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05/09/2012 | SéNéGAL | N°81

Sénégal | Sénégal, Cour suprême, 05 septembre 2012, 81


Texte (pseudonymisé)
ARRET N°8 Du 05 septembre 2012 ………. MATIERE : Civile et commerciale N° AFFAIRE :
J/03/ RG/ 12
S.C.I Les Bougainvilliers
Contre
El Hadji Mamadou Lamine DIAO RAPPORTEUR :
Mouhamadou DIAWARA PARQUET GENERAL:
Abdourahmane DIOUF
AUDIENCE :
05 septembre 2012 PRESENTS :
Mouhamadou DIAWARA Mouhamadou Bachir SEYE Amadou Lamine BATHILY Adama NDIAYE Babacar DIALLO GREFFIER :
Maurice Dioma KAMA REPUBLIQUE DU SENEGAL Un Peuple – Un But – Une Foi …………….
AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS ……………

COUR SUPREME …………… CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE …………… A L’AUDIENCE PUBLIQUE DE VACATION DU CINQ SEP...

ARRET N°8 Du 05 septembre 2012 ………. MATIERE : Civile et commerciale N° AFFAIRE :
J/03/ RG/ 12
S.C.I Les Bougainvilliers
Contre
El Hadji Mamadou Lamine DIAO RAPPORTEUR :
Mouhamadou DIAWARA PARQUET GENERAL:
Abdourahmane DIOUF
AUDIENCE :
05 septembre 2012 PRESENTS :
Mouhamadou DIAWARA Mouhamadou Bachir SEYE Amadou Lamine BATHILY Adama NDIAYE Babacar DIALLO GREFFIER :
Maurice Dioma KAMA REPUBLIQUE DU SENEGAL Un Peuple – Un But – Une Foi …………….
AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS …………… COUR SUPREME …………… CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE …………… A L’AUDIENCE PUBLIQUE DE VACATION DU CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE DOUZE
ENTRE :
S.C.I Les Bougainvilliers, ayant son siège provisoire à Dakar- Almadies, représentée par Monsieur Ab A, mais faisant élection de domicile en l’Etude de Maître Guédel NDIAYE et associés, avocats à la cour, 73 bis, Rue Ad Ae A à Dakar Demanderesse ;
D’une part
ET : El Hadji Mamadou Lamine DIAO, Directeur de l’entreprise NENZO CONSTRUCTION (ENC), demeurant à Dakar aux Parcelles Assainies Unité 22 villa n° 204, ayant domicile élu en l’étude de Maître Samba AMETTI, Avocat à la cour 127 Avenue Aa Ac à Dakar ; Défendeur ;
D’autre part ; Statuant sur le pourvoi formé suivant requête enregistrée au Greffe de la Cour suprême le 03 janvier 2012 sous le numéro J/03/RG/12, par Maître Guédel NDIAYE et associés, avocats à la cour, agissant au nom et pour le compte de la S.C.I Les Bougainvilliers contre l’arrêt n° 657 rendu le 12 septembre 2011 par la Cour d’Appel de Dakar, dans la cause l’opposant au sieur El Hadji Mamadou Lamine DIAO ; Vu le certificat attestant la consignation de la somme devant garantir le paiement des droits de timbre et d’enregistrement du 19 janvier 2012 ; Vu la signification du pourvoi au défendeur par exploit du 10 janvier2012 de Maître Oumar Tidiane DIOUF, Huissier de justice ; Vu le mémoire en réponse valant pourvoi incidant déposé le 12 mars 2012 par Maître Samba AMETTI Avocats à la cour, pour le compte de Monsieur El Hadji Mamadou Lamine DIAO ;
La COUR, Ouï Monsieur Mouhamadou DIAWARA, Président, en son rapport ; Ouï Monsieur Abdourahmane DIOUF, Avocat général, en ses conclusions tendant l’irrecevabilité du pourvoi ; Vu la loi organique n° 2008-35 du 08 août 2008 sur la Cour suprême ; Vu les moyens annexés ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu que par l’arrêt attaqué, la Cour d’Appel de Dakar a condamné la S.C.I les Bougainvilliers à payer à Mamadou Lamine Diao la somme de cinq millions de francs (5.000.000) à titre de dommages et intérêts pour rupture unilatérale de contrat ; Sur le premier moyen, en sa première branche, tiré de la violation des articles 122 et 445 du Code des Obligations civiles et commerciales, en ce que la cour d’Appel s’est employée à démontrer que la S.C.I les Bougainvilliers n’aurait pu rompre le contrat qu’en prouvant  « que ce qui restait du délai ne permettait pas de finir les travaux », alors que, selon