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23/06/2022 | OHADA | N°104/2022

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 23 juin 2022, 104/2022


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Assemblée Plénière
Audience publique du 23 juin 2022
Recours : n° 016/2021/PC du 20/01/2021 et 285/2021/PC du 28/07/2021
Affaire : Entreprise X C B (EMM SARLU)
(Conseils : Maîtres Patient MUKENDI KABEYA, Christian Kadima KAKESSE, Jacques
Mukonga Sefu et Eugénie Yuma, MANINGU et KOUAME BI IRITIE, Avocats à la Cour)
Contre
Société KAMOTO COPPER COMPANY SA
(Conseils : Maîtres Marie Michon-Charl

es, John Kalala Kabamba et Jacques Shesha, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 104/2022 du 23 juin 2022
L...

ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Assemblée Plénière
Audience publique du 23 juin 2022
Recours : n° 016/2021/PC du 20/01/2021 et 285/2021/PC du 28/07/2021
Affaire : Entreprise X C B (EMM SARLU)
(Conseils : Maîtres Patient MUKENDI KABEYA, Christian Kadima KAKESSE, Jacques
Mukonga Sefu et Eugénie Yuma, MANINGU et KOUAME BI IRITIE, Avocats à la Cour)
Contre
Société KAMOTO COPPER COMPANY SA
(Conseils : Maîtres Marie Michon-Charles, John Kalala Kabamba et Jacques Shesha, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 104/2022 du 23 juin 2022
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), a rendu, en Assemblée Plénière, l’Arrêt suivant en son audience publique du 23 juin 2022, où étaient présents :
Madame Esther Ngo MOUTNGUIIKOUE, Présidente
Messieurs Armand Claude DEMBA, 1°" Vice-Président
Mahamadou BERTE, 2"d Vice-Président, Rapporteur Birika Jean Claude BONZI, Juge
Fodé KANTE, Juge
César Apollinaire ONDO MVE, Juge
Robert SAFARI ZIHALIRWA, Juge
Madame Afiwa-Kindena HOHOUETO, Juge
Messieurs Arsène Jean Bruno MINIME, Juge
Mariano Essono NCOGO EWORO, Juge
Sabiou NAISSA MAMANE, Juge
et Maître Acka Edmond ASSIEHUE, Greffier en chef ;
Sur les procédures suivantes :
1) Le recours en contestation de validité de la sentence finale rendue le 14 octobre 2020, enregistré au greffe de la Cour de céans le 20 janvier 2021 sous le n° 016/2021/PC, formé par Maîtres Patient MUKENDI KABEYA, Christian Kadima KAKESSE, Jacques Mukonga Sefu et Eugénie Yuma MANINGU et KOUAME BI IRITIE, Avocats à la Cour, demeurant à 239A, Avenue Likasi, Commune de Lubumbashi, agissant au nom et pour le compte de Entreprise X C B dite EMM SARLU, ayant son siège social au n°120 de l’Avenue Kakifuluwe, Commune et Ville de Kolwezi, quartier Mutoshi, dans la cause qui l’oppose à la société KAMOTO COPPER COMPANY SA dite KCC, ci-dessous identifiée,
2) La requête aux fins d’exequatur des sentences partielle et finale rendues le 24 juillet 2019 et le 14 octobre 2020, enregistrée au greffe de la Cour de céans le 28/07/2021, sous le n° 285/2021/PC, formée par Maîtres Marie Michon-Charles du Cabinet Résonances Avocats, 62, boulevard de la Tour Maubourg 75007, Paris France et Ac Ai Ab du Cabinet J & R Société d’avocats, 158B, avenue Ag, Commune de Lubumbashi, Lubumbashi/Katanga, Ah Af du Congo, agissant au nom et pour le compte de la société Kamoto Copper Company SA, société anonyme avec conseil d’administration, dont le siège social est sis Usine de Luili, Commune de Dilala, ville de Kolwezi, province de Lualaba, Ah Af du Congo, dans la cause qui l’oppose à l’'ENTREPRISE X C B, ci-dessus identifiée,
Sur le rapport de Monsieur Mahamadou BERTE, Second Vice-Président,
L’Entreprise X C B dite EMM SARLU invoque à l’appui de son recours les moyens d’annulation tels qu’ils figurent dans la requête jointe au présent arrêt ;
La société KAMOTO COPPER COMPANY SA invoque les moyens tels qu’ils figurent dans sa requête aux fins d’exequatur annexée au présent Arrêt ;
Vu les dispositions du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l'OHADA ;
