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08/04/2021 | OHADA | N°054/2021

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 08 avril 2021, 054/2021


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Troisième chambre
Audience publique du 08 avril 2021
Pourvoi :n° 173/2020/PC du 09/07/2020
Affaire : Société TAMARIS International SA
( (Conseils : SCPA BEDI & GNIMAVO, Avocats à la Cour)
Contre
Association Professionnelle des Banques et Etablissements
Financiers de Côte d’Ivoire (APBEF-CI)
(Conseils : SCPA DOGUE-ABBE YAO & Associés, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 054/2021

du 08 avril 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation e...

ORGANISATION POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Troisième chambre
Audience publique du 08 avril 2021
Pourvoi :n° 173/2020/PC du 09/07/2020
Affaire : Société TAMARIS International SA
( (Conseils : SCPA BEDI & GNIMAVO, Avocats à la Cour)
Contre
Association Professionnelle des Banques et Etablissements
Financiers de Côte d’Ivoire (APBEF-CI)
(Conseils : SCPA DOGUE-ABBE YAO & Associés, Avocats à la Cour)
Arrêt N° 054/2021 du 08 avril 2021
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 08 avril 2021 où étaient présents :
Messieurs Mahamadou BERTE, Président, Rapporteur Arsène Jean Bruno MINIME, Juge
Mariano Esono NCOGO EWORO, Juge
et Maître Louis Kouamé HOUNGBO, Greffier ;
Sur la requête enregistrée au greffe de la Cour de céans le 09 juillet 2020 sous le n°173/2020/PC et formée par la SCPA BEDI & GNIMAVO, Avocats à la Cour, sise à Ad Ab II Plateaux 7" tranche, près de la pharmacie de la 7ème tranche après la boulangerie "Paris Baguette", immeuble à carreaux de couleur marron, 1“ étage, agissant au nom et pour le compte de la société TAMARIS International SA, dont le siège social est sis aux Îles Aa Ac, PO BOX 33 21, ROAD TOWN, dans la cause qui l’oppose à l’Association Professionnelle des Banques et Etablissements Financiers de Côte d’Ivoire dite APBEF-CI, association régie par la loi de 1960 dont le siège social est à Ad,
01 BP 3810 Ad 01, ayant pour conseils la SCPA DOGUE-ABBE-YAO & Associés, Avocats à la Cour, sise à Ad 29, boulevard Clozel, 01 BP 174 ;
en cassation de l’arrêt n°245 COM du 09 mars 2018 rendu par la Cour d’appel d’Ad, et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en dernier ressort ;
En la forme :
Déclare la société TAMARIS International recevable en son appel relevé du jugement n°2882 rendu le 05 novembre 2015 par le Tribunal de Commerce d’Ad ;
Au fond :
L’y dit mal fondée ;
L’en déboute ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne l’appelante aux dépens. »
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Mahamadou BERTE, second Vice-Président ;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l'OHADA ;
Attendu, selon les énonciations de l’arrêt attaqué, que dans le cadre de la modernisation du système de carte bancaire, l’Association Professionnelle des Banques et Etablissements Financiers de Côte d’Ivoire en abrégé APBEF-CI, a initié un projet de création et d’exploitation d’un centre monétique interbancaire ; que dans le but de s’associer des partenaires compétents et capables de l’aider efficacement à réaliser le projet, elle a lancé un appel d’offre international ; que la société TAMARIS International SA a soumissionné à cet appel d’offre dont elle a été déclarée définitivement adjudicataire le 1” juillet 1998, après qu’elle ait accepté la détention par les banques de 51% du capital de la future structure ; que cependant, l’APBEF, estimant que la société TAMARIS International LTD n’a pas donné de réponse à certaines de ses préoccupations, a, par correspondance en date du 27 janvier 1999, notifié à celle-ci sa décision de mettre un terme à leur relation ;
Qu’ainsi, suivant exploit en date du 15 juillet 2015, la société TAMARIS International a donné assignation à l’APBEF devant le Tribunal de commerce d’Ad en réparation de préjudice ;
Que par jugement n°2882 du 05 novembre 2015, cette juridiction a déclaré la société TAMARIS International irrecevable en son action, pour cause de forclusion ;
Que statuant sur l’appel interjeté par celle-ci contre ce jugement, la Cour d’appel a rendu l’arrêt objet du présent recours en cassation ;
Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi
Vu l’article 26 de l’Acte uniforme portant sur le Droit Commercial Général ;
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué, d’avoir violé l’article 26 de l’Acte uniforme susvisé, en ce que pour confirmer le jugement entrepris auquel il était reproché d’avoir soulevé d’office le moyen tiré de la prescription, la Cour d’appel a retenu que ce moyen « peut être soulevé même pour la première fois en appel, ce qu’a fait l’intimée », alors, selon le pourvoi, que « la question qui se posait n’était nullement celle de savoir si, ce moyen pouvait être soulevé, même pour la première fois, en cause d’appel par les parties, mais plutôt celle de savoir si le Tribunal de commerce d’Ad pouvait légalement soulever d’office, un tel moyen » ; qu’en s’abstenant volontairement de répondre à cette question pour ne pas infirmer la décision déférée, la Cour d’appel a, selon le pourvoi, violé l’article 26 de l’Acte uniforme précité et exposé son arrêt à la cassation ;
