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22/04/2021 | SéNéGAL | N°21-21

Sénégal | Sénégal, Cour suprême, 22 avril 2021, 21-21


Texte (pseudonymisé)
REPUBLIQUE DU SENEGAL AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS ¤¤¤¤¤ COUR SUPREME CHAMBRE ADMINISTRATIVE ¤¤¤¤¤ AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI VINGT DEUX AVRIL DE L’AN DEUX MILLE VINGT UN ¤¤¤¤¤ ENTRE :
La Société Sénégal Handling Services SA dite SHS, prise en la personne de son représentant légal, sis au 15 Ak Ae Ac virage à Dakar, mais ayant domicile élu en l’étude de Maître Boukounta Diallo, avocat à la Cour, Place de l’Indépendance à Ah ;
DEMANDERESSE,
D’une part,
ET : L’État du Sénégal pris en la personne de Monsieur l’agent judiciaire de

l’État, en ses bureaux sis au Ministère de l’Économie et des Finances, building Peytavin, Avenue de la R...

REPUBLIQUE DU SENEGAL AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS ¤¤¤¤¤ COUR SUPREME CHAMBRE ADMINISTRATIVE ¤¤¤¤¤ AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI VINGT DEUX AVRIL DE L’AN DEUX MILLE VINGT UN ¤¤¤¤¤ ENTRE :
La Société Sénégal Handling Services SA dite SHS, prise en la personne de son représentant légal, sis au 15 Ak Ae Ac virage à Dakar, mais ayant domicile élu en l’étude de Maître Boukounta Diallo, avocat à la Cour, Place de l’Indépendance à Ah ;
DEMANDERESSE,
D’une part,
ET : L’État du Sénégal pris en la personne de Monsieur l’agent judiciaire de l’État, en ses bureaux sis au Ministère de l’Économie et des Finances, building Peytavin, Avenue de la République x Avenue Carde à Ah ;
A :
D’autre part,
Vu la requête reçue le 15 novembre 2017 au greffe central par laquelle la société Sénégal Handling Services SA dite SHS, élisant domicile … l’étude de Maitre Boukounta Diallo, avocat à la Cour, sollicite l’annulation du décret n°2017-1606 du 14 septembre 2017 portant réglementation de l’activité d’assistance en escale dans les aéroports du Sénégal, des arrêtés n°19404 du18 septembre 2017 relatif aux modalités d’exercice de l’activité d’assistance en escale dans les aéroports du Sénégal et n°19419/MTADIA/CAB du 20 septembre 2017 portant agrément de AIBD Assistance Services SA « 2AS » comme société d’assistance ;
Vu les actes additionnels au traité de la CEDEAO.A/SA.1/12/08 portant adoption des règles communautaires de concurrence et A/SA du 9 février 2012 fixant les règles communes relatives Arrêt n°21 du 22 avril 2021 ¤¤¤¤¤ Administratif ¤¤¤¤¤ Affaire n°J/425/RG/17 15/11/17
Société Sénégal Handling Services SA dite SHS (Me Boucounta Diallo)
CONTRE - Etat du Sénégal (AJE)
RAPPORTEUR Oumar Gaye
PARQUET B Ousmane Diagne AUDIENCE 22 avril 2021 PRESENTS Abdoulaye Ndiaye, président,
Oumar Gaye,
Adama Ndiaye,
Mbacké Fall,
Idrissa Sow, conseillers,
Cheikh Diop, greffier MATIERE Administrative RECOURS Annulation aux exemptions concernant certaines catégories d'accords, de décisions, de pratiques relatives à la concurrence dans les services de transport aérien dans les États membres de la CEDEAO ;
Vu la Directive n°01/2003/CM /UEMOA du 20 mars 2003 relative à l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports des pays membres de l’UEMOA ;
Vu la loi organique n°2017-09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême ;
Vu l’exploit du 28 décembre 2017 de Maitre Abdoulaye Ba, huissier de justice à Dakar, portant signification de la requête ;
Vu le mémoire de l’État du Sénégal reçu le 1er mars 2018 au greffe ;
Vu les lettres des 23 avril et 1er décembre 2020 du président de la chambre administrative ;
Vu la lettre réponse du 11 janvier 2021 du Ministre chargé des Transports aériens;
Vu les actes attaqués ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Ouï Monsieur Oumar Gaye, conseiller, en son rapport ; Ouï Monsieur Ousmane Diagne, avocat général, en ses conclusions tendant à l’annulation ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que par note de service du 24 mai 2017 le Ministre chargé des Transports aériens a mis en place un comité ad hoc de réflexion pour faire des propositions en vue de la prise en charge de l'assistance au sol au niveau de l’Ag Ab Aa Ad (AIBD);  Qu’il a informé, par lettre n° 839/MTTA/CAB du 13 juillet 2017, la société SHS que l'Etat a retenu le schéma d'un opérateur unique qui aura l'exclusivité de la prise en charge de l'assistance au sol au niveau de AIBD et lui a proposé d’acquérir 33 % des actions de la société à créer ; Que le Ministre du Tourisme et des Transports aériens a notifié le 31 août 2017 à la société SHS la création d'une nouvelle société « AIBD Assistance Services SA » en abrégé « 2AS », seul prestataire sur AIBD ; Considérant que l’État du Sénégal a pris le décret n°2017-1606 du 14 septembre 2017 portant réglementation de l'assistance en escale dans les aéroports du Sénégal ; Qu’en application dudit décret, le Ministre des Transports aériens par arrêté n° 2017-194 du 18 septembre 2017, a fixé les modalités d'exercice de l'activité d'assistance en escale dans les aéroports du Sénégal et limité le nombre des prestataires d’assistance en escale à un (1), pour tout aéroport dont le trafic est inférieur ou égal à trois (3) millions de passagers par an  ;
