n'est besoin qu'il soit affecté dans ses
droits ou ses obligations: l'essentiel est qu'il soit concrètement
touché par la décision attaquée. Il peut l'être de manière
quelconque, matériellement aussi bien que juridiquement (ATF 104 Ib
317 consid. 3b). La qualité pour recourir est donnée, au regard de
ces dispositions, au justiciable touché plus que quiconque ou que la
généralité des administrés dans ses intérêts
3.- Les recourants se plaignent d'une violation de l'art. 80 EIMP,
disposition dont la teneur est la suivante:
"Si une demande nécessite des investigations dans plusieurs
cantons,
l'Office fédéral peut charger l'autorité compétente de l'un d'entre
eux de
conduire les opérations. Les articles 352 à 355 du code pénal
s'appliquent
par analogie."
a) Ils font valoir que les investigations nécessitées par la
demande d'entraide ont déjà été exécutées, la seule question encore
litigieuse concernant le respect, par l'Etat requérant, des
conditions fixées pour la remise des avoirs bloqués en Suisse. Les
conditions d'application de l'art. 80 EIMP ne seraient donc pas
réalisées.
aa) Contrairement à ce que soutiennent les recourants - et à ce
qu'une interprétation strictement littérale de l'art. 80 EIMP
pourrait laisser penser -, la possibilité de désigner un canton
directeur n'est pas limitée aux seuls cas dans lesquels des
investigations proprement dites doivent être menées. Le but poursuivi
par le législateur lors de l'adoption de l'art. 80 EIMP n'est pas
seulement, comme le soutiennent les recourants, de coordonner les
recherches de preuves dans les différents cantons concernés, mais,
plus généralement, de simplifier l'ensemble de la procédure
d'entraide, en évitant notamment des décisions contradictoires (FF
1976 II 471 ad art. 77 du projet de loi; ATF 117 Ib 82 consid. 3c
bb). L'autorité compétente du canton directeur statue donc sur la
question de l'entrée en matière au sens de l'art. 79 al. 1 EIMP (ATF
117 Ib 73 consid. 3); elle dirige l'exécution des mesures d'entraide
sollicitées (investigations), que les cantons concernés exécutent
conformément à leur propre droit de procédure (art. 355 al. 2 CP
relatif à l'entraide intercantonale, auquel