Attendu en effet, qu’aux termes de l’article 26 alinéa 1 de l’Acte uniforme précité : «les juges ne peuvent soulever d’office le moyen résultant de la prescription » ;
Qu’il en ressort qu’il est interdit au juge de soulever lui-même le moyen tiré de la prescription d’une action ;
Attendu en l’espèce, qu’il ressort de l’arrêt attaqué, les énonciations ci- après : « considérant qu’en cause d’appel, la société TAMARIS International prétend que le jugement attaqué est nul au regard de l’article 26 de l’Acte uniforme OHADA sur le droit commercial général qui interdit clairement au juge de soulever d’office l’exception de prescription ;
Qu'elle prie la Cour, après évocation, de faire droit à ses prétentions ;
Considérant qu’en réplique, l’APBEF-CI, invoque l’article 26 alinéa 2 de l’Acte uniforme OHADA précité prévoyant que la prescription peut être soulevée même pour la première fois en appel ; qu’elle sollicite la confirmation du jugement attaqué » ; qu’il en ressort que le premier juge a soulevé d’office la fin de non- recevoir tirée de la prescription de l’action de la société TAMARIS International et que celle-ci avait demandé à la Cour d’appel de sanctionner cette irrégularité par l’infirmation dudit jugement ;
Attendu que la Cour d’appel, en confirmant dans ces conditions le jugement qui lui a été déféré a, de ce fait, admis la possibilité pour le juge de soulever d’office le moyen tiré de la prescription ; qu’en se déterminant ainsi, elle a violé le texte visé au moyen ; qu’il y a lieu de casser l’arrêt attaqué, et d’invoquer en application de l’article 14 alinéa 5 du Traité institutif de l'OHADA, sans qu’il soit besoin de statuer sur le second moyen ;
Sur l’évocation
Attendu que par exploit d’huissier de justice en date du 07 juin 2016, la société TAMARIS International a relevé appel du jugement n°2882 rendu le 05 novembre 2015 par le Tribunal de commerce d’Ad qui, en la cause, a statué comme suit :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et dernier ressort, déclare la société TAMARIS International irrecevable en son action pour cause de prescription ;
la condamne aux dépens de l’instance… » ;
Qu’au soutien de son recours, la société TAMARIS International a exposé qu’elle a soumissionné à un marché de création d’un centre monétique interbancaire et a été adjudicataire de ce marché, sous la seule réserve d’une révision de la structure du capital du futur centre monétique interbancaire dont les banques souhaitaient avoir la majorité ; que le 10 juin 1998, elle a levé cette réserve en proposant aux banques la cession de 51% du capital et que le 1” juillet 1998, prenant acte de cette réponse, l’APBEF-CI a accepté ladite proposition de cession et l’a déclarée définitivement adjudicataire ; qu’à partir de cet instant, non seulement toutes ses relances à l’endroit de l’intimée informant celle-ci de ce qu’elle attendait les instructions sur le point de répartition de la portion du capital réservée aux banques, sont restées sans suite, mais l’APBEF-CI, par le biais de la SGBCI a tenté de façon maladroite à renégocier ou rediscuter les termes de la convention les liant ; que n’ayant pas atteint son objectif, l’APBEF-CI a rompu unilatéralement le contrat les liant, le 27 janvier 1999 ;
Qu'elle allègue que, les parties étaient liées par un contrat synallagmatique et n’étaient plus au stade de proposition comme l’a soutenu l’intimée dans le courrier de résiliation ;
Que les moyens invoqués par l’APBEF-CI à l’appui de la décision de rupture ne font pas partie des causes prévues par l’article 1134 du code civil et de nature à justifier la résiliation unilatérale intervenue ;
Qu'elle estime que, seul le non-respect par elle des exigences du cahier des charges ou de toutes autres obligations contractuelles librement consenties peut légitimer cette rupture ;
Qu'elle fait observer que toutes les raisons invoquées par l’intimée pour justifier la rupture sont extérieures aux cahiers des charges, cadre juridique exclusif de leurs relations ;
Que la rupture ainsi intervenue est donc abusive et lui a causé un préjudice qui ne peut être chiffré qu’à dire d’expert ;
Attendu qu’en cause d’appel, la société TAMARIS International soutient que le jugement attaqué est nul au regard de l’article 26 de l’acte uniforme OHADA sur le droit commercial général qui interdit clairement au juge de soulever d’office l’exception de prescription ;
Qu'elle prie la Cour, après évocation, de faire droit à ses prétentions ;
Qu'elle relève que l’acte uniforme OHADA sur le droit commercial général n’est pas applicable en l’espèce car entré en vigueur le 15 décembre 2010, après les faits datant du 27 janvier 1999 ;
