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27/01/2022 | OHADA | N°016/2022

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 27 janvier 2022, 016/2022


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(O.H.A.D.A)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Première chambre
Audience publique du 27 janvier 2022
Pourvoi : n° 134/2021/PC du 13/04/2021
Affaire : Madame C Aa A
(Conseils : Maîtres Sidiki DIARRA, Demba TRAORE, Hamidou Baba HAÏDARA et Mamadou TRAORE, Avocats à la
Contre
Bank Of Africa Mali SA
(Conseils : Cabinet YOUBA, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 016/2022 du 27 janvier 2022 MAIGA, Sidi Mahmoud
Cour) La Cour Commune de Justice et d

Arbitrage (C.C.J.A) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A),...

ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(O.H.A.D.A)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Première chambre
Audience publique du 27 janvier 2022
Pourvoi : n° 134/2021/PC du 13/04/2021
Affaire : Madame C Aa A
(Conseils : Maîtres Sidiki DIARRA, Demba TRAORE, Hamidou Baba HAÏDARA et Mamadou TRAORE, Avocats à la
Contre
Bank Of Africa Mali SA
(Conseils : Cabinet YOUBA, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 016/2022 du 27 janvier 2022 MAIGA, Sidi Mahmoud
Cour) La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 27 janvier 2022 où étaient présents :
Messieurs : César Apollinaire ONDO MVE, Président, rapporteur
Birika Jean Claude BONZI, Juge
Sabiou MAMANE NAÏSSA, Juge
et Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier
Sur le recours enregistré sous le n°134/2021/PC du 13 avril 2021, formé par Maîtres Sidiki DIARRA, Avocat à la Cour, demeurant à Bamako Ah Y 2000, Avenue Ae Ad, Immeuble ABK IV, 2°"° étage, Hamidou MAIGA et Demba TRAORE, Avocats à la Cour, demeurant à Bamako, au quartier de Niaréla Sud, BP 238 Bamako, Sidi Mahmoud Baba HAÏDARA, Avocat à Cour, demeurant 338, Rue 64 Badalabougou-Ouest, BP 189 Bamako, et Mamadou TRAORE, Avocat à la Cour, demeurant à Quinzambougou, Rue 583, BP 66 Bamako, agissant tous au nom et pour le compte de madame C Aa A, demeurant quartier de Ac Ag, Rue 444, Porte 116, es-qualité caution hypothécaire des sociétés SATRACOM SARL, SIMPARA TRANSIT Sarl et Etablissements Aa A, dans la cause qui l’oppose à la Bank Of Africa Mali SA, ayant son siège social à Bamako, quartier Ah Y 2000, Immeuble Bank Of Africa, Avenue du Mali, BP 2249 Bamako, et ayant pour conseils le Cabinet YOUBA, Avocats à la Cour, demeurant à la Rue 303, porte 121 de la plaque rouge, près de l’Ecole de Base à Bamako- Mali,
en cassation de l’Arrêt n°68 rendu le 28 octobre 2020 par la Cour d’appel de Bamako et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale, et en dernier ressort ;
En la forme
Reçoit l’appel principal de Madame C Aa A et l’appel incident de Ab B Af ;
Au fond
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf celles relatives à la demande reconventionnelle de Bank of Africa… »
« Statuant à nouveau ;
Rejette la demande reconventionnelle de la Bank of Africa comme mal fondée ;
Met les dépens à la charge de l’appelante… »
La requérante invoque à l’appui de son recours les cinq moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent Arrêt ;
Sur le rapport de monsieur César Apollinaire ONDO MVE, Président ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, victime de plusieurs procédures de saisie immobilière ayant toutes échoué pour des raisons liées à la contestation de la créance poursuivie, C Aa A saisissait le Tribunal de commerce de Bamako aux fins de condamner la BOA Mali, auteure desdites procédures, à lui payer la somme de trois milliards de francs CFA à titre dommages-intérêts, en réparation des préjudices subis, du fait, selon elle, d’un harcèlement judiciaire suivi d’une publicité nuisible à son image ; que vidant sa saisine, le tribunal déboutait C Aa A de sa demande et faisait partiellement droit à la demande reconventionnelle de la BOA Mali en condamnant C Aa A à lui payer cinq millions de francs CFA à titre de dommages-intérêts pour action abusive ; que saisie par C Aa A, la Cour d’appel de Bamako rendait l’arrêt dont pourvoi ;
Sur la compétence de la Cour
