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13/06/2018 | SéNéGAL | N°23

Sénégal | Sénégal, Cour suprême, 13 juin 2018, 23


Texte (pseudonymisé)
ARRÊT N°23 DU 13 JUIN 2018



LA FCCMS

c/

A B





JUGEMENTS ET ARRêTS – MENTIONS DES JUGEMENTS – FORCE PROBANTE D’UN ACTE AUTHENTIQUE – PREUVE CONTRAIRE – INSCRIPTION DE FAUX



Selon les articles L 265 alinéa 5 et L 256 du code du travail, et 73 du code de procédure civile, d’une part, l’appel est jugé sur pièces sauf si les parties demandent à être entendues, les juges pouvant délibérer immédiatement après la clôture des débats et, d’autre part, les mentions des jugements et arrêts font foi jusqu’à

inscription de faux ;



A méconnu le sens et la portée de ces textes, la cour d’Appel qui a accueilli une demande en rétractation aux mot...

ARRÊT N°23 DU 13 JUIN 2018

LA FCCMS

c/

A B

JUGEMENTS ET ARRêTS – MENTIONS DES JUGEMENTS – FORCE PROBANTE D’UN ACTE AUTHENTIQUE – PREUVE CONTRAIRE – INSCRIPTION DE FAUX

Selon les articles L 265 alinéa 5 et L 256 du code du travail, et 73 du code de procédure civile, d’une part, l’appel est jugé sur pièces sauf si les parties demandent à être entendues, les juges pouvant délibérer immédiatement après la clôture des débats et, d’autre part, les mentions des jugements et arrêts font foi jusqu’à inscription de faux ;

A méconnu le sens et la portée de ces textes, la cour d’Appel qui a accueilli une demande en rétractation aux motif que la formation de jugement a violé les prescriptions de forme touchant au délibéré, au prononcé du jugement, au droit de la défense, alors que, d’une part, le conseil de l’employé a conclu durant toute la procédure avant que l’affaire ne soit mise en délibéré, ce dont il s’induit que le délibéré ayant été rabattu, uniquement pour nouvelle composition, les juges n’étaient pas tenus de provoquer les observations des parties et pouvaient statuer immédiatement et, d’autre part, l’autorité attachée aux mentions des jugements et arrêts relatives à la composition de la juridiction et au délibéré ne peut être remise en cause par la seule inexistence de leur indication sur le plumitif d’audience.

La Cour suprême,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que A B a assigné le Crédit Mutuel du Sénégal (CMS), devant la chambre sociale de la cour d’Appel de Kaolack, aux fins de rétractation de l’arrêt n° 29/16 du 29 septembre 2016 et de confirmation du jugement du 17 mars 2016 du tribunal du travail de Kaolack ;

Sur le deuxième moyen ;

Vu l’article L 265 alinéa 5 du code du travail, ensemble les articles L 256 du même code et 73 du code de procédure civile ;

Attendu que, selon ces textes, d’une part, l’appel est jugé sur pièces sauf si les parties demandent à être entendues, les juges pouvant délibérer immédiatement après la clôture des débats et, d’autre part les mentions des jugements et arrêts font foi jusqu’à inscription de faux ;

Attendu que pour accueillir la demande en rétractation, l’arrêt relève et énonce que « l’arrêt du 29 septembre 2016 de la chambre sociale a été rendu par une composition autre que celle qui l’avait mise en délibéré à l’audience du 21 juillet 2016 sans au préalable que le conseil de A B, régulièrement constitué et qui a conclu durant toute la procédure n’ait été appelé à faire des observations après le rabat du délibéré ;

Qu’en statuant immédiatement sur le siège sans remettre la cause en délibéré et sans recueillir l’avis du conseil d’une des parties, la cour a violé les prescriptions de forme touchant au délibéré, au prononcé du jugement, au droit de la défense et même à la règle sacro-sainte qui commande que la décision soit rendue par le ou les juges officiant, ce qui n’est pas le cas si l’on s’en réfère aux mentions du plumitif d’audience qui, contrairement à l’arrêt, n’indiquent nullement l’exception d’irrecevabilité soulevée par le défendeur à la requête » ;

Qu’en statuant ainsi, alors que, d’une part, le conseil de A B a conclu durant toute la procédure avant que l’affaire ne soit mise en délibéré, ce dont il s’induit que le délibéré ayant été rabattu, uniquement pour nouvelle composition, les juges n’étaient pas tenus de provoquer les observations des parties et pouvaient statuer immédiatement et, d’autre part, l’autorité attachée aux mentions des jugements et arrêts relatives à la composition de la juridiction et au délibéré ne peut être remise en cause par la seule inexistence de leur indication sur le plumitif d’audience, la cour d’Appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;

Par ces motifs,

Et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi :

Casse et annule l’arrêt n° 15/17 rendu le 10 mai 2017 par la cour d’Appel de Kaolack ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d’Appel de Thiès ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre sociale de la Cour suprême, en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Madame et Messieurs :

PRÉSIDENT : JEAN LOUIS PAUL TOUPANE ; RAPPORTEUR : JEAN LOUIS PAUL TOUPANE ; CONSEILLERS : AMADOU HAMADY DIALLO, AMINATA LY NDIAYE, AMADOU LAMINE BATHILY, IBRAHIMA SY ; GREFFIER : MAÎTRE MACODOU NDIAYE

Moyens annexés

1 – Sur le moyen tiré de la violation de l’article 305 du code de procédure civile

Attendu qu’aux termes de l’article 305 du code de procédure civile : « Toute requête civile est communiquée au ministère public »

Attendu qu’en l’espèce, la chambre sociale de la cour d’Appel de Aa n’a pas communiqué la requête civile au parquet général de cette juridiction pour lui permettre de prendre ses réquisitions.

