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24/05/2017 | SéNéGAL | N°53

Sénégal | Sénégal, Cour suprême, 24 mai 2017, 53


Texte (pseudonymisé)
Arrêt n° 53
du 245/ 2017
Social
Affaire
n° J/129/RG/16
23/3/16
Am C et 15 autres
(Me Guédel NDIAYE et
associés)
CONTRE
- Compagnie AW
AH, dite CSS
(Me Boubacar KOITA)
RAPPORTEUR
Jean Louis Paul TOUPANE
PAR UET AL
Ahmeth DIOUF
AUDIENCE
24 mai 2017
PRESENTS
Jean Louis Paul TOUPANE, Président,
Amadou Hamady DIALLO, Aminata LY NDIAYE,
Amadou Lamine BATHILY, Ibrahima SY, Conseillers,
Cheikh DIOP, Greffier;
MATIERE
sociale REPUBLIQUE DU SENEGAL
AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS

COUR SUPREME
CHAMBRE SOCIALE
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE
DU MERCREDI VINGT QUATRE MAI DE L’AN DEUX
MILLE DIX SEPT
EN...

Arrêt n° 53
du 245/ 2017
Social
Affaire
n° J/129/RG/16
23/3/16
Am C et 15 autres
(Me Guédel NDIAYE et
associés)
CONTRE
- Compagnie AW
AH, dite CSS
(Me Boubacar KOITA)
RAPPORTEUR
Jean Louis Paul TOUPANE
PAR UET AL
Ahmeth DIOUF
AUDIENCE
24 mai 2017
PRESENTS
Jean Louis Paul TOUPANE, Président,
Amadou Hamady DIALLO, Aminata LY NDIAYE,
Amadou Lamine BATHILY, Ibrahima SY, Conseillers,
Cheikh DIOP, Greffier;
MATIERE
sociale REPUBLIQUE DU SENEGAL
AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS
COUR SUPREME
CHAMBRE SOCIALE
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE
DU MERCREDI VINGT QUATRE MAI DE L’AN DEUX
MILLE DIX SEPT
ENTRE :
Am C, Ac B, Am
C, Aq C AT, Az Ba AX,
Ae AS, Aj AM, Al Aw A,
Af AG, Ai AK, Ap AZ,
Ak BB, Am Ab AK, les
héritiers de Ao Am Bb AJ ( As Z,
Ah AJ, As ASAV Au AK et Ay
Ag AU, faisant tous élection de domicile en l’étude de
Maître Guédel NDIAYE & associés, avocats à la Cour, 73 bis
Rue Ax Av AN à Dakar;
DEMANDEURS, D’une part,
ET:
- La compagnie AW AH, dite C.S.S., poursuites et diligences de son représentant légal en ses bureaux sis à l’Avenue Ad AP à Dakar, élisant domicile … l’étude de Maître Boubacar KOITA & associés, avocats à la Cour, 76, Rue Carnot à Ar ;
X,
D’autre part,
vu la déclaration de pourvoi formée par Maître Guédel NDIAYE & associés, avocats à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Am C et 15 autres;
ladite déclaration est enregistrée au greffe central de la Cour suprême le 12 août 2016 sous le numéro J/129/RG/16 et tendant à ce qu’il plaise à la Cour, casser l’arrêt n°565 du 28 août 2015 rendu par la 3“"° chambre sociale de la Cour d’Appel de Dakar;
ce faisant, attendu que l’arrêt est attaqué pour défaut de réponse à conclusions, dénaturation d’un écrit entrainant la dénaturation des faits, contrariété de motifs, violation de l’article L.49 du Code du Travail et défaut de base légale;
la Cour,
vu la loi organique n°2008-35 du 8 août 2008 sur la Cour suprême ;
vu la loi organique n° 2017- 09 du 17 janvier 2017 sur la Cour suprême ;
vu l’arrêt attaqué ;
vu les pièces produites et jointes au dossier ;
vu la lettre du greffe du 22 avril 2016 portant notification du pourvoi à la défenderesse ;
vu le mémoire en réponse reçu au greffe le 24 juin 2016 du défendeur ;
vu les moyens annexés ;
ouï monsieur Jean Louis Paul TOUPANE, président de chambre, en son rapport ;
ouï monsieur Ameth DIOUF, avocat général, représentant le parquet général, en ses
conclusions, tendant au rejet ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la compagnie AW AH, dite CSS, avait engagé Am C et 13 autres par contrats de travail saisonniers qui se sont poursuivis, au-delà du terme, pendant une période de cinq ans ;
Qu’à la suite de la rupture des relations de travail, les employés ont saisi le tribunal du travail qui a déclaré, qu’à l’exception de Au AK, ils étaient liés à la CSS par des contrats de travail à durée indéterminée et condamné leur ex-employeur au paiement de diverses indemnités ;
