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08/02/1993 | SUISSE | N°4C.213/1992

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 08 février 1993, 4C.213/1992


119 II 51

13. Extrait de l'arrêt de la 1re Cour civile du 8 février 1993 dans
la cause Cable News Network Inc. (CNN) contre Société anonyme du
Grand Casino (recours en réforme)
A.- Cable News Network Inc. (ci-après: CNN), société de droit
américain ayant son siège dans l'Etat de Géorgie, distribue à
l'échelle internationale un programme de télévision conçu par elle et
consistant en la diffusion 24 heures sur 24 d'informations relevant
de tous les domaines de l'actualité ("CNN International"). Ce
programme est transmis depuis l

es Etats-Unis au moyen d'un satellite
de télécommunication "Intelsat". En Europe, il est dis...

119 II 51

13. Extrait de l'arrêt de la 1re Cour civile du 8 février 1993 dans
la cause Cable News Network Inc. (CNN) contre Société anonyme du
Grand Casino (recours en réforme)
A.- Cable News Network Inc. (ci-après: CNN), société de droit
américain ayant son siège dans l'Etat de Géorgie, distribue à
l'échelle internationale un programme de télévision conçu par elle et
consistant en la diffusion 24 heures sur 24 d'informations relevant
de tous les domaines de l'actualité ("CNN International"). Ce
programme est transmis depuis les Etats-Unis au moyen d'un satellite
de télécommunication "Intelsat". En Europe, il est distribué sous
licence par CNN International Sales Ltd, à Londres, qui le met à la
disposition des exploitants de réseaux câblés afin qu'ils en fassent
bénéficier gratuitement l'ensemble de leurs abonnés, à l'exception
notamment des hôtels 3 à 5 étoiles pour lesquels ce service est
assuré moyennant finance.
La Société anonyme du Grand Casino (ci-après: SAGC) exploite
l'hôtel "Noga Hilton" à Genève. Elle a refusé de payer quoi que ce
soit pour la réception du programme précité. Télégenève S.A., qui
gère le réseau câblé de la commune de Genève, a alors brouillé ce
programme. Par la suite, SAGC a fait installer, sur le toit de
l'hôtel, une antenne parabolique qui lui permet de capter le
programme "CNN International" et de le diffuser par fil dans les 413
chambres du "Noga Hilton".

B.- Le 16 mai 1991, CNN a introduit, contre SAGC, une action fondée
sur le droit d'auteur. Elle a conclu à ce qu'interdiction fût faite à
la défenderesse de diffuser le programme "CNN International" et a
réclamé en outre des dommages-intérêts ainsi que la publication du
jugement.
La défenderesse a conclu à libération.
Par arrêt du 15 mai 1992, la Cour de justice civile du canton de
Genève a rejeté l'action.