Que cette formalité n’a pas été non plus été accomplie par la partie demanderesse à la requête civile.

Que cela la Cour suprême le constatera à la lecture de l’arrêt attaqué où nulle part il n’est mentionné la preuve de l’accomplissement d’une telle formalité.

Que d’ailleurs devant cette omission, le CMS a, par correspondance du 13 avril 2017 reçue par le cabinet du Premier président de la cour d’Appel de Kaolack.

Que cette lettre est restée sans suite pour on ne sait quel motif.

Qu’il conviendrait donc de casser l’arrêt n°15/17 du 10 mai 2017 de la chambre sociale de la cour d’Appel de Aa pour violation de l’article 305 du CPC ;

2- Sur le second moyen tiré de la violation des articles 72, 73 et 287.2 du code de procédure civile (CPC)

Attendu que pour rejeter les arguments du CMS et faire droit à la requête civile, la cour d’Appel de Aa a motivé son arrêt ainsi qu’il suit :

« qu’en effet, l’arrêt du 29 septembre 2016 de la chambre sociale a été rendu par une composition autre que celle qui l’avait mis en délibéré à l’audience du 21 juillet 2016 sans au préalable que conseil de A B, régulièrement constitué et qui a conclu durant tout le long de la procédure n’ait été appelé à faire des observations après le rabat du délibéré ; qu’en statuant immédiatement sur le siège sans remettre la cause en délibéré et sans recueillir l’avis du conseil d’une des parties, la Cour a violé les prescriptions de forme touchant au délibéré, au prononcé du jugement, au droit de la défense et même à la règle sacro-sainte qui commande que la décision soit rendue par le ou les juges officiant, ce qui n’est pas le cas si l’on s’en réfère aux mentions du plumitif d’audience qui, contrairement à l’arrêt, n’indiquant nullement que le délibéré a été rabattu pour composition … »

Que la Cour continue en disant : « Considérant qu’au regard des motifs exposés supra relativement aux violations des règles de forme prescrites à peine de nullité commises lors du prononcé de l’arrêt du 29 septembre 2016, il y a lieu d’ordonner la rétraction dudit arrêt » ;

Attendu qu’en statuant de la sorte, l’arrêt attaqué a violé les dispositions des articles 72, 73 et 287.2 susvisés ;

Que la violation de l’article 72 consiste dans le fait de remettre en cause le contenu de l’arrêt rétracté qui mentionne que le délibéré a été rabattu pour nouvelle composition et la parole donnée à A B pour ses observations et l’affaire remise en délibéré avant d’être vidée sur le siège au motif que le plumitif ne le mentionne pas alors que non seulement les mentions du jugement priment sur celles du plumitif mais elles font foi jusqu’à inscription de faux ce qui veut dire qu’elles ne peuvent être contestées ou remise en cause que dans le cadre d’une procédure d’inscription de faux.

Attendu que s’agissant de la violation de l’article 287.2 du CPC, elle consiste dans ce qui précède mais dans le fait de considérer que l’arrêt du 29 septembre 2016 a violé les formes prescrites à peine de nullité lors de son prononcé.

Or, non seulement il n’est pas prononcé par voie de nullité contre les jugements, mais il s’y ajoute qu’il n’y a aucune violation d’une quelconque forme prescrite à peine de nullité ;

Qu’il n’existe aucun texte qui prévoit que le fait de ne pas donner la parole au conseil d’une partie absent à l’audience après le rabat du délibéré pour nouvelle composition constitue une formalité requise à peine de nullité.

Que d’ailleurs, nulle part dans son arrêt attaqué, la cour d’Appel de Aa n’a invoqué un seul texte qui prévoit une telle formalité à peine de nullité.

Que cela est d’autant plus vrai qu’en l’espèce, après le rabat du délibéré, la Cour a donné la parole aux parties présentes et le sieur A B dont le conseil s’était délibérément absenté a affirmé n’avoir pas d’observations à faire avant que la Cour ne remette l’affaire en délibéré avant de la vider comme il est de pratique en de pareilles circonstances.

Que, contrairement aux énonciations de l’arrêt attaqué, il n y a pas eu violation des droits de la défense et que même si tel était le cas, cela ne donne pas droit à une requête civile puisque la violation des droits de la défense qui est un principe de droit est un cas d’ouverture à cassation.

Qu’il conviendrait donc au regard de ce qui précède, de casser l’arrêt pour violation des articles 72, 73 et 287.2 du CPC.

3- Sur la violation de l’article L 265 du code du travail

Attendu qu’aux termes de cet article, l’appel est jugé sur pièces.

Qu’en décidant dans ces conditions, que l’arrêt du 29 septembre 2016 doit être rétracté au motif que la Cour n’a pas donné la parole aux conseils de A B après le rabat du délibéré ce qui serait constitutif d’une violation des règles prescrites à peine de nullité et de droits de la défense, la cour d’Appel de Aa a violé les dispositions de l’article L 265 du code du travail.

Que dans une matière jugée sur pièces où la comparution n’est pas obligatoire, on ne peut reprocher à une juridiction de violer l’article 287.2 au motif qu’elle n’a pas donné la parole à l’avocat d’une partie absent à l’audience après le rabat du délibéré pour nouvelle composition avant la remise en délibéré de l’affaire.

Qu’il conviendrait donc de casser l’arrêt attaqué pour violation de l’article L 265 du code du travail.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 23
Date de la décision : 13/06/2018

Analyses

JUGEMENTS ET ARRêTS – MENTIONS DES JUGEMENTS – FORCE PROBANTE D’UN ACTE AUTHENTIQUE – PREUVE CONTRAIRE – INSCRIPTION DE FAUX


Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme;arret;2018-06-13;23 ?
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