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24/06/2021 | OHADA | N°147/2021

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 24 juin 2021, 147/2021


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Deuxième chambre
Audience publique du 24 juin 2021
Pourvoi : n° 121/2020/PC du 25/05/2020
Affaire : Association des Propriétaires Ae Ai de BADO
(Conseil : Maître GALOLO SOEDJEDE, Avocat à la Cour)
Contre
Société West Ag Ah
(Conseil : Maître Ahlin KOMLAN, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 147/2021 du 24 juin 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pou

r l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, a rendu l’arrêt suivant, en son a...

ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Deuxième chambre
Audience publique du 24 juin 2021
Pourvoi : n° 121/2020/PC du 25/05/2020
Affaire : Association des Propriétaires Ae Ai de BADO
(Conseil : Maître GALOLO SOEDJEDE, Avocat à la Cour)
Contre
Société West Ag Ah
(Conseil : Maître Ahlin KOMLAN, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 147/2021 du 24 juin 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième chambre, a rendu l’arrêt suivant, en son audience publique du 24 juin 2021 où étaient présents :
Messieurs Djimasna NDONINGAR, Président
Armand Claude DEMBA Juge
Mounetaga DIOUF, Juge, Rapporteur
et Maître Koessy Alfred BADO, Greffier,
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans le 25 mai 2020, sous le n°121/2020/PC et formé par Maître Galolo SOEDJEDE, Avocat à la Cour, demeurant à Lomé, 3469, Boulevard du 13 janvier, agissant au nom et pour le compte de l’Association des Propriétaires Ae Ai de Ac ZAG) représentée par son Président monsieur Koffi KOSSI, demeurant à AI X, et dont les noms figurent à la requête annexée au présent arrêt, élisant domicile … monsieur Aa A, demeurant au II Plateaux, Ab Ad, immeuble AH, dans les locaux de « SAUFA SARL », bâtiment A,
1°" étage, porte 5, Abidjan-Cocody, dans la cause qui l’oppose à la société West African Cement (WACEM) SA ( ex-Ciments de l’Afrique de l’Ouest, C SA), ayant son siège social à Aj (P/Yoto), site de l’usine de l’ancienne C, sur la route de Tabligbo-Aneho, ayant pour conseil Maître Ahlin KOMLAN, Avocat à la Cour, demeurant à Lomé, 37 Boulevard Af B -BOIGNY, BP 13471, Lomé, Togo et élisant domicile … l’étude de maître DIALLO Amoussou Myriam, demeurant au 08 BP. 1501 Abidjan 01, II Plateau, rue des jardins, résidence du Vallon, immeuble Bubale, RDC app.71 ;
en annulation de l’ordonnance n°048/20 rendue le 26 mars 2020 par le Président de la Cour Suprême du Togo et dont le dispositif est le suivant :
« Nous déclarons compétent ;
Ordonnons le sursis à exécution de l’arrêt ADD n° 204/19 rendu[e] contradictoirement le 06 mars 2019 par la cour d’appel de Lomé ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée en expédition aux parties, à la diligence de monsieur le greffier en Chef de la Cour Suprême, et sera classée au rang des minutes au Greffe pour en être délivrées à qui de droit, toutes expéditions nécessaires. »
La requérante invoque à l’appui de son recours le moyen unique d’annulation tel qu’il figure dans sa requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Mounetaga DIOUF, Juge ;
Vu les articles 13, 14 et 18 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’'OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces de la procédure que dans le cadre de l’exécution forcée du jugement n°195/10 du 22 décembre 2010 rendu par le tribunal de première instance de Aj et de l’arrêt n°075/14 du 24 juillet 2014 rendu par la Cour Suprême du Togo, l’Association des Propriétaires Ae Ai de Ac ZAG) faisait pratiquer contre la société WACEM SA, défenderesse, des saisie-attributions de créances suivant deux procès-verbaux datés respectivement des 04, 05, 07 mai 2018 et 03, 04 mai 2018; qu’à la suite de la contestation de ces saisies par WACEM SA, la requérante assignait en intervention forcée les sociétés FORTIA Cement SA et PP Bags, formant avec elles Y, un groupe de sociétés ; que le président du tribunal de première instance rendait à cette occasion l’ordonnance n°06/18 du 30 août 2018 qui enjoignait à la société WACEM SA de consigner les sommes figurant au crédit de ses comptes en banque à l’exception du compte n°100305201019 ouvert dans les livres de ECOBANK, soit un montant de 84 827 837 FCFA sur le compte CARPA ; que la décision ordonnait également la main-levée de la saisie- attribution pratiquée après production de la quittance de versement du susdit montant, mettait hors de cause les banques BTCI, UTB, BIA, SIAB, BSIC, ORABANK, DIAMOND BANK et la Société Générale, déclarait la Banque Atlantique et ECOBANK solidairement responsables des causes de la- saisie attribution et les condamnait à consigner les sommes objet de ladite saisie sur le compte CARPA ; que dans le cadre de l’appel relevé par l’APTEB, la cour d’appel de Lomé rendait, le 06 mars 2019 un arrêt avant dire droit n°204/19 rejetant la demande de sursis à exécution sollicitée par Y et lui enjoignant de conclure au fond ; que sur pourvoi de cette société, le Président de la Cour Suprême du Togo rendait l’ordonnance de sursis attaquée ;
Sur la compétence de la Cour
Attendu que dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour de céans le 05 octobre 2020, la société West African Cement (WACEM) SA a soulevé l’incompétence de la Cour de céans au motif que le présent recours est dirigé contre une ordonnance du Président de la Cour Suprême du Togo saisi conformément à la loi nationale et que nulle part dans l’arrêt avant dire droit n°204/19 du 06 mars 2019, qui porte exclusivement sur le sursis à statuer tiré de l’article 4 du code de procédure pénale togolais, il n’y a eu de débat sur une quelconque disposition du droit OHADA nécessitant que le dossier soit porté à connaissance de la CCJA ;