C.- La demanderesse interjette un recours en réforme au Tribunal
fédéral. Elle conclut à l'admission de son action et,
subsidiairement, au renvoi de la cause à la Cour de justice pour
qu'elle complète ses constatations de fait.
Le Tribunal fédéral rejette le recours, dans la mesure où il est
recevable, et confirme l'arrêt attaqué.
Extrait des considérants:
2.- a) L'art. 12 LDA (RS 231.1) accorde à l'auteur le droit
exclusif de radiodiffuser son oeuvre (al. 1 ch. 5) et de communiquer
publiquement, soit par fil, soit sans fil, l'oeuvre radiodiffusée,
lorsque cette communication est faite par un autre organisme que
celui d'origine (al. 1 ch. 6). A la radiodiffusion est assimilée la
communication publique de l'oeuvre par tout autre moyen servant à
diffuser les signes, les sons ou les images (al. 2). Celui qui viole
ce droit exclusif peut être poursuivi civilement et pénalement en
vertu de l'art. 42 al. 1 let. e et f LDA.
Le droit d'auteur garanti par la loi consiste également dans le
droit exclusif de réciter, représenter, exécuter ou exhiber l'oeuvre
publiquement ou de transmettre publiquement par fil la récitation, la
représentation, l'exécution ou l'exhibition de l'oeuvre (art. 12 al.
1 ch. 3 LDA). Sa violation peut aussi donner lieu à des poursuites
(art. 42 al. 1 let. c LDA).
Dans son argumentation subsidiaire, la Cour de justice, considérant
que la retransmission du programme "CNN International" dans les
chambres de l'hôtel exploité par la défenderesse devait être tenue
pour une communication publique par fil d'une oeuvre "radiodiffusée",
a examiné la violation alléguée du droit d'auteur au regard de l'art.
12 al. 1 ch. 6 LDA; elle a donc admis implicitement que la diffusion
de ce programme au moyen d'un satellite de télécommunication
"Intelsat" constituait une radiodiffusion au sens de l'art. 12 al. 1
ch. 5 et al. 2 LDA. La demanderesse n'est pas de cet avis; pour elle,
les caractéristiques dudit satellite, en particulier le fait que les
signaux émis par lui ne sont pas destinés au public en général,
suffisent à exclure la thèse soutenue par la cour cantonale et
justifient de lui préférer celle de la transmission publique par fil
de l'exécution de l'oeuvre, à laquelle la défenderesse aurait procédé
en violation du droit exclusif réservé à l'auteur par l'art. 12 al. 1
ch. 3 LDA. Ce raisonnement comporte, lui aussi, une prémisse
implicite voulant que l'adverbe "publiquement" n'ait pas la même
signification aux ch. 3 et 6 de l'art. 12 al. 1 LDA, plus précisément
que le caractère public d'une transmission par fil (ch. 3) doive être
admis plus facilement que le caractère public d'une communication par
fil (ch. 6), car, si telle n'était pas l'opinion de la demanderesse à
ce sujet, on ne comprendrait plus la portée du grief formulé par elle
dans ce cadre-là. Cependant, l'examen du bien-fondé de cette opinion
ne s'imposera que dans l'hypothèse où les actes incriminés ne
tomberaient pas sous
3.- a) L'art. 11bis al. 1 ch. 2 CB accorde à l'auteur le droit
exclusif d'autoriser toute communication publique de l'oeuvre
radiodiffusée, si celle-ci est assurée par un autre organisme que
celui d'origine. Les critères permettant de distinguer entre une
telle communication, qui peut être faite à l'aide d'un réseau câblé,
et une simple opération de réception des émissions, qui n'est pas
soumise au régime du droit exclusif de l'auteur, sont laissés à
l'appréciation des législations nationales (MASOUYÉ, op.cit., p. 80,
n. 10; SCHRICKER, op.cit., p. 48 et les références). Les Etats
auxquels s'applique la Convention de Berne n'ont pas fait le même
usage de cette liberté d'appréciation. Les principaux critères de
distinction utilisés par eux sont de nature quantitative, le nombre
de raccordements, fixé par la loi ou la jurisprudence, jouant à cet
égard un rôle décisif. Mais ce critère numérique subit de notables
variations de pays à pays: la loi autrichienne sur le droit d'auteur,
par exemple, dont la conformité avec la Convention de Berne est
d'ailleurs sujette à caution (DREIER, Kabelweiterleitung ...,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.213/1992
Date de la décision : 08/02/1993
1re cour civile

Analyses

Radiodiffusion par satellite et droit d'auteur (art. 12 al. 1 ch. 6 et al. 2 LDA; art. 11bis al. 1 ch. 1 et ch. 2 CB). 1. Constitue une radiodiffusion, au sens de l'art. 12 al. 2 LDA, l'envoi par tout satellite de signaux accessibles techniquement et financièrement au public en général et destinés à être reçus directement ou indirectement par lui (consid. 2). 2. La diffusion par fil, dans les chambres d'un hôtel, d'un programme de télévision étranger capté au moyen d'une antenne parabolique n'est pas une communication publique de l'oeuvre radiodiffusée, au sens de l'art. 12 al. 1 ch. 6 LDA, mais une simple opération de réception des émissions non soumise au régime du droit exclusif de l'auteur (consid. 3).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1993-02-08;4c.213.1992 ?
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