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16/03/2009 | SéNéGAL | N°06

Sénégal | Arrêt n° 06 du 16 mars 2009 (Commission Electorale Nationale Autonome c/ Ministre Chargé de l’Intérieur )


Arrêt n° 06 du 16 mars 2009



LA COUR SUPRÊME,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

SUR LA RECEVABILITE DES MEMOIRES COMPLEMENTAIRES ET PIECES VERSES
AU DOSSIER :

Considérant que la CENA, après avoir déposé un recours le 20 février 2009, a, par le canal de deux
autres conseils à savoir Maître Cheikh Ahmadou Ndiaye et Maître Assane Dioma Ndiaye, déposé les 4
, 6 et 11 mars 2009 des mémoires complémentaires non communiqués à la partie adverse à savoir le
Ministre chargé de l’intérieur,

et accompagnés de pièces qui n’ont pas été produites devant la Cour
d’Appel ;

Considérant que l’arti...

Arrêt n° 06 du 16 mars 2009



LA COUR SUPRÊME,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

SUR LA RECEVABILITE DES MEMOIRES COMPLEMENTAIRES ET PIECES VERSES
AU DOSSIER :

Considérant que la CENA, après avoir déposé un recours le 20 février 2009, a, par le canal de deux
autres conseils à savoir Maître Cheikh Ahmadou Ndiaye et Maître Assane Dioma Ndiaye, déposé les 4
, 6 et 11 mars 2009 des mémoires complémentaires non communiqués à la partie adverse à savoir le
Ministre chargé de l’intérieur, et accompagnés de pièces qui n’ont pas été produites devant la Cour
d’Appel ;

Considérant que l’article 76 de la loi organique n° 2008-35 du 8 août 2008 sur la Cour suprême
détermine la procédure à suivre pour se pourvoir contre les décisions de la Cour d’Appel statuant sur
le contentieux des élections régionales, municipales et rurales et dispose en ses 1° et 2° que le pourvoi,
formé par simple requête enregistrée au greffe de la Cour suprême, est notifié dans les deux jours qui
suivent, par le greffier, à la partie adverse qui a un délai de 15 jours pour produire sa défense ;

Considérant qu’en l’espèce le recours de la CENA a été notifié au Ministre chargé de l’intérieur,
lequel a déposé un mémoire en défense le 26 février 2009 ;

Considérant que depuis cette date, l’affaire est en état d’être jugée conformément à la volonté du
législateur qui a prescrit des délais très brefs en matière électorale en instituant une procédure
d’urgence et sommaire dont l’aboutissement rapide ne doit pas être différé par la procédure de mise en
état ordinaire ;

Qu’il y a lieu, cela étant, d’écarter des débats les mémoires complémentaires et pièces déposés par les
conseils de la CENA ;

SUR LA RECEVABILITE DU RECOURS :

Considérant que le Ministre chargé de l’Intérieur conclut à titre principal à l’irrecevabilité de la
requête de la CENA au motif que celle-ci, en formant appel contre l’arrêt de la Cour d’Appel, a
méconnu la nature et l’objet de la saisine de la Cour suprême, qui se fait par un pourvoi en cassation ;

Considérant que la qualification donnée par une partie à son recours est sans effet sur la recevabilité
de celui-ci ;

Que le recours de la CENA, introduit dans les formes et délais légaux, doit être déclaré recevable ;

SUR LE BIEN FONDE DU RECOURS :

Considérant que la CENA, qui déclare exercer son recours sur le fondement de l’article L.10 du code
électoral, entend faire invalider les listes de candidature déposées par la coalition Sopi 2009 auprès des
autorités administratives de Ndoulo et de Ndindy en faisant observer qu’elle a régulièrement mis en
demeure lesdites autorités pour qu’elles prennent des mesures correctives suite à la parution des
arrêtés portant publication des listes de candidats aux élections locales du 22 mars 2009 malgré les
preuves irréfutables et unanimement constatées de la forclusion desdites listes ;

Considérant qu’elle entend établir la forclusion alléguée par le fait qu’il ne résulterait ni des
récépissés de dépôt de candidature dûment signés par les sous-préfets et visés par les contrôleurs de la
Commission Electorale Départementale Autonome (CEDA), ni des constatations de ses superviseurs
dépêchés dans lesdites préfectures que la coalition Sopi 2009 ait déposé ses listes dans les délais
légaux ;

Considérant que le Ministre chargé de l’Intérieur a, quant à lui, conclu au rejet du recours de la
CENA, en faisant valoir que celle-ci, sans articuler de griefs de violation de la loi ou de manque de
base légale, demande à la Cour de juger en fait, et non de vérifier si la loi électorale a été correctement
appliquée ;

Considérant que la CENA précise qu’elle entend, après avoir constaté des violations à la loi
électorale par les Sous-préfets de Ndindy et de Ndoulo, et après leur avoir adressé des mises en
demeure restées infructueuses, exercer les pouvoirs de dessaisissement et de substitution d’action que
lui confère la loi ;

Considérant que l’article L.10 du code électoral dispose que : « En cas de non-respect des
dispositions législatives et réglementaires relatives aux élections ou référendums par une autorité
administrative, la CENA lui enjoint de prendre les mesures de correction appropriées. Si l’autorité
administrative ne s’exécute pas, la CENA dispose du pouvoir de dessaisissement et de substitution
d’action dans le cadre des opérations électorales à l’égard de l’agent responsable, nonobstant son
pouvoir de saisine des juridictions compétentes » ;

