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27/05/2021 | OHADA | N°094/2021

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 27 mai 2021, 094/2021


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Troisième chambre
Audience publique du 27 mai 2021
Pourvoi :n° 226/2020/PC du 21/08/2020
Affaire : Société Fatiah Holding SA
Ac Ab A
(Conseils : Maître Idrissa Bacar MAÏGA et la SCPA DOUMBIA-TOUNKARA,
Avocats à la Cour)
contre
Société ORABANK Mali SA (Succursale de ORABANK
(Conseils : Maîtres Founéké Traoré et Louis Auguste TRAORE, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 094/2

021 du 27 mai 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation l’Harmonisation en Afrique d...

ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Troisième chambre
Audience publique du 27 mai 2021
Pourvoi :n° 226/2020/PC du 21/08/2020
Affaire : Société Fatiah Holding SA
Ac Ab A
(Conseils : Maître Idrissa Bacar MAÏGA et la SCPA DOUMBIA-TOUNKARA,
Avocats à la Cour)
contre
Société ORABANK Mali SA (Succursale de ORABANK
(Conseils : Maîtres Founéké Traoré et Louis Auguste TRAORE, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 094/2021 du 27 mai 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième chambre, présidée par Monsieur Ae B, assisté de Maître Louis Kouamé HOUNGBO, Greffier, a rendu en son audience publique du 27 mai 2021, l’arrêt dont la teneur suit, après délibération du collège de juges composé de :
Messieurs Ae B, Second Vice-Président, rapporteur
Fodé KANTE, Juge
Arsène Jean Bruno MINIME, Juge
Mariano Esono NCOGO EWERO, Juge
Sabiou MAMANE NAISSA, Juge
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans le 21 août 2020 sous le n°226/2020/PC et formé par Maître Idrissa Bacar MAÏGA et la SCPA DOUMBIA-TOUNKARA, Avocats à la Cour, demeurant à Bamako, agissant au nom et pour le compte de la Société Fatiah Holding SA, ayant son siège social à Bamako, Cité du Niger, Villa n°62, et de Madame Ac Ab A,
demeurant au 7, Rue Jean Mace, 94120 Fontenay sous-bois (France), dans la cause qui les oppose à la Société ORABANK Mali SA (Succursale de ORABANK Côte d’Ivoire) ayant son siège social à ACI 2000, Avenue du Mali, immeuble Soutra Mali, ayant pour conseil Maîtres Founéké Traoré et Louis Auguste TRAORE, Avocats à la Cour, demeurant à Bamako,
en cassation de l’Arrêt n°174 rendu le 18 mars 2020 par la Cour d’appel de Bamako et dont le dispositif suit :
« Statuant publiquement contradictoirement en matière civile et en dernier ressort :
En la forme : reçoit l’appel de la Société ORABANK ;
Au fond : le déclare bien fondé ;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
En la forme : reçoit la demande de résolution de vente et la réclamation de dommages-intérêts de la Société Fatiah Holding SA ;
Au fond : les déclare mal fondées, les en déboute ;
En revanche condamne la Société ORABANK à payer à la Société Fatiah Holding SA la somme de 9.375.649 FCFA représentant le reliquat du prix d’adjudication de l’immeuble objet du titre foncier n°576, sis à la Cité du Niger ;
Déboute la Société Fatiah Holding SA du surplus de sa demande ;
Met les dépens à la charge de l’intimée. » ;
Sur le rapport de monsieur Ae B, Second Vice-Président,
Les requérantes invoquent à l’appui de leur pourvoi les six moyens de cassation tels qu’ils figurent dans la requête jointe au présent Arrêt ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu, selon les énonciations de l’arrêt attaqué, que dans le cadre du recouvrement de sa créance de 126.106.567 Francs CFA contre la société FATIAH HOLDING SA, sa débitrice et la dame Ac Ab A, caution hypothécaire, la Société ORABANK Mali a procédé à la saisie immobilière de l’immeuble objet du TF n°576 du livre foncier de la Commune II de Bamako et en a été déclarée adjudicataire pour la somme de 200.000.000 F CFA, suivant jugement n°141 rendu le 5 avril 2017 par le Tribunal de grande instance de la commune II du District de Bamako ; que la Société Fatiah Holding SA et Dame Ac Ab A estimant que la société ORABANK Mali SA, après avoir recouvré l’intégralité de sa créance et des accessoires de celle-ci pour un montant de 126.907.567 F CFA, a fait de façon injuste, usage de l’excédent du prix de l’adjudication soit 73.093.433 F CFA pour couvrir ses propres frais dont les honoraires de son avocat, les frais de poursuite, les droits d’enregistrement et de mutation pour un montant total de 61.713.784 F CFA et n’a pas de surcroit, représenté le reliquat de 9.379.649 F CFA, l’ont assignée devant le Tribunal de grande instance de la Commune II du District de Bamako, en résolution de la vente par adjudication intervenue ; que statuant sur cette demande la juridiction saisie a, par jugement n°29 rendu le 24 juin 2018, prononcé la résolution de la vente et alloué des dommages-intérêts ; que sur appel de la société ORABANK Mali SA, la Cour d’appel de Bamako a rendu l’arrêt infirmatif objet du présent recours en cassation ;