Attendu qu’aux termes de l’article 14, alinéas 2 et 3 du Traité de l'OHADA, la CCJA, « saisie par la voie du recours en cassation, se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des actes uniformes et des règlements prévus au présent Traité, à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales. Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats parties dans les mêmes contentieux. » ; qu’il résulte de l’article 10 du Traité susvisé que « Les Actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats-parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure » ; qu’en vertu de l’article 32 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement (AUPSRVE), à l’exception de l’adjudication des immeubles, l’exécution forcée peut être poursuivie jusqu’à son terme en vertu d’un titre exécutoire par provision, l’exécution est alors poursuivie aux risques du créancier, à charge pour celui-ci, si le titre est ultérieurement modifié, de réparer intégralement le préjudice causé par cette exécution sans qu’il y ait lieu de relever de faute de sa part ;
Attendu qu’en application de ces dispositions, lorsque l’exécution forcée est entamée, les juridictions nationales de cassation ne peuvent plus, sur la base d’une disposition nationale, exercer leur compétence en matière de sursis à exécution ; que les recours contre les décisions rendues en dernier ressort, en matière de sursis à une exécution déjà entamée, comme c’est le cas en l’espèce, sont soumis au régime de l’article 32 AUPSRVE et relèvent donc du champ d’application des dispositions de l’article 14, alinéas 3 et 4, du Traité de l’OHADA qui donne compétence exclusive à la Cour de céans ; qu’il échet dès lors de se déclarer compétente ;
Sur la recevabilité du recours
Attendu que dans son mémoire en réponse sus visé, la défenderesse a soulevé l’irrecevabilité du recours pour autorité de la chose jugée ; qu’elle a soutenu qu’à la suite de l’ordonnance de sursis n°048/20 rendue le 26 mars 2020, la requérante avait introduit auprès du président de la Cour suprême du Togo une requête aux fins de rétractation qui a été rejetée par ordonnance n°078/20 du 02 juin 2020 ; que l’ordonnance querellée a donc acquis l’autorité de la chose jugée entre les parties d’où l’irrecevabilité du recours adressé à la Cour de céans ;
Mais attendu que la recevabilité des recours adressés à la Cour de céans est appréciée au regard de son Règlement de procédure ; que s’agissant de l’autorité de chose jugée relativement aux contentieux dont est saisie la Cour et qui relèvent de sa compétence, elle est appréciée au regard de ses seuls arrêts et ordonnances, à l’exclusion de toutes autres décisions des juridictions nationales fussent-elles de cassation ; que cette fin de non-recevoir n’étant pas fondée, il échet de la rejeter et de déclarer le recours recevable ;
Sur la première branche du moyen unique d’annulation tirée de l’incompétence du Président de la Cour Suprême du Togo
Attendu que la requérante fait grief à l’ordonnance querellée d’avoir retenu la compétence du Président de la Cour Suprême du Togo alors, selon le moyen, d’une part, qu’en application de l’article 15 du Traité de l’'OHADA, le renvoi devant la CCJA n’est pas facultatif mais impératif et doit être ordonné dès lors qu’un Acte uniforme est en cause et d’autre part, que la CCJA a déjà jugé que « Viole les dispositions des articles 32 et 49 de l’AUPSRVE, la Cour suprême nationale qui ordonne la suspension de l’exécution d’une décision exécutoire en vertu d’une disposition de la loi nationale alors que l’exécution avait déjà commencé, cette juridiction n’étant pas compétente pour connaître des difficultés d’exécution des titres exécutoire ou des mesures conservatoires » ;
Attendu qu’en application des articles 15 du Traité de l’'OHADA et 32 AUPSRVE, lorsque l’exécution forcée étant entamée, les juridictions nationales de cassation ne peuvent plus exercer leur compétence en matière de sursis à exécution sur la base d’une disposition nationale en raison de la primauté et de la portée abrogative et neutralisante de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; que les recours en cassation contre les décisions rendues en dernier ressort, en matière de sursis à une exécution déjà entamée sont soumis au régime de l’article 32 AUPSRVE et ne relèvent donc pas de la compétence de la juridiction nationale de cassation mais plutôt de celle de la Cour de céans en application des dispositions de l’article 14, alinéas 3 et 4, du Traité de l’'OHADA ; qu’en l’espèce, l’ordonnance attaquée, rendue par le Président de la Cour Suprême du Togo sur la base de la loi nationale togolaise, l’a été dans le cadre d’une procédure de sursis à exécution alors que des actes d’exécution avaient été accomplis, tels les deux procès-verbaux de saisies- attributions de créances datés respectivement des 03, 04, 05 et 07 mai 2018 ; qu’une telle décision rendue par une juridiction qui n’en a pas les attributions a donc commis le grief allégué ; qu’il échet dès lors, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la seconde branche du moyen, de la déclarer nulle et non avenue ;
Sur les dépens
Attendu que la société West African Cement (WACEM) SA a succombé ; qu’il échet de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Se déclare compétente ;
Déclare le recours en annulation recevable ;
Annule l’ordonnance n°048/20 rendue le 26 mars 2020 par le Président de la Cour Suprême du Togo ;
Condamne la société West African Cement (WACEM) SA aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le greffier


Synthèse
Numéro d'arrêt : 147/2021
Date de la décision : 24/06/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2021-06-24;147.2021 ?
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