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08/04/2021 | OHADA | N°063/2021

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 08 avril 2021, 063/2021


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(O.H.A.D.A)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(C.C.J.A)
Première chambre
Audience publique du 08 avril 2021
Pourvoi : n° 379/2019/PC du 23/12/2019
Affaire : Monsieur Ac C
(Conseil : Maître Vincent KANGULUMBA MBAMBI, Avocat à la Cour)
Contre
Monsieur Ae A Ab
(Conseil : Maître parfait KANYANGA KUMWILA, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 063/2021 du 08 avril 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmo

nisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre, présidée par Madame Afiwa-Kindéna HOHOUET...

ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(O.H.A.D.A)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(C.C.J.A)
Première chambre
Audience publique du 08 avril 2021
Pourvoi : n° 379/2019/PC du 23/12/2019
Affaire : Monsieur Ac C
(Conseil : Maître Vincent KANGULUMBA MBAMBI, Avocat à la Cour)
Contre
Monsieur Ae A Ab
(Conseil : Maître parfait KANYANGA KUMWILA, Avocat à la Cour)
Arrêt N° 063/2021 du 08 avril 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre, présidée par Madame Afiwa-Kindéna HOHOUETO, assistée de Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier, a rendu en son audience publique ordinaire du 08 avril 2021 l’Arrêt dont la teneur suit, après délibération du collège de juges composé de :
Messieurs : Ai Aa B MVE, Président
Fodé KANTE, Juge
Mesdames : Afiwa-Kindéna HOHOUETO, Juge,
Esther Ngo MOUTNGUI IKOUE, Juge rapporteur
Monsieur : Sabiou MAMANE NAÏSSA, Juge
Sur le recours enregistré sous le n°379/2019/PC le 23 décembre 2019 et formé par Maître Vincent KANGULUMBA MBAMBI, Avocat à la Cour, Associés au Cabinet d’Avocats André et Vincent, situé dans l’immeuble Botour, 2°"° étage, B2, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, agissant au nom et pour le compte de Monsieur Ac C, domicilié à l’Avenue Coral, n°36, Coral Bay, Peya, Chypres, dans la cause qui l’oppose à Monsieur Ae A Ab, résidant au 3075 de l’avenue des Entrepôts, quartier Ah, Commune de Limete à Ag, ayant pour conseil Maître Parfait KANYANGA KUMWILA,
Avocat à la Cour, Cabinet situé au n°11 de l’avenue de la Presse, résidence MOANDA, 2°"° étage, Apt 25 à Kinshasa/Gombe, Af Ad du Congo,
en cassation de l’Arrêt RSSA 008 rendu le 18 octobre 2018 par la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe, dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement ;
Le Ministère public entendu ;
Reçoit les moyens exceptionnels soulevés par le défendeur Ac C et les dit non fondés ;
Dit recevable et fondé le recours du demandeur Ae A Ab ; par conséquent, annule dans toutes ses dispositions la sentence arbitrale entreprise ;
- Met les frais d’instance à charge du défendeur. »
Le requérant invoque à l’appui de son recours les trois moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent Arrêt ;
Sur le rapport de Madame Esther Ngo MOUTNGUI IKOUE, Juge ;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l'OHADA ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que suite à la désignation par ordonnance n° 01063/2016 du 04 novembre 2016 du Président du Tribunal de commerce de Kinshasa/Gombe de Maître Laurent OKITONEMBO WETSHONGUNDA comme arbitre unique dans la cause qui oppose Monsieur Ac C à Monsieur Ae A Ab, au sujet d’une créance non payée de 250 000 $US, le Tribunal arbitral prononçait, le 22 décembre 2017, une sentence définitive condamnant le dernier cité à payer au premier ladite somme et des dommages- intérêts, ainsi que des frais ; que par exploit du 20 avril 2018, le défendeur au pourvoi assignait en annulation Monsieur Ac C devant la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe qui rendait, le 18 octobre 2019, l’arrêt dont pourvoi ;
Sur la recevabilité du pourvoi
Attendu que dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour le 04 septembre 2020, Ae A Ab soulève l’irrecevabilité du pourvoi, pour violation de diverses dispositions, notamment :
- Les articles 28.1, 25.1 et 2 du Règlement de procédure de la CCJA, et l’article 1°" de la Décision n° 002/99/CCJA du 04 février 1999, en ce qu’il a été déposé hors le délai de deux mois et 21 jours légalement prévu ;