Sur les premier, deuxième, troisième et quatrième moyens réunis ;
Attendu qu’ayant relevé, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, qu’à l’exception de Au AK, Am C et autres, qui ont produit des contrats saisonniers, des bulletins de paie journaliers et des bulletins de salaires du mois d’août 2009, ont continué à travailler au- delà du terme pendant une période de cinq ans et que la CSS a mis fin aux relations de travail, sans un motif, autre que le non-renouvellement des contrats, la cour d’Appel qui a confirmé le jugement sur la qualification des contrats de travail des demandeurs, à l’exception de Au AK, en contrats de travail à durée indéterminée, a répondu aux conclusions prétendument omises, sans dénaturation de documents dont elle ne constate ni l’existence ni n’en fait usage et hors toute contradiction, a fait l’exacte application de la loi ;
Mais sur le cinquième moyen ;
Vu l’article L 56 du Code du travail ;
Attendu que allouer à chacun des travailleurs la somme de 350.000frs à titre de dommages- intérêts pour licenciement abusif, la cour d’Appel énonce que « la rupture intempestive des contrats de travail a causé un préjudice moral et financier aux travailleurs qui ont perdu leur emploi ; que toutefois la somme de 15.000.000 Frs qu’ils ont réclamée est excessive eu égard à leur ancienneté et à leur salaire mensuel » ;
Qu'en statuant ainsi, par des considérations générales qui ne se rapportent pas à la situation individuelle de chaque travailleur, alors que lorsque la responsabilité de la rupture incombe à l’employeur, le préjudice est fixé compte tenu de tous les éléments qui peuvent justifier l’existence et déterminer l’étendue du préjudice, notamment de la nature des services engagés, de l’âge et de l’ancienneté du travailleur et des droits acquis à quelque titre que ce soit, la cour d’Appel a violé l’article visé ci-dessus ;
Et sur le sixième moyen ;
Vu les articles 134 du Code de la sécurité sociale et 118 du COCC ;
Attendu que pour débouter les travailleurs de leurs demandes de dommages et intérêts pour non reversement des cotisations sociales, la cour d’Appel énonce « qu’aux termes de l’article 149 du Code de la Sécurité sociale, seules les institutions de prévoyance sociale ont qualité pour poursuivre le recouvrement des cotisations ; que (...) les travailleurs ne peuvent valablement réclamer le paiement des dommages et intérêts à leur employeur pour non reversement des cotisations sociales par celui-ci » ;
Qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher, au regard de la défaillance de l’employeur à exécuter une obligation légale au bénéfice des travailleurs, si ceux -ci ont subi un dommage, la cour d’Appel n’a pas mis la Cour en mesure d’exercer son contrôle ;
Par ces motifs:
Casse et annule, mais seulement en ce qu’il alloué à Am C et autres, chacun la somme de 350.000 frs à x titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif et les a déboutés de leurs demandes de paiement de dommages et intérêts pour non reversement des cotisations sociales, l’arrêt n°565 du 28 août 2015 de la Cour d’Appel de Dakar ;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Thiès ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre sociale de la Cour suprême, en son
audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents messieurs :
Jean Louis Paul TOUPANE, Président,
Amadou Hamady DIALLO,
Aminata LY NDIAŸYE,
Amadou Lamine BATHILY,
Ibrahima SY, Conseillers,
Cheikh DIOP, Greffier,
Ahmeth DIOUF, avocat général, représentant le parquet général;
Cheikh DIOP, greffier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, les conseillers et le greffier.