Sur le troisième moyen tiré de la contrariété des motifs
Vu l’article 28 bis tiret 4 du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’arbitrage de l'OHADA ;
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, une contrariété de motifs en ce que ledit arrêt qui, statuant sur la fin de non-recevoir soulevée par l’appelante après avoir retenu, sur le fondement des articles 118, 121 du Code de procédure civile du Mali et 313 de l’'AUPSRVE : « que n’ayant pas agi dans le délai légal requis l’action des requérants se heurtait aux dispositions pertinentes et d’ordre public de l’article 313 que l’appelante en invoquant l’exception de fin de non-recevoir apporte conformément aux dispositions de l’article 09 du CPCCS, les faits nécessaires pour appuyer ses prétentions ; qu’il convient alors de tirer toutes les conséquences de droit qui s’y attèlent » a, néanmoins statué sur le fond de l’affaire alors, selon le moyen, que la conséquence logique de la motivation ci-dessus était de déclarer l’action irrecevable et de ne plus pouvoir statuer au fond ; qu’en retenant à la fois la fin de non-recevoir qui met fin au procès sans examen au fond de l’affaire, suivant les termes mêmes de l’article 118 du CPCCS visé et en statuant également sur le fond de cette même affaire, la cour d’appel a, suivant le moyen, étalé la contrariété qui affecte sa motivation et exposé sa décision à la cassation ;
Attendu que selon, l’article 28 bis du Règlement de procédure de la CCJA : « le recours en cassation est fondé sur …- le défaut, l’insuffisance ou la contrariété des motifs ; …. » ; que ce grief qui dénonce une discordance dans la motivation de l’arrêt, peut indifféremment affecter les motifs entre eux ou les motifs et le dispositif ;
Attendu, en l’espèce, que la cour d’appel après avoir admis le bienfondé de la fin de non-recevoir soulevée par la banque et tirée la tardiveté de l’action des requérantes a, d’une part, connu du fond de l’affaire et, d’autre part, dans le dispositif, déclaré la même action recevable ; qu’en se déterminant comme elle l’a fait la Cour d’appel qui s’est contredite, a privé sa décision de motifs ; qu’il y a donc lieu de casser l’arrêt attaqué, d’évoquer et de statuer au fond en application de l’article 14 alinéa 5 du Traité instituant l'OHADA, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
Sur l’évocation
Attendu que par acte d’appel n°003 en date du 14 juillet 2019 le Cabinet GANO, Avocat au Barreau du Mali, agissant au nom et pour le compte de la société ORABANK SA, a déclaré relever appel du jugement n°29 rendu le 24 janvier 2019 par le Tribunal de grande instance de la Commune II du District de Bamako et dont le dispositif est ainsi conçu: «statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en 1“ ressort, rejette les exceptions d’irrecevabilité soulevées par la défenderesse ;
En la forme : reçoit l’action des requérants ;
Au fond : la déclare bien-fondé : y faisant droit : prononce la résolution de la vente par adjudication faite au profit de la Société ORABANK Mali SA suivant jugement n°141 du 05 avril 2017 du Tribunal de grande instance de la Commune II du District de Bamako portant sur l’immeuble objet du titre foncier n°576 sis à la Cité du Niger appartenant à Ac Ab A ; condamne en outre la société ORABANK Mali-SA, à leur payer la somme de 50.000.000 F CFA (cinquante millions F CFA) à titre de dommages-intérêts, les déboute du surplus ; met les dépens à la charge de la défenderesse… » ;