Vu le Règlement d’arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ;
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que le 26 février 2014, l’Entreprise X C B, en abrégé EMM SARLU et la société KAMOTO COPPER COMPANY SA dite KCC SA ont conclu un accord de
services portant sur la fourniture, par la première, de travaux du génie civil et de services de soutien à la mine souterraine de la seconde ; que le contrat était conclu pour une durée de deux ans, soit jusqu’au 25 février 2016 « ou à la fin des services, selon le problème en premier » conformément à l’article 4 de l’annexe A de l’accord ; que la société KAMOTO COPPER COMPANY a, par lettre en date du 15 septembre 2015, informé sa cocontractante de la résiliation de l’accord à partir du 15 octobre 2015; qu’estimant que cette résiliation est illégale, l’Entreprise X C B a, conformément à la clause compromissoire incluse dans l’accord, saisi le 15 décembre 2017 le Centre d’arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’une demande d’arbitrage ; qu’un tribunal arbitral siégeant sous l’égide de ladite Cour a été constitué et a, d’une part, rendu le 24 juillet 2019 la sentence partielle n°013/17/ARB dont le dispositif est ainsi conçu :
« Après avoir donné aux Parties l’opportunité d’exposer leurs positions respectives, le 24 juillet 2019, le Tribunal Arbitral a rendu la Sentence Partielle dans laquelle il :
(1)Déclare recevables toutes les demandes de redressement de la défenderesse qui font l’objet de la présente Sentence Partielle ;
(2)Déclare que la demanderesse a violé l’article 10.5 du Règlement d’Arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires de 1999 en omettant de communiquer, sans délai, sa demande de saisie conservatoire de 2016 ; sa demande de saisie conservatoire de 2018 ; l’ordonnance du Tribunal de commerce de Kolwezi accordant la demande de saisie conservatoire de 2018 et sa demande d’un séquestre ;
(3) Déclare que la demanderesse a violé la convention d’arbitrage lorsqu’elle a présenté sa demande de saisie conservatoire de 2018 et sa demande de désignation d’un séquestre auprès du Tribunal de commerce de Kolwezi ;
(4)Déclare que le comportement de la demanderesse en retardant le dépôt de son mémoire en demande constitue de la mauvaise foi, les autres prétentions de la défenderesse quant à la mauvaise foi de la demanderesse étant rejetées ou une décision à cet égard étant réservée conformément au paragraphe 8.2.1 ci-dessus ;
(5) Condamne la demanderesse à payer à la défenderesse 9.000 euros à
titre de remboursement des honoraires et débours de la défenderesse
afférents à l’objet de la présente Sentence Partielle ;
(6)Rejette les demandes de la défenderesse visant à obtenir : 1) une provision pour frais d’un montant de 250.000 euros, 2) qu’il soit ordonné à la demanderesse d’informer le Tribunal de son intention de
se conformer à l’ ordonnance de provision pour frais dans les 30 jours suivant ladite ordonnance, et 3) que la défenderesse soit autorisée par avance à déposer une demande de désistement de la procédure dans les 60 jours suivant l’ordonnance de provision pour frais si la demanderesse ne fournit pas le cautionnement avant cette date ; et
(7) Réserve à une étape ultérieure de la procédure toutes les autres réclamations et demandes de redressement (y compris les frais juridiques et autres frais des parties qui n’ont pas été décidés dans la présente Sentence Partielle). » ;
Et, d’autre part, rendu le 14 octobre 2020, la sentence finale dont le dispositif : « Pour les raisons mentionnées ci-dessus, le Tribunal rend à l’unanimité la sentence finale suivante dans laquelle il :
1. Déclare qu’elle a compétence sur le différend, à l’exception des réclamations (i) de l’ENTREPRISE X C B relatives aux factures de gasoil avant l’entrée en vigueur de l’Accord et (ii) concernant les travaux de canonnage T17 ;
