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28/01/2015 | SéNéGAL | N°03

Sénégal | Sénégal, Cour suprême, 28 janvier 2015, 03


Texte (pseudonymisé)
ARRET N°03 28/01/2015 Social -------------- X B Contre Trade Point Sénégal
AFFAIRE: J-054/RG/14
RAPPORTEUR: Ibrahima SY
MINISTERE PUBLIC: Ousmane DIAGNE
AUDIENCE: Du 28/01/2015
PRESENTS: Jean Louis Paul TOUPANE, Président,
Mouhamadou Bachir SEYE,
Mahamadou Mansour MBAYE,
Amadou Lamine BATHILY,
Ibrahima SY,
Conseillers,
Maurice Dioma KAMA, Greffier ; MATIERE : Sociale REPUBLIQUE DU SENEGAL ------------- AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS ----------- LA COUR SUPREME -------------- CHAMBRE SOCIALE -------------- A L’AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU MERCREDI

VINGT-HUIT JANVIER DEUX MILLE QUINZE ; ENTRE :
X B, demeurant à Dakar, élisant domicile...

ARRET N°03 28/01/2015 Social -------------- X B Contre Trade Point Sénégal
AFFAIRE: J-054/RG/14
RAPPORTEUR: Ibrahima SY
MINISTERE PUBLIC: Ousmane DIAGNE
AUDIENCE: Du 28/01/2015
PRESENTS: Jean Louis Paul TOUPANE, Président,
Mouhamadou Bachir SEYE,
Mahamadou Mansour MBAYE,
Amadou Lamine BATHILY,
Ibrahima SY,
Conseillers,
Maurice Dioma KAMA, Greffier ; MATIERE : Sociale REPUBLIQUE DU SENEGAL ------------- AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS ----------- LA COUR SUPREME -------------- CHAMBRE SOCIALE -------------- A L’AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU MERCREDI VINGT-HUIT JANVIER DEUX MILLE QUINZE ; ENTRE :
X B, demeurant à Dakar, élisant domicile … l’étude en l’étude de maître Corneille BADJI, avocat à la cour, 66 avenue Aa Y à Dakar ;
Demandeur ;
D’une part,
ET :
Trade Point Sénégal, sis au km 2,5 boulevard du centenaire de la commune de Dakar,
élisant domicile … l’étude maîtres SOW, SECK et DIAGNE, avocats à la Cour 15, boulevard Ab A à Dakar ;
Défendeur ; D’autre part,
VU la déclaration de pourvoi formée par maître Corneille BADJI, avocat à la cour, agissant au nom et pour le compte d’X B ; Ladite déclaration enregistrée au greffe de la Cour suprême le 07 février 2014 sous le numéro J-054/RG/2014 et tendant à ce qu’il plaise à la Cour, casser l’arrêt n°213 du 10 avril 2013 par lequel, la chambre sociale de la Cour d’Appel de Dakar a partiellement infirmé le jugement entrepris et condamné Trade Point Sénégal à payer à monsieur X B les sommes de 222.797,8 (deux cent vingt-deux mille virgule huit) francs à titre de prime d’ancienneté et 100.000 (cent mille) francs à titre de dommages et intérêts pour non inscriptions aux institutions sociales ;
Ce faisant, attendu que l’arrêt est attaqué pour, violation des articles 1-4 , 1-5 du Code de Procédure Civile, et L70 du Code du travail, défaut de base légale, dénaturation des faits et insuffisance de motifs ;
La Cour, vu la loi organique n° 2008-35 du 8 août 2008 sur la Cour suprême ;
vu l’arrêt attaqué ;
vu les pièces produites et jointes au dossier ; vu la lettre du greffe en date du 18 mars 2014 portant notification de la déclaration de pourvoi au défendeur ;
vu le mémoire en réponse pour le compte de Trade Point Ad, ledit mémoire enregistré au greffe de la Cour suprême le 19 mai 2014 et tendant au rejet du pourvoi ;
VU le mémoire en réplique pour le compte d’X B, Ledit mémoire enregistré au greffe de la Cour suprême le 24 juin 2014 et tendant à la cassation de l’arrêt attaqué ;
vu les conclusions écrites de monsieur l’avocat général tendant à la cassation de l’arrêt attaqué ;
ouï monsieur Ibrahima SY, conseiller, en son rapport ;
ouï monsieur Ousmane DIAGNE, avocat général représentant le ministère public, en ses conclusions ; Vu les moyens annexés ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la cour d’Appel a déclaré le licenciement d’X B légitime pour abandon de poste, constitutif d’une faute lourde ;