Attendu que le juge d’un droit est également le juge de l’abus de ce droit ; qu’en l’espèce, le litige opposant les parties est relatif à l’abus du droit de la saisie immobilière, lequel est, en l’occurrence, régi par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; qu’il y a lieu pour la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’affirmer, en tant que de besoin, sa compétence, au demeurant non contestée par les parties ;
Sur la première branche du premier moyen, tiré de la violation de la loi, notamment de l’article 31 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué la violation de l’article 31 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, en ce que, pour statuer comme elle l’a fait, la Cour d’appel de Bamako a considéré « qu’il n’a été relevé nulle part le non-respect du principe édicté par les dispositions pertinentes de l’AUPSRVE relatives aux mentions de publicité et d’affichage prévues par l’OHADA ; qu’en outre, il n’est nulle part versé au dossier la preuve probante d’un quelconque fait imputable à l’intimée la BOA Mali », alors, selon le moyen, qu’il n’est pas contesté que la BOA Mali a posé des actes d’exécution forcée sur des immeubles en l’absence d’un titre exécutoire constatant une créance certaine liquide et exigible ; qu’ainsi, les juges d’appel ont violé la loi et exposé leur arrêt à la cassation ;
Attendu qu’aux termes de l’article 31 de l’Acte uniforme visé au moyen, l’exécution forcée n’est ouverte qu’au créancier justifiant d’une créance certaine, liquide et exigible sous réserve des dispositions relatives à l’appréhension et à la revendication des meubles ; que l’article 247 du même Acte uniforme précise tout spécialement que la vente forcée l’immeuble ne peut avoir lieu qu’en vertu d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible ;
Attendu qu’en l’espèce, la BOA Mali reconnait dans ses écritures avoir sans succès initié plusieurs procédures de vente forcée des immeubles de la requérante, sans toutefois prouver qu’elle disposait à l’occasion d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible contre cette dernière ; qu’il est plutôt acquis au dossier que ses actions ont été introduites alors que la créance invoquée fait l’objet d’une contestation devant les juridictions et qu’une mesure expertale a même été ordonnée ; qu’en se fondant uniquement sur la régularité des actes de publicité et d’affichage de placards, sans préalablement s’assurer, comme les invitait la spécificité de la demande de C Aa A, de leur conformité aux prescriptions fondamentales des articles 31 et 247 de l’Acte uniforme susvisé, les juges d’appel ont violé la loi, et leur décision encourt la cassation de ce seul chef ; qu’il y a lieu pour la Cour d’évoquer l’affaire conformément aux dispositions de l’article 14 alinéa 5 du Traité de l’OHADA ;
Sur l’évocation
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que suivant actes notariés passés courant 2013, la Bank Of Africa Mali, en abrégé BOA Mali, concluait une convention de compte courant avec les sociétés SATRACOM Sarl, SIMPARA TRANSIT Sarl et Etablissements Aa A ; que C Aa A se portait caution hypothécaire desdites sociétés, respectivement à hauteur de 350.000.000 FCFA, 100.000.000 FCFA et 328.000.000 FCFA ; que courant 2015, la BOA Mali procédait à la clôture des comptes et dégageait les soldes débiteurs de 185.766.945 FCFA pour la SATRACOM Sarl, 604.017.478 FCFA pour la SIMPARA TRANSIT Sarl, 272.436.090 FCFA pour les Etablissements Aa A ; que le 17 février 2015, la BOA Mali servait un commandement de payer lesdites sommes ; que C Aa A, agissant au nom et pour le compte des débitrices principales, saisissait le juge des référés du Tribunal de commerce de Bamako en annulation du commandement et discontinuation des poursuites à son encontre dans l’attente d’une décision définitive sur sa demande de reddition des comptes portée devant le même tribunal ; qu’alors que ces procédures suivaient leur cours, la BOA Mali signifiait à C Aa A un commandement aux fins de saisie immobilière par exploit du 17 mars 2015, pour recouvrement forcé de la somme totale d’un milliard cent quatorze millions huit cent douze mille cent quatorze FCFA ;