Le président
Jean Louis Paul TOUPANE
Les conseillers
Amadou Hamady DIALLO Aminata LY NDIAYE Amadou L. BATHILY Ibrahima SY
Le greffier
Cheikh DIOP EXPOSE DES MOYENS DE CASSATION
A. DU PREMIER MOYEN TIRE DU DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS
Attendu qu'il convient de rappeler que même si les juges du fond ne sont pas tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ils sont par contre tenus de répondre aux véritables moyens invoqués par les parties dans leurs conclusions.
Qu'en l'espèce, les demandeurs au pourvoi nt indiqué dans leurs conclusions d'appel datées du 30 Juillet 2014 ce qui suit: «Attendu que le jugement doit par contre être infirmé en qu'il a débouté le sieur Au AK de routes ses demandes et en ce qu'il n'a pas requalifié le contrat verbal des concluants en contrat de travail à durée indéterminée. , Qu 'en effet, pour débouter le sieur Au AK de toutes ses demandes, le premier juge
indiqué que celui-ci n versé aux débats aucune pièce à l'appui de ses prétentions.
Attendu que celte affirmation est inexacte;
Qu ‘en effet, M. Au AK a versé aux débats les pièces suivantes:
- son bulletin de paie d'octobre 2006
- son contrat saisonnier du 087 Mars 2007
- son bulletin de paie de Mai 2008
- son bulletin de paie de Mai 2009
- son certificat de travail du 31 Août 2009
Que le premier juge a même visé son bulletin de paie de Mai 2009 pour le débouter de sa demande de rappel de congés payés;
Qu'en tout état de cause, pour éviter toutes contestations sur ce point, M. Au AK dispose à nouveau lesdites pièces et sollicite la requa4fication de sa relation de travail avec la CSS en contrat de travail en durée indéterminée, Qu ‘il confirmer donc d'infirmer le jugement sur ce point »,.
Attendu que M. Au AK a donc clairement indiqué dans lesdites conclusions que non seulement il a déposé les pièces de son dossier - le premier juge l'ayant même visé pour le débouter de sa demande de rappel de congés - mais qu'en tout état de cause, il a déposé à la barre de la Cour d'Appel l'intégralité des pièces de son dossier qu'il avait pris le soin de lister. Or, pour débouter M. Au AK de sa demande de requalification de contrat s'est contenté de dire que: « Attendu qu'en l'espèce, il résulte des éléments du dossier que la Compagnie AW AH a conclu avec les sieurs Am C, Ac B, Am C, Aq C AT, Az Ba AX, Ae AS, Aj AM, Al Aw A, Af AG, Ai AK, Ap AI, Ak AO, Am Ab AK, Ao Am Aa AJ, Au AK, Ay At AU des contrats à durée déterminée de deux mois allant du 18 Septembre 2006 au 17 Novembre 2006, des contrats saisonniers à compter du 12 Mars 2007 jusqu'à la fin de la campagne agricole 200612007 et d'autres contrats saisonniers couvrant la période du 19 Mai 2008 au 19Mars 2009,
Qu’en plus des contrats, les sieurs Am C et autres ont versés des bulletins de paie journaliers et des bulletins de salaires du Mois d'Août 2009 à l'exception de Au AK; Considérant qu'il résulte des ces différentes pièces versées aux débats que la CSS a conclu avec M Am C & autres des contrats de travail saisonniers qui se sont poursuivis après le terme fixé au 19 Mars 2009;
Qu'après le terme fixé, la CSS n'a pas conclu de nouveaux contrats avec Am C & autres mais elle a continué à les faire travailleurs en qualité de journaliers pendant une période de cinq ans dépassant largement le terme fixé à la fin de la campagne agricole. , Que ces contrats qui se sont étalés sur une période de cinq ans et qui ont eu pour objet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité permanente de la CSS constitue à la lumière du décret n° 70-180 du 20 Février 1970 des contrats à durée indéterminée ».