Sur le premier moyen, pris de la violation des articles 1-4 et 1-5 du Code de procédure civile, L70 du Code du travail et 19 de la Convention collective nationale interprofessionnelle, le deuxième moyen, en sa première branche et le quatrième moyen, pris du défaut de base légale et de l’insuffisance de motifs, réunis ; Attendu qu’ayant relevé qu’X B n’a pas repris son service le 7 avril 2006 puis énoncé, faisant usage de son pouvoir souverain d’appréciation des moyens de preuve soumis à son examen, que « la lettre et les fiches de rendez-vous des 11 avril et 9 mai 2006 ne sont que de simples photocopies non revêtues de cachet et qu’X B devait fournir un certificat médical informant de sa maladie et de la durée du traitement qui aurait pu justifier la considération d’une période de congés maladie », la cour d’Appel, saisie d’une demande tendant à faire déclarer le licenciement abusif, qui en a déduit que l’abandon de poste constaté le 16 janvier 2008, par voie d’huissier, est constitutif d’une faute lourde, ce dont il résulte que le licenciement est légitime, a fait l’exacte application de la loi et justifié sa décision ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; Sur le troisième moyen pris de la dénaturation des faits;
Attendu que sous couvert de ce grief, le moyen ne tend qu’à discuter l’appréciation par les juges du fond de la portée d’éléments de preuve soumis à leur examen ;
D’où il suit qu’il est irrecevable ;
Mais sur le deuxième moyen, en sa seconde branche, pris du défaut de base légale ;
Vu l’article 46 de la Convention collective nationale interprofessionnelle ;
Attendu que pour débouter X B de sa demande de paiement de l’indemnité mensuelle de transport, la cour d’Appel, par motifs adoptés du premier juge , relève qu’il n’a pas produit de certificat de résidence ou de domicile établissant qu’il est resté à la même adresse, Pikine villa n° 5937 et ajoute que ladite pièce versée au dossier, en cause d’appel, ne saurait prospérer ;
Qu’en se déterminant ainsi, sans dire en quoi la pièce produite en appel ne saurait prospérer, la cour d’Appel ne met pas la Cour en mesure d’exercer son contrôle ;
Par ces motifs :
Casse et annule, mais seulement en ce qu’il a rejeté la demande de paiement de l’indemnité mensuelle de transport, l’arrêt n° 213 du 10 avril 2013 de la Cour d’Appel de Dakar;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Dakar ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la chambre sociale de la Cour Suprême, en son audience publique ordinaire tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents messieurs :
Jean Louis Paul TOUPANE, président ;
Ibrahima SY, conseiller-rapporteur ;
Mouhamadou Bachir SEYE,
Mahamadou Mansour MBAYE,
Amadou Lamine BATHILY, conseillers ;
Ousmane DIAGNE, avocat général, représentant le ministère public ;
Maurice Dioma KAMA, greffier.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le conseiller-rapporteur, les conseillers et le greffier. /.
Le président Le Conseiller-rapporteur Jean Louis Paul TOUPANE Ibrahima SY
Les conseillers

Mouhamadou Bachir SEYE Mahamadou Mansour MBAYE Amadou Lamine BATHILY
Le greffier
Maurice Dioma KAMA
ANNEXE
PREMIER MOYEN: VIOLATION DE LOI 1ère branche : Violation des articles 1-4 et 1-5 du code de procédure civile.
A la page 5 de son arrêt, la Cour d'Appel énonce ce qui suit dans son 5ème considérant:
« Considérant que c'est à bon droit que TRADE POINT a fait constater par voie d'huissier l'abandon de poste du sieur B le 16janvier 2008 ce qui est constitutif de faute lourde;
Qu'il résulte donc de tout ce qui précède que le licenciement du sieur X B est parfaitement légitime et qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer du jugement entrepris sur ce point ».
Ainsi, après avoir retenu un abandon de poste à l'encontre du requérant, le juge d'appel qualifie ce fait comme une faute lourde.
Il juge ensuite que le sieur B a été licencié de manière « parfaitement» légitime… Or, non seulement la faute lourde n'a jamais été alléguée ni invoquée par l'employeur, mais celui-ci n'a jamais admis avoir licencié le requérant.
