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ARRET No 99
Du 23 Octobre 1998
GREFFE
DEMANDEUR
Sté LES TISSANDIERS
Présents :Mmes et M.
Renée BARO,Président de Chambre, Président ;
Célina CISSE,
Ibrahima GUEYE,
Conseillers ;
Me Abdou Razakh DABO, Greffier -
RAPPORTEUR
Mme Renée BARO
MINISTERE PUBLIC
Dakar ;
M.Cheikh Tidiane FAYE
AUDIENCE DU
23 Octobre 1998
MATIERE SOCIALE ET
EXTRAIT DES MINUTES DU
DE LA COUR DE CASSATION
REPUBLIQUE DU SENEGAL
Au Nom du Peuple Sénégalais
LA COUR DE CASSATION
A l’audience Publique de VACATION
du Vendredi Vingt Trois Octobre Mil Neuf
Cent Quatre Vingt Dix Huit ;
ENTRE
La Société les TISSANDIERS sise Dakar,11,avenue Ab Ae, mais ayant Elu domicile en l’étude de Me Mamadou
GUEYE,1,avenue Ab Ae,
D’UNE PART ;
:
Mme Ad A, demeurant à
Dakar, HLM II, villa n°677, mais ayant élu domicile en l’étude de Me Sandembou Diop Avocat à la Cour,127,avenue Aa
Ac, Dakar ;
D’AUTRE PART ; / / VU la déclaration de pourvoi présentée par
Me Mamadou GUEYE Avocat à la Cour,
Agissant au nom et pour le compte de la
Société les TISSANDIERS,
LADITE déclaration enregistrée au greffe de la Troisième Chambre de la Cour de Cassation le 18 Juillet 1996 et tendant à ce qu’il plaise à la Cour casser l’arrêt n°100 en date du 19 Mars 1996 par lequel la Cour d’Appel a infirmé le
jugement entrepris et déclaré abusif le licenciement de la dame A ;
CE FAISANT, attendu que l’arrêt attaqué a été pris :
-par violation de l’article 273 du C.P.C ; ;- par insuffisance de motifs ;
-par violation de l’article 51 du Code du Travail ;
-par défaut de motifs ;
VU l’arrêt attaqué ;
VU les pièces produites et jointes au dossier ;
VU la lettre du Greffe en date du 15 Octobre 1996 portant notification de la déclaration de pourvoi au défendeur ;
VU le mémoire en défense produit pour le compte de Ad A ;
Ledit mémoire enregistré au greffe de la Cour de Cassation le 16
Septembre 1996 et tendant au rejet du pourvoi ;
Vu le Code du Travail ;
VU la loi organique n°92-25 du 30 Mai 1992 sur la Cour de cassation ;
LA COUR,
OUI Madame Renée BARO , Président de Chambre, en son rapport ;
OUI Monsieur Cheikh Tidiane FAŸE Avocat Général représentant le
Ministère Public en ses conclusions ;
APRES en avoir délibéré conformément à la loi ;
url remier m n tiré d’un f; réponses à conclusions, constitutif d’une violation de l’article 273 du Code de Procédure Civile .
ATTENDU qu’il apparaît des énonciations de l’arrêt attaqué que Ad A embauchée en qualité d’ouvrière en 1972 par la société « les
Tissandiers ”,fut licenciée par lettre du 19 avril 1993 pour avoir tenu, devant le personnel et des personnes étrangères à l’entreprise, des propos injurieux et obscènes à l’endroit de la directrice de l’établissement : qu’ayant attrait
l’ex-employeur devant le tribunal du travail pour solliciter le paiement de
dommages et intérêts pour licenciement abusif, la dame A fut déboutée de toutes ses demandes et que la Cour d’Appel par l’arrêt attaqué considéra au contraire le licenciement injustifié et alloug à l’employée des indemnités de
préavis de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement abusif .
ATTENDU que la demanderesse reproche à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 273 du Code de procédure Civile en ce qu’il a omis de répondre à ses
conclusions qui avaient plaidé la violation de l’article précité posant le principe de l’interdiction des demandes nouvelles en appel alors que si la Cour avait
apporté une réponse à ce moyen, elle aurait été amenée à déclarer irrecevable la demande en dommages et intérêts dont le montant de 300.000 F en première
instance a été porté à 9.000.000 F en cause d’appel .
MAIS ATTENDU qu’il apparaît des conclusions que la dame A a fait déposer devant le tribunal le 22 février 1994 que le montant des dommages et intérêts sollicités en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement abusif était de 9.000.000 F et que cette demande a été réitérée en appel, il en
résulte que la Cour d’Appel pouvait valablement statuer sans faire cas d’une
simple erreur de plume qui s’est glissée dans le jugement déféré ;
D’où il suit que le moyen est inopérant et doit être rejeté .
SUR les deuxième et troisième movens tirés d’une insuffisance de
motif: la violation de l’article 51 du ravail .
