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28/10/2008 | SéNéGAL | N°12

Sénégal | Arrêt n° 12 du 28 octobre 2008 (Société Buhan &Teisseire c/ État du Sénégal )


Arrêt n° 12 du 28 octobre 2008



LA COUR SUPRÊME,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

AU FOND :

Sur le moyen unique tiré de la violation de la loi :

– Sur la première branche du moyen tirée de la tardivité de la décision :

Considérant que la société Buhan & Teisseire reproche au Ministre du Travail, d’avoir violé la loi en
confirmant par son silence la décision de l’Inspecteur du Travail qui n’a pas été prise dans le délai
légal ;

Considérant qu’aux

termes des dispositions de l’article L.215 du code du travail « L’Inspecteur du
travail et de la Sécurité sociale do...

Arrêt n° 12 du 28 octobre 2008



LA COUR SUPRÊME,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

AU FOND :

Sur le moyen unique tiré de la violation de la loi :

– Sur la première branche du moyen tirée de la tardivité de la décision :

Considérant que la société Buhan & Teisseire reproche au Ministre du Travail, d’avoir violé la loi en
confirmant par son silence la décision de l’Inspecteur du Travail qui n’a pas été prise dans le délai
légal ;

Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article L.215 du code du travail « L’Inspecteur du
travail et de la Sécurité sociale doit rendre sa décision dans les quinze jours suivant le dépôt de la
demande d’autorisation de licenciement au bureau de l’Inspection de ressort. Le défaut de réponse
dans ce délai vaut autorisation, sauf dans le cas d’expertise où ledit délai est porté à un mois » ;

Considérant qu’il résulte de l’examen des pièces du dossier, que l’Inspecteur du Travail de Dakar,
qui a été saisi le 17 janvier 2007, avait par lettre du 1
er
février 2007 adressée à la direction de Buhan &
Teisseire, prorogé le délai de quinze (15) jours pour enquête complémentaire, et avait de nouveau
convoqué les parties à cet effet ;

Considérant que la finalité aussi bien de l’enquête que de l’expertise est d’éclairer celui qui l’ordonne
en vue de la prise de décision ;

Considérant que la requérante a participé à l’enquête ainsi diligentée et à l’issue de celle-ci en a tiré
la suite idoine ;

Qu’il y a lieu en conséquence de rejeter ce moyen comme mal fondé ;

– Sur la deuxième branche du moyen tirée de l’erreur manifeste d’appréciation :

Considérant que la requérante reproche au Ministre du Travail d’avoir fait une mauvaise appréciation
de faits clairement établis, notamment les manquements graves relatifs à la violation du mandat des
délégués, la menace de la survie de l’entreprise et le refus de prendre des demandes d’explication, tous
constitutifs de faute lourde ;

Considérant qu’une décision est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation lorsque
l’Administration s’est trompée grossièrement dans l’appréciation des faits qui ont motivé celle-ci ;

Considérant que le Ministre du Travail saisi par la requérante sur la base d’un recours hiérarchique
n’a pas répondu dans le délai prescrit, confirmant ainsi par son silence la décision de l’Inspecteur du
Travail en s’appropriant les motifs;



Considérant que l’Inspecteur du Travail a constaté, sans être démenti, que le port de brassard rouge,
l’organisation de sit-in, le dépôt de préavis de grève et la pétition faisaient partie d’un plan d’action
que le personnel de la société avait voté en assemblée générale le 9 novembre 2006;

Qu’en effet, la requérante n’a pas établi en quoi le port de brassard rouge pour manifester son
mécontentement, la menace d’organisation de sit-in, l’élaboration d’une pétition pour le départ du
Directeur Général contre qui sont élevés des griefs, et le refus de recevoir individuellement des
demandes d’explications précédemment envoyées collectivement au collège des délégués du
personnel, peuvent constituer des fautes lourdes de nature à justifier le licenciement de délégués du
personnel ;

Considérant que toutes ces activités étaient menées légalement par les délégués du personnel au sein
de l’entreprise pour réclamer de meilleures conditions de travail et ceci dans le cadre d’un mandat qui
leur a été confié par l’ensemble des travailleurs pour l’exécution du plan d’action;