Que cependant, par ordonnances n°42, n°45 et n°46 du 30 mars 2015, le juge des référés du Tribunal de commerce de Bamako déclarait nul et de nul effet, le commandement de payer du 17 février 2015 ; que par ordonnances n°41, n°43 et n°44 du même jour, le juge des référés ordonnait aussi la discontinuation des poursuites contre C Aa A ès-qualité de caution hypothécaire des sociétés débitrices ; qu’une ordonnance de référé n°253 du 20 mai 2015 de la présidente du Tribunal de grande instance de la Commune II du District de Bamako déclarait nul et de nul effet le même commandement aux fins de saisie, décision signifiée à la BOA Mali suivant exploit du 1°" juillet 2015 ;
Que par jugement n°499 du 15 juillet 2015, le Tribunal civil de la Commune II du District de Bamako annulait la procédure de saisie immobilière initiée par la BOA Mali ; que la Cour d’appel de Bamako confirmait ledit jugement suivant arrêt n°1036 en date du 09 décembre 2015 ; qu’alors même que l’arrêt de la Cour d’appel ne lui était pas encore signifié, la BOA Mali servait à C Aa A un commandement aux fins de saisie immobilière le 29 mars 2016, sans tenir compte des décisions ayant ordonné la discontinuation des poursuites ; que statuant sur la demande en annulation de ce demier commandement, le juge des référés du Tribunal civil de la Commune II du District de Bamako se déclarait incompétent ; que par jugement n°444 du 22 juin 2016, le même tribunal tenant son audience éventuelle, ordonnait la continuation des poursuites en renvoyant les parties à l’audience d’adjudication du 27 juillet 2016 ;
Que toutefois, avant l’audience d’adjudication, le Tribunal de commerce de Bamako, statuant sur la demande en contestation de créance de C Aa A, rendait le jugement n°506 du 13 juillet 2016, lequel constatait que les créances revendiquée par la BOA Mali n’étaient pas fondées en l’état et ordonnait une expertise et la discontinuation des poursuites en attendant le dépôt de son rapport par l’expert désigné ; que quelques jours plus tard, la Cour d’appel de Bamako rendait aussi l’arrêt n°366 du 19 juillet 2016 annulant l’ordonnance par laquelle le juge des référés du Tribunal de grande instance de la Commune II du District de Bamako s’était déclaré incompétent ; que statuant à nouveau, la cour d’appel déclarait nul et de nul effet le commandement litigieux ; que tirant les conséquences de toutes ces décisions, le Tribunal civil de la Commune II du District de Bamako, statuant à l’audience d’adjudication par jugement n°527 du 03 août 2016, déclarait nulle la procédure de saisie immobilière initiée par la BOA Mali et l’appel relevé par celle-ci était déclaré irrecevable par la Cour d’appel de Bamako, suivant arrêt n°996 du 02 novembre 2016 ;
Que la requête civile introduite par la BOA Mali aux fins de rétractation dudit arrêt était rejetée comme mal fondée par la Cour d’appel de Bamako ; que par exploit en date du 22 juin 2017, la BOA Mali signifiait à C Aa A un nouveau commandement aux fins dc saisie immobilière ; que c’est alors que C Aa A demandait au Tribunal de commerce de Bamako de condamner la BOA Mali à lui payer la somme de trois milliards de FCFA à titre de dommages-intérêts pour procédures abusives et vexatoires, la créance objet des multiples actions aux fins de saisie immobilière de ladite banque ne remplissant pas les conditions de certitude, de liquidité et d’exigibilité posées par l’article 31 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Qu'elle rappelait qu’aux termes de l’article 125 du RGO, « toute personne, qui par sa faute, même d’imprudence, maladresse ou de négligence, cause à autrui un dommage est obligée de le réparer. » ; que s'il est vrai que l’exercice du droit d’ester en justice, reconnu à toute personne titulaire de la capacité à agir, ne peut à lui seul justifier une condamnation à des dommages-intérêts, il n’en demeure pas moins vrai que ce droit peut dégénérer en abus dans certaines circonstances ; que selon la jurisprudence, l’abus peut résulter de l’absence de tout fondement juridique à l’action, de son intention malveillante ou encore de la volonté de multiplier les procédures ; qu’un simple comportement fautif ou une légèreté blâämable suffit à caractériser l’abus du droit d’agir sans que la preuve d’un acte de malice ou de mauvaise foi ne soit nécessairement rapportée ;