- L'article 28.1 du Règlement de procédure de la Cour, en ce que le demandeur n’a pas, selon le défendeur, démontré en quoi l’arrêt de la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe soulève des questions relatives à l’application des actes uniformes ou des règlements prévus au Traité, le recourant ayant fondé son recours principalement sur des dispositions du droit interne ;
- L'article 28.3 du Règlement de procédure, en ce que le recours ne contient aucune élection de domicile au lieu où la Cour a son siège, et n’indique pas le nom de la personne qui a consenti à recevoir les significations ;
- L'article 28 (nouveau) du Règlement de procédure, en ce que le demandeur n’a pas produit l’exploit de signification de la décision attaquée ;
Mais attendu qu’aux termes des dispositions combinées des articles 25.1 et 28.1 du Règlement de procédure sus indiqué, « 1-lorsqu'’un acte ou une formalité doit en vertu du Traité ou du présent Règlement être accompli avant l’expiration d’un délai, celui-ci a pour origine la date de l'acte, de l'évènement de la décision ou de la signification qui fait courir ce délai. Le jour au cours duquel survient cet acte, cet évènement, cette décision ou cette signification n’est pas compris dans le délai (.…) » ; « Lorsque la Cour est saisie par l’une des parties à l'instance par la voie du recours en cassation prévu au troisième ou quatrième alinéa de l’article 14 du Traité, le recours est présenté au greffe dans les deux mois de la signification ou de la notification de la décision attaquée par l’Avocat du requérant dans les conditions fixées à l’article 23 du présent Règlement. (...) » ; que l’article 1” de la décision n°002/99/CCJA du 04 février 1999 augmente ces délais de procédure de 21 jours pour les pays de l’Afrique centrale ;
Attendu qu’en l’espèce, il résulte, d’une part, des pièces de la procédure que l’expédition du 18 octobre 2018, délivrée le 03 octobre 2019, a été signifiée à la requête du Greffier principal de la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe le 23 octobre 2019 par Maître Mado Muanda, Huissier de justice près ladite cour ; que le pourvoi formé le 23 décembre 2019 n’est donc nullement tardif ;
Que d’autre part, la sentence à l’origine du recours en cassation a été rendue en application de l’Acte uniforme du 11 mars 1999 relatif au droit de l’arbitrage, matière qui rentre dans celles définies à l’article 2 du Traité de l’'OHADA ; que l’invocation du droit interne est indifférente et il n’en résulte aucune violation de l’article 28.1 du Règlement de procédure de la Cour ;
Que, de troisième part, l’article 28 (nouveau) du Règlement n°001/2014/CM du 30 janvier 2014 n’impose plus une élection de domicile au lieu où la Cour a son siège et de quatrième part, la production de l’exploit de signification, qui sert de preuve pour la computation des délais de recours n’est pas impérative et qu’en l’absence d’un tel exploit, la décision est présumée n’avoir pas été signifiée ;
Attendu qu’au regard de ce qui précède, qu’il y a lieu pour la Cour de rejeter, comme non fondés, tous les arguments tendant à l’irrecevabilité du pourvoi ;
Sur le troisième moyen de cassation, tiré de la violation de la loi
Vu l’article 5-b de l’Acte uniforme du 11 mars 1999 relatif au droit de l’arbitrage ;
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation de l’article 5-b de l’Acte uniforme susvisé, en ce qu’il a retenu comme motif d’annulation de la sentence qui lui était déférée la composition irrégulière du Tribunal arbitral alors, selon le demandeur au pourvoi, que l’arbitre unique a été désigné par ordonnance du juge compétent, conformément à l’article mentionné, le défendeur en cassation n’ayant pas réagi dans le délai de 30 jours à sa sollicitation, et l’obligeant ainsi à saisir le juge d’appui pour permettre la mise en œuvre de la procédure arbitrale ;
Attendu que l’article 5-b de l’Acte uniforme visé au moyen prévoit qu’« en cas d'arbitrage par un arbitre unique, si les parties ne peuvent s’accorder sur le choix d’un arbitre, celui-ci est nommé, sur la demande d’une des parties, par le juge compétent » ;
