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17/02/2022 | OHADA | N°025/2022

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 17 février 2022, 025/2022


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(O.H.A.D.A)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(C.C.J.A)
Première chambre
Audience publique du 17 février 2022
Pourvoi : n° 019/2020/PC du 06/02/2020
Affaire : Société SHIRE PETROLEUM Sarl
(Conseils : Maître MASUDI KADOGO & Associés, Avocats à la Cour)
Contre
Monsieur AH AG
(Conseil : Maître CHIRI KAHATWA MUHIMA, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 025/2022 du 17 février 2022
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Orga

nisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre, présidée par Madame Est...

ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(O.H.A.D.A)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(C.C.J.A)
Première chambre
Audience publique du 17 février 2022
Pourvoi : n° 019/2020/PC du 06/02/2020
Affaire : Société SHIRE PETROLEUM Sarl
(Conseils : Maître MASUDI KADOGO & Associés, Avocats à la Cour)
Contre
Monsieur AH AG
(Conseil : Maître CHIRI KAHATWA MUHIMA, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 025/2022 du 17 février 2022
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre, présidée par Madame Esther Ngo MOUTNGUI IKOUE et assistée de Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier, a rendu à son audience publique du 17 février 2022 l’Arrêt dont la teneur suit, après délibération du collège de juges composé de :
Messieurs : César Apollinaire ONDO MVE, Président,
Birika Jean Claude BONZI, Juge
Mesdames : Afiwa-Kindéna HOHOUETO, Juge
Esther Ngo MOUTNGUI IKOUE, Juge, rapporteur Monsieur Sabiou MAMANE NAISSA, Juge
Sur le recours enregistré sous le n°019/2020/PC formé le 06 février 2020 par Maîtres MASUDI KADOGO &Associés, Avocats au Barreau du Nord-Kivu, Cabinet sis au n°20, Avenue des Touristes, Quartier des Volcans, Commune et Ville de Goma, Province du Nord-Kivu, en République Démocratique du Congo, au nom et pour le compte de la société SHIRE PETROLEUM Sarl, laquelle a son siège au n°5 de l’Avenue de la Révolution, Commune et Ville de Lubumbashi, Province du Haut Ab en République Démocratique du Congo, dans la cause qui l’oppose à monsieur AH AG, propriétaire des Aa AG, demeurant au n°151/9, Avenue des Touristes, Quartier des Volcans,
Commune et Ville de Goma, Province du Nord-Kivu, ayant pour conseil Maître CHIRI KAHATWA MUHIMA Hubert, Avocat au Barreau du Nord-Kivu, Goma, République Démocratique du Congo,
en cassation de l’arrêt RCA 4088/4100 rendu le10 juin 2019 par la Cour d’appel du Nord-Kivu, dont le dispositif est le suivant :
« C’est pourquoi ;
La Cour, Section judiciaire ;
Statuant contradictoirement ;
-Le Ministère public entendu ;
Sous RCA 4088 ;
-Reçoit l’appel de la Société SHIRE PETROLEUM et le déclare partiellement fondé ;
-Annule le jugement RH 001/2015 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et faisant ce que le premier juge aurait dû faire ;
-Reçoit le moyen tiré du défaut de qualité mais le déclare non fondé ;
-Reçoit l’action originaire mais la déclare non fondée ;
-Déclare par conséquent nulle et non avenue la saisie immobilière ;
Sous RCA 4100
-Reçoit tous les moyens exceptionnels soulevés mais les déclare non fondés ;
-Dit recevable l’appel de la société SHIRE PFTROLEUM mais le déclare non fondé ;
-Confirme le jugement RCE 439 en toutes ses dispositions ;
-Met les frais à la charge de l’appelante » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi quatre moyens de cassation, tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent Arrêt ;
Sur le rapport de madame Esther Ngo MOUTNGUI IKOUE, Juge ;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’'OHADA ;
Attendu, selon les énonciations de l’arrêt attaqué, que, se prévalant d’une créance objet d’un procès-verbal de conciliation sur lequel était apposé la formule exécutoire, la société SHIRE PETROLEUM initiait une procédure de saisie immobilière sur l’immeuble portant le numéro SU 125, couvert par le certificat d’enregistrement 64 Folio 47 appartenant à monsieur AH AG, propriétaire des Aa AG ; que pendant que cette procédure suivait son cours, ce dernier engageait, par-devant le Tribunal de commerce de Goma, une action en annulation du commandement à lui servi et en contestation de l’existence de la créance fondement de la saisie immobilière, sous RCE 439 ; que statuant sur les dires et observations annexés au cahier des charges déposé par Z Y, le Tribunal de Goma, par jugement RH 01/2015 du 01 octobre 2019, annulait la procédure de saisie immobilière ; qu’avant, statuant sous RCE 439 le 17 octobre 2018, le même tribunal constatait que la créance alléguée par la société SHIRE PETROLEUM était totalement apurée, et annulait le commandement aux fins de saisie immobilière ; que sur appel de la société demanderesse contre les deux jugements, les procédures étaient jointes sous le numéro RCA 4088/4100, et l’arrêt objet du présent pourvoi était rendu ;
Sur l’irrecevabilité du mémoire en réponse, relevée d’office
Attendu qu’aux termes des articles 28, 29 et 30 du Règlement de procédure de la CCJA, toute partie doit être assistée d’un avocat muni d’un mandat spécial ;