Que le 20 septembre 2017, le Ministre a pris l'arrêté n° 19419/MTADIA/CAB portant agrément de AIBD Assistance Services SA en abrégé «2AS» comme société d'assistance en escale » ;
Que la société SHS sollicite l’annulation de ces décisions en invoquant sept moyens tirés de la violation de la loi et d’un détournement de pouvoir ;
Considérant que l’État du Sénégal soulève l’incompétence au motif que le recours tend à faire annuler les actes attaqués pris en application de la Directive n°01/2003/CM/UEMOA du 20 mars 2003 relative à l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports des pays membres de l'UEMOA alors que l'article 1er du protocole additionnel n°1 relatif aux organes de l'UEMOA dispose que la Cour de justice veille au respect du droit quant à l'interprétation et à l'application du Traité de l'Union ;
Considérant que selon l'article 1er du protocole susvisé, la Cour de justice veille au respect du droit quant à l'interprétation et à l'application du Traité de l'Union et arbitre les conflits entre États membres ou entre l'Union et ses agents ;
Qu’en l'espèce, il ne s'agit pas de l'interprétation ou de l'application du traité de l'Union, mais plutôt d'un contrôle de légalité d’un acte administratif par rapport à une norme communautaire qui relève de la compétence de la Cour suprême ; D'où il suit que l'exception doit être rejetée ;
Sur le premier moyen tiré de la violation de la Directive n°01/2003/CM/UEMOA du 20 mars 2003 relative à l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports des pays membres de l'UEMOA, en ses cinq branches : La première branche est tirée de la violation de l'article 2 de la Directive en ce que les actes attaqués instaurent un monopole en limitant l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports du Sénégal alors que l'objet de la Directive est de libéraliser l'accès au marché de l'assistance en escale ;
La deuxième branche est tirée de la violation de l'article 4 de la Directive en ce que l'État du Sénégal n'a pas pris de mesures pour assurer le libre accès au marché, mais a décidé de limiter le nombre des prestataires à un (1) ;
La troisième branche est tirée de la violation de l'article 9 de la Directive en ce que l'État s'est abstenu de prendre des mesures nécessaires pour que soit organisée une procédure de sélection des prestataires lorsque leur nombre est limité dans les cas prévus par l'article 13 de la Directive ;
La quatrième branche est tirée du défaut de motivation en ce qu'aucune raison n'est avancée pour justifier la limitation des prestataires à un et l'exclusivité accordée à « 2AS » ;
La cinquième branche est tirée du vice de procédure quant à l'absence de notification et de consultation de la commission de l'UEMOA, prévus par les points 3, 4 et 5 de l'article 11 de la Directive ;
Sur le deuxième moyen tiré de la violation des règles de concurrence de l'UEMOA et de la CEDEAO en ce qu'en créant d'autorité une société d'assistance en escale et en lui octroyant un agrément ainsi que l'exclusivité de l'assistance en escale sur la plateforme aéroportuaire de AIBD, l'État fausse le jeu de la concurrence en favorisant une entreprise à son détriment ; Sur le troisième moyen tiré de la violation des articles 23 à 31 de la loi n°94-63 du 22 août 1994 sur les prix, la concurrence et le contentieux économique en ce que les actes attaqués limitent l'accès au marché d'assistance en escale alors que ces dispositions interdisent toute pratique anti concurrentielle ;
Sur le cinquième moyen tiré de la violation de la Directive de l'UEMOA et du décret réglementant l'assistance en escale par l'arrêté portant agrément de la société « 2AS » en ce que cette société ne remplit pas les critères posés par l'article 4 alinéa 2 de la Directive puisqu'elle ne dispose ni de matériel, ni de personnel, ni d'une expérience ;
Les moyens étant réunis Considérant que la loi n°2015-10 du 4 mai 2015 portant Code de l’Aviation civile prévoit à son article 11 que, « le Ministre chargé de l’Aviation civile peut octroyer des agréments d’opérateur d’assistance ou d’auto assistance en escale dans les conditions déterminées par décret » ;
Qu’en application du décret n°2017-1606 du 14 septembre 2017 réglementant l’activité d’assistance en escale, le Ministre a pris l’arrêté n° 2017-19404 du 18 septembre 2017 fixant les modalités d'exercice de l'activité d'assistance en escale dans les aéroports du Sénégal dont l’article 2 limite le nombre des prestataires d’assistance en escale à un (1), pour tout aéroport dont le trafic est inférieur ou égal à trois (3) millions de passagers par an ;