Que pour n'avoir pas répondu aux conclusions de M.Waly AK qui visent expressément et spécialement le dossier qu'il a déposé, l'arrêt attaqué encourt la cassation.
B. DU DEUXIEME MOYEN TIRE DE LA DENATURATION D'UN ECRIT ENTRAINANT LA DENATURATION DES FAITS
Attendu que la Cour d'appel a énoncé que « qu'en plus des contrats, les sieurs Am AR Y et autres ont versés des bulletins de paie journaliers et des bulletins de salaires du Mois d'Août 2009 à l'exception de Au AK»
Or, M.Waly DIOUF a indiqué dans ses conclusions ce qui suit:
«M. Au AK a versé aux débats les pièces suivantes:
- son bulletin de paie d'octobre 2006
- son contrat saisonnier du 087 Mars 2007
- son bulletin de paie de Mai 2008
- son bulletin de paie de Mai 2009
- son certificat de travail du 31 Août 2009, Que le premier juge a même visé son bulletin de paie de Mai 2009 pour le débouter de sa demande de rappel de congés payés;
Qu'en tout état de cause, pour éviter toutes contestations sur ce point, M. Au AK dépose à nouveau lesdites pièces et sollicite la requa4fication de sa relation de travail avec la CSS en contrat de travail en durée indéterminée »
Qu'ainsi, en retenant que le M. Au AK n'a pas justifié sa demande de requalification en versant aux débats les pièces de son dossier alors qu'il appert des pièces visées ci-dessous que M. Au AK a été engagé en violation du décret 70-180 du 20 Février 1970 et des articles L 45 et 49 du Code du Travail, la Cour d'Appel a dénaturé les écrits produits aux débats et par voir de conséquence, les faits de la cause.
Que sur ce deuxième moyen également, son arrêt encourt l'annulation.
C. DU TROISIEME MOYEN TIRE DE LA CONTRARIETE DE MOTIFS
Attendu que la Cour d'Appel a retenu que la demande de M.Waly DIOUF tendant à la requalification de ses contrats journaliers et saisonniers en contrat à durée indéterminée n'est pas justifiée;
Or, dans le même arrêt, la Cour d'Appel dit ceci:
«Considérant qu'il résulte des ces différentes pièces versées aux débats que hi CSS a conclu avec M Am C & autres des contrats de travail saisonniers qui se sont poursuivis après le terme fixé au 19 Mars 2009;
Qu'après le terme fixé, la CSS n'a pas conclu de nouveaux contrats avec Am AR Y & autres mais elle a continué à les faire travailleurs en qualité de journaliers pendant une période de cinq ans dépassant largement le terme fixé à la fin de la campagne agricole.
Que ces contrats qui se sont étalés sur une période de cinq ans et qui ont eu pour objet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité permanente de la CSS constitue à la lumière du décret n° 70-180 du 20 Février 1970 des contrats à durée indéterminée;
Considérant qu 'en outre la CSS n 'a pas contesté avoir mis fin aux relations de travail qui la liait à Am AR Y et autres et na invoqué aucun motif autre que le non renouvellement, que sous ce rapport, c'est à bon droit que le premier juge a déclaré abusif le licenciement de M Au AY BA et autres et de confirmer le jugement entrepris».
Qu'il y'a donc contrariété de motifs pour deux raisons au moins:
1. la Cour d'Appel ne pouvait pas sérieusement énoncer dans le même arrêt d'une part, que les pièces versées établissent l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée et d'autre part que M.Waly DIOUF n'a pas déposé de pièces qui justifie et sa demande de requalification de ses contrats en contrats de travail en durée indéterminée.
