La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2015 | OHADA | N°086/2015

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 08 juillet 2015, 086/2015


ARRET N°086/2015 du 08 juillet 2015
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 08 juillet 2015 où étaient présents :
Messieurs Abdoulaye Issoufi TOURE, Président
Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge, rapporteur Djimasna N’DONINGAR, Juge
et Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier,
Sur pourvoi enregistré au greffe de la cour de céans le 19 avril 2010 sous le n°039/2010/PC et formé par la SCPA KlemetSawad

ogoKouadio, Avocats à la Cour, demeurant à Abidjan, Commune de Cocody, avenue Jacque...

ARRET N°086/2015 du 08 juillet 2015
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 08 juillet 2015 où étaient présents :
Messieurs Abdoulaye Issoufi TOURE, Président
Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge, rapporteur Djimasna N’DONINGAR, Juge
et Maître Jean Bosco MONBLE, Greffier,
Sur pourvoi enregistré au greffe de la cour de céans le 19 avril 2010 sous le n°039/2010/PC et formé par la SCPA KlemetSawadogoKouadio, Avocats à la Cour, demeurant à Abidjan, Commune de Cocody, avenue Jacques AKA, Villa Médecine, 08 BP 118 Abidjan 08, Côte d’Ivoire, agissant au nom et pour le compte des Ayants-droit de Feu COFFIE Benjamin Barthélémy, BP V 164 Abidjan, dans la cause les opposant à dame KOFFI NDRI Béatrice épouse MIAN KOFFI, commerçante, exerçant sous la dénomination commerciale de « Restaurant OLISSAN », demeurant à Abidjan, Cocody les deux Plateaux,
2
Boulevard Latrille, 16 BP 558 Abidjan 16, ayant pour conseil Maître BAMBA Akoua Lydie, Avocat à la Cour, demeurant à Cocody-centre, quartier SICOGI, derrière la CI-TELECOM, Immeuble Entente, 1er étage Porte 766, 04 BP 2330,
en cassation de l’arrêt n°324/09 du 26 juin 2009 rendu par la cour d’appel d’Abidjan,
dont le dispositif est le suivant : « Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort ; EN LA FORME : Déclare recevable l’appel relevé par Mme KOFFI N’DRI Béatrice épouse Mian
KOFFI ; AU FOND : L’y dit partiellement fondée ; Infirme le jugement entrepris ; Statuant à nouveau : La condamne à payer aux ayants droit de feu COFFIE Benjamin Barthélémy la somme
de 6.157.000 F à titre de loyers échus et impayés ; Déboute les ayants droit de feu COFFIE Benjamin Barthélémy de leur demande en
résiliation de bail et en expulsion ; Condamne aux dépens les deux parties à proportion de la moitié pour chacune
d’elles » ;
Les requérants invoquent à l’appui de leur pourvoi les deux (2) moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge ; Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que Dame KOFFI N’DRI Béatrice est locataire à usage de restaurant d’une villa sise à Cocody les Deux-Plateaux, en vertu d’un contrat de bail conclu entre le propriétaire COFFIE Benjamin et elle ; qu’au décès du bailleur, invoquant le non respect par Dame KOFFI de son obligation de payer les loyers, les Ayants-Droit de Feu COFFIE Benjamin, par acte de Maître N’CHO AMONCHI Léonard, Huissier de justice, en date du 30 janvier 2006, ont mis en demeure Dame KOFFI N’DRI Béatrice d’avoir à s’acquitter des loyers échus et impayés ; que par la suite, ils ont sollicité et obtenu du tribunal de première instance d’Abidjan Plateau la condamnation de la dame à payer 3.300.000 F au titres des loyers échus et impayés ainsi que son expulsion après résiliation du bail par le jugement n° 328 CIV 4B rendu le 20 février 2007; Que sur appel de
3
dame KOFFI N’DRI Beatrice, Epse MIAN KOFFI la cour d’appel d’Abidjan rendait l’arrêt partiellement infirmatif n° 324/09 du 26 juin 2009, dont pourvoi ;