Attendu qu’en réplique, l’APBEF-CI invoque l’article 26 alinéa 2 de l’acte uniforme OHADA précité prévoyant que la prescription peut être soulevée même pour la première fois en appel ;
Qu'elle sollicite la confirmation du jugement ;
Sur la recevabilité de l’appel
Considérant que l’appel a été interjeté dans les forme et délai légaux ;
Qu'il convient donc de le déclarer recevable ;
Sur l’applicabilité de l’article 16 de l’Acte uniforme du droit commercial général
Attendu que la société TAMARIS International, pour solliciter l’infirmation du jugement entrepris, soutient que l’article 16 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général n’est pas applicable en l’espèce, en ce que son action qui vise à obtenir la réparation du préjudice subi du fait de la rupture abusive par l’APBEF-CI de la relation contractuelle qui les liait et non à recouvrer une créance ou à contraindre celle-ci à exécuter une obligation, tombe sous le coup de la prescription trentenaire ;
Attendu que selon les dispositions de l’article 16 de l’Acte uniforme précité : « les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants, se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes.
Cette prescription est soumise à la loi régissant le droit qu’elle affecte. » ;
Qu’il en ressort que la prescription du droit commun n’est pas applicable aux obligations nées à l’occasion de leur commerce, entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants, lesquelles se prescrivent par cinq ans ;
Attendu qu’en l’espèce, il est sans conteste que l’action initiée par la société TAMARIS International, société commerciale, trouve son fondement dans les relations contractuelles qui la liaient à l’APBEF-CI ; que c’est donc à bon droit que le premier juge a considéré qu’une telle action tombe sous le coup de la prescription quinquennale prévue par l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général tant dans sa rédaction du 17 avril 1997 que dans celle du 15 décembre 2010 ;
Sur la violation de l’article 26 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général
Attendu que la société TAMARIS International, sollicite également l’infirmation du jugement entrepris pour violation de l’article 26 de l’Acte uniforme précité au motif que le premier juge a, en dépit de l’interdiction résultant de ce texte, soulevé d’office le moyen tiré de la prescription de son action ;
Attendu en effet que les dispositions de l’article 26 susvisé interdisent au juge de soulever d’office le moyen résultant de la prescription ;
Qu’en l’espèce, le jugement entrepris énonce: «A l’audience de conciliation du 08 octobre 2015, le Tribunal a relevé la prescription de l’action tirée des dispositions de l’article 16 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général et a invité les parties à conclure sur cette fin de non-recevoir » ; qu’il en ressort que le juge a, en violation de l’article 26 susvisé soulevé d’office le moyen résultant de la prescription ; qu’il y a donc lieu d’infirmer le jugement entrepris sur ce point et d’évoquer ;
Attendu qu’en cause d’appel l’APBEF-CI a, sur le fondement de l’alinéa 2 du même article, soulevé la prescription de l’action en réparation de préjudice initiée contre elle par la société TAMARIS International ;
Attendu que selon les dispositions de l’alinéa 2 dudit article 26 « sauf renonciation, la prescription peut être opposée en tout état de cause, même en appel. » ;
Attendu qu’en l’espèce, il est établi que les relations contractuelles ayant existé entre les parties, pour les besoins de leurs activités commerciales, ont été rompues par l’APBEF-CI par courrier en date du 27 janvier 1999 et que l’appelante a initié son action le 15 juillet 2015, soit environ 16 ans après ladite rupture ; qu’il s’ensuit que cette action qui tombe sous le coup de l’article 16 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général se trouve prescrite et est donc irrecevable ;
Sur les dépens
Attendu que la société TAMARIS International, succombant, sera condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
Casse et annule l’arrêt n°245 rendu le 09 novembre 2018 par la Cour d’appel d’Ad ;
Evoquant et statuant sur le fond,
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a retenu que l’article 16 de l’acte uniforme sur le droit commercial général est applicable en l’espèce ;
L’infirme en ce que le Tribunal a soulevé d’office le moyen résultant de la prescription ;
Statuant à nouveau sur ce point :
Reçoit la fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale soulevée en cause d’appel par l’APBEF-CI ;
La dit bien fondée ;
Déclare la société TAMARIS International irrecevable en son action pour cause de prescription ;
La condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier


Synthèse
Numéro d'arrêt : 054/2021
Date de la décision : 08/04/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2021-04-08;054.2021 ?
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