Attendu qu’au soutien de son recours, l'appelante, sous la plume de ses conseils, a, en application des dispositions des articles 118 et 121 du code de procédure civile du Mali, soulevé l’exception tirée de l'irrecevabilité de l'assignation des intimées pour inobservation du délai de quinze jours prévu par l’article 313 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; qu'elle explique que la procédure en résolution de vente et réparation de préjudice initiée par les requérantes n'était dirigée que contre le jugement n° 141 du 05 Avril 2017 du tribunal de la Commune II du District de Bamako qui lui a adjugé l'immeuble objet du titre foncier n°576 sis à la Cité du Niger ; que les intimées ont voulu créer l’amalgame en invoquant dans leur assignation des dispositions du Code Civil Français et du Régime Général des Obligations du Mali ; que cette manière de procéder ne devrait pas prospérer eu égard aux dispositions pertinentes des articles 335, 336 et 337 de l’Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement de créances et des voies d’exécution, qui ont définitivement réglé cette question depuis l’entrée en vigueur du traité instituant l’OHADA et des actes uniformes pris en vertu dudit traité ; que la jurisprudence de la CCJA est conforme au principe posé par les articles ci-dessus à savoir l’interdiction absolue d’appliquer la législation interne contraire d’un Etat partie au Traité de l’'OHADA aux matières entrant dans le champ d’application des actes uniformes, que la même position a été dégagée à travers un avis de la susdite cour ; que tout ce qui précède, il ressort qu’aucune législation nationale ou étrangère édictant des dispositions contraires à celles de l’Acte uniforme ne saurait s’appliquer à la procédure de vente par expropriation forcée ; qu’elle ajoute que la présente procédure en résolution de vente et réparation de préjudice s’analyse comme une demande d’annulation de la décision judiciaire d’adjudication du titre foncier n° 576 ; qu’ainsi, les requérants auraient dû attaquer cette décision judiciaire en nullité dans le délai préfix de quinze jours prévu par l’article 313 de l’AUPSRVE susvisé ; qu’entre le 18 septembre 2017, date de la saisine du tribunal de la commune II par assignation en résolution de vente et réparation de préjudice et celle du Jugement N° 141 du 05 Avril 2017, il s'est écoulé plus de quatre mois; que n'ayant pas agi dans le délai légal requis, l'action des requérantes se heurte aux dispositions pertinentes et d'ordre public de l'article 313 susvisé; que c'est pourquoi, elle avait conclu devant le premier juge à l’irrecevabilité de l'assignation de la société Fatiah Holding SA et Ac Ab A pour inobservation de délai; que les motivations du jugement ayant permis au premier juge de rejeter la fin de non-recevoir, sont à l'antipode des dispositions de l'article 290 de l'AUPSRVE ; que le non-paiement des frais de poursuite et du prix d'adjudication excédant la créance par l’adjudicataire dans un délai de vingt jours ne constitue nullement une cause de nullité du jugement d'adjudication ; que dès lors, il apparait que le jugement entrepris manque de motivation et mérite en conséquence d’être annulé conformément aux dispositions de l'article 463 du CPCCS ; qu’elle conclut à l’irrecevabilité de l'assignation de la société FATIAH HOLDING et de Mme Ab A pour cause de forclusion ;
Attendu qu'en réplique, les intimées ont conclu à la confirmation du jugement entrepris; qu'elles font observer que la prétendue irrecevabilité de l’assignation pour inobservation du délai de quinze jours prescrit par l’article 313 de l’AUPSRVE pour exercer le recours en nullité contre la décision judiciaire ou le procès-verbal notarié d’adjudication est inopérante ; que c’est l’action en résolution de vente qui est entreprise ; que celle-ci n’est pas fondée sur l’article 313 qui régit le recours en nullité ; qu’elle trouve son fondement dans l’article 290 alinéa 5 de l’AUPSRVE suivant lequel l’adjudicataire qui n’apporte pas la preuve du paiement des frais de poursuite, du prix de l'adjudication et de l'accomplissement des conditions du cahier des charges dans les vingt (20) jours de l'adjudication, peut être poursuivi par la voie de la folle enchère sans préjudice des autres voies de droit ; que cette action n’est pas enfermée dans le délai de quinze jours prescrit par l'article 313; que cela est d’autant plus évident que l'exercice des autres voies de droit prévues par l'article 290 alinéa 5 ne peut se faire qu'à l'expiration du délai de vingt (20) jours imparti à l'adjudicataire pour payer ou