2. Rejette toutes les autres allégations de l’ENTREPRISE X C B avec préjudice ;
3. Condamne l’ENTREPRISE X C B à payer à KAMOTO COPPER COMPANY SA les montants suivants :
(i) 343 591,43 € en frais juridiques et dépenses pour le Cabinet Tour Maubourg et Aj Ae ;
(ii)12500 Ad Aa en frais juridiques pour les avocats du Cabinet J & R Société d’Avocats ;
(iii) XOF 45.750.000 F en remboursement à KAMOTO COPPER COMPANY SA des avances sur les coûts qu’elle a payées à la CCJA ;
4. Ordonne l’exécution provisoire de la présente sentence finale ; et 5. Rejette toutes les autres: demandes, … demandes reconventionnelles et demandes en réparation et/ou demandes de procédure. » ;
Sur la jonction de procédures
Attendu que la Cour de céans est saisie d’un recours en annulation de la sentence arbitrale rendue le 14 octobre 2020 et d’une requête aux fins d’exequatur de la même sentence et de la sentence partielle n°013/17/ARB du 24 juillet 2019 ;
Attendu que les deux procédures étant liées, il y a lieu, conformément à l’article 30.3 du Règlement d’arbitrage du 11 mars 1999 applicable à la cause, d’ordonner leur jonction pour être statué par une seule et même décision ;
Sur la recevabilité du recours en contestation de validité de sentence
Attendu que la société KAMOTO COPPER COMPANY SA dite KCC SA a, dans ses écritures reçues le 08 août 2021 au greffe de la Cour de céans, soulevé l’irrecevabilité de la requête en contestation de validité de sentence initiée par l’Entreprise X C B ; que cette exception n’est cependant pas fondée au regard des éléments du dossier ; que la recevabilité du recours a même été admise par ladite société tant au regard du respect du délai de deux mois prescrit à l’article 29.3 du Règlement d’arbitrage du 11 mars 1999, seul applicable en l’espèce, la demande d’arbitrage ayant été introduite sous son empire, qu’au regard de la justification de l’existence juridique de la requérante, il y a donc lieu de déclarer le recours recevable ;
Sur le motif de contestation de la validité de la sentence tiré de la
composition irrégulière du tribunal arbitral
Attendu que l’Entreprise X C B sollicite l’annulation de la sentence querellée au motif que celle-ci a été rendue par un tribunal irrégulièrement composé ; qu’à cet égard, elle expose qu’après la nomination des arbitres, elle s’est rendue compte que celui désigné par la société KAMOTO COPPER COMPANY SA avait récemment statué et occupé pour le compte de la société Gécamines qui est partenaire directe de KCC SA ; que craignant le risque de manque d’impartialité elle a, conformément à l’article 4 du Règlement d’arbitrage, récusé ledit arbitre sans obtenir gain de cause ;
Mais attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 4 du Règlement d’arbitrage du 11 mars 1999 : « 4.1 tout arbitre nommé ou confirmé doit être et demeurer indépendant des parties en cause. (...) Avant sa nomination ou sa confirmation par la Cour, l’arbitre pressenti, auquel il a été donné connaissance des informations sur le litige figurant dans la demande d’arbitrage et, si elle est parvenue, dans la réponse à celle-ci, fait connaitre par écrit au Secrétaire Général de la Cour les faits ou circonstances qui pourraient être de nature à mettre en cause son indépendance dans l’esprit des parties.
Dès réception de cette information, le Secrétaire Général de la Cour la communique par écrit aux parties et leur fixe un délai pour faire connaitre leurs observations éventuelles. (…)
4.2 la demande de récusation, fondée par une allégation de défaut d’indépendance ou sur tout autre motif, est introduite par l’envoi au Secrétaire Général de la Cour d’une déclaration précisant les faits et circonstances sur lesquels est fondée cette demande.