Sur la recevabilité du recours en cassation Attendu que dame KOFFI Béatrice soulève in limine litis l’irrecevabilité du pourvoi
en cassation pour non respect des dispositions de l’Article 28.1 du Règlement de procédure de la CCJA au motif qu’il est intervenu hors délai ;
Mais attendu que l’Article 28.1 du Règlement de procédure de la CCJA dispose que :
« Lorsque la Cour est saisie par l’une des Parties à l’instance par la voie du recours en cassation prévu au troisième ou quatrième alinéa de l’article 14 du traité, le recours est présenté au Greffe dans les deux mois de la signification de la décision attaquée par l’avocat du requérant dans les conditions fixées à l’article 23… et l’article 25 stipule quant à lui que : « 1. Lorsqu’un acte ou une formalité doit en vertu du traité ou du présent Règlement être accompli avant l’expiration d’un délai, celui-ci a pour origine la date de l’acte, de l’événement, de la décision ou de la signification qui fait courir ce délai. Le jour au cours duquel survient cet acte, cet événement, cette décision ou cette signification n’est pas compris dans le délai. …,
4. Tout délai expire le dernier jour à 24 heures. Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié légal dans le pays où l’acte ou la formalité doit être accompli est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant…» ;
Attendu qu’en l’espèce l’arrêt querellé a été signifié à la date du 16 février 2010 ; que
le premier jour de l’acte n’étant pas pris en compte, le délai de deux (2) mois impartis pour exercer le recours expirait le 17 avril 2010 ; que cependant cette date correspondant à un samedi, le délai doit être prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant qui était effectivement le lundi 19 avril 2010 ; qu’en conséquence, le recours formé le 19 avril 2010 par les Ayants-Droit de Feu COFFIE Benjamin l’a été dans le délai légal ; qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;
Sur le premier moyen de cassation tiré de la violation de la loi Attendu que les Ayants-Droit de Feu COFFIE Benjamin Barthelemy font grief à
l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions de l’article 101 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général (non revisé), en ce que la cour d’appel a estimé bien fondé le maintien de Dame Koffi Béatrice dans les lieux loués, motif pris de ce que l’article 101 ne prévoit pas « une résiliation automatique du bail en cas de non paiement des loyers par le preneur, ce qui donne à la juridiction compétente un pouvoir souverain d’appréciation quant aux conséquences à tirer sur le bail en cas de non paiement de loyers » ; alors que le non paiement ou le retard dans le paiement des loyers doit entrainer l’expulsion du locataire ;
Attendu en effet que l’article 101 de l’Acte uniforme sus énoncé dont la violation est invoquée est ainsi libellé : « Le preneur est tenu de payer le loyer et de respecter les clauses et conditions du bail. A défaut de paiement du loyer ou en cas d’inexécution d’une clause du bail, le bailleur pourra demander à la juridiction compétente la résiliation du bail et l’expulsion du preneur, et de tous occupants de son chef, après avoir fait délivrer, par acte extrajudiciaire, une mise en demeure d’avoir à respecter les clauses et les conditions du bail …» ; qu’il appert donc qu’à la demande du bailleur, après mise en demeure, et au constat
4