consigner le prix de l'adjudication et les frais de poursuite et accomplir les autres formalités ; qu'elle conclut au rejet de la fin de non-recevoir tirée de la forclusion comme étant mal fondée ; que les intimées ajoutent que l'appelante prétend faire écarter l'application des articles 1654 du Code civil, 105 , 113 et 125 du Régime Général des Obligations (RGO) invoqués à l'appui de l'action en résolution de vente et réparation de préjudice, au motif que les actes uniformes supplantent les dispositions de droit interne dans les Etats parties au Traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique; que ce moyen ne saurait prospérer d’autant plus que c'est l'AUPSRVE lui-même, en son article 290 alinéa 5, qui permet, outre l'exercice de la folle enchère, celui des autres voies de droit contre l'adjudicataire qui ne justifie pas avoir payé les frais de poursuites et le montant du prix de l'adjudication excédant sa créance dans les vingt jours de l'adjudication; que l'action en résolution de la vente fait partie des autres voies de droit dont l'exercice est permis, étant entendu que le saisi est considéré comme vendeur dans ses rapports avec l'adjudicataire ; qu'en effet, il est constant que le jugement d'adjudication est considéré tant par la doctrine que par la jurisprudence comme un " contrat judiciaire " ; que comme tout contrat, il est susceptible d’être remis en cause en cas de défaillance dans sa formation ou l’inexécution des obligations qu’il engendre ; que c’est pourquoi ; indépendamment du recours en nullité prévu par l’article 313 de l’AUPSRVE, l’action résultant de l’article 290 alinéa 5 ci-dessus cité qui est la reproduction de l’article 713 de l’ancien code de procédure civile français, permet d’exercer contre la vente intervenue, outre la folle enchère, les voies de droit autres que le recours en nullité ; qu’il est de jurisprudence que : « les dispositions propres à la saisie immobilière ne constituent pas un obstacle à l’utilisation des autres voies de droit et en particulier de celle découlant du code civil »; que d’ailleurs, il y a lieu de noter que l’Acte Uniforme sur les suretés reconnait au vendeur l’action en résolution de la vente pour défaut de paiement du prix; que dès lors, l’action en résolution de vente fondée sur l’article 290 alinéa 5 de l’AUPSRVE et les textes ci-dessus cités ne saurait être écartée ; que par ailleurs, la banque a illégalement prélevé sur l’excédent qui doit leur revenir la somme de 23.600.000 CFA pour payer les honoraires de son avocat ; qu’enfin, en dépit de tous ces prélèvements illégaux, il reste sur l’excédent un reliquat de 9.379.649 F CFA qui n’apparaît nulle part sur l’extrait de compte de l’intimée Aa Ad ; qu’au regard de tout ce qui précède ORABANK ne peut justifier avoir payé le montant du prix de l’adjudication excédant sa créance ; que suivant l’article 1654 du code civil « si l’acheteur ne paye pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente » ; que d’après l’article 105 du RGO dans les contrats synallagmatiques « lorsque l’une des partie manque à ses obligations en refusant de les exécuter en tout ou en partie l’autre peut, en dehors des dommages intérêts qui lui sont dus, demander en justice soit la réduction de ses propres obligations, soit la résolution du contrat. »; que l’article 212 du code civil stipule expressément : « à défaut de consignation du prix et de paiement des frais, la vente est résolue de plein droit. » ; que face à la défaillance ci-dessus démontrée de ORABANK Mali-SA qui est à la fois créancière poursuivante et adjudicataire, elles sont fondées en vertu des dispositions combinées des articles 290 de l'AUPSRVE, 1654 du code civil et 105 du RGO ci-dessus cités à solliciter la résolution du "contrat judicaire de vente" formé entre les parties par le jugement d'adjudication ; que c'est à bon droit que le juge d'instance a favorablement accueilli leur demande et sa décision procède d'une saine application de la loi; que l'extrait de compte qui leur a été remis le 26 Juillet 2017 prouve l’intention délibérée d'appropriation; que malgré le prélèvement de 61.713.784 F CFA sur l'excédent du prix d'adjudication qui est de 73.0'93.433 F CFA , il reste encore un reliquat de 9.375.649 F CFA qui n'apparait nulle part dans la situation du compte ; que le préjudice qui en qui