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23/01/2019 | SéNéGAL | N°01

Sénégal | Sénégal, Cour suprême, 23 janvier 2019, 01


Texte (pseudonymisé)
ARRÊT N° 01 DU 23 JANVIER 2019



HôTEL B A

c/

AI Aa





CONTRAT DE TRAVAIL, EXéCUTION – MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL – MODIFICATION SUBSTANTIELLE – DéFAUT DE RECHERCHE DES CARACTéRISTIQUES – MANQUE DE BASE LéGALE – CAS



A privé sa décision de base légale au regard de l’article L 67 du code du travail, une cour d’Appel qui, pour retenir la modification substantielle du contrat de travail, s’est bornée à relever le changement d’appellation des fonctions du travailleur et l’extension de sa charge d

e travail à trois sites, sans indiquer en quoi, il y a ou non retrait ou altération des responsabilités, et sans aucune base comparativ...

ARRÊT N° 01 DU 23 JANVIER 2019

HôTEL B A

c/

AI Aa

CONTRAT DE TRAVAIL, EXéCUTION – MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL – MODIFICATION SUBSTANTIELLE – DéFAUT DE RECHERCHE DES CARACTéRISTIQUES – MANQUE DE BASE LéGALE – CAS

A privé sa décision de base légale au regard de l’article L 67 du code du travail, une cour d’Appel qui, pour retenir la modification substantielle du contrat de travail, s’est bornée à relever le changement d’appellation des fonctions du travailleur et l’extension de sa charge de travail à trois sites, sans indiquer en quoi, il y a ou non retrait ou altération des responsabilités, et sans aucune base comparative entre les fonctions anciennement occupées et celles qui lui sont confiées.

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE – LICENCIEMENT ABUSIF – SANCTION – ALLOCATION DE DOMMAGES ET INTéRÊTS – INTERDICTION DE FIXER LE MONTANT SUR LA BASE D’UN SEUL CRITèRE.

Selon l’article L 56 alinéa 5 du code du travail, le montant des dommages-intérêts est fixé compte tenu, en général, de tous les éléments qui peuvent justifier l’existence et déterminer l’étendue du préjudice causé et, notamment, lorsque la responsabilité incombe à l’employeur, des usages, de la nature des services engages, de l’ancienneté des services, de l’âge du travailleur et des droits acquis à quelque titre que ce soit.

A violé ce texte, la cour d’Appel qui a alloué des dommages et intérêts pour licenciement abusif en se fondant seulement sur l’ancienneté.

La Cour suprême ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’à la suite de son licenciement, sous le couvert de son refus d’une modification substantielle de son contrat de travail, le faisant passer de directeur des ressources humaines à responsable des ressources humaines places et supports hôtels, AI Aa a attrait son ex-employeur, l’hôtel Novotel, devant le

tribunal du travail qui a qualifié le licenciement d’abusif et condamné l’hôtel Novotel au paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, en sa première branche, les deuxième et troisième moyens réunis ;

Vu l’article L 67 du code du travail ;

Attendu que pour retenir la modification substantielle du contrat du travail et en déduire que le licenciement est abusif, l’arrêt, par motifs adoptés et propres, énonce « (…) que s’il est constant que le sieur Aa a refusé d’intégrer la nouvelle organisation des services RH, ce refus ne peut être qualifié de faute par son employeur dans la mesure où il n’a fait qu’user d’un droit qui lui est accordé par l’article L67 alinéa 5 du code du travail ; (…) que le travailleur allègue sans être sérieusement contredit par l’employeur que la nouvelle organisation RH aura pour conséquence de lui faire quitter le poste de Directeur des Ressources Humaines pour celui de Responsable des Ressources Humaines places et supports hôtels, alors que le poste de Coordinateur Process et support hôtels, qui est en réalité celui de Directeur des Ressources Humaines, sera confié à quelqu’un d’autre (voir organigramme) ; qu’ensuite pour s’opposer à la mesure, le sieur Aa écrit à son Directeur général dans sa lettre du 20 juin 2013, sans être contredit par ce dernier, que cette nouvelle organisation va entrainer une augmentation systématique de ses charges de travail, qui vont désormais s’étendre sur trois hôtels et être en même temps le support RH du siège et des hôtels de la place » ;

Qu’en se déterminant ainsi, se bornant d’une part, à relever le changement d’appella-tion des fonctions de AI Aa devenu responsable des ressources humaines en lieu et place de Directeur des ressources humaines et, d’autre part, l’extension de sa charge de travail à trois hôtels, étant en même temps le support RH du siège et des hôtels de la zone, sans indiquer en quoi, il y a ou non retrait ou altération des responsabilités, réduction à des tâches secondaires ou déclassement et sans aucune base comparative entre les fonctions anciennement occupées et celles qui lui sont confiées dans l’organigramme cité, qui n’est ni décrit ni analysé, la cour d’Appel a privé sa décision de base légale ;

Sur le premier moyen, en sa seconde branche et le quatrième moyen, réunis ;

Vu l’article L 56 alinéa 5 du code du travail ;

Attendu que pour allouer la somme de 80 000 000 francs à titre de dommages-intérêts à AI Aa, la cour d’Appel, par motifs adoptés et propres, relève qu’il « a passé 27 ans au service de la défenderesse ; que son âge et la rareté de l’emploi ne favorisent pas sa réinsertion sociale » et que « la somme de 80 000 000 francs allouée par le premier juge est parfaitement raisonnable compte tenu des éléments d’appréciation dont dispose la Cour » ;