Considérant que par cette disposition, le législateur a entendu renforcer la compétence et les pouvoirs
de la CENA, tout en faisant de la saisine des juridictions, une action subsidiaire ;

Qu’en effet, les pouvoirs de dessaisissement et de substitution d’action accordés à la CENA par la loi
électorale doivent être exercés en dehors de toute action judiciaire ;

Considérant que la CENA s’est bornée à adresser aux autorités administratives de Ndindy et de
Ndoulo des mises en demeure, sans réagir par la suite contre l’inaction de l’administration, en prenant,
comme les articles L.3 et L.10 lui en donnent le pouvoir, des décisions immédiatement exécutoires, de
rectification et de dessaisissement notamment ;

Considérant qu’en introduisant son recours devant les juridictions sans mettre en œuvre les pouvoirs
que lui donne la loi, la CENA n’a pas satisfait aux exigences de la loi électorale ;

Considérant que, surabondamment, il y a lieu de faire observer que le débat, élevé devant la Cour
d’Appel sur l’invalidation des listes de candidature déposées par la coalition Sopi 2009 auprès des
autorités administratives de Ndoulo et de Ndindy, reposait sur la preuve du dépôt desdites listes dans
les formes et délais légaux ;

Considérant que, pour rejeter le recours de la CENA, la Cour d’Appel a énoncé que, d’une part, dans
le rapport de la CENA, il est fait état de récépissés de dépôt que ni l’administration ni la CENA n’ont
versés aux débats et d’autre part, que l’arrêté préfectoral présente une régularité formelle que n’ont pu
combattre les déclarations non étayées par des éléments objectifs et probants versés aux dossiers ;

Qu’en statuant ainsi, la Cour d’Appel a suffisamment apprécié les éléments de preuve produits ainsi
que leur force probante ;

D’où il suit que le recours de la CENA est mal fondé ;

PAR CES MOTIFS :

Rejette le recours de la CENA comme mal fondé ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, Chambre administrative, en son audience publique
spéciale tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents :

Président : Fatou Habibatou DIALLO ; Conseillers : Ciré Aly BA, Mamadou Abdoulaye DIOUF,
Amadou Hamady DIALLO, Abdoulaye NDIAYE ; Rapporteur : Fatou Habibatou DIALLO ; Avocat
général : Abdourahmane DIOUF ; Avocat : El. Hadji GUISSÉ ; Greffier : Cheikh DIOP.


Synthèse
Formation : chambre administrative
Numéro d'arrêt : 06
Date de la décision : 16/03/2009

Analyses

EFFETS – DÉTERMINATION Selon les dispositions des articles 76-1 et 76-2 de la loi organique sur la Cour suprême le pourvoi contre les décisions de la Cour d’Appel statuant sur le contentieux des élections régionales, municipales et rurales est formé par requête enregistrée au greffe de la Cour suprême et notifié dans les deux jours qui suivent, par le greffier, à la partie adverse qui a d’un délai de 15 jours pour produire sa défense. Ainsi, dès que le défendeur, qui a reçu notification du pourvoi, a déposé un mémoire en défense, l’affaire est en état d’être jugée et par conséquent, les mémoires complémentaires et pièces déposés par le requérant, postérieurement à la mise en état et non communiqués à la partie adverse, doivent être écartés des débats. ÉLECTIONS – ÉLECTIONS RÉGIONALES, MUNICIPALES ET RURALES – CONTENTIEUX PRÉÉLECTORAL – COMPÉTENCE DE LA CENA – ACTION EN JUSTICE – CONDITIONS D’EXERCICE – POUVOIRS DE SUBSTITUTION D’ACTION ET DE DESSAISISSEMENT DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES – MISE EN ŒUVRE PRÉALABLE L’article L.10 du code électoral, qui dispose que : « En cas de non-respect des dispositions législatives et réglementaires relatives aux élections ou référendums par une autorité administrative, la CENA lui enjoint de prendre les mesures de correction appropriées. Si l’autorité administrative ne s’exécute pas, la CENA dispose du pouvoir de dessaisissement et de substitution d’action dans le cadre des opérations électorales à l’égard de l’agent responsable, nonobstant son pouvoir de saisine des juridictions compétentes », fait de la saisine des juridictions, une action subsidiaire. Ainsi, n’a pas satisfait aux exigences de la loi électorale la CENA qui, sans mettre en œuvre les pouvoirs que lui donne la loi, d’une part, s’est bornée à adresser aux autorités administratives des mises en demeure, sans réagir par la suite contre l’inaction de celles-ci, en prenant, comme les articles L.3 et L.10 lui en donnent le pouvoir, des décisions immédiatement exécutoires, de rectification et de dessaisissement notamment, et, d’autre part, s’est limitée à introduire un recours devant les juridictions.

ÉLECTIONS – ÉLECTIONS RÉGIONALES, MUNICIPALES ET RURALES – DÉCISION DE LA COUR D’APPEL – POURVOI – DÉLAIS DE MISE EN ÉTAT – EXPIRATION – EFFETS – DÉTERMINATION


Parties
Demandeurs : Commission Electorale Nationale Autonome
Défendeurs : Ministre Chargé de l’Intérieur

Origine de la décision
Date de l'import : 13/12/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme,.chambre.administrative;arret;2009-03-16;06 ?
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