découle des agissements de la banque est certain et actuel ;que c’est pourquoi elles avaient, en application des articles 125 et 113 du RGO, sollicité la condamnation d'ORABANK à leur payer la somme de cent millions ( 100.000.000 ) francs CFA à titre de dommages intérêts ; que le jugement querellé leur a alloué celle de cinquante millions (50.00.000) francs CFA à titre de réparation ; que dès lors en procédant ainsi, le juge d’instance a correctement appliqué la loi ; qu’elles concluent à la confirmation du jugement dont est appel en toutes ses dispositions et subsidiairement ordonner un sursis à statuer pour être édifié davantage sur le vrai montant de la créance de l’appelante ;
Attendu que dans leurs écritures devant la cour de céans, les intimées ont sollicité l’infirmation du jugement entrepris relativement au montant des dommages-intérêts et ont sollicité à ce titre la condamnation de la banque à leur payer la somme de 100.000.000 F CFA ;
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la Société ORABANK MALI sA
Attendu que la société ORABANK MALI SA sollicite sur le fondement de l’article 313 de l’Acte uniforme portant organisation des procédure simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, l’irrecevabilité de la demande aux fins de résolution de la vente par adjudication intervenue suivant jugement n°141 rendu le 05 avril 2017 pour cause de forclusion ; que les intimées sollicitent la confirmation dudit jugement qui a rejeté cette fin de non-recevoir ;
Attendu cependant que le délai de quinze jours prévu par l’article 313 de l’Acte uniforme précité s’applique à l’action principale en annulation de la décision judiciaire ou du procès-verbal notarié d’adjudication, action distincte de celle en résolution de la vente initiée par les intimées sur le fondement de l’article 290 alinéa 5 du même Acte uniforme et qui ne peut être mise en œuvre que lorsque l’adjudicataire n’a pas apporté les justifications spécifiées audit article « dans les vingt jours de l’adjudication » ; qu’il suit que cette dernière action n’est pas frappée de forclusion et doit être reçue par confirmation du jugement entrepris dont il convient d’adopter les motifs non contraires aux présents ;
Sur les demandes de résolution de la vente et de dommages-intérêts
Attendu que la Société ORABANK SA Mali sollicite l’infirmation du jugement entrepris qui a prononcé la résolution de la vente par adjudication, en soutenant qu’au sens de l’article 290 alinéa 2 de l’ Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution, la seule possibilité qui s’offre aux intimées pour anéantir l’adjudication en cas de non-accomplissement par l’adjudicataire des formalités prévues audit texte, est de remettre en vente l’immeuble concerné par le moyen de la folle enchère ; que la résolution de la vente par expropriation forcée, ne peut être obtenue que par cette voie, toute autre dont celle de la résolution devant être déclarée irrecevable ou mal fondée ; que cela ressort d’ailleurs de l’article 15 du cahier des charges ;
Attendu que les intimées sollicitent, quant à elles, la confirmation du susdit jugement relativement à la résolution de la vente sur le fondement des articles 290 de l’Acte uniforme précité 1654 et 2212 du code civil et 105, du Régime Général des obligations du Mali et demandent devant la Cour de céans que les dommages- intérêts soient portées à la somme de 100.000.000 F CFA et cela en application des articles 125 et 113 du RGO ;
Attendu qu’aux termes de l’article 290 de l’Acte uniforme précité : « la décision judiciaire ou le procès-verbal de l’adjudication du notaire est porté en minute à la suite du cahier des charges.
Une expédition en est délivrée selon le cas, par le greffier ou le notaire à l’adjudicataire après paiement des frais de poursuite et de prix d’adjudication et après l’accomplissement des conditions du cahier des charges qui doivent être exécutées dans les vingt jours de l’adjudication.
Toutefois si l’adjudicataire est seul créancier inscrit ou privilégié du saisi, il n’est tenu de payer, outre les frais, que le montant du prix de l’adjudication excédant sa créance. La quittance et les pièces justificatives sont annexées à la minute de la décision judiciaire ou du procès-verbal d’adjudication établi par le notaire et reproduites à la suite de l’expédition.