des griefs invoqués, la juridiction saisie ne peut rejeter la requête en expulsion ; qu’en faisant état d’un pouvoir souverain du juge, la cour d’appel a violé les dispositions de l’article susvisé au moyen ; qu’il échet dès lors, de casser l’arrêt n°324/09 rendu le 26 juin 2009 et d’évoquer, sans qu’il soit besoin d’examiner le deuxième moyen ;
Sur l’évocation Attendu que, par exploit en date du 03 mars 2008, Madame KOFFI N’DRI Beatrice,
Epse MIAN KOFFI a déclaré interjeter appel du jugement n° 328 CIV 4B rendu le 20 février 2007 par le tribunal de première instance d’Abidjan et a, par le même exploit, assigné les ayants droit de feu COFFIE Benjamin Barthelemy à comparaître par devant la cour d’appel d’Abidjan à l’audience du vendredi 02 mai 2008 pour entendre annuler, ou infirmer ledit jugement ;
Attendu qu’au soutien de son appel, Dame KOFFI N’DRI Béatrice, par le canal de son Conseil, expose, tant dans son acte d’appel que dans ses conclusions en date du 29 mars 2008, qu’elle a conclu un bail avec COFFIE Benjamin Barthelemy en 1985 sur la base d’un loyer de 200.000 F par mois ; qu’en 1994, un nouveau bail a été passé entre eux ramenant ledit loyer à 175.000F dont elle s’est régulièrement acquittée jusqu’au décès du bailleur survenu en 2000 ; qu’après le décès de COFFIE Benjamin Barthelemy aucun de ses ayants droit n’est venu à elle pour encaisser les loyers de sorte qu’elle a dû entreprendre elle même des démarches qui lui ont permis, après plusieurs années, de retrouver la veuve qui ignorait même l’existence de la villa ; que malheureusement, celle-ci s’est opposée à l’application du contrat de bail de 1994 stipulant un loyer de 175.000 F et a exigé le paiement du loyer initial de 200.000 F, ainsi que les loyers échus et impayés ; qu’elle a pu s’acquitter entre les mains de la veuve d’une partie des loyers échus et conclure, pour le reliquat de 8.525.000 F, un échéancier de paiement dont elle a exécuté la première échéance d’un montant de 500.000 F ; qu’ayant payé ce montant ainsi que l’impôt foncier d’un montant de 2.268.000 F, elle ne reste devoir que la somme de 5.757.000 F dont elle compte s’acquitter sous peu ; qu’à ce jour, le montant de 8.400.000 F réclamé par les ayants droit de feu COFFIE Benjamin Barthélémy, après actualisation des arriérés prenant en compte les mois d’Octobre 2004 jusqu’en décembre 2008, était erroné ;
Attendu qu’en ce qui concerne l’expulsion, elle fait valoir que le non paiement des
loyers ne lui était pas imputable car après le décès du bailleur, aucun de ses ayants droit ne s’est présenté à elle pour l’encaissement ; qu’elle estime que la résiliation du bail et l’expulsion ont été injustement prononcées ; qu’elle sollicite l’infirmation du jugement ;
Attendu qu’en réplique, les ayants droits de feu COFFIE Benjamin Barthélemy, par le
canal de leur conseil, Maître Jean François Chauveau, exposent que le contrat de bail conclu le 1erJanvier 1994 prévoyait un loyer de 200.000 F par mois ; que l’appelante ne rapporte pas la preuve que le loyer est de 175.000 F par mois et ce d’autant plus qu’elle a toujours payé la somme de 200.000 F par mois comme le révèle les reçus délivrés ; qu’elle n’a pas respecté l’engagement du 1er mars 2006 qu’elle a, elle-même, pris d’apurer sa dette par échéance ; qu’elle doit à ce jour d’octobre 2004 à mai 2008 la somme totale de 8.900.0000F ; que déduction faite de la somme de 500.000 F qu’elle a déjà payée, elle reste devoir la somme de 8.400.000 F à parfaire au jour du prononcé de la décision ; que s’agissant de l’expulsion, elle est de droit suite au non paiement des loyers ; qu’ils sollicitent la condamnation de l’appelante au paiement des loyers échus, impayés, actualisés et la confirmation du jugement entrepris pour le surplus ;