2. La Cour d'Appel de Dakar ne pouvait pas non plus, dire et juger que «la CSS n'a pas contesté avoir mis fin aux relations de travail qui la liait à Am AR Y et autres et n'a invoqué aucun motif autre que le non renouvellement», ce qui sous entend le caractère abusif des licenciements et d'autre part, «confirmer le jugement entrepris », alors que ledit jugement a débouté M.Waly Diouf de sa demande tendant à faire déclarer abusif son licenciement.
Que pour ces deux raisons, l'arrêt attaqué encourt également la cassation pour contrariété de motifs
D. DU QUATRIEME MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE L 49 DU CODE DU TRAVAIL
Attendu que pour écarter l'existence d'un contrat de travail durée indéterminée, la Cour d'Appel se contente d'énoncer ce qui suit:
« Qu 'en plus des contrats, les sieurs Am C et autres ont versés des bulletins de paie journaliers et des bulletins de salaires du Mois d'Août 2009 à l'exception de Au AK»;
Or, l'article L 49 du Code du Travail dispose clairement que:
« Tout contrat de travail quine répond pas aux définitions du contrat à durée déterminée, du contrat d'apprentissage ou du contrat d'engagement à l'essai doit être considéré comme contrat à durée indéterminée.»
Qu'il appartenait donc à la Cour d'Appel de déterminer parmi les types de contrat prévus par le Code du travail, lequel était de nature à s'appliquer aux relations existant entre les parties.
Que dans son arrêt, elle a écarté l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée sans pour autant déterminer la nature des relations contractuelles entre Au AK et la CSS, au vu de l'article L 49 du Code du Travail.
Que de ce fait, elle a violé l'article L 49 du Code du Travail visé au moyen, l'arrêt attaqué mérite d'être cassé.
E. DU CINQUIEME MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE L 56 DU CODE DU TRAVAIL
Attendu que M. Am C & autres ont sollicité à titre de réparation la somme de 15.000.000 Frs, chacun ; Qu'à l'appui de leurs réclamations, ils ont rappelé avoir été engagés pendant plus de 5 ans dans la plus grande précarité.
Pis, ils ont été licenciés brutalement sans aucun motif légitime alors qu'ils n'ont jamais reçu la moindre sanction d leur employeur.
Attendu que pour fixer à 350.000 Ers le montant des dommages-intérêts dus à M Am C & autres, la Cour d'Appel a statué ainsi qu'il suit:
«Considérant qu'en l'espèce les licenciements sont abusifs sauf celui de Au AK; que la rupture intempestive des contrats de travail a causé un préjudice moral et financier aux travailleurs qui ont perdu leur emploi.
Que toutefois la somme de 15.000.000 Fis qu'ils ont réclamé est excessive eu égard à leur ancienneté et à leur salaire mensuel;
Qui échet compte tenu des éléments précités de leur allouer chacun 350.000 Frs, de condamner la CSS à leur payer ladite somme»
Attendu que cette motivation viole la loi;
Qu'en effet, la Cour d'Appel, en fixant le préjudice matériel et moral subi par M. Am C & autres à 350.000 Frs n'a tenu compte ni de tous les éléments, ni des droits acquis prévus par l'article L56 du Code du Travail.
Qu'en effet, s'il est vrai que les juges du fond apprécient souverainement le montant des dommages et intérêts, il n'en demeure pas moins qu'ils doivent suffisamment motiver leur décision.
Or, en l'espèce, la Cour d'appel, après avoir relevé que le licenciement concluants leur a causé un préjudice direct et certain, s'est bornés à indiquer « la somme de 15.000.000 Fis sollicitée à titre de réparation est excessif eu égard à leur ancienneté et leur salaire mensuel».