L’adjudicataire qui n’apporte pas ces justifications dans les vingt jours de l’adjudication peut être poursuivi par la voie de la folle enchère sans préjudice des autres voies de droit » ; qu’il ressort de ces dispositions que l’adjudicataire, seul créancier inscrit ou privilégié du saisi, exempté du paiement de la portion du prix de l’adjudication correspondant à sa créance, est tenu d’apporter les justifications relatives entre autres au paiement des frais de poursuite, du montant du prix de l’adjudication excédant sa créance et à l’accomplissement des conditions du cahier des charges dans les vingt jours de l’adjudication ; qu’à défaut de ces justifications l’adjudicataire s’expose à être poursuivi soit par la voie de la folle enchère soit par d’autres voies de droit ; qu’en effet l’expression : « par la voie de la folle enchère sans préjudice des autres voies de droit », signifie que nonobstant la possibilité de mettre en œuvre la procédure de la folle enchère, d’autre voies de droit, dont par exemple celle de la résolution de la vente par adjudication, peuvent faire l’objet d’une demande principale contre l’adjudicataire qui ne justifie pas de l’accomplissement des conditions du cahier des charges ;
Attendu, en l’espèce, qu’il ressort des éléments du dossier et notamment du cahier des charges et du jugement d’adjudication n°141 susvisé, d’une part, que la créance de la société ORABANK était de 126.906.567 F CFA dont en principal, 100.14.131 F CFA, majoré de l’indemnité forfaitaire de 25% et de divers droits et frais d’actes et, d’autre part, que l’immeuble a été adjugé à la banque à la somme de 200.000.000 F CFA ; qu’il se dégage un excédent de 73.093.433 F CFA que la société ORABANK, créancière adjudicataire, devait payer en application de l’article 290 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution en plus des frais de poursuite taxés à la somme de 20.84725 F CFA dont 14.816.985 F CFA pour les frais de l’huissier et 600.3000 F CFA pour les frais de greffe ;
Attendu que s’il est constant que l’adjudicataire, seul créancier privilégié n’a pas apporté les justifications relatives au paiement de l’excédent du prix de l’adjudication, il reste que cette inexécution partielle qui ne porte que sur un peu plus du tiers du prix de l’adjudication, le reste étant acquis à la banque ; ne présente pas un caractère de gravité suffisant pour en justifier la résolution, qu’il y a donc lieu de rejeter la demande en résolution présentée par les requérants ;
Attendu en revanche, qu’en application des dispositions de l’article 113 du régime général des obligations au Mali, qui prévoit que : « la responsabilité emporte obligation de réparer le préjudice résultant soit de l’inexécution d’un contrat soit du devoir général de ne causer aucun dommages à autrui. », il y a lieu de faire droit à la demande de dommages-intérêts des intimées qui, depuis 2017sont privées de l’usage de leur immeuble et ne sont pas non plus entrées en possession de l’excédent du prix de l’adjudication ; qu’au regard de la durée de ces privations imputables à la faute de la banque, il y a lieu d’allouer aux intimées la somme de 85.000.000 F CFA en réparation du préjudice subi et de débouter celles-ci du surplus de la demande ;
Sur les dépens
Attendu que la banque ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
Casse et annule l’Arrêt n°174 rendu le 18 mars 2020 par la Cour d’appel de Bamako ;
Evoquant et statuant au fond,
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société ORABANK MALI SA et fait droit à la demande de dommages et intérêts formulée par la société Fatiah holding et la dame Ac Ab A;
L’infirme en ce qu’il a ordonné la résolution de la vente et fixé à la somme de 50.000.000 F CFA le montant de la réparation due aux intimées ;
Statuant à nouveau sur ces points,
Rejette la demande de résolution de la vente ;
Condamne la société ORABANK Mali SA à payer à la société Fatiah Holding et dame Ac Ab A la somme de 85.000.000 F CFA à titre de dommages-intérêts ;
Condamne la Société ORABANK Mali SA aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier
10


Synthèse
Numéro d'arrêt : 094/2021
Date de la décision : 27/05/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2021-05-27;094.2021 ?
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