Attendu qu’en l’espèce, le 23 février 2021, la Cour recevait un « mémoire en réplique aux moyens de la société SHIRE PETROLUM, demanderesse en cassation », produit par Maître CHIRI KAHATWA MUHIMA Hubert, Avocat à la Cour, pour le compte de AH AG, auquel n’était joint aucun mandat donné par le défendeur ; que la demande de régularisation initiée par la Cour et matérialisée par une lettre du Greffier en chef ayant échoué, il y a lieu de déclarer irrecevable ledit mémoire ;
Sur la première branche du premier moyen, tirée de la violation de la loi
Attendu que le premier moyen, en sa première branche, reproche à l’arrêt attaqué la violation de l’article 20 du Traité OHADA, en ce qu’il a déclaré nulle et non avenue la saisie immobilière pratiquée sur l’immeuble appartenant au défendeur, alors que, par arrêt n°192/2017 du 09 novembre 2017, la Cour Commune de Justice et d’Ad avait déjà ordonné la poursuite de la procédure initiée par la société SHIRE PETROLEUM ; qu’en statuant ainsi, l’arrêt déféré a méconnu l’existence de l’arrêt de la CCJA, ensemble l’autorité de la chose jugée et la force exécutoire qui s’y rattachent ; qu’il s’expose par conséquent à la cassation ;
Attendu qu’aux termes de l’article 20 du Traité de l'OHADA «les arrêts de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ont l’autorité de la chose jugée et la force exécutoire. Ils reçoivent sur le territoire de chacun des Etats parties une exécution forcée dans les mêmes conditions que les décisions des juridictions nationales. Dans une même affaire, aucune décision contraire à un arrêt de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ne peut faire l’objet d’une exécution forcée sur le territoire d’un Etat partie » ;
Mais attendu que l’arrêt n°192/2017 du 09 novembre 2017 de la CCJA évoqué par le moyen énonce que « la procédure de saisie immobilière diligentée contre l’immeuble appartenant à monsieur AH AG, personne physique et seul propriétaire de l’entreprise individuelle dénommée « Ets AG », inscrite comme il l’a fait au RCCM, doit être déclarée régulière, en vertu de ce que l’identité de la personne physique commerçante créant une entreprise individuelle se confond avec celle-ci ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel de Ac a violé l’article 44 sus indiqué (.…) » ; qu’il énonce également, dans le cadre de l’évocation, « que le moyen fondé sur l’apurement de la créance relève du fond du litige, lequel ne fait pas l’objet de l’instance soumise devant elle ; qu’en outre, pour les mêmes motifs ci-dessus qui ont déterminé la Cour de céans à casser l’arrêt déféré, il y a lieu de confirmer l’ordonnance attaquée et d’ordonner la poursuite de la procédure de saisie immobilière » ;
Attendu qu’il en résulte clairement que l’instance sanctionnée par ledit arrêt portait sur la qualité de AH AG par rapport à l’immeuble objet de la saisie, et non sur les moyens de fonds développés au soutien des dires et observations et des écritures subséquentes ; qu’ainsi, la cour d’appel qui a ordonné la poursuite de la procédure d’expropriation n’a pas commis le grief articulé, et cette branche du premier moyen rejetée comme étant mal fondée ;
Sur la seconde branche du premier moyen, tirée de la violation de la loi
Attendu, selon la seconde branche du moyen, que l’arrêt attaqué a confirmé la décision rendue sous RH 001/2015 le 01 octobre 2019, soit quarante-neuf jours après l’audience éventuelle ayant eu lieu le 13 août 2019 ; qu’en statuant dans ces délais, au mépris de la nature de la saisie immobilière qui est une procédure d’urgence, la cour d’appel a violé les dispositions de l’article 298. 2° de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution et exposé sa décision à la cassation ;
Mais attendu, d’une part, que si l’article 298.2° de l’Acte uniforme visé à la branche du moyen dispose que «les affaires sont instruites et jugées d’urgence », il appartient aux juges du fond d’apprécier cette exigence conformément aux pratiques, usages et règles de fonctionnement et d’administration de leurs juridictions ; que, d’autre part, ce texte n’ayant prévu aucune sanction expresse, sa violation éventuelle ne peut donner lieu qu’à une nullité relative, supposant de la partie qui s’en prévaut la preuve d’un préjudice ; qu’en l’espèce, le demandeur ne fonde son moyen sur aucun élément d’appréciation précis de nature à caractériser la non-prise en compte de l’urgence par les juges du fond au regard du contexte de leur intervention ; qu’il ne justifie non plus d’aucun préjudice ; qu’il s’ensuit que cette seconde branche du moyen manque de pertinence et mérite d’être rejetée ;
Sur le deuxième moyen tiré de l’incompétence et de l’excès de pouvoir
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation de l’article 49 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, en ce que le tribunal a connu d’une « assignation en annulation de commandement aux fins de saisie immobilière et en contestation de l’apurement de la créance », alors qu’une telle procédure relève de la compétence du juge de l’urgence institué par l’article 49 de l’Acte uniforme précité ; qu’en confirmant le jugement entrepris, la Cour d’appel du Nord-Kivu a méconnu les dispositions du texte susvisé et exposé sa décision à la cassation ;