Que la convention de cession de parts sociales liant les parties ayant prévu en son article 5 intitulé « notifications-différends-droit applicable », qu’ « (...)en cas de différend, elles (les parties) privilégient le règlement amiable. A défaut, elles s’en remettent à l'arbitrage. Dans ce cas, le droit applicable est le droit congolais et le lieu d'arbitrage, Ag », et n’ayant prévu ni le mode de désignation ni le nombre des arbitres, c’est en application des dispositions susvisées, complétées par celles de l’article 161 alinéas 1, 2 et 3 du Code de procédure civile de la République 4 démocratique du Congo que le juge d’appui, en l’occurrence le Président du Tribunal de commerce de Kinshasa/Gombe, brisant la résistance de la partie défenderesse à l’arbitrage, a désigné, après deux premières ordonnances infructueuses, par ordonnance n°01063/2016 du 04 novembre 2016, Maître Laurent Okitonembo comme arbitre unique pour connaître du litige entre les parties;
Qu’en énonçant que «La Cour note que dans le cas sous examen, conformément à ces deux dispositions précitées (..….) le Tribunal arbitral a été irrégulièrement composé et l'arbitre unique irrégulièrement désigné en tenant compte de la volonté d’une seule partie, en l’occurrence le défendeur Ac C, qui a même fait rétracter le juge sur le deuxième arbitre qui était l’expression de la volonté de la partie ALKARIM (...) ; il n’a pas été donné aux deux arbitres, désignés à la requête de chacune des parties de compléter le troisième arbitre ou par choix par le juge compétent sur le troisième arbitre pour plus d’impartialité (...) », la Cour de Kinshasa/Gombe a statué en méconnaissance de l’intervention rendue nécessaire du juge d’appui dans la procédure initiée par Ac C et des décisions prises par celui-ci en vue de rendre effective la procédure, notamment l’ordonnance de désignation de l’arbitre unique et celle n° 0621/2017 du 13 juin 2017 ayant rétracté l’ordonnance qui a inopportunément désigné un second arbitre, alors que l’instance arbitrale était déjà en cours ;
Attendu qu’il en résulte une violation par mauvaise application de l’article 5.b de l’Acte uniforme visé au moyen, ensemble les dispositions pertinentes du Code de procédure civile de la République Démocratique du Congo, par la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe ; qu’il y a lieu de casser l’arrêt entrepris et d’évoquer, en application des dispositions de l’article 14 alinéa 5 du Traité de l'OHADA ;
Sur l’évocation
Attendu que Monsieur Ae A Ab et le demandeur avaient conclu, en date du 13 juillet 2015, une convention de cession de 2,5% et 10% de parts sociales que détenait ce dernier au sein des sociétés RAKEEN-Congo Sarl et RAK.CCC Sarl, au prix convenu de 650 000 $ US dont la somme de 400 000 $ immédiatement libérée ; qu’en application de la clause compromissoire contenue dans l’acte de cession, Ac C faisait transmettre à son cocontractant, le 03 janvier 2016, une correspondance aux fins de désignation d’un arbitre pour régler le litige né entre eux ; que face au défaut de réponse de ce dernier dans le délai de 30 jours, le défendeur au recours en annulation saisissait le juge d’appui et, par ordonnance n°01063/2016 du 04 novembre 2016, le Président du Tribunal de commerce de Kinshasa/Gombe désignait un arbitre unique aux fins de mise en œuvre de la procédure d’arbitrage ; que le 22 décembre 2017, une sentence définitive était rendue, dont le dispositif est le suivant :
« Au vu de tout ce qui précède, l’Arbitre unique,
-Dit recevable pour la forme la requête d’arbitrage de la partie demanderesse, Ac C, mais la dit partiellement fondée ;
- En conséquence, condamne la Partie défenderesse, Ae A Ab à payer à la Partie demanderesse la somme de 250 000 USD (Deux cent cinquante mille dollars américains) au titre de créance principale ;
- Condamne également la Partie défenderesse à payer à la Partie demanderesse la somme de 33.350 USD (Trente-trois mille trois cent cinquante dollars américains) au titre de dommages-intérêts moratoires ;
- Dit que ce montant de dommages-intérêts moratoires augmentera à due proportion jusqu’au jour du paiement complet à raison de 8% l’an de la créance principale de 250 000 USD calculable et payable de droit ;