Que ce faisant, elle a violé l'article L 56 du Code du Travail qui dispose que « le montant des dommages intérêts est fixé compte tenu de tous les éléments qui peuvent justifier l'existence et déterminer l'étendue du préjudice causé et notamment lorsque la responsabilité incombe à l'employeur, des usages, de Li nature des services engagés, de l'ancienneté du travailleur, de l'Age du travailleur et des droits acquis à quelque titre que ce soit».
> Cf. Cour de Cassation 25 Juillet 2001. TPOM n° 919 Novembre 2002. Cote jurisprudence.
Qu'en effet, la Cour d'Appel devait fixer les dommages et intérêts en tenant compte du préjudice matériel et moral incommensurable subi par les demandeurs au pourvoi.
En effet, les demandeurs au pourvoi ont été licenciés sans AUCUN motif précis, puisque la CSS n'a ni énoncé le motif de son licenciement, ni établi l'existence d'un motif réel et sérieux. Qu’en effet, après plusieurs années de bons et loyaux services rendus à leur ex-employeur, M. C et autres se sont retrouvés, du jour au lendemain, injustement privés de leur emploi et de leur rémunération;
Que ces honnêtes pères de famille et fidèles employés se sont donc retrouvés dans l'impossibilité de subvenir aux besoins de leur famille, dans un contexte marqué par le chômage et la cherté de la vie.
Qu'à cela s'ajoute le préjudice moral incommensurable subi par les concluants du fait de leurs licenciement intempestifs;
Qu'en effet, au-delà du caractère abusif du licenciement, c'est l'intention de nuire qui a caractérisé l'attitude de la CSS puisque les circonstances du licenciement des concluants sont tant imprévisibles que vexatoires.
Pis, ils ne pourront jamais bénéficier d'une pension de retraite du fait qu'ils ont été employés dans une extrême précarité.
De plus, le juge d'appel ne pouvait allouer à chacun 350.000 Frs à titre de dommages et intérêts alors qu'ils n'ont pas été engagés à la même période, comme l'attestent les bulletins de paie journaliers qui ont été versés aux débats:
1. Am C a une ancienneté de 3 ans
2. Ac B, 3 ans
3. Am C, 3 ans
4. Aq C AT, 3 ans
5. Az Ba AX, 6 ans
6. Ae AS, 3 ans
7. Souleymane SY, 6 ans
8. Papa Aw A, 3 ans
9. Af AG, 3 ans
10. Ai AK, 3 ans
11. Ap AZ, 3 ans
12. Ak BB, 3 ans
13. Am Ab AK, 12 ans
14. Ao Am Bb AJ, 3 ans
17. Au AK, 3 ans
18. Ay Ag AU, 3 ans
Qu'ainsi, la Cour d'Appel, qui ne s'est pas référée à tous ces éléments d'appréciation qui entrent nécessairement dans le calcul des dommages et intérêts, a violé les dispositions de l'alinéa 5 de l'article L 56 du Code du Travail.
Que c'est la solution retenue par la Cour Suprême qui a décidé que:
«le montant des dommages et intérêts est fixé compte tenu de tous les éléments qui peuvent justifier l'existence et déterminer l'étendue du préjudice causé et notamment, lorsque la responsabilité incombe à l'employeur, des usages, de la nature des services engagés, de l'ancienneté, de l'âge du travailleur et des droits acquis à quelque titre que ce soit ». (C Cas s. Sénégal 25 juillet 2001. TPOM n° 919 novembre 2002).
Que l'on peut également se référer à l'arrêt de la Cour de Cassation qui a annulé l'arrêt de la Cour d'Appel qui, « après une confirmation partielle par adoption de motifs du premier juge, réforme le montant des dommages et intérêts alloués pour licenciement abusif, sans aucun motif et, en particulier, sans tenir compte de tous les éléments qui peuvent justifier l'existence et déterminer l'étendue du préjudice, doit être cassé pour violation de la loi ». (Cour de Cassation arrêt n°76 du 04 Décembre 1991. Affaire Birame BA/ An Bc - Cote Jurisprudence) Qu'il s'infère de tout ce qui précède que l'arrêt de la Cour d'Appel doit être cassé pour violation de l'article L 56 du Code du Travail.
