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30/03/2023 | OHADA | N°053/2023

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage (ohada), 30 mars 2023, 053/2023


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA) -------- COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA) --------- Première chambre ------- Audience publique du 30 mars 2023 Recours : n° 292/2021/PC du 09/08/2021
Affaire :Madame C B Ad XConseil : Maître Sidy Abdallah KANOUTE, Avocat à la Cour)
Contre
Monsieur Ab A (Conseil : Maître Massokhna KANE, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 053/2023 du 30 mars 2023
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmon

isation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre, a rendu l’Arrêt...

ORGANISATION POUR L’HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA) -------- COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE (CCJA) --------- Première chambre ------- Audience publique du 30 mars 2023 Recours : n° 292/2021/PC du 09/08/2021
Affaire :Madame C B Ad XConseil : Maître Sidy Abdallah KANOUTE, Avocat à la Cour)
Contre
Monsieur Ab A (Conseil : Maître Massokhna KANE, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 053/2023 du 30 mars 2023
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 30 mars 2023, où étaient présents :
Madame Esther Ngo MOUTNGUI IKOUE,Présidente, rapporteur Messieurs : Arsène Jean Bruno MINIME Juge Mariano Esono NCOGO EWERO Juge Mounetaga DIOUF, Juge Adelino Francisco SANCA, Juge et Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier ; Sur le renvoi, en vertu de l’article 15 du traité de l’OHADA, de la Cour Suprême du Sénégal, du recours formé par la SCP SEMBENE, DIOUF et NDIONE, Avocats au Barreau du Sénégal, Cabinet sis au 16, Rue Af Aa Ae Y à Dakar, agissant au nom et pour le compte de madame B Ad C, de nationalité sénégalaise, domiciliée au Sacré-Cœur III VDN, Villa 9510 à Dakar, Sénégal, et enregistré au greffe de la Cour de céans le 09 août 2021, sous le n° 292/2021/PC, dans la cause qui l’oppose à monsieur Ab A, de nationalité sénégalaise, domicilié au 9540 Sacré-Cœur à Dakar, Sénégal, ayant pour conseil Maître Massokhna KANE, Avocat au Barreau du Sénégal, Cabinet sis Mermoz, 1ère porte, Villa 7135, Ac, Sénégal ; en cassation de l’Arrêt n° 159 rendu le 14 octobre 2019 par la Chambre commerciale de la Cour d’appel de Dakar, Sénégal, et dont le dispositif suit : « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort ; En la forme : Vu l’ordonnance de clôture du Conseiller de la mise en état ; Au fond : Infirme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau ; Prononce la résiliation du bail ayant lié les parties ; Ordonne l’expulsion de Madame B Ad C, tant de sa personne, de ses biens, que de tous autres occupants de son chef des lieux loués ; Condamne B Ad C à payer à Ab A la somme de vingt-trois millions quatre cent mille (23 400 000) FCFA à titre d’arriérés de loyers ; Ordonne la remise en l’état des lieux loués par B Ad C ; Confirme le jugement entrepris pour le surplus ; Condamne B Ad C aux entiers dépens d’instance et d’appel. » ; La requérante invoque à l’appui de son recours les cinq moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent Arrêt ; Sur le rapport de Madame Esther Ngo MOUTNGUI IKOUE, Présidente ; Vu les articles 13 et 14et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ; Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que Madame B Ad C et monsieur Ab A étaient liés par un contrat, par lequel le dernier nommé louait, à la première, un immeuble devant abriter un établissement scolaire privé maternel, sous la dénomination « Les Taurelles » ; que des difficultés d’exécution de ce bail conduisaient les parties devant le Tribunal de commerce hors-classe de Dakar, lequel en prononçait la résolution ; qu’insatisfait de cette décision, monsieur Ab A relevait appel, et la Cour d’appel de Dakar rendait l’arrêt dont pourvoi ; Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de la loi
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de s’être borné à retenir que le bailleur avait prouvé l’existence du bail sans que la demanderesse au pourvoi justifie s’être acquittée des loyers correspondants au mois d’août 2017 à août 2018, pour la condamner à payer la somme de 23 400 000 FCFA au titre de prétendus arriérés de loyers et ordonner son expulsion des lieux, alors, selon le moyen, que la signature d’un bail n’emporte, au sens de l’article 112 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, exigibilité des loyers que s’il est prouvé que le bailleur a mis le preneur en mesure de jouir des locaux loués ; que tel n’est pas le cas, toute chose qui l’a obligée à quitter l’immeuble, après avoir fait constater le manquement du bailleur par procès-verbal d’huissier du 30 septembre 