Qu'elle précisait que depuis février 2015, la BOA Mali multiplie contre elle des procédures abusives et vexatoires, alors que sa créance n’est pas certaine comme en fait foi l’expertise des comptes ordonnée par le Tribunal de commerce de Bamako ; que la BOA Mali lui a signifié plusieurs commandements aux fins de saisie immobilière dont les procédures subséquentes ont toutes été annulées en raison de l’absence de certitude de la créance alléguée, objet de contestation ; que sans attendre le rapport de l’expertise régulièrement ordonnée pour déterminer le solde exact de la créance invoquée, la BOA Mali s’attèle à engager frénétiquement des procédures de ventes judiciaires des immeubles donnés en garantie, oubliant qu’aux termes de l’article 127 du RGO, « commet une faute pour abus de droit celui qui fait l’usage de son droit dans la seule intention de nuire à autrui et fait un usage contraire à sa finalité. » ; que les actes de la BOA Mali caractérisent un abus de droit car ils ne sont nullement motivés par le souci de demander justice, mais vise uniquement à faire pression sur elle, en l’entraînant dans une série de procédures, aussi traumatisantes que la saisie immobilière ; que sans attendre une décision définitive sur la procédure en contestation de créance, la BOA Mali a cru devoir procéder à l’exécution forcée par des procédures de ventes par adjudication qui ont été à chaque fois annulées ; que cette attitude illustre sa mauvaise foi et dénote du peu d’égard qu’elle affiche vis-à-vis des décisions de la justice malienne ; qu’en réalité la BOA Mali entend en découdre avec une cliente jugée très regardante sur ses pratiques consistant à brader les garanties offertes par les opérateurs économiques maliens qui œuvrent pour l’essor de l’économie nationale ; que le comportement de la BOA Mali est d’autant plus intolérable que la banque est consciente que la créance poursuivie est contestée et fait l’objet d’une mesure d’expertise ordonnée par le Tribunal de commerce de Bamako, dont le rapport n’a pas encore été déposé ;
Qu’enfin, C Aa A soutenait avoir subi un préjudice qui mérite réparation, la BOA ayant porté atteinte à son image de marque et à sa crédibilité vis-à-vis de ses partenaires à travers des actes de publicité menés à la hussarde, par des affichages de placards tant devant son domicile que dans les différents marchés de son lieu de résidence ;
Qu'en réplique, la BOA Mali s’opposait à la demande de C Aa A ; qu’elle exposait qu’à l’effet de recouvrer sa créance, elle a entrepris une procédure de saisie immobilière des immeubles N°6789 CI, N°6790 CI, N°6791 CI, N°1429 CI, N°9160 CI, N°1418 CI et N°6118 CI tous affectés en hypothèque pour garantir les sommes de 328.000.000 FCFA pour C Aa A ou Etablissements Aa A, 350.000.000 FCFA pour SATRACOM Sarl et 100.000.000 FCFA pour SIMPARA TRANSIT Sarl ; que le premier commandement aux fins de saisie immobilière du 17 mars 2015 a été annulé par jugement du 15 juillet 2015 confirmé par la cour d’appel ;
Que n’étant pas payée, elle a repris la procédure de saisie immobilière par la signification d’un nouveau commandement aux fins de saisie immobilière du 29 mars 2016 ; que le cahier des charges a été régulièrement déposé ; que la débitrice saisie n’ayant pas déposé de dires, avant l’audience éventuelle, elle a obtenu un certificat attestant de ce fait ; que c’est dans ces conditions que par jugement N°444 du 22 juin 2016, le Tribunal de grande instance de la Commune II du District de Bamako a ordonné la continuation des poursuites pour l’audience du 27 juillet 2016 ; qu’en vertu de ce jugement, l’avis de vente a été publié et les placards apposés conformément à la loi ; que malgré la procédure pendante devant le Tribunal, déjà en 2015, C Aa A a multiplié les procédures, au lieu d’attendre l’issue de la procédure d’expropriation forcée ;