F. DU SIXIEME MOYEN TIRE DU DEFAUT DE BASE LEGALE
Attendu pour débouter M. Am C & autres de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts pour non reversement des cotisations sociales, la Cour d'Appel a énoncé ce qui suit:
« Considérant qu'aux termes de l'article 149 du Code de la Sécurité Sociale, seules les institutions de prévoyance sociale ont qualité pour poursuivre le recouvrement des cotisations
Que également les travailleurs ne peuvent valablement réclamer k paiement de dommages et intérêts à leur employeur pour non reversement des cotisations sociales par celui-ci, qu'il échet dès lors de considérer que c'est à bon droit que le premier juge a débouté Am C et autres de leur demande en paiement de dommages et intérêts pour non reversement des cotisations sociales comme mal fondée et de confirmer le jugement entrepris sur ce point»;
Qu'en se déterminant ainsi, le juge d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Qu'en effet, l'article 149 du Code de la Sécurité sociale dispose très clairement que:
« Toute action ou poursuite en recouvrement de cotisations et autres sommes dues de même nature est obligatoirement précédée d'une mise en demeure, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du Directeur de la Caisse de Sécurité Social, invitant l'employeur à régulariser sa situation dans un délai compris entre 15 jours et 3 mois»
Qu'en effet, il convient ici de rappeler que si le travailleur n'est pas recevable à solliciter le remboursement des cotisations IPRES (seul l'IPRES peut en effet agir
pour recouvrer lesdites cotisations), il est par contre parfaitement recevable à solliciter, comme en l'espèce, des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'il subit du fait du non reversement à l'IPRES de ses cotisations!
Que la jurisprudence est constante en la matière et répare systématiquement le préjudice subi par le travailleur du fait du non reversement de ses cotisations;
Qu'à titre d'illustration, il n'est que de citer une affaire dans laquelle le Tribunal du Travail a décidé que l'employeur n'a pas rapporté la preuve du reversement des cotisations et Fa condamné à payer au travailleur des dommages et intérêts pour la non prise en compte de sa sécurité sociale. (Cf. Tribunal du Travail Dakar, jugement n° 630 du 14 septembre 2007. Affaire XTPPI SARL / Amie Fall SAKHO)
Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la CSS a toujours opéré des retenues sur le salaire des concluants, au titre des cotisations IPRES.
Que pourtant les demandeurs au pourvoi ont eu la désagréable surprise d'apprendre que la société défenderesse n'a pas reversé leurs cotisations sociales auprès de l'Institution de Prévoyance Retraite du Sénégal.
Que la CSS a ainsi, minoré la déjà maigre pension de retraite qu'ils percevront, ce qui leur cause un préjudice énorme, puisqu'elle les a privés de la protection sociale minimale et incompressible qu'est la pension de retraite.
Qu'il s'y ajoute que pendant tout le temps qu'ils sont restés au service de la CSS, ils n'ont pas été affiliés à la Caisse de Sécurité Sociale.
Que cette situation leur a causé un préjudice incommensurable qui mérite réparation.
Que pour toutes ces raisons, l'arrêt de la Cour d'Appel doit être cassé pour défaut de base légale puisque l'article 149 du Code de la Sécurité n'est applicable que pour les demandes en recouvrement de cotisations sociales.
Que pour tous ces moyens dont chacun est un motif suffisant de cassation, il plaira à la Cour Suprême casser l'arrêt n° 565 du 28 Août 2015 rendu par la Troisième Chambre Sociale de la Cour d'Appel de Dakar et renvoyer la cause et les parties devant la Cour d'Appel de Dakar autrement composée, ou devant une autre Cour d'Appel pour qu'il soit statué à nouveau.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 53
Date de la décision : 24/05/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme;arret;2017-05-24;53 ?
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