Qu’en statuant ainsi, se fondant seulement sur l’ancienneté et faisant abstraction des autres critères, notamment les usages, la nature des services engagés, l’âge du travailleur et les droits acquis à quel que tire que ce soit qui, bien que non exhaustifs, sont légalement cités pour apprécier l’étendue du préjudice, la cour d’Appel a violé, par mauvaise application, l’article visé ci-dessus ;

Par ces motifs :

Casse et annule l’arrêt n° 49 du 23 janvier 2018 de la cour d’Appel de Dakar ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d’Appel de Kaolack ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre sociale de la Cour suprême, en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Madame et Messieurs :

PRÉSIDENT : JEAN LOUIS PAUL TOUPANE ; RAPPORTEUR : JEAN LOUIS PAUL TOUPANE ; CONSEILLERS : AMADOU AG AH, Y X AJ, AMADOU Z AK, IBRAHIMA SY ; AVOCAT GÉNÉRAL : AHMETH DIOUF ; GREFFIER : MAÎTRE MACODOU NDIAYE.

1- Du premier moyen pris de l’insuffisance de motifs constitutive d’un défaut de base légale

Première branche du moyen :

Il est fait grief à l’arrêt d’avoir confirmé le jugement en ce qu’il a déclaré le licenciement de AI Aa au motif suivant :

« Considérant que pour déclarer le licenciement abusif, le juge d’instance se fondant sur les deux motifs invoqués par la lettre de licenciement que sont le refus manifeste et réitéré d’intégrer la nouvelle organisation des services RH et la défiance de l’autorité hiérarchique par refus de prendre une convocation personnellement remise par le supérieur, a estimé que pour le premier grief, s’il est constant que le sieur Aa a refusé d’intégrer la nouvelle organisation des services RH, ce refus ne peut être qualifié de faille par son employeur dans la mesure où il n’a fait qu’user d’un droit qui lui est accordé par l’article L 67 alinéa 5 du code du travail ;

Que l’employeur ne peut se placer sur le terrain de la faute pour le licencier ;

Que s’agissant du second grief, l’acte d’huissier convoquant le sieur Aa à la réunion du 21 juin 2013 ne prouve pas le refus de ce dernier de prendre à main propre la convocation que son employeur lui aurait remis puisque celui-ci le conteste ;

Qu’au regard de ce qui précède, il convient d’en déduire que les faits qui ont conduit le licenciement de AI Aa sont dépourvus de cause réelle et sérieuse» ;

Qu’il suffit juste de rajouter que relativement au premier grief, le caractère substantiel de la modification ne souffre d’aucun doute dès lors que le travailleur allègue sans être sérieusement contredit par l’employeur que la nouvelle organisation RH aura pour conséquences de lui faire quitter le poste de Directeur des Ressources Humaines pour celui de Responsable Ressources

Il est fait grief à l’arrêt d’avoir confirmé le jugement en ce qu’il a alloué à AI Aa la somme de 80 000 000 FCFA à titre de dommages ct intérêts pour licenciement abusif aux motifs suivants :

« Considérant qu’il résulte de l’article L 56 du code du travail que le montant des dommages et intérêts est fixé compte tenu, en général de tous les éléments qui peuvent justifier l’existence et déterminer l’étendue du préjudice causé et notamment ;

b. lorsque la responsabilité incombe à l’employeur, des usages, de la nature des services engagés, de l’ancienneté des services, de l’âge du travailleur et des droits acquis à quelque titre que ce soit ;

Qu’en l’espèce, la somme de 80 000 000 F CFA allouée par le premier juge est parfaitement raisonnable compte tenu des éléments d’appréciation dont dispose la Cour ;

Qu’il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point ».

Alors qu’aux termes de l’article L S6 du code du travail :

« ( .. ) Le montant des dommages intérêts est fixé compte tenu, en général, de tous les éléments qui peuvent justifier l’existence et déterminer l’étendue du préjudice causé et notamment :

C 1° lorsque la responsabilité incombe au travailleur, du préjudice subi par l’employeur en raison de l’inexécution du contrat.

C 2° lorsque la responsabilité incombe à l’employeur, des usages, de la nature des services engagés, de l’ancienneté des services, de l’âge du travailleur et des droits acquis à quelque titre que ce soit.

Le jugement doit être motivé en cc qui concerne la fixation du montant des dommages intérêts (... ) » ;

Que la cour d’Appel, en ne motivant pas sa décision tel qu’exigé par l’article ci-dessus qui précise clairement les critères de caractérisation du préjudice, a violé la loi par refus d’application ;

Que ce faisant, elle prive la Haute cour de céans de son contrôle ;

Pour cette quatrième raison, il plaira à la Haute Cour de céans casser et annuler l’arrêt n° 49 du 23 janvier 2018 rendu par la 3ème chambre sociale de la cour d’Appel de Dakar.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 01
Date de la décision : 23/01/2019

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXéCUTION – MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL – MODIFICATION SUBSTANTIELLE – DéFAUT DE RECHERCHE DES CARACTéRISTIQUES – MANQUE DE BASE LéGALE – CAS


Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme;arret;2019-01-23;01 ?
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