- Dit recevable pour la forme la demande de la Partie demanderesse tendant à condamner la Partie défenderesse à lui payer la somme de 75.000 USD au titre des dommages-intérêts pour mauvaise foi mais la déclare non fondée et la rejette ;
- Condamne les parties aux frais et honoraires d’arbitrage à raison des % à charge de la partie défenderesse et % à charge de la Partie demanderesse, soit respectivement 6.600 USD et 2.200 USD ;
-Condamne la partie défenderesse à payer à la Partie demanderesse la somme de 6.600 USD au titre de remboursement des frais de procédure et honoraires de l’arbitre unique avancés par cette dernière ;
- Condamne les parties à tous autres frais que requerra l’exécution de la présente sentence à raison de % à charge de la Partie défenderesse et A4 à charge de la Partie demanderesse ;
-Dit la présente sentence exécutoire nonobstant tout recours et sans caution. » ;
Attendu que par exploit du 20 avril 2018 de l’Huissier Mado MUANDA, Alkarim ALNOOR JAMAL assignait en annulation de ladite sentence Ac C devant la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe ; qu’il développait au soutien de son appel le défaut de convention d’arbitrage entre les parties et l’irrégularité de la composition du Tribunal arbitral, la méconnaissance par l’arbitre de sa mission et le non-respect par celui-ci du principe du contradictoire, le défaut d’indépendance et d’impartialité de l’arbitre ;
Qu’en réponse, Ac C soulevait en la forme l’irrecevabilité du recours en annulation et quant au fond, son rejet ;
Sur la recevabilité du recours en annulation
Attendu qu’in limine litis, le défendeur soulève en la forme l’irrecevabilité de l’assignation en nullité motifs pris :
- du défaut de qualité de Maître Parfait KANYANGA KUMWILA, conseil de Ae A, en ce qu’il ne ressort ni de la lecture de l’assignation ni de la consultation des registres du greffe civil de la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe, que ce dernier était porteur d’une procuration spéciale de son client, document pourtant indispensable pour l’introduction de son recours ;
- de l’irrégularité de la saisine de la Cour d’appel par voie d’assignation, alors, selon les dispositions combinées des articles 25 à 29 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage et 2 du Code de procédure civile de la République Démocratique du Congo, que la sentence ne peut être attaquée que par un « recours en annulation » et non par une assignation ;
- de la forclusion, en ce que le recours n’a pas été introduit dans le mois de la signification, l’assignation ayant été faite le 22 avril 2018, pour une sentence rendue le 22 décembre 2017 et signifiée aux parties le 27 décembre de la même année ;
Mais attendu qu’il ressort des pièces du dossier que :
- Maître Parfait KANYANGA KUMWILA a bien produit au dossier de la procédure une procuration spéciale datée du 06 mars 2018, donnée par Ae A Ab, aux fins d’introduire le recours en annulation de la sentence arbitrale rendue le 22 décembre 2017 et complétée le 02 janvier 2018 ; que seule importe la matérialité de cette pièce, dont l’existence est, en l’espèce, prouvée, et sa production au dossier, l’absence de mention dans l’assignation et dans les registres du Greffe de la Cour étant inopérante ;
- s’agissant de la saisine par voie d’assignation, en l’absence de prescription particulière sur le mode de saisine par les dispositions de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage applicable à la convention des parties, qui renvoient simplement à un « recours », l’action en annulation portée contre une sentence arbitrale devant la juridiction étatique compétente par voie d’assignation ne saurait être déclarée irrecevable, d’autant que l’article 192 du code de procédure civile précité dispose,
s’agissant de l’arbitrage, que « la demande en nullité formée par voie d’assignation est portée devant la cour d'appel (...) » ;
-s’agissant de la forclusion du demandeur à l’annulation de la sentence, l’article 27 alinéa 1” de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage dispose que «le recours en annulation est recevable dès le prononcé de la sentence. Il cesse de l’être s’il n’a pas été exercé dans le mois de la signification de la sentence munie de l’exéquatur » ; qu’il ressort de ces dispositions que la sentence doit être, au moment de sa signification, munie de l’exéquatur ; que la signification de la sentence qui, comme en l’espèce, ne remplit pas cette condition ne saurait faire courir les délais de recours ;