5
Sur la demande en paiement des loyers Attendu que les intimés réclament le paiement des loyers échus, impayés et actualisés
sur la base d’un loyer de 200.000 f par mois et sollicitent la condamnation de l’appelante au paiement de la somme de 8.400.000 F au lieu de celle de 3.300.000 F accordée par le premier juge et ce, pour tenir compte des mois de mai 2006 à mai 2008 ;
Attendu que pour sa part, l’appelante sans contester le principe de cette actualisation,
évalue à 5.757.000 F le montant des loyers dus sur la période concernée en se prévalant d’un nouveau contrat de bail conclu en 1994 ramenant le loyer mensuel à 175.000 F étant donné qu’elle a déjà payé 500.000F en avance et 2.268.000 F au titre des impôts ;
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure qu’un nouveau bail fixant
le loyer mensuel à 175.000 F a été conclu le 1erjanvier 1994 entre Mr. COFFIE Benjamin Barthélémy et Dame KOFFI N’DRI Béatrice ; que les ayants-droit de feu COFFIE Benjamin Barthélémy n’ayant pas rapporté la preuve contraire, il y a lieu de considérer comme établi que le bail liant les parties porte sur un loyer de 175.000F par mois et de s’y référer pour le calcul des loyers échus ultérieurement et les arriérés ;
Attendu que l’appelante ne conteste pas les arriérés de loyers dus et a effectué ses
calculs à partir du mois d’octobre 2004 jusqu’au mois de décembre 2008, soit 51 mois, mais demande que soient pris en compte les montants payés à titre d’avance sur les échéances convenues ainsi que les impôts payés au profit du bailleur, ce qui donne le montant de 6.157.000 F ; qu’en soustrayant du montant de 8.925.000 F la somme de 500.000 F déjà payée comme acompte et celle de 2.268.000 F payée au titre des impôts au profit du bailleur comme l’attestent les pièces produites au dossier, Dame KOFFI N’DRI Béatrice ne reste devoir que la somme de 6.157.000 F ; qu’il échet donc de condamner l’appelante à payer aux intimés le montant de 6.157.000 F de loyers échus et impayés;
Sur la demande en expulsion Attendu que les Ayants-droit de feu COFFIE Benjamin Barthélémy ont demandé la
résiliation du bail et l’expulsion de Dame KOFFI Béatrice des lieux occupés tant de sa personne que de tous occupants de son chef ;
Attendu qu’il résulte de l’article 101 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial
général du 17 avril 1997, qu’à défaut de paiement du loyer ou en cas d’inexécution d’une clause du bail, le bailleur pourra demander à la juridiction compétente la résiliation du bail et l’expulsion du preneur et de tous occupants de son chef après mise en demeure ;
Attendu qu’en l’espèce, Dame KOFFI Béatrice a accumulé des impayés de loyers
et qu’une mise en demeure, par exploit d’Huissier de Justice, de payer lesdits loyers échus lui a été adressée conformément aux stipulations de l’article 101 précité ; qu’il y a lieu de confirmer sur ce point le jugement n° 328 rendu le 21 avril 2006 par le tribunal de première instance d’Abidjan ;
Attendu que Dame KOFFI Béatrice ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux
dépens ;
PAR CES MOTIFS
6
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
En la forme
Reçoit le pourvoi ;
Au fond
Casse l’arrêt n°324/09 du 26 juin 2009 rendu par la cour d’appel d’Abidjan ;
Evoquant et statuant à nouveau,
Reçoit l’appel de Dame KOFFI N’DRI Béatrice ;
L’y dit mal fondée, la condamne à payer aux Ayants-droit de feu COFFIE Benjamin Barthélémy la somme de 6.157.000 F CFA à titre de loyers échus et impayés ;
Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;
Condamne Dame KOFFI Béatrice aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président Le Greffier


Synthèse
Numéro d'arrêt : 086/2015
Date de la décision : 08/07/2015

Analyses

POURVOI EN CASSATION - DÉLAI DE SAISINE DE LA CCJA - COMPUTATION DU DÉLAI - JOUR FÉRIÉ : NON COMPTABILISE BAIL COMMERCIAL - IMPAYÉS DE LOYERS - DEMANDE DE RÉSILIATION ET D'EXPULSION DU PRENEUR - APPRÉCIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND : NON


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2015-07-08;086.2015 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award