Que selon la BOA Mali, c’est en semant la diversion que C Aa A a sollicité et obtenu du Tribunal de commerce de Bamako le jugement avant dire droit avant-dire-droit n°506 du 13 juillet 2016 aux fin d'expertise après plusieurs autres prétextant contester la créance, objet des poursuites sans jamais payer dans les délais la provision due à l’expert ; que ce jugement avant-dire-droit n°506 est inédit puisque le 09 décembre 2015, par un autre jugement n°743 du même tribunal rendu surtout au fond, la juridiction commerciale a rejeté comme mal fondée la demande d’expertise des comptes de la société SIMPARA TRANSIT, qui avait cru devoir contester le débit de 469.784.959 FCFA ; qu’en dépit du jugement n°444 rendu à l’audience éventuelle du 22 juin 2016 ordonnant la continuation des poursuites pour l’audience d’adjudication du 27 Juillet 2016, le juge des référés de la Cour d’appel, sur contredit exercé par C Aa A, n’a pas craint, suivant arrêt n°366 du 19 juillet 2016, d’annuler le commandement aux fins de saisie immobilière du 29 mars 2016 ;
Qu’alors que cette décision du juge des référés de la Cour d’appel ne s’imposait pas au Tribunal statuant en audience des criées, celui-ci annulera néanmoins les poursuites en se fondant sur l’arrêt n°366 du 19 juillet 2016 rendu en référé en s’abstenant de procéder à l’adjudication ; que le 09 novembre 2016, statuant sur l’appel du jugement N°527 du 03 août 2016 rendu à l’audience d’adjudication qui, au lieu d’ordonner l’ouverture des enchères et l’adjudication, a annulé la procédure de saisie immobilière aux motifs, d’une part, que le jugement ADD du Tribunal de commerce a déclaré la créance inexistante, infondée en l’état et, d’autre part, que l’arrêt n°366 du 19 juillet 2016 de la Chambre des référés de la Cour d’appel a annulé le commandement aux fins de saisie immobilière au vu du même jugement avant-dire-droit du Tribunal de commerce ; que la Cour d'appel a déclaré le recours irrecevable par arrêt N°996 du 09 novembre 2016 ; que le 17 mai 2017, la Cour d'appel a rejeté sa requête civile aux fins de rétractation de l'arrêt n°996 susvisé, lequel était en contradiction avec celui du 09 décembre 2015 ; qu’elle est à sa troisième tentative de réalisation de ses garanties avec la même créance en souffrance sans qu’un seul franc n’ait été payé ;
Qu’en réaction au commandement aux fins de saisie immobilière du 22 juin 2017, les débiteurs ont saisi le juge des référés qui a déclaré leur demande aux fins d’annulation sans objet par une ordonnance en date du 26 juillet 2017 qui a fait l’objet d’un appel ; que ne voulant pas honorer ses engagements, SIMPARA a initié la présente procédure en réparation de préjudice devant le Tribunal de commerce de Bamako ; que tout en concluant au débouté de C Aa A, la BOA Mali demandait reconventionnellement la condamnation de cette dernière à lui payer des dommages-intérêts ;
Que le 13 février 2019, le Tribunal de commerce de Bamako rendait le jugement n°0129 dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort ;
Déclare madame C Aa A, recevable mais mal fondée en sa demande ;
L’en déboute ;
Reçoit la demande reconventionnelle de la BOA Mali SA ;
Condamne C A à payer à la BOA Mali SA une somme de cinq (05) millions de francs CFA à titre de dommage-intérêts ;
Déboute la BOA Mali SA du surplus de sa demande ;
Condamne madame C Aa A aux entiers dépens… » ;
Attendu que C Aa A a interjeté appel dudit jugement ; qu’elle demande d’infirmer la décision entreprise, de statuer à nouveau et de faire droit à ses demandes telles que présentées aux premiers juges ;
Que pour sa part, la BOA Mali expose que sa demande reconventionnelle a été accueillie par les premiers juges à hauteur de cinq millions FCFA, montant loin de réparer son préjudice qui continue à s’accroitre par la faute C Aa A depuis la clôture des comptes en février 2015 qui a fait apparaître au profit de la BOA un solde créditeur correspondant à une créance certaine, liquide et exigible objet de la saisie immobilière critiquée ; que le premier juge a relevé que la résistance abusive de Aa A consistant à remettre en cause toutes ses tentatives de rentrer en possession de son dû ; que sa créance est restée toujours impayée ; qu’elle investit beaucoup de temps pour suivre ses procédures devant les juridictions aux fins d’obtenir la réalisation de ses hypothèques ; que suite au retard de remboursement du solde, elle a subi un préjudice en payant