l’article 445 précité, le maître de l’œuvre a la faculté de résiliation unilatérale qui n’est pas soumise à la préexistence d’une faute ; Vu l’article 445 précité ; Attendu qu’aux termes de ce texte « tant que l’ouvrage n’est pas terminé, le maître de l’œuvre peut toujours se départir du contrat en payant le travail fait et en indemnisant complètement l’entrepreneur » ; Attendu que pour condamner la S.C.I les Bougainvilliers au paiement, la cour d’Appel, après avoir énoncé qu’il n’est pas contesté que le travail effectué a été intégralement payé, a retenu que le maître d’ouvrage n’a pas prouvé l’existence d’une faute de l’entrepreneur susceptible de justifier une rupture du contrat ; Qu’en statuant ainsi alors que la faculté de rupture unilatérale du maître de l’œuvre n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute de l’entrepreneur, la cour d’Appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs : Casse et annule l’arrêt n° 657 rendu le 12 septembre 2011 par la Cour d’Appel de Dakar ;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Saint-Louis ; Condamne Mamadou Lamine Diao aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour Suprême, chambre civile et commerciale en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Messieurs : Mouhamadou DIAWARA, Président-rapporteur ;
Mouhamadou Bachir SEYE,
Amadou Lamine BATHILY,
Adama NDIAYE,
Babacar DIALLO, Conseillers ;
En présence de Monsieur Abdourahmane DIOUF, Avocat général, représentant le Parquet Général et avec l’assistance de Maître Maurice Dioma KAMA, Greffier. En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président – rapporteur, les Conseillers et le Greffier.
Le Président – rapporteur
Mouhamadou DIAWARA
Les Conseillers Mouhamadou Bachir SEYE Amadou Lamine BATHILY Adama NDIAYE Babacar DIALLO
Le Greffier
Maurice Dioma KAMA
ANNEXE
Moyens annexés au présent arrêt
A - Premier moyen tiré de la violation de la loi
1ère branche du moyen tiré de la violation des articles 122 et 445 du Cocc
Attendu que pour déclarer abusive la rupture du contrat d’entreprise à l’initiative de la SCI Les Bougainvilliers, la cour d’Appel a commis la même erreur que le tribunal régional hors classe de Dakar. Qu’elle a estimé en effet que : « Il n’est pas contesté que l’intimé a été intégralement payé pour le travail effectué ; mais considérant que le maître d’ouvrage n’a pas prouvé l’existence d’une faute de l’entrepreneur susceptible de justifier une rupture du contrat ; Considérant en effet que le seul délai imparti par le contrat est celui de 07 mois qui lui a été donné pour finir les travaux ; que toute référence à un retard doit se faire par rapport à ce délai ; Considérant qu’au moment où elle rompait le contrat le 03 novembre 2008, il restait encore quatre mois à l’entrepreneur pour finir les travaux ; que la société Les Bougainvilliers ne prouve pas que ce qui restait du délai ne permettait pas des finir les travaux ; qu’il s’y ajoute qu’aux termes de l’article VII du contrat, « si le représentant d la société Les Bougainvilliers juge que l’entrepreneur risque de déraper sur le délai contractuel, il est en droit de demander à ce dernier d’augmenter son effectif ou de réaliser les travaux à la charge de l’entreprise » qu’en décidant de rompre le contrat dès le 03 novembre pour retard dans l’exécution des travaux, la société Les Bougainvilliers a manifestement commis une faute préjudiciable à l’entrepreneur ». 1er élément de la branche
