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23/04/2015 | OHADA | N°032/2015

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 23 avril 2015, 032/2015


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Ohadata J-16-32 IMMUNITE DIPLOMATIQUE – FONCTIONNAIRES ET EMPLOYES DE L’OHADA – CARACTERE RELATIF ET NON ABSOLU DELIMITE PAR LA CONVENTION DE SIEGE QUI L’ETABLIT COUTUME INTERNATIONALE – CONDITION D’APPLICATION : ABSENCE DE TOUTE TEXTE IMPOT – CARACTERE REGALIEN – RECOUVREMENT – RETENUE SUR REMUNERATION - TITRE EXECUTOIRE NON NECESSAIRE – INAPPLICATION DES ARTICLES 174 ET 177 DE L’AUPSRVE – ABSENCE DE VIOLATION DE L’ARTICLE 23 DE LA DECLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L’HOMME ET DU REGLEMENT APPLICABLE AU PERSONNEL DE L’OHADA L’immunité diplomatique con

férée par l’article 49 du Traité de l’OHADA, tel que révisé à Québec le 17 octobre ...

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Ohadata J-16-32 IMMUNITE DIPLOMATIQUE – FONCTIONNAIRES ET EMPLOYES DE L’OHADA – CARACTERE RELATIF ET NON ABSOLU DELIMITE PAR LA CONVENTION DE SIEGE QUI L’ETABLIT COUTUME INTERNATIONALE – CONDITION D’APPLICATION : ABSENCE DE TOUTE TEXTE IMPOT – CARACTERE REGALIEN – RECOUVREMENT – RETENUE SUR REMUNERATION - TITRE EXECUTOIRE NON NECESSAIRE – INAPPLICATION DES ARTICLES 174 ET 177 DE L’AUPSRVE – ABSENCE DE VIOLATION DE L’ARTICLE 23 DE LA DECLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L’HOMME ET DU REGLEMENT APPLICABLE AU PERSONNEL DE L’OHADA L’immunité diplomatique conférée par l’article 49 du Traité de l’OHADA, tel que révisé à Québec le 17 octobre 2008, aux fonctionnaires et employés de l’OHADA, n’a pas un caractère absolu ; son étendue dépend de la convention bilatérale ou de l’accord de siège qui les établit. Au demeurant, l’impôt défini, par le Lexique des termes juridiques 2011, 18e édition, comme une « Prestation pécuniaire requise autoritairement des assujettis selon leurs facultés contributives par l’Etat, les collectivités territoriales et certains établissements publics, à titre définitif et sans contrepartie identifiable, en vue de couvrir les charges publiques ou d’intervenir dans le domaine économique et social », est une prérogative régalienne de l’Etat. L’accord de siège intervenu entre la République du Cameroun et l’OHADA le 30 juillet 1997, expressément rendu applicable par l’article 2.4.2 à la gestion du personnel de l’OHADA, en son article 17, ne prévoyait l’exonération des impôts sur les traitements et émoluments du fait de leur activité que du Secrétaire Permanent, son adjoint et leurs collaborateurs non camerounais. En outre, il ne ressort pas des termes de l’article 27 du code général des impôts du Cameroun que les nationaux camerounais ayant la qualité d’agents diplomatiques bénéficient de l’exonération fiscale ; qu’enfin, il résulte des termes même de l’article 4 du contrat de travail les liant que son salaire est dû, déduction faite des retenues réglementaires en vigueur dans l’