Cette demande doit être envoyée par la partie, à peine de forclusion, soit dans les trente (30) jours suivant la réception par celle-ci de la notification de la nomination ou de la confirmation de l’arbitre par la Cour, soit dans les trente (30) jours suivant la date à laquelle la partie introduisant la récusation a été informée des faits et circonstances qu’elle évoque à l’appui de sa demande de récusation, si cette date est postérieure à la réception de la notification susvisée… » ;
Attendu, en l’espèce, qu’il résulte des éléments du dossier, que le Secrétaire Général du Centre d’arbitrage de la Cour de céans avait soumis aux observations des parties, la déclaration complémentaire de Monsieur A, arbitre pressenti, par laquelle celui-ci précisait qu’il avait, par le passé, été désigné par la Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de Commerce International dite CCI, pour intervenir à titre d’arbitre d’urgence dans une affaire qui opposait la Gecamines, actionnaire de KCC, à une société Mauricienne sans rapport avec la procédure arbitrale en cours ;
Attendu que l’Entreprise X C, qui soutient avoir usé de son droit de récusation, n’apporte aucune preuve de cette allégation ; qu’au contraire, son conseil qui avait auparavant soutenu avoir soulevé des observations dans le délai imparti par mail en date du 09 avril 2018, adressé au Secrétaire Général, a fini par reconnaitre dans un mail du 02 mai 2018 que « relativement à nos échanges d’hier je suis désolé de vous signifier que cet email du 09 avril n’est jamais parti ; je vous prie de prendre en gré mes excuses. Je vais en tirer les conséquences. » ; qu’au surplus, dans son mémoire en réponse, reçu au greffe le 08 février 2022, EFMM SARLU n’a pu édifier sur la saisine de la Cour de céans de sa requête aux fins de récusation puisqu’il y écrit : « Que craignant pour le risque manifeste d’impartialité qu’elle encourait, la demanderesse EMM le dénonça et usa de son droit de récusation pourtant lui légalement reconnu dans requête en récusation adressée au Secrétaire Général de la C CJA référencée.…ou mail du… » ; qu’ainsi, EMM qui, ni avant ni après la nomination ou la confirmation de Monsieur A en qualité d’arbitre, n’a introduit aucune demande de récusation et qui de surcroit a signé le procès-verbal constatant l’objet de l’arbitrage et fixant le déroulement de la procédure d’arbitrage prévu à l’article 15 du Règlement d’arbitrage, est mal venue maintenant à invoquer l’irrégularité de la composition du tribunal arbitral, ceci d’autant plus qu’elle ne justifie pas en quoi le fait pour l’arbitre d’avoir, par le passé, été désigné en cette même qualité dans une cause impliquant l’actionnaire de son adversaire, est de nature à entamer l’indépendance et l’impartialité dudit arbitre ; qu’il y a lieu de rejeter ce motif d’annulation de la sentence ;
Sur le motif de contestation de validité de la sentence tiré du non-respect de sa mission par le tribunal arbitral
Attendu que l’Ak X C conteste la validité de la sentence en soutenant que le tribunal n’a pas respecté la mission qui lui a été confiée en ce que, d’une part, ledit tribunal n’a pas, conformément à l’ordonnance de procédure n°01, jugé opportun d’examiner les preuves qu’elle a présentées et s’est limité à dire qu’elle n’a jamais apporté les preuves de ses allégations, alors qu’elle a, tant dans la requête introductive d’instance que lors des diverses audiences, toujours étayé ses allégations des dispositions légales applicables en la matière et accompagné celles-ci des preuves consistant notamment en des factures, mails, lettres et, d’autre part, que le tribunal arbitral est sorti de la mission qui lui a été assignée «en s’étalant longuement et inutilement sur une demande en dédommagement » initiée par la partie adverse à la suite des mesures provisoires prises par une juridiction d’un Etat partie, au point de rendre des ordonnances de procédure de nature à offrir à ladite partie les moyens d’exercer une influence dans les affaires pendantes devant la juridiction étatique saisie ;
Mais attendu, d’une part, que la mission du tribunal arbitral est délimitée par l’objet du litige ; que celui-ci est déterminé par les prétentions et demandes respectives des parties telles qu’exposées dans le procès-verbal constatant l’objet de l’arbitrage et fixant le déroulement de la procédure prévue à l’article 15 du Règlement d’arbitrage et, d’autre part, que le non-respect par le tribunal arbitral de sa mission ne peut avoir pour objet la révision au fond de la sentence ; qu’il permet seulement à la Cour de céans de vérifier si les arbitres se sont ou non conformés à