Mais attendu qu’aux termes des articles 246 et 248 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « le créancier ne peut faire vendre les immeubles appartenant à son débiteur qu’en respectant les formalités prescrites par les dispositions qui suivent (…) ; la juridiction devant laquelle la vente est poursuivie est celle ayant plénitude de juridiction dans le ressort territorial où se trouvent les immeubles » ; que ces dispositions spéciales dérogent à celles de l’article 49 du même Acte uniforme instituant le juge de droit commun des procédures de saisie, sous quelques réserves limitativement prévues par le législateur OHADA lui-même ; qu’en l’espèce, le juge ayant plénitude de juridiction en matière de saisie immobilière, selon l’organisation judiciaire en République Démocratique du Congo, est le Tribunal de commerce ; qu’en confirmant sa décision, l’arrêt attaqué n’encourt pas le grief qui lui est fait et le moyen sera rejeté comme non fondé ;
Sur le troisième moyen, tiré de la dénaturation des faits ou des pièces de la procédure, pris en ses quatre branches
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt la dénaturation des faits ou des pièces de la procédure en ce que la cour d’appel :
1. s’est basée sur un prétendu protocole d’accord signé entre les parties pour décider que Z Y avait reçu paiement de son dû, alors que l’acte transactionnel produit au cours de la procédure était signé par les sieurs B A et X AH Ae, qui n’avaient aucune qualité pour représenter les parties ; qu’en passant outre les dispositions des statuts de la société demanderesse, qui faisaient du nommé C C son seul représentant légal, et pour avoir refusé de vérifier en quelle qualité le nommé X AH Ae représenterait les Aa AG, la cour a dénaturé les fais contenus dans le protocole d’accord produit au dossier ;
2. a estimé que les pièces intitulées « procès-verbal de gardiennage et reçus » produits aux débats par AH AG le libéraient de sa dette, alors qu’en aucun cas, un procès-verbal de gardiennage ne saurait être considéré comme un acte de paiement ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a donné une portée erronée audit procès-verbal ;
3. a pris en compte comme valant paiement de la créance de la société SHIRE PETROLEUM des reçus produits par AH AG, alors que ceux-ci étaient étrangers à la créance revendiquée et antérieurs au protocole transactionnel intervenu le 22 août 2014 ;
4. a considéré comme preuve de paiement de la créance revendiquée le contenu des procès-verbaux du parquet, alors qu’il n’apparait nulle part dans ces documents que le défendeur au pourvoi a payé sa dette ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a donné à ces procès-verbaux une portée erronée et, partant, les a dénaturés ;
Attendu que les quatre branches du moyen convoquent les mêmes arguments, à savoir la dénaturation des faits et de la portée des pièces versées au dossier, que les juges du fond ont estimées suffisantes à justifier l’apurement de la créance revendiquée par la société SHIRE PETROLEUM ; qu’à cet égard, la Cour note que c’est par une appréciation souveraine de la portée des pièces présentées que ces juges ont estimée éteinte la dette de AH AG envers la demanderesse ; que leurs motifs échappent par conséquent au contrôle de la juridiction de cassation et le moyen sera déclaré irrecevable ;
Sur le quatrième moyen, tiré de l’omission ou du refus de répondre à des chefs de demandes
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de n’avoir pas répondu à diverses demandes pourtant bien exprimées par Z Y, notamment celles de ne pas prendre en considération des pièces telles que le procès-verbal de gardiennage n°001/200016 et des reçus produits par le défendeur du fait de leur antériorité à la créance de SHIRE PETROLEUM ; qu’en refusant de répondre à ces chefs de demande et en confirmant le jugement RCE 439 sur ces points, l’arrêt attaqué a commis le grief visé au moyen et encourt cassation ;
Mais attendu qu’il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que les juges du fond ont examiné et analysé toutes les pièces produites par les parties au soutien de leurs prétentions, pour conclure à l’extinction de la créance de la société SHIRE PETROLEUM ; que le grief de défaut de réponse à des chefs de demandes n’est pas avéré, et il y a lieu de rejeter le moyen comme non fondé ;
Attendu qu’aucun moyen développé au soutien du pourvoi ne prospérant, il échet de le rejeter comme non fondé ;
Sur les dépens
Attendu que la société demanderesse succombant, il y a lieu de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare irrecevable le mémoire en réponse produit par Maître CHIRI KAHATWA MUHIMA pour le compte du défendeur ;
Rejette le pourvoi formé par la société SHIRE PETROLEUM Sarl comme non fondé ;
La condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier


Synthèse
Numéro d'arrêt : 025/2022
Date de la décision : 17/02/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2022-02-17;025.2022 ?
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