ATTENDU que la demanderesse reproche à la Cour d’Appel d’avoir
rendu une décision entachée d’une insuffisance de motifs en ce qu’après avoir relevé que la dame A a tenu les propos suivants : « cela est incorrect de traiter l’ensemble du personnel de voleur, sans aucune distinction et de surcroît sans preuve "elle s’est abstenue d’analyser cette déclaration pour apprécier si
elle était ou non constitutive d’une faute de nature à légitimer un licenciement alors que si le travailleur reconnaît un comportement qu’il a adopté dans les faits à l’origine de son licenciement, la juridiction saisie ne peut sans pêcher par
insuffisance de motifs, s’abstenir d’analyser et d’apprécier le caractère fautif ou non du comportement considéré et se borner à déclarer le licenciement abusif au motif que l’employeur n’aurait pas fait la preuve de la légitimité du
licenciement ; que la demanderesse fait d’autre part, grief à la Cour d’Appel
d’avoir violé l’article 5S1en ce qu’elle a reproché au premier juge d’avoir
renversé la charge de la preuve lorsque ce dernier, pour apprécier le caractère
légitime ou fautif des propos tenus par la dame A à son employeur, a
retenu que « la dame Ad A ne prouve pas que c’est la direction
des Tissandiers qui a , par ses propos injurieux, provoqué sa réaction négative,
qu’il y a lieu de relever sa carence "alors que la preuve d’un fait justificatif
invoqué par l’employée pour légitimer un comportement fautif reste à sa charge et qu’en l’espèce, en invoquant l’article 51 pour mettre à la charge de
l’employeur le fait justificatif invoqué par le travailleur pour justifier son
attitude fautive vis-à-vis de son employeur, l’arrêt attaqué a méconnu le sens et la portée des dispositions de ce texte ;
MAIS ATTENDU que l’article 51 dispose notamment qu’en cas de
contestation, la preuve de l’existence d’un motif légitime de licenciement
incombe à l’employeur ; que l’article 47 du même code fait obligation à
l’employeur de notifier par écrit au travailleur le motif du licenciement, ce qui a pour conséquence de circonscrire le débat autour des motifs invoqués sans qu’il soit possible au juge ou aux parties d’en invoquer d’autres ;
ATTENDU qu’il n’apparaît pas des énonciations de l’arrêt attaqué que la dame A ait jamais reconnu avoir adopté un comportement qui ait pu être à l’origine de son licenciement, la Cour d’Appel, après avoir très justement
relevé que la lettre de licenciement rédigée dans un style lapidaire faisait état
d’injures et d’obscénités que l’employée aurait proférées à l’endroit de la
directrice des Tissandiers, sans articuler en quoi précisément celles-ci
consistaient et sans que l’employeur ait rapporté ou offert de rapporter la preuve de la réalité des faits, a pu statuer comme elle l’a fait, sans qu’il soit possible de lui reprocher une insuffisance de motifs ou une violation de la loi ;
Qu’il s’ensuit que les moyens doivent être rejetés.
SUR le quatrième moyen tiré d’un défaut de motifs.
ATTENDU que la demanderesse fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir fixé à 9.000.000 F le montant des dommages-intérêts à allouer à l’employée en
estimant simplement que « Considérant qu’il y a lieu, compte tenu des éléments d'appréciation fournis à la Cour par la dame NDIAYEd’allouer à celle-ci la
somme réclamée de ce chef "alors que cela s’analyse comme étant un défaut de motifs puisque si la détermination du montant des dommages et intérêts relève de l’appréciation souveraine des juges du fond, ces derniers sont tenus
d’analyser et d’apprécier les documents, éléments de preuve et moyens produits pour en tirer un raisonnement propre justifiant le montant fixé au titre de ce chef de demande.
MAIS ATTENDU qu’en vertu de l’article 51 du code du travail, le
montant des dommages et intérêts est fixé compte tenu notamment des usages, de la nature des services engagés, de l’ancienneté des services, de l’âge du
travailleur et des droits acquis à quelque titre que ce soit ;
Qu'en application de ces principes, la Cour d’Appel en relevant que la
dame A percevait un salaire mensuel moyen de 210.355 F et comptait au moment de son licenciement 21 ans, un mois et 19 jours de service, a bien
indiqué des éléments sur lesquels elle s’est fondée pour fixer le montant des
sommes à allouer à l’employée tant au titre des indemnités de préavis et de
licenciement qu’à celui des dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
Qu'il s’ensuit que le moyen est mal fondé et doit être rejeté.
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi formé contre l’arrêt n°100 rendu le 19 Mars 1996 par la chambre sociale de la Cour d’Appel.
AINSI fait, jugé et prononcé par la Cour de Cassation, Troisième
Chambre, statuant en matière sociale, en son audience publique de Vacation des jour, mois et an que dessus à laquelle siégeaient :
Mme Renée BARO, Président de Chambre - Rapporteur ;
Mme Célina CISSE,
M. Ibrahima GUEYFE, Conseillers ;
En présence de Monsieur Cheikh Tidiane FAYE Avocat Général,
représentant le Ministère Public et avec l’assistance de Me Abdou Razakh
DABO, Greffier ;
ET ont signé le présent arrêt le Président — Rapporteur , les Conseillers et le Greffier.
Le Président — Rapporteur Les Conseillers Le Groffitr
perf BARO Célina CISSE Ibréhima GUEYE Abdou R. DABO
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