En effet, s'étant toujours gardé de soutenir avoir licencié le requérant, l'employeur a constamment affirmé dans ses différentes conclusions que la rupture des relations de travail entre les parties était imputable au travailleur et n'a jamais considéré ni relevé que le travailleur avait commis une faute lourde.
De fait le débat simplement posé par l'employeur est celui de l'imputabilité de la rupture, celui-ci soutenant que cette rupture était imputable au travailleur.
En statuant comme elle l'a fait, la Cour d'Appel a non seulement statué ultra petita, mais elle a introduit dans le débat des faits qui ne résultent pas des conclusions des parties.
Ce faisant, elle a violé les dispositions articles 1-4 et 1-5 du code de procédure civile, d'où il suit que sa décision encourt cassation.
2ème branche : Violation de l'article L. 70 du Code du travail et de l'article 19 de la Convention Collective Nationale Interprofessionnelle.
A la page 5 de son arrêt, la Cour d'Appel énonce ce qui suit dans ses 3ème et 4ème considérants:
« Considérant cependant que le sieur B n'a pas repris service à cette date [7 avril 2006] en faisant valoir que son état de santé l'a contraint à subir un traitement médical en Europe où II se trouve et a versé aux débats comme justificatifs une lettre et deux fiches de rendez-vous pour les 11 avril et 9 mai 2006 ».
Considérant que lesdites pièces ne sont que de simples photocopies non revêtues de cachet et que plus décisivement il était tenu de fournir un certificat médical provenant de l'homme de l'art informant de sa maladie et de la durée prévue pour son traitement ce qui aurait pu justifier la considération d'une période de congés maladie ».
Il est manifeste qu'en statuant ainsi, la Cour d'Appel viole et ajoute à la loi.
En effet, ni l'article L. 70 du Code du travail ni l'article 19 de la Convention Collective Nationale Interprofessionnelle, ne considèrent que des photocopies de documents médicaux ne peuvent servir comme justificatif d'une maladie.
Aucun de ces textes n'exige non plus l'existence d'un cachet sur de tels documents, surtout si, comme en l'espèce, il s'agit de documents établis sur papier en-tête des établissements hospitaliers qui les ont délivrés.
Il en est ainsi de la mention relative à la durée du traitement.
Au demeurant, l'attestation établie le 6 avril 2006 par le Docteur Ae C du CHU Ac Af de Bruxelles est bien revêtue de cachet.
C'est dire que la décision querellée mérite cassation.
DEUXIEME MOYEN: DEFAUT DE BASE LEGALE 1ère branche :
Comme indiqué ci-dessus, à la page 5 de son arrêt, la Cour d'Appel énonce ce qui suit dans son 4ème considérant, à propos des pièces produites par le requérant pour justifier sa maladie et le traitement dont il faisait l'objet en Europe:
« Considérant que lesdites pièces ne sont que de simples photocopies non revêtues de cachet et que plus décisivement il était tenu de fournir un certificat médical provenant de l'homme de l'art informant de sa maladie et de la durée prévue pour son traitement ce qui aurait pu justifier la considération d'une période de congés maladie ».
A l'évidence, en statuant comme elle l'a fait et en subordonnant la validité ou la recevabilité des éléments fournis par le travailleur pour justifier sa maladie ou encore le bénéfice d'un congé maladie à la production des originaux revêtus de cachet et d'un certificat médical informant de la durée prévue pour le traitement, le juge d'appel ne donne pas de base légale à sa décision et ne permet pas non plus à la Haute Juridiction d'exercer son contrôle.
Par voie de conséquence, sa décision encourt cassation.
2ème branche :
Pour justifier la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté le requérant de sa demande en paiement de la prime de transport, le juge d'appel énonce ce qui suit (page 5):
« Considérant que par adoption des motifs pertinents du premier juge, ily a lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce point, en ce qu'il a rejeté la demande de l'appelant comme mal fondée au motif qu'il n'a pas produit de certificat de travail ou de domicile établissant qu'il est resté à la même adresse: Pikine villa n° 5937; qu'il s'y ajoute que ladite pièce versée au dossier en cause d'appel ne saurait prospérer ».
Le juge d'appel reconnait ainsi qu'en cause d'appel, le requérant a versé au dossier le certificat établissant qu'il est resté à la même adresse, Pikine, villa n° 5937.
Pourtant, très curieusement, il relève, sans en indiquer le moindre fondement légal, que ladite pièce versée au dossier en cause d'appel ne saurait prospérer.