des frais successifs pour des procédures annulées justifiant la résistance abusive de sa débitrice ; que ce retard lui crée un énorme trou d’où il résulte un manque à gagner et une gêne profonde de trésorerie ; que l’attitude de C Aa A appelle à une juste réparation car elle l’expose au stress, aux aléas et aux frais de la procédure pour se défendre ; qu’il est de principe qu’une partie peut solliciter des dommages-intérêts pour le préjudice souffert depuis le jugement attaqué ; que l’atteinte à son honneur continue avec un appel manifestement abusif ; qu’elle sollicite l’application de l’article 125 RGO et estime que la somme de 3.500.000.000 FCFA serait une juste réparation de son préjudice ;
Sur la recevabilité de l’appel
Attendu que l’appel de C Aa A ayant été régulièrement interjeté, il y a lieu de le déclarer recevable en la forme ;
Sur le fond
Attendu que C Aa A a saisi le Tribunal de commerce à l’effet de faire constater qu’elle est victime d’un harcèlement judiciaire constitutif d’un abus de droit et caractérisé par la multiplication des procédures de saisie immobilière se rapportant toutes à une même créance que poursuit BOA Mali sans jamais justifier d’un titre constatant les caractères certain, liquide et exigible de celle-ci, comme l’impose la loi ; que ces faits sont établis dans la mesure où toutes ces procédures ont été annulées par des décisions judiciaires, entre autres, parce que la créance n’est pas liquide et exigible, ce qui n’a pas empêché la BOA Mali d’introduire de nouvelles procédures de saisie immobilière en l’absence de tout élément nouveau et au mépris de l’autorité de la chose jugée rattachée auxdites décisions ; qu’en ne déduisant pas de ce comportement de la BOA Mali un abus de son droit de recourir à la saisie immobilière, le Tribunal de commerce a fait une mauvaise appréciation des faits et son jugement doit être infirmé ;
Sur les dommages-intérêts demandés par C A
Attendu qu’il ressort des dispositions de l’article 32 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement que l’exécution forcée est toujours faite aux risques et périls du créancier poursuivant, lequel répond alors des conséquences dommageables de ses initiatives, sans qu’il soit besoin pour le juge saisi en réparation de rechercher de faute de sa part ;
Attendu qu’en l’espèce, les multiples procédures de saisie immobilière initiées contre C Aa A lui ont incontestablement causé un préjudice tant moral que financier imputable à la BOA Mali ; qu’au vu des éléments du dossier et des circonstances de la cause, la Cour estime juste et équitable de lui allouer la somme de cent millions de francs CFA pour le préjudice moral et celle de deux cent cinquante millions de francs CFA pour le préjudice financier, soit la somme totale de trois cent cinquante millions de francs CFA à titre de dommages-intérêts ;
Sur la demande reconventionnelle de la BOA Mali
Attendu que la BOA Mali sollicite reconventionnellement la condamnation de C Aa A à lui payer la somme de trois milliards cinq cent millions de francs CFA à titre de dommages-intérêts pour actions abusives ; qu’au regard de tout ce qui précède, cette demande est mal fondée et sera rejetée ;
Sur les dépens
Attendu que la BOA Mali succombant, sera condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Se déclare compétente ;
Casse et annule l’arrêt attaqué ;
Evoquant et statuant sur le fond :
Déclare l’appel de C Aa A recevable en la forme ;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Reçoit C Aa A en sa demande et l’y dit fondée ;
Condamne la BOA Mali à lui payer pour le préjudice moral, la somme de cent millions (100.000.000) FCFA et, pour le préjudice financier, la somme de deux cent cinquante millions (250.000.000) FCFA, soit la somme totale de trois cent cinquante millions (350.000.000) FCFA à titre dommages-intérêts ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes respectives ;
Condamne la BOA Mali aux entiers dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier
10


Synthèse
Numéro d'arrêt : 016/2022
Date de la décision : 27/01/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2022-01-27;016.2022 ?
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