Attendu qu’au regard de ce qui précède, il y a lieu de rejeter les moyens tendant à l’irrecevabilité du recours en annulation introduit par Ae A Ab, et de le déclarer recevable ;
Sur les motifs tirés de l’inexistence de la convention d’arbitrage et de l’irrégularité de la constitution du Tribunal arbitral
Attendu qu’Ae A Ab invoque l’absence d’une convention d’arbitrage entre les parties, en ce que la clause sur laquelle l’arbitre s’est fondé n’ayant réglé ni le mode de désignation ni le nombre d’arbitres devant trancher le litige, elle doit être considérée comme inexistante ou nulle ou, à tout le moins expirée ; que de plus, la désignation du Tribunal arbitral a été faite en violation des dispositions de l’article 5 de l’ Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage quant à sa composition, en ce qu’il a été désigné un arbitre unique au lieu de laisser la possibilité aux parties d’en désigner trois ;
Attendu que l’article 5 susvisé dispose que « les arbitres sont nommés, révoqués ou remplacés conformément à la convention des parties. À défaut d’une telle convention ou si la convention est insuffisante : a) en cas d'arbitrage par trois arbitres, chaque partie nomme un arbitre et les deux autres arbitres ainsi nommés choisissent un troisième arbitre ; si une partie ne nomme pas un arbitre dans le délai de trente jours à compter de la réception d’une demande à cette fin émanant de l’autre partie, ou si les deux arbitres ne s'accordent pas sur le choix du troisième arbitre dans un délai de trente jours à compter de leur désignation, la nomination est effectuée, sur la demande d’une partie, par le juge compétent dans l’État partie ; b) en cas d'arbitrage par un arbitre unique, si les parties ne peuvent s’accorder sur le choix de l'arbitre, celui-ci est nommé, sur la demande d’une partie, par le juge compétent dans l'Etat partie » ;
Attendu que telle que libellée, la clause litigieuse, qui renvoie expressément à l’arbitrage, ne saurait être déclarée inexistante ou nulle, nonobstant ses insuffisances, dès lors qu’elle doit opportunément être complétée par les dispositions pertinentes tant de l’article 5 susvisé que de celles du Code de procédure congolais ; que c’est donc à bon droit que le Tribunal arbitral a considérée valable ladite clause, l’argument tiré de son expiration manquant par de pertinence ;
Attendu, par ailleurs, que s’agissant de la désignation d’un arbitre unique, elle ne saurait être reprochée à la demanderesse, en l’absence d’une volonté contraire des parties, dès lors qu’il fallait faire face à l’inertie de la défenderesse ; que c’est à bon droit qu’a été prise l’ordonnance du 04 novembre 2016 désignant Maître Laurent Okitonembo comme arbitre unique pour connaître du litige ; qu’il ne saurait être davantage reproché au juge d’appui d’avoir rapporté une ordonnance tendant à désigner un second arbitre, alors même que la procédure d’arbitrage était déjà mise en œuvre depuis son ordonnance de désignation de l’arbitre unique ;
Qu’il y a lieu de rejeter ces deux motifs d’annulation comme non fondés et les rejeter ;
Sur les motifs tirés de la méconnaissance par l’arbitre de sa mission et du non-respect par celui-ci du principe du contradictoire
Attendu qu’il est d’une part, reproché à l’arbitre d’avoir rendu une sentence, alors que l’acte de mission établi le 13 février 2017 n’a pas été signé par Ae A Ab, et que les frais sollicités par l’arbitre n’ont été ni acceptés ni payés ; qu’en l’absence de ces formalités, il y a lieu de conclure que Tribunal arbitral a statué sans se conformer à une quelconque mission, et que sa sentence encourt annulation ; qu’il est d’autre part reproché au Tribunal arbitral de n’avoir pas respecté le principe du contradictoire, en ce qu’il a omis de tenir compte de la volonté de Ae A de faire désigner un second arbitre, faisant ainsi prévaloir la seule volonté de Ac C, lequel a usé de manœuvres afin de faire rapporter l’ordonnance désignant le second arbitre ; qu’en agissant ainsi, le Tribunal arbitral a manqué de réserver aux parties un traitement égal, commettant les griefs qui lui sont reproché et exposant ainsi la sentence à l’annulation ;