Attendu que l’article 445 du Cocc est ainsi libellé : « Résiliation unilatérale Tant que l’ouvrage n’est pas terminé, le maître de l’œuvre peut toujours se départir du contrat en payant le travail fait et en indemnisant complètement l’entrepreneur ». Qu’il résulte clairement de cette disposition que le maître de l’œuvre a une faculté de résiliation unilatérale qui n’est pas soumise à la préexistence d’une faute de l’entrepreneur. Autrement dit, le maître de l’œuvre peut discrétionnairement rompre le contrat sans même avoir à rechercher une faute de l’entrepreneur. Que dans le cas d’espèce, la cour d’appel s’est – comme la Haute Cour peut le noter ci-avant-employée à démontrer que la SCI Les Bougainvilliers n’aurait pu rompre le contrat qu’en prouvant « que ce qui restait du délai ne permettait pas de finir les travaux », autrement dit, qu’en rapportant la preuve d’une faute commise par le défendeur au pourvoi. Que ce faisant, la Cour d’Appel de Dakar a ajouté aux dispositions de l’article 445 précité, ce qui constitue une violation dudit article. 2ème élément de la branche
Attendu que la cour d’Appel a également violé l’article 122 du Cocc qui est ainsi libellé : « Abus de droit Commet une faute par abus de droit celui qui use de son droit dans la seule intention de nuire à autrui, ou qui en fait usage contraire à sa destination ». Attendu en effet, que dès lors que la SCI Les Bougainvilliers n’a rien fait d’autre qu’exercer son droit discrétionnaire de résiliation unilatérale, la Cour ne pouvait lui imputer une faute qu’en démontrant qu’elle avait agi dans la seule intention de nuire ou avait fait e son droit un usage contraire à sa destination. Or, attendu que dans le cas d’espèce, il n’est guère contesté que l’entrepreneur avait accusé de graves irrégularités constatées dans les procès-verbaux de chantiers, ce qui lui a d’ailleurs valu plusieurs mises en demeure de la SCI Les Bougainvilliers également contenues dans lesdits procès-verbaux (Cote 1 doc 3 à 13). Attendu que Haute Cour notera par exemple que sur le procès-verbal de chantier du 10 septembre 2008, il est clairement indiqué : « Si le vendredi 12 septembre 2008, ENC ne respecte pas ses engagements (amener la deuxième bétonnière, amener des lettes et début du coulage des nervure, fin coffrage phrdc r2, r3, le contrat sera résilié ». (Cote 1 – doc 6)
Qu’il en est de même du procès-verbal du 22 octobre 2008, sur lequel la Haute Cour lira : «  La SCI Les Bouguinvilliers demande à ENC de résorber son retard. % délai = 28 % # % avancement travaux = 8 % ». (Cote 1 – doc 11)
Que la cour d’Appel, qui n’a pas recherché un seul instant la preuve de l’intention de nuire à la SCI Les Bouguinvilliers, ni démontré que cette dernière aurait fait de son droit un usage contraire à sa destination, a violé l’article 122 du Cocc, ci-dessus reproduit. 2ème branche du moyen tirée de la violation des articles 125 et 126 du Cocc
Attendu que la preuve étant faite, par les procès-verbaux de chantier, que le défendeur au pourvoi a accusé un grand retard dans la réalisation de ses travaux, la cour d’Appel de Dakar, comme le tribunal n’a pas trouvé d’autre parade, pour l’absoudre, que d’indiquer : « Qu’au moment où elle rompait le contrat le 03 novembre 2008, il restait 4 mois à l’entrepreneur pour finir les travaux ; que la société Les Bouguinvilliers ne prouve pas que ce qui reste du délai ne permettait pas de finir les travaux… ». Que ce faisant, la cour d’Appel indique très clairement que la SCI Les Bouguinvilliers aurait pu et dû attendre la fin du délai contractuel, subir encor plus outrageusement les retards accumulés par le défendeur au pourvoi, avant de pouvoir lui faire le moindre grief sur les multiples violations du contrat. Que la cour d’Appel indique surtout, implicitement mais nécessairement, que le dommage dont peut se prévaloir la SCI Les Bouguinvilliers pour rompre le contrat, ne peut être qu’antérieur à la rupture du contrat. Or, les articles 125 et 126 du Cocc disposent très clairement que : Article 125 : « Le dommage peut être actuel ou futur. Il doit toujours être certain et direct ». Article 126 : « Le dommage est certain lorsque, bien que n’étant pas réalisé sur le champ, il se produira nécessairement dans l’avenir »
