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20/02/2019 | SéNéGAL | N°16

Sénégal | Sénégal, Cour suprême, 20 février 2019, 16


Texte (pseudonymisé)
ARRÊT N°16 DU 20 FEVRIER 2019



LA SOCIéTé BOUYGUES CONSTRUCTION SA

c/

LA SOCIéTé POUR LE DéVELOPPEMENT DE L’INDUSTRIE DU TOURISME ET DE L’HABITAT AU SéNéGAL DITE C





CONVENTIONS INTERNATIONALES – CONVENTION DE COOPéRATION EN MATIèRE JUDICIAIRE ENTRE LE SéNéGAL ET LA FRANCE DU 29 MARS 1974 – RECONNAISSANCE ET EXEQUATUR – DéTERMINATION DES TITULAIRES DE L’ACTION – LES PARTIES à LA DéCISION éTRANGéRE ET TOUT INTéRESSé



Viole les articles 47 et 48 de la Convention de Coopération judiciaire du 29 mars

1974 entre la France et le Sénégal et 1-2 du code de procédure civile, l’ordonnance déclarant irrecevable la demande d’exequatur de déci...

ARRÊT N°16 DU 20 FEVRIER 2019

LA SOCIéTé BOUYGUES CONSTRUCTION SA

c/

LA SOCIéTé POUR LE DéVELOPPEMENT DE L’INDUSTRIE DU TOURISME ET DE L’HABITAT AU SéNéGAL DITE C

CONVENTIONS INTERNATIONALES – CONVENTION DE COOPéRATION EN MATIèRE JUDICIAIRE ENTRE LE SéNéGAL ET LA FRANCE DU 29 MARS 1974 – RECONNAISSANCE ET EXEQUATUR – DéTERMINATION DES TITULAIRES DE L’ACTION – LES PARTIES à LA DéCISION éTRANGéRE ET TOUT INTéRESSé

Viole les articles 47 et 48 de la Convention de Coopération judiciaire du 29 mars 1974 entre la France et le Sénégal et 1-2 du code de procédure civile, l’ordonnance déclarant irrecevable la demande d’exequatur de décisions étrangères aux motifs qu’elles ne consacrent aucune créance exécutoire en France et que l’exequatur ne peut être obtenu que par la personne qui est en mesure de poursuivre l’exécution de la décision sous le fondement de laquelle l’exequatur est sollicité, alors qu’il peut être demandé pour l’exécution de la décision étrangère comme pour faire établir sa régularité, l’intérêt à agir étant reconnu dans ce cas à toutes les parties au procès qui s’est déroulé à l’étranger, ainsi qu’à toute personne qui justifie d’un intérêt.

La Cour suprême,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’ordonnance attaquée, rendue en dernier ressort, que la société Bouygues Construction SA a saisi le juge des référés du tribunal régional de Dakar pour obtenir l’exequatur du jugement du 12 mars 2013 du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Versailles et de l’arrêt n° 172 du 20 mars 2014 de la cour d’Appel de ladite ville ; que la Société pour le Développement de l’Industrie du Tourisme et de l’Habitat au Sénégal dite C a contesté la recevabilité de ladite demande pour défaut d’intérêt à agir ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches réunies :

Vu les articles 47 de la Convention de Coopération en matière judiciaire, signée le 29 mars 1974 entre la France et le Sénégal et 1-2 du code de procédure civile, ensemble l’article 48 de la même Convention ;

Attendu qu’aux termes du premier de ces textes, en matière civile, sociale, commerciale ou administrative, les décisions contentieuses et gracieuses rendues par toutes les juridictions siégeant sur le territoire de la République française et sur le territoire du Sénégal sont reconnues de plein droit et ont l’autorité de la chose jugée sur le territoire de l’autre État ;

À cet effet, elles doivent réunir les conditions suivantes :

a – la décision émane d’une juridiction compétente, selon les règles concernant les conflits de compétence admises dans l’état où la décision est exécutée ;

b – la décision a fait application de la loi applicable au litige en vertu des règles de solution des conflits de loi admise dans l’État où la décision est exécutée ;

c – la décision ne peut plus, d’après la loi de l’État où elle a été rendue, faire l’objet d’un recours ordinaire ou d’un pourvoi en cassation ;

d – les parties ont été régulièrement citées, représentées ou déclarées défaillantes ;

e – la décision ne contient rien de contraire à l’ordre public de l’État où elle est invoquée ;

f – un litige entre les mêmes parties, fondé sur les mêmes faits et ayant le même objet :- n’est pas pendant devant une juridiction de l’État requis, première saisie, ou- n’a pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée rendue dans l’État requis ou

- n’a pas donné lieu à une décision rendue dans un autre État et qui, dans l’État requis, réunit les conditions nécessaires pour être reconnue de plein droit et revêtue de l’autorité de la chose jugée ;

Que, selon le dernier de ces textes, les décisions visées à l’alinéa 1er de l’article 47 ne peuvent donner lieu à aucune exécution forcée par les autorités de l’autre État ni faire l’objet, de la part de ces autorités, d’aucune formalité publique telle l’inscription, la transcription ou la rectification sur les registres publics qu’après y avoir été déclarées exécutoires ;

Que, selon le second de ces textes, tous ceux qui justifient d’un intérêt légitime peuvent, en prenant l’initiative d’une demande, obtenir du juge une décision sur le fond de leur prétention, sous réserve des cas où la loi subordonne le droit d’agir à des conditions spéciales ou attribue ce droit aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé ;

Attendu que pour déclarer l’action irrecevable, l’ordonnance retient, d’une part, que les décisions ne consacrent aucune créance exécutoire en France et d’autre part, que l’exequatur ne peut être obtenu que par la personne qui est en mesure de poursuivre l’exécution de la décision sous le fondement de laquelle l’exequatur est sollicité ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’exequatur peut être demandé pour l’exécution de la décision étrangère comme pour faire établir sa régularité, l’intérêt à agir étant reconnu dans ce cas à toutes les parties au procès qui s’est déroulé à l’étranger, ainsi qu’à toute personne qui justifie d’un intérêt, le président du tribunal régional a violé la loi ;

Par ces motifs sans qu’il soit besoin d’examiner le second moyen :

Casse et annule en toutes ses dispositions l’ordonnance n° 405 rendue le 27 mars 2017 par le président du tribunal régional de Dakar ;

Remet en conséquence la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et pour être fait droit, les renvoie devant le président du tribunal de grande instance de Thiès ;

Condamne la C aux dépens ;

Dit que le présent arrêt sera imprimé, qu’il sera transcrit sur les registres du tribunal de grande instance de Dakar, en marge ou à la suite de la décision attaquée ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, chambre civile et commerciale en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Madame et Messieurs :

PRÉSIDENT : El HADJI MALICK SOW ; CONSEILLER : LATYR NIANG ; RAPPORTEUR : LATYR NIANG ; CONSEILLERS : WALY FAYE, A B Aa, AMADOU LAMINE BATHILY ; AVOCAT GÉNÉRAL : EL HADJI BIRAME FAYE ; GREFFIER : MAÎTRE MAURICE DIOMA KAMA.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16
Date de la décision : 20/02/2019

Analyses

CONVENTIONS INTERNATIONALES – CONVENTION DE COOPéRATION EN MATIèRE JUDICIAIRE ENTRE LE SéNéGAL ET LA FRANCE DU 29 MARS 1974 – RECONNAISSANCE ET EXEQUATUR – DéTERMINATION DES TITULAIRES DE L’ACTION – LES PARTIES à LA DéCISION éTRANGéRE ET TOUT INTéRESSé


Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme;arret;2019-02-20;16 ?
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