Considérant que la requérante n’a nulle part soutenu et établi que ces activités excédaient leur mandat
de délégué du personnel et avaient eu une répercussion négative sur la marche de l’entreprise ;

Qu’il y a lieu en conséquence de rejeter cette deuxième branche du moyen tirée de l’erreur manifeste
d’appréciation comme mal fondée, l’administration ayant procédé à une exacte appréciation des faits
pour écarter la faute lourde, invoquée pour asseoir le licenciement ;

PAR CES MOTIFS :

Rejette le recours de la société Buhan & Teisseire formé contre la décision implicite de rejet du
Ministre du Travail suite au recours hiérarchique introduit contre la décision n° 0000525/ IRTSS/DK
du 16 février 2007 de l’Inspecteur du Travail de Dakar ;

Dit que l’amende consignée est acquise au Trésor public ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, Chambre administrative, en son audience publique
de vacation tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents :

Président : Fatou Habibatou DIALLO ; Conseillers : Mamadou Yakham LÉYE, Mamadou Abdoulaye
DIOUF, Amadou Hamady DIALLO, Abdoulaye NDIAYE ; Rapporteur : Mamadou Yakham LÉYE ;
Avocat général : Abdourahmane DIOUF ; Avocat : Guédel NDIAYE ; Greffier : Cheikh DIOP.


Synthèse
Formation : chambre administrative
Numéro d'arrêt : 12
Date de la décision : 28/10/2008

Analyses

ENQUÊTE Aux termes des dispositions de l’article L.215 du code du travail « L’Inspecteur du travail et de la Sécurité sociale doit rendre sa décision dans les quinze jours suivant le dépôt de la demande d’autorisation de licenciement au bureau de l’Inspection du ressort. Le défaut de réponse dans ce délai vaut autorisation, sauf dans le cas d’expertise où ledit délai est porté à un mois ». La finalité aussi bien de l’enquête que de l’expertise est d’éclairer celui qui l’ordonne en vue de la prise de décision. Ainsi, lorsque prorogeant le délai de quinze (15) jours pour enquête complémentaire, l’Inspecteur du Travail a de nouveau convoqué les parties, le requérant, qui y a participé, est mal fondé à reprocher au Ministre du Travail d’avoir violé la loi en confirmant, par son silence, la décision de l’Inspecteur du Travail qui n’aurait pas été prise dans le délai légal. DÉLÉGUÉ DU PERSONNEL – LICENCIEMENT – AUTORISATION – CONDITION – GRAVITÉ DE LA FAUTE – APPRÉCIATION – CONTRÔLE – OFFICE DU JUGE DÉLÉGUÉ DU PERSONNEL – LICENCIEMENT – AUTORISATION – CONDITION – FAUTE LOURDE – CONTRÔLE DE QUALIFICATION – OFFICE DU JUGE Une décision est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation lorsque l’Administration s’est trompée grossièrement dans l’appréciation des faits qui ont motivé celle-ci. En ne répondant pas dans le délai prescrit au recours hiérarchique, le Ministre du Travail confirme, par son silence, la décision de l’Inspecteur du Travail en s’appropriant les motifs. Ainsi, l’administration a procédé à une exacte appréciation des faits et écarté, à bon droit, la faute lourde invoquée pour asseoir le licenciement de délégués du personnel, lorsque l’employeur n’a pas établi en quoi le port de brassard rouge pour manifester son mécontentement, la menace d’organisation de sit-in, l’élaboration d’une pétition pour le départ du directeur général et le refus de recevoir individuellement des demandes d’explications précédemment envoyées à leur collectif correspondent à des activités excédant le mandat de délégué du personnel et ayant eu une répercussion négative sur la marche de l’entreprise.

DÉLÉGUÉ DU PERSONNEL – LICENCIEMENT – AUTORISATION DE L’INSPECTEUR DU TRAVAIL – DEMANDE – DÉLAI DE RÉPONSE – PROROGATION – EXPERTISE OU ENQUÊTE


Parties
Demandeurs : Société Buhan &Teisseire
Défendeurs : État du Sénégal

Origine de la décision
Date de l'import : 13/12/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme,.chambre.administrative;arret;2008-10-28;12 ?
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