2017 ; Attendu qu’il résulte du dossier que dame B Ad C a vainement tenté d’obtenir du bailleur le règlement des arriérés d’eau et d’électricité pour lui permettre de souscrire des abonnements afin de rendre les locaux propres à l’hébergement d’une école maternelle, tel que prévu par le contrat ; que c’est dans ces circonstances qu’elle a quitté les lieux, après avoir fait dresser par un huissier procès-verbal du 30 septembre 2017 constatant l’absence d’électricité et d’eau, due à des impayés ; Attendu que le comportement de dame B s’analyse en une résiliation unilatérale du bail, qui engage la responsabilité civile de son auteur, sauf si elle est justifiée par la faute grave du cocontractant ; qu’à ce titre, en louant à madame B un immeuble non exploitable du fait d’impayés de factures d’eau et d’électricité entrainant le refus des services compétents de fournir l’eau et l’électricité à l’immeuble, et en s’abstenant de régulariser cette situation avec les services précités, le bailleur n’a pas mis son locataire en mesure de jouir pleinement des lieux loués, et dont la destination était bien précisée dans le contrat ; qu’une telle attitude constitue une faute grave justifiant la résiliation unilatérale, faute qui exempte l’auteur de la rupture de toute responsabilité ; qu’en condamnant B à payer la somme de 23 400 000 FCFA au titre des arriérés de loyers, qui débordent la période comprise entre la date de la signature du bail et celle de la résiliation unilatérale opérée par B, l’arrêt attaqué a commis le grief allégué au moyen ; qu’il échet de le casser et d’évoquer, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres moyens ; Sur l’évocation Attendu que par exploit en date du 26 février 2019, monsieur Ab A a interjeté appel contre le jugement n° 229 rendu le 13 février 2019 par le Tribunal de commerce hors-classe de Dakar, dans la cause qui l’oppose à madame B Ad C et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale, en premier ressort et en dernier ressort ; EN LA FORME  Vu l’ordonnance de clôture n° 49/2019 en date du 23 janvier 2019 ; Déclare l’action recevable ; AU FOND ;
Prononce la résolution du bail liant les parties ; Ordonne à M. Ab A de rembourser à Mme B Ad C la somme de 6 250 000 FCFA ; Déboute Mme B Ad C de sa demande de dommages intérêts ;
Déboute Ab A de toutes ses demandes ;
Dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution sur minute et avant enregistrement ;
Met les dépens à la charge de M. Ab A. » ; Attendu que l’appelant fait grief au jugement d’avoir prononcé la résolution, par ailleurs, non demandée par les parties, du contrat de bail signé le 04 mai 2017, entre lui et madame B Ad C, à laquelle il reproche pourtant divers manquements de ses obligations consécutives au contrat de bail professionnel conclu entre eux ; qu’il demande à la cour d’infirmer ledit jugement et sollicite la résiliation du bail, la condamnation de B Ad C à payer les arriérés de loyers, sa condamnation à la remise en l’état des lieux loués ; qu’il sollicite également le rejet de la demande reconventionnelle de B Ad C ; Attendu que cette dernière, en la forme, oppose l’irrecevabilité de l’appel, le jugement attaqué ayant été rendu en dernier ressort ; qu’au fond, elle plaide la confirmation pure et simple de la décision dont appel ; Sur la recevabilité de l’appel Attendu que par ordonnance du 1er juillet 2029, le Conseiller de la mise en état a déclaré l’appel recevable et ordonné la clôture des débats, toutes les parties ayant été représentées et ayant conclu ; qu’il y a lieu de déclarer l’appel recevable ; Sur les demandes de résiliation et d’expulsion de monsieur Ab A Attendu qu’au soutien de son appel, monsieur Ab A explique que, par exploit du 21 septembre 2018, il a saisi le Tribunal de commerce hors classe de Dakar pour voir prononcer la résiliation du contrat de bail le liant à madame B Ad C, à l’expulser des lieux loués pour non-respect de ses engagements, notamment le paiement des loyers pour une période de treize mois, d’août 2017 à août 2018, soit une somme totale de 23 400 000 FCFA, de condamner celle-ci au paiement des loyers impayés, ainsi qu’à la remise en l’état des locaux loués ;
Attendu que Madame B Ad C considère que le bail n’a pu prendre effet, dans la mesure où, faute d’eau et d’électricité, elle ne pouvait pas mener dans l’immeuble l’activité pour laquelle ledit bail avait été conclu, à savoir l’hébergement d’une école maternelle ; qu’elle soutient que le bailleur a manqué à ses obligations, en refusant de purger les impayés d’eau et d’électricité ; que ce comportement fautif du bailleur l’a emmenée à quitter les locaux, après un constat d’huissier ;