Qu’en ne recherchant pas si le dommage invoqué par la SCI Les Bougainvilliers pour rompre le contrat le 03 novembre 2008 n’est pas un dommage futur, la cour d’Appel a visé deux articles reproduits ci-dessus. Que son arrêt encourt la cassation de ce chef. B - Deuxième moyen tiré de l’insuffisance des motifs constitutif d’un défaut de base légale
Attendu qu’il n’est pas contesté qu’au jour de la résiliation, la SCI Les Bougainvilliers a, conformément à la loi, indemnisé complètement l’entrepreneur puisqu’elle lui a remis : d’abord, l’intégralité de l’avance de démarrage par chèque n° 4503226 du 04 août 2008 (1.000.000 F), 4503231 du 09 août 2008 (1.000.000 F), 4503234 du 16 septembre 20089 (1.000.000 F),4503235 du 06 septembre 2008 (1.000.000 F) ; ensuite la somme de 4.024.106 F représentant la totalité du décompte de travaux réalisés à la date de résiliation du contrat, ce par deux chèque n° 4503245 du 24 octobre 2008 (2.000.000 F) et 4503252 du 13 novembre 2008 (2.020.106 F) ;
(Cote 1 doc 14/1 à 14/6) Qu’ayant été totalement indemnisée, l’entreprise ENC (Mamadou Lamine DIAO) a remis à la SCI Les Bougainvilliers une reconnaissance de paiement ansi libellée :
« RECONNAISSANCE DE PAIEMENT Je soussigné monsieur El Hadj Mamadou Lamine DIAO, certifie avoir reçu la somme de 2.024106 (deux millions vingt quatre mille cent six), francs CFA pour solder l’ensemble des factures dues par la SCI Les Bougainvilliers pour le compte des travaux de l’immeuble collectif des Almadies ;
Ce montant tient compte du matériel cédé à la SCI Les Bougainvilliers et listé sur ma dernière facture.
En foi de quoi, la présente reconnaissance est établie pour servir et valoir ce que de droit.
Fait à Dakar, le 13 novembre 2008 El hadj Mamadou Lamine DIAO » (Cote 1 doc 16) Que la cour d’Appel elle-même l’a expressément reconnu, puisqu’elle indique :
« Que le premier juge a ordonné une expertise pour pouvoir évaluer le coût des travaux, mais considérant que lesdits travaux ont déjà été remboursés… » Attendu qu’il est, dès lors, on ne peut plus curieux que la cour d’Appel ait cru devoir condamner la SCI Les Bougainvilliers à la somme de 5.000.0000 à titre de dommages-intérêts, au motif laconique que voici :
« Que l’indemnisation concerne non pas les travaux réalisés, mais le préjudice découlant de la rupture du contrat ; que la détermination de ce préjudice ne nécessite pas une expertise ; Considérant que l’intimé avait réclamé la somme de 5.000.000 F à titre de dommages et intérêts ; qu’au regard des circonstances dans lesquelles l’appelante a résilié le contrat, cette demande paraît raisonnable, qu’il échet donc d’infirmer le jugement sur ce point et de condamner la SCI les Bougainvilliers à payer à Mamadou Lamine DIAO la somme de 5.000.000 F à titre de dommages et intérêts ».
Attendu qu’en se contentant de viser les circonstances des la résiliation, sans indiquer lesquelles, ni préciser en quoi elles pouvaient permettre de déterminer le montant du préjudice allégué par le défendeur au pourvoi, la cour d’Appel a insuffisamment motivé sa décision, qui manque de base légale et encourt la cassation de ce chef


Synthèse
Formation :
Numéro d'arrêt : 81
Date de la décision : 05/09/2012

Analyses

CONTRATS ET OBLIGATIONS – CONTRAT D’ENTREPRISE – RUPTURE – RUPTURE UNILATÉRALE DU MAÎTRE D’ŒUVRE – CONDITION – INDEMNISATION COMPLÈTE DE L’ENTREPRENEUR


Parties
Demandeurs : SCI LES BOUGAINVILLIERS
Défendeurs : EL HADJI MAMADOU LAMINE DIAO

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2023
Fonds documentaire ?: Bulletin des arrets
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme;arret;2012-09-05;81 ?
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