Mais attendu qu’il ressort des pièces du dossier que non seulement la désignation du second arbitre par le Président du Tribunal de commerce de Kinshasa/Gombe a été rapportée par ce dernier par ordonnance n°0258/2017 du 21 mars 2017, et que le demandeur à l’annulation de la sentence n’explique pas en quoi ont consisté les supposées manœuvres de son contradicteur ; que les pièces du dossier indiquent plutôt que depuis la correspondance de Ac C du 3 janvier 2016 aux fins de désignation d’un arbitre, plusieurs ordonnances de désignation ont été prises par le tiers sus indiqué, jusqu’à celle n°010063/2016 nommant Maître Laurent OKITONEMBO WETSHONGUNDA, en qualité d’arbitre unique ;
Qu’il ressort également des mêmes pièces que bien que le projet d’acte de mission et un projet de calendrier ont été dûment transmis et réceptionnés par toutes les parties, Monsieur Ae A Ab a plutôt multiplié, par le biais de son conseil, des incidents, allant de la contestation de la procédure à la récusation de l’arbitre désigné par le juge d’appui, sans engager pour autant la procédure prévue par l’article 7 alinéas 3 et 4 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage, toutes choses de nature à contrarier la procédure arbitrale engagée ;
Que la partie défenderesse à l’instance d’arbitrage ayant été parfaitement mise en mesure de faire valoir ses arguments, c’est en vain qu’elle prétend que l’arbitre n’a pas respecté sa mission, et que le principe du contradictoire n’a pas été respecté ; qu’il y a lieu de dire ces moyens d’annulation non fondés et les rejeter ;
Sur les motifs tirés du défaut d’indépendance et d’impartialité de l’arbitre
Attendu qu’il est reproché à la sentence d’une part, la violation de l’article 7 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage, en ce que, l’arbitre a statué en dépit de sa récusation par l’une des parties ; que d’autre part, l’arbitre désigné a été particulièrement partial, en ce qu’il a tenu compte des seuls points de vue de la partie demanderesse à l’arbitrage ;
Attendu qu’aux termes de l’article 7 alinéa 3 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage applicable au contrat des parties prévoit que « en cas de litige, et si les parties n’ont pas réglé la procédure de récusation, le juge compétent dans l'Etat partie statue sur la récusation. Sa décision n’est susceptible d'aucun recours » ;
Attendu qu’au-delà de ce que l’arbitre contesté a été désigné par le juge d’appui, il ne ressort des éléments du dossier aucune procédure régulière de récusation dudit arbitre devant la juridiction compétente ; que des simples correspondances adressées au conseil de la partie demanderesse par celui de la partie défenderesse ne sauraient être considérés comme constitutives d’une procédure de récusation régulière, ce d’autant qu’au reçu desdites correspondances, l’arbitre désigné a sursis à statuer sur le fond de la procédure, en attendant éventuellement une décision du juge qui serait régulièrement saisi ;
Qu’en l’absence d’une quelconque procédure engagée, c’est à bon droit que le Tribunal a repris, après sa sentence partielle du 24 avril 2017 la procédure, l’arbitre désigné ne supposant en sa personne aucune cause de récusation telle qu’indiquée à l’article 7 alinéa 2 de l’Acte uniforme ; qu’il y a lieu également d’écarter ces moyens comme non fondés ;
Attendu qu’aucun moyen à l’appui de la demande d’annulation ne prospérant, il y a lieu de rejeter le recours de Ae A Ab ;
Sur les dépens
Attendu que la partie demanderesse au recours en annulation succombant, sera condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
Déclare recevable le pourvoi initié par Monsieur Ac C ;
Casse l’arrêt attaqué ;
Évoquant et statuant à nouveau
En la forme: rejette l’exception d’irrecevabilité soulevée par Ac C ;
Déclare recevable le recours en annulation initié par Monsieur Ae A Ab ;
Le déclare cependant mal fondé et le rejette ;
Condamne Ae A Ab aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier
11


Synthèse
Numéro d'arrêt : 063/2021
Date de la décision : 08/04/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2021-04-08;063.2021 ?
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