leur mission, sur les points où leur décision est critiquée sans avoir à apprécier le bien-fondé de ladite décision ;
Attendu, en l’espèce, que le tribunal arbitral, après avoir, dans la sentence contestée, d’une part, noté au paragraphe 7 que :« … le tribunal arbitral (le « tribunal ») a examiné tous les documents gisant au dossier, qu’ils soient de nature factuelle ou juridique, ainsi que toutes les allégations des parties, même si certains de ces documents ou allégations ne sont pas expressément mentionnés dans l’attribution finale », et, d’autre part, énuméré les prétentions respectives des parties, du paragraphe 93 au paragraphe 100, a, dans les paragraphes 122 à 252, examiné successivement chacune de ces prétentions et leur a donné une réponse ; qu’au nombre de ces prétentions, figure la demande de la société KCC relative aux frais de la procédure ; qu’il y a donc lieu de dire que le tribunal arbitral s’est conformé à la mission qui lui a été confiée et est resté dans les limites de ladite mission en prenant l’ordonnance de procédure destinée à informer une juridiction nationale saisie d’une contestation visant une mesure provisoire prise par celle-ci, qu’il n’est pas saisi du même contentieux contrairement à ce que l’Entreprise X C B avait fait croire devant ladite juridiction nationale ; qu’il y a donc lieu de rejeter ce motif ;
Sur le motif de contestation de validité de la sentence tiré de la violation
du principe du contradictoire
Attendu que l’Entreprise X C B reproche au tribunal arbitral de n’avoir pas respecté le principe du contradictoire en ce, d’une part, qu’il a refusé de recevoir, comme étant nouvelle sa demande de réouverture des débats, qui devait lui permettre de faire valoir des moyens utiles à sa défense et, d’autre part, qu’il n’a pas soumis de questionnaire écrit aux parties, contrairement à la décision qu’il avait prise dans ce sens eu égard à l’impossibilité de tenir l’audience ultime en raison de la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid 19 ou de procéder par téléconférence et, enfin, qu’il a déclaré recevable la demande d’exécution provisoire de KCC déposée après la signature de l’Acte de mission ;
Mais attendu que le respect du principe du contradictoire suppose que chacune des parties ait pu faire connaitre ses prétentions et discuter celles de son adversaire de telle sorte que rien de ce qui a servi à fonder la sentence n’ait échappé aux débats ;
Attendu, en l’espèce, qu’il ressort des éléments du dossier, que les parties et le tribunal arbitral ont, ainsi que cela ressort de l’ordonnance de procédure n°1 du 18 octobre 2018, signé le calendrier de procédure en vertu duquel elles ont échangé des mémoires sur le fond jusqu’au 4 mai 2020, date de dépôt du dernier mémoire en duplique ; qu’ainsi, par ordonnance de procédure n° 09 en date du 13 mai 2020, le tribunal arbitral a clos les débats en précisant qu’il « confirme qu’il fournira aux parties une liste de questions dans la mesure où elles sont pertinentes ou les informera qu’il n’a pas besoin d’autres informations ou preuves en juin 2020 » ( 860 de la sentence finale) ; que de fait, par ordonnance de procédure n°11 du 18 juin 2020, le tribunal arbitral a décidé qu’il « ne requiert plus aucune information de la part des parties tant sur les questions de fond que de compétence de cette affaire » (875 de la sentence) ; qu’au regard de ce qui précède, il y a lieu de dire que le tribunal arbitral n’a pas enfreint le principe du contradictoire, en déclarant irrecevable la note en cours de délibéré déposée tardivement et en informant les parties qu’il ne leur soumettra plus de questionnaire ;
Attendu, par ailleurs, que pour recevoir la demande d’exécution provisoire de KCC, formulée dans le mémoire sur les frais déposé après la signature de l’Acte de mission, le tribunal arbitral a retenu au paragraphe n°215 de la sentence que bien que constituant une demande nouvelle, elle ne dépasse pas les limites de l’Acte de mission « car elles sont directement liées au litige des parties et ne modifient ni n’ajoutent à la gamme de considérations exposées dans l’Acte de mission. En tout état de cause, la demanderesse n’a soulevé aucune objection quant à la recevabilité des demandes d’exécution provisoire de la défenderesse. » ; que la Cour de céans n’ayant pas le pouvoir d’apprécier ou de remettre en cause une telle motivation, il y a lieu de dire que le tribunal n’a pas violé le principe de l’égalité de traitement entre les parties ; qu’il convient donc de rejeter le moyen tiré du non-respect du principe du contradictoire comme inopérant ;
