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19/01/1993 | SUISSE | N°4C.92/1992

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 janvier 1993, 4C.92/1992


119 II 23

7. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 19 janvier 1993 dans
la cause H. contre Caves Mövenpick S.A. (recours en réforme)
A.- Dès 1978 et jusqu'en mars 1984, X., directeur de Caves
Mövenpick S.A. (ci-après: Mövenpick), a créé un immense marché
parallèle de vins à l'insu de son employeur. Dans ce but, il
s'arrangeait pour que le libellé des chèques établis en faveur de
Mövenpick comporte aussi son nom afin de pouvoir les encaisser
lui-même.
Connaisseur des vins et client de Mövenpick, H. a, le 29 août 1983,r> passé deux conventions avec cette société par l'intermédiaire de X.
Dans chacune d'elles, H. ...

119 II 23

7. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 19 janvier 1993 dans
la cause H. contre Caves Mövenpick S.A. (recours en réforme)
A.- Dès 1978 et jusqu'en mars 1984, X., directeur de Caves
Mövenpick S.A. (ci-après: Mövenpick), a créé un immense marché
parallèle de vins à l'insu de son employeur. Dans ce but, il
s'arrangeait pour que le libellé des chèques établis en faveur de
Mövenpick comporte aussi son nom afin de pouvoir les encaisser
lui-même.
Connaisseur des vins et client de Mövenpick, H. a, le 29 août 1983,
passé deux conventions avec cette société par l'intermédiaire de X.
Dans chacune d'elles, H. s'engageait à acheter des vins pour plus de
100'000 francs (art. 1), à les déposer auprès de Mövenpick (art. 2)
tout en lui donnant le mandat de les vendre au prix d'achat majoré de
40% (art. 4); cette clause prévoyait, en outre, que:

"En cas de vente par Mövenpick à un acheteur à un prix dépassant
celui
figurant sur la facture + 40%, Mövenpick aura droit à une
commission de 5%
sur le profit supplémentaire réalisé par le déposant."

Pour Mövenpick, ces conventions ont été signées par X. et Y., alors
tous deux fondés de pouvoir avec signature collective à deux. Le même
jour, le frère de H. a passé une convention identique avec Mövenpick.
En réalité, les parties visaient un "placement financier", les
quantités et les prix étant secondaires, voire fantaisistes, car se
situant entre 15 et 29% en dessous du prix d'achat ou encore du prix
officiel de souscription pratiqué par Mövenpick. D'ailleurs, tous les
vins vendus par X. de cette même manière n'ont jamais été ni
commandés, ni achetés, ou livrés ou même individualisés par les
"acheteurs". H. a payé le prix des vins par remise d'un chèque
bancaire libellé à l'ordre de "Caves Mövenpick S.A., votre cellier,
X.". Ce dernier avait demandé à H. d'indiquer son nom à côté de la
mention du bénéficiaire. X. a encaissé ce chèque au guichet d'une
banque
Extrait des considérants:
3.- Contre la thèse soutenue par la défenderesse, la cour
cantonale a admis, en principe, la validité de la convention
litigieuse. Néanmoins, elle a considéré que cette dernière n'y était
pas engagée. En effet, dès lors que, s'il avait prêté à l'affaire
l'attention exigée par les circonstances, le demandeur aurait dû se
rendre compte des abus commis par les représentants de la
défenderesse, il n'était pas de bonne foi. Pour sa part, le demandeur
soutient le contraire et se plaint d'une violation de l'art. 3 al. 2
CC.
a) Aux termes de l'art. 3 al. 1 CC, la bonne foi est présumée.
Cette norme n'institue pas une véritable présomption, mais elle
constitue une simple règle sur le fardeau de la preuve: ce n'est pas
la bonne mais la mauvaise foi qui doit être prouvée (KUMMER, n. 354
ad art. 8 CC). La partie qui en a la charge peut ou détruire la
présomption de bonne foi en prouvant la connaissance du vice
juridique par la partie adverse et, par conséquent, sa mauvaise foi
ou admettre cette présomption, mais établir, en conformité de l'art.
3 al. 2 CC, que l'autre partie ne pouvait pas être de bonne foi dans
les circonstances particulières, même si elle l'était en réalité.
Autrement dit, la bonne foi, même si elle est admise en principe, ne
peut toutefois être invoquée si elle apparaît incompatible avec
l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de la partie
qui s'en prévaut (JÄGGI, n. 100/101 ad art. 3 CC).
b) En l'occurrence, selon les constatations souveraines de la cour
cantonale, la bonne foi du demandeur - en sa qualité de tiers
contractant - se pose moins dans le cadre d'un simple dépassement du
pouvoir de représentation que d'un véritable abus de ce pouvoir. En
effet, le représentant de la défenderesse a conclu l'affaire
litigieuse dans son propre intérêt et de façon délictueuse; dans ses
rapports avec le


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.92/1992
Date de la décision : 19/01/1993
1re cour civile

Analyses

Abus du pouvoir de représentation. Bonne foi du tiers (art. 3 CC). Lorsque le représentant ne se livre pas à un simple dépassement de son pouvoir de représentation, mais en abuse véritablement, en particulier lorsqu'il conclut une affaire uniquement dans son propre intérêt et au détriment du représenté, la bonne foi du tiers contractant doit exclusivement s'apprécier à la lumière de l'art. 3 al. 2 CC; mesure de l'attention exigée de la part du tiers.


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;1993-01-19;4c.92.1992 ?
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