Que selon l’article 7 de cet arrêté, le Ministre ne peut prendre l’acte d’agrément que sur avis motivé et conforme de l’autorité chargée de l’aviation civile qui vérifie que la société demanderesse remplit toutes les conditions exigées ; Considérant que par ailleurs, l’article 1er, alinéa 3 de l'arrêté n°19419 du 20 septembre 2017 portant agrément de AIBD Assistance Services SA en abrégé « 2AS » précise que l’exclusivité de l’exercice de l’activité d’assistance en escale est accordée sur AIBD jusqu’à la fin de l’année 2017 ou lorsque le niveau du trafic atteint 3 millions de passagers ;  Considérant que le titulaire de l’agrément doit en outre disposer d’une licence d’exploitation pour la fourniture des services d’assistance en escale, valable un an renouvelable ;
Considérant que les dispositions des actes attaqués sont compatibles avec celles des textes visés au moyen puisque n’ayant pas eu pour objet ou finalité de violer les règles de la libre concurrence ;
Que le requérant dépourvu de l’agrément prévu par la loi est malvenu à invoquer un grief tiré d’un défaut de notification à la commission de l’UEMOA ;
Qu’il s’ensuit que les moyens ne sont pas fondés.
Sur le quatrième moyen tiré de la violation de la sécurité juridique et du principe de confiance légitime du fait de la modification des règles applicables ;
Considérant que l’exigence de sécurité juridique et le principe de confiance légitime se traduisent par le principe de non-rétroactivité des actes administratifs ou par l’interdiction du retrait des actes créateurs de droit ;
Considérant qu’en raison de l’adoption du nouveau Code de l’Aviation civile, la requérante, ne saurait valablement se fonder sur le seul fait qu’elle avait un agrément sur l’aéroport Af Aj Ai pour revendiquer un droit acquis à l’octroi d’un agrément sur AIBD qui est un aéroport distinct ; Qu’il s’ensuit que le moyen est mal fondé ;
Sur le sixième moyen tiré de la violation des actes additionnels au traité de la CEDEAO.A/SA.1/12/08 portant adoption des règles communautaires de concurrence et A/SA. 9/02/12 fixant les règles communes relatives aux exemptions concernant certaines catégories d'accords, de décisions, de pratiques relatives à la concurrence dans les services de transport aérien dans les Etats membres de la CEDEAO et notamment de l’article 5 ;
Considérant que l’article 5 sur les accords et pratiques concertés restreignant le commerce visé au moyen dispose « sont incompatibles avec la construction du marché commun de la CEDEAO : tous les accords entre entreprises, décisions par associations d’entreprises et pratiques concertées susceptibles de nuire au commerce entre Etats membres de la CEDEAO et ayant pour objet ou pourrait avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence au sien du marché commun et notamment les accords qui consistent à :
(…) ;
c) se répartir les marchés, les clients ou les sources d’approvisionnement,
e) subordonner la conclusion de contrats à l’acceptation par les partenaires de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n’ont pas de lien avec l’objet de ces contrats. » ;
Considérant que cet article, qui vise les prestataires disposant d’un agrément pour l’exercice des activités de l’assistance en escale, opérant sur la même plateforme aéroportuaire et qui concluent des accords entre eux ou se livrent à des pratiques concertées, dans le but de fausser le jeu de la concurrence, n’a pas vocation à s’appliquer en l’espèce, dès lors que lesdites activités sont confiées à un prestataire unique sur la plateforme de AIBD ;
D’où il suit que le moyen est mal fondé ;
Sur le septième moyen tiré du détournement de pouvoir en ce que l'autorité administrative a agi dans un but différent de celui pour lequel compétence lui a été attribuée ;
Considérant qu’il n’est pas établi en l’espèce que l’autorité administrative a agi pour des considérations autres que l’intérêt général et le bon fonctionnement du service ;
Qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé ;
Par ces motifs Se déclare compétente ;
Rejette le recours introduit par la Société Sénégal Handling Services S.A dite SHS contre le décret n°2017-1606 du 14 septembre 2017 portant réglementation de l’activité d’assistance en escale dans les aéroports du Sénégal, les arrêtés n° n°19404 du 18 septembre 2017 relatif aux modalités d’exercice de l’activité d’assistance en escale dans les aéroports du Sénégal et n°1641/MTADIA/CAB du 20 septembre 2017 portant agrément de AIBD Assistance Services SA « 2AS » comme société d’assistance ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre administrative de la Cour suprême, en son audience publique ordinaire tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents :
Abdoulaye Ndiaye, président,
Oumar Gaye, Adama Ndiaye,
Mbacké Fall,
Idrissa Sow, conseillers,
Ousmane Diagne, avocat général ;
Cheikh Diop, greffier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, les conseillers et le greffier.
Le président Le rapporteur Abdoulaye Ndiaye Oumar Gaye Les conseillers :
Adama Ndiaye Mbacké Fall Idrissa Sow Le greffier Cheikh Diop


Synthèse
Numéro d'arrêt : 21-21
Date de la décision : 22/04/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme;arret;2021-04-22;21.21 ?
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