Sur le motif de contestation de validité de la sentence tiré de sa contrariété
à l’ordre public international
Attendu que l’Ak X C B soutient que la sentence est contraire à l’ordre public international en ce, qu’alors que c’est le droit congolais qui est applicable au litige, le tribunal arbitral a refusé d’appliquer les principes généraux de droit, d’une part et, a, d’autre part, violé l’article 441 du code civil congolais ;
Mais attendu que la sentence arbitrale a relevé que, selon la loi congolaise, le recours aux principes généraux de droit congolais n’est prescrit que lorsque la matière n’est pas prévue par un décret, un arrêté ou une ordonnance déjà promulguée ; que l’objet du différend, en l’espèce, fait spécifiquement l’objet du décret des contrats ou des obligations contractuelles du 30 juillet 1888 ; que les principes généraux de droit congolais ne peuvent donc recevoir application ;
Attendu que, pour ce qui est de la violation de l’article 441 du Code civil, le Tribunal arbitral a également indiqué que cette disposition ne s’applique qu’aux marchés à forfait et que tel n’est pas le cas en l’espèce ;
Attendu qu’au regard de ces motivations, il y a lieu de déclarer ce motif mal fondé et de le rejeter, aucune contrariété à l’ordre public international n’étant caractérisée ;
Sur le motif de contestation de validité de la sentence, tiré du défaut de motivation
Attendu que la requérante reproche au tribunal arbitral de n’avoir pas motivé sa décision et de s’être « contenté de reprendre à la limite près, l’argumentaire de la partie intimée » tout en rejetant en bloc ses prétentions pourtant émaillées de preuve ;
Mais attendu que l’absence de motivation de la sentence arbitrale n’est pas incluse dans les cas d’ouverture à contestation de validité prévus à l’article 30.6 du Règlement de d’arbitrage du 11 mars 1999 ; qu’il y a lieu pour la Cour de déclarer ce motif de contestation irrecevable ;
Attendu, en définitive, qu’aucun des motifs d’annulation ou de contestation de la validité de la sentence entreprise n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours formé par l’Entreprise X C B ;
Sur la demande d’exequatur
Attendu que la demande d’exequatur concerne tant la sentence partielle n° 013/2017/ARB du 24 juillet 2019 que la sentence finale du 14 octobre 2020 ; que la première n’ayant fait l’objet d’aucune voie de recours, est devenue définitive ; que le recours en contestation de validité de la sentence finale ayant été rejeté, il y a lieu en application de l’article 30 du Règlement d’arbitrage de la Cour, d’ordonner l’exequatur desdites sentences ;
Sur la demande de liquidation des dépens
Attendu que la société KAMOTO COPPER COMPANY SA dite KCC demande que la Cour de céans, en application de l’article 43 du Règlement de procédure de ladite Cour, condamne l’Entreprise X C B aux entiers dépens dont la liquidation doit inclure, notamment, et non exclusivement, un montant de 35.000.000 FCFA pour les honoraires des avocats, au taux d’intérêts judiciaires de 6% l’an en vigueur en Ah Af du Congo, applicable à compter de la notification du présent Arrêt ;
Mais attendu que, devant la Cour de céans, la liquidation des dépens est régie par l’article 43 du Règlement susvisé ; que tels que prévus par cet article, les dépens ne peuvent être liquidés et taxés qu’après le prononcé de l’arrêt mettant fin à l’instance ; qu’il échet de déclarer la demande irrecevable en l’état ;
Sur les dépens
Attendu que l’Entreprise X C B ayant succombé, sera condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Ordonne la jonction du recours en annulation de la sentence arbitrale rendue le 14 octobre 2020 et de la requête aux fins d’exequatur de la même sentence et de la sentence partielle n° 013/17/ARB du 24 juillet 2019 ;
Déclare le recours en contestation de validité recevable ;
Le rejette ;
Ordonne l’exequatur des sentences partielle et finale rendues respectivement le 24 juillet 2019 et le 14 octobre 2020 par le tribunal arbitral ;
Déclare irrecevable en l’état la demande de liquidation des dépens ;
Condamne l’Entreprise X C B aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
La Présidente
Le Greffier en chef


Synthèse
Numéro d'arrêt : 104/2022
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2022-06-23;104.2022 ?
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