Attendu que pour les mêmes motifs que ceux ayant conduit à la cassation de l’arrêt attaqué, il y a lieu de rejeter, comme non fondée, la demande de Ab A, d’autant que le procès-verbal de constat d’huissier du 14 décembre 2017, produit par le bailleur lui-même, montre bien que dame B avait déjà quitté les locaux à cette date ; Qu’il y a lieu également de rejeter la demande d’expulsion comme sans objet ;
Sur le paiement des arriérés de loyers Attendu que le juge devait se déterminer sur le nombre de loyers à payer par madame B Ad C ; que pour le bailleur, le contrat est resté en vigueur jusqu’à la date de l’assignation en paiement, et qu’il tenait pour dus, les loyers des mois d’août 2017 à août 2018, soit 13 mois ; Attendu que l’intimé conclut au rejet de cette demande ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que la rupture unilatérale du contrat est intervenue suite au procès-verbal de constat d’huissier du 30 septembre 2017 ; que partant, madame B Ad C ne peut être condamnée qu’à payer les loyers de juillet à octobre 2017, période pendant laquelle elle a effectivement donné effet au contrat par sa présence sur les lieux, soit la somme de 7 200 000 FCFA, de laquelle l’on déduira celle de 6 250 000 FCFA donnée au titre d’avance de loyers et de caution ;
Que l’intimée, et demanderesse reconventionnelle, doit être condamnée à payer à l’appelant la somme de 950 000 FCFA ; Sur la demande de remise en l’état de l’immeuble loué Attendu que le bailleur reproche à madame B Ad C d’avoir entrepris des travaux dans son immeuble, sans son accord ; qu’il sollicite sa condamnation à leur remise en l’état ; que madame B oppose le défaut d’un état des lieux contradictoire à la signature du bail, dû à la précipitation observée lors de sa conclusion ;
Attendu qu’aux termes de l’article 105 de l’AUDCG « le bailleur est tenu de délivrer les locaux en bon état. Il est présumé avoir rempli cette obligation…. – lorsque le preneur a signé le bail sans formuler des réserves quant à l’état des locaux » ; qu’il en résulte que lorsque le preneur n’a pas pris le soin de faire établir un état des lieux à la prise d’effet du contrat, le bailleur est présumé avoir livré à celui-ci un immeuble en bon état ; que tel est le cas en l’espèce ;
Attendu toutefois que la demande de Ab A, en l’absence de cet état des lieux contradictoire, d’une description précise des dégradations apportées par madame B Ad C, le procès-verbal dressé par l’huissier le 14 décembre 2017 à la demande de Ab A n’étant pas suffisamment exhaustif, ne permet pas à la Cour de se déterminer utilement ; qu’il y a lieu de rejeter cette demande en l’état, comme non justifiée ; Sur les demandes de madame B Ad C Attendu que madame B Ad C sollicite la restitution de ses avances, cautions et la condamnation du bailleur à lui payer la somme de 50 000 000 FCFA au titre de dommages et intérêts ;
Attendu que l’appelant conclut au rejet de ces demandes ;
Attendu qu’il a été retenu que madame B doit payer des loyers pour les mois de juillet à octobre 2017, soit la somme de 7 200 000 FCFA ; Que sa demande de restitution de la somme de 6 250 000 FCFA donnée au titre d’avance de loyers et de caution doit être rejetée comme non fondée ;
Attendu, s’agissant de la demande de dommages et intérêts, que la faute grave du bailleur ayant été à l’origine de la résiliation unilatérale du bail par la preneuse, il y a lieu de dire fondée la demande de dame B, mais la dire exagérée et la ramener au juste montant de 1 000 0000 FCFA ; Sur les dépens Attendu que monsieur Ab A succombant, sera condamné aux dépens ;
PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Casse et annule l’Arrêt n° 159 rendu le 14 octobre 2019 par la Cour d’appel de Dakar ; Evoquant et statuant à nouveau En la forme Déclare recevable l’appel de Ab A ;
Au fond Infirme le Jugement n° 229 rendu le 13 février 2019 par le Tribunal de commerce hors classe de Dakar ;
Constate la résiliation unilatérale du bail par madame B Ad C pour faute grave du bailleur ;
La condamne à payer à ce dernier la somme de 7 200 000 FCFA représentant les loyers des mois de juillet à octobre 2017 ; Dit que de ce montant, il sera déduit la somme de 6 250 000 déjà perçue par le bailleur au titre de loyers et caution et qu’elle payera à monsieur Ab A la somme de 950 000 (neuf cent cinquante mille) FCFA ;
Dit sans objet la demande d’expulsion ;
Dit non justifiée, en l’état, la demande de remise en l’état des lieux loués et la rejette ;
Condamne à titre reconventionnel monsieur Ab A à payer à madame B Ad C la somme de 1 000 000 FCFA au titre de dommages et intérêts ;
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes ;
Condamne Ab A aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé : La Présidente Le Greffier


Synthèse
Numéro d'arrêt : 053/2023
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage.(ohada);arret;2023-03-30;053.2023 ?
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