Ce faisant, il ne donne aucune base légale à sa décision et ne permet pas à la Cour Suprême d'exercer son contrôle.
Ce défaut de base légale est d'autant plus constant que par arrêt n° 18 du 12 janvier 1994 (cf Recueil des arrêts de la Cour de Cassation, années judiciaires 1993-1998, éditions Giraf, décembre 2001, page 394-395), la Cour de Cassation de céans, statuant en matière sociale, a jugé qu'à la suite d'une cassation, les parties sont libres d'invoquer des moyens nouveaux et de produire de nouvelles pièces propres à justifier leurs conclusions, ce qui signifie qu'en cause d'appel, celles-ci peuvent parfaitement produire de nouvelles pièces pour établir leurs prétentions.
Il s'en suit que l'arrêt contesté mérite cassation.
TROISIEME MOYEN: MATURATION DES FAITS jère branche:
A la page 5 de son arrêt, la Cour d'Appel énonce ce qui suit dans son 4ème considérant, à propos des pièces produites par le requérant pour justifier sa maladie et le traitement dont il faisait l'objet en Europe:
« Considérant que lesdites pièces ne sont que de simples photocopies non revêtues de cachet et que plus décisivement II était tenu de fournir un certificat médical provenant de l'homme de l'art informant de sa maladie et de la durée prévue pour son traitement ce qui aurait pu justifier la considération d'une période de congés maladie ».
Tout d'abord, l'on ne sait ce que signifient de simples photocopies, s'agissant de documents médicaux.
Ensuite, la Haute Cour constatera que, contrairement aux énonciations qui précèdent, les pièces produites par le requérant sont bien revêtues de cachet, spécialement l'attestation de suivi médical, dont le requérant verse d'ailleurs l'original (cf sous cote V).
Cette attestation a été établie par un médecin, le Docteur Ae C du CHU Ac Af de Bruxelles et il est constant qu'elle vaut certificat médical.
Dès lors, c'est par pure dénaturation des faits et des écrits sus évoqués que le juge d'appel a pu dire que lesdites pièces ne sont que de simples photocopies non revêtues de cachet et semble induire qu'elles n'auraient pas été établies par un homme de l'art.
D'ailleurs, il ressort expressément des mentions du jugement rendu par le Tribunal du travail de Dakar le 9janvier 2009 que le requérant a informé son employeur de sa maladie et produit au dossier un certificat médical en bonne et due forme comportant le cachet et la signature du docteur.
C'est dire que l'arrêt querellé mérite cassation pour dénaturation des faits. 2ème branche:
A la page 5 de son arrêt, la Cour d'Appel énonce ce qui suit dans son 5ème considérant: « Considérant que c'est à bon droit que TRADE POINT a fait constater par voie d'huissier de justice l'abandon de poste du sieur B le 16janvier 2008 ».
Or, à la date du 16 janvier 2008, le requérant avait déjà saisi, près d'un an auparavant, le Tribunal du travail d'une action tendant à voir déclarer, entre autres, qu'il a été licencié et de manière abusive (cf requête enregistrée au greffe le 9 mars 2007 sous le numéro 579).
Le tribunal avait même déjà convoqué les parties à une tentative de conciliation (cf citation servie au requérant pour l'audience du 19 avril 2007) et noté la non conciliation, le requérant ayant d'ailleurs déjà pris et déposé ses conclusions d'instance.
Dans ces conditions, sauf à vouloir dénaturer délibérément les faits, l'on ne voit pas comment il est possible d'opposer au travailleur un abandon de poste constaté après que celui-ci avait déjà estimé avoir été licencié et saisi le tribunal à cet effet.
QUATRIEME MOYEN INSUFFISANCE DE MOTIFS Comme énoncé ci-dessus, à la page 5 de son arrêt, la Cour d'Appel énonce ce qui suit dans son 5ème considérant:
«Considérant que c'est à bon droit que TRADE POINT a fait constater par voie d'huissier de justice l'abandon de poste du sieur B le 16janvier 2008 ».
En se fondant sur des faits postérieurs à la saisine du tribunal pour justifier le caractère légitime d'un licenciement dont le travailleur estimait déjà avoir été victime au moment de l'introduction de son action, il est constant que le juge d'appel ne motive pas suffisamment sa décision qui encourt dès lors cassation.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 03
Date de la décision : 28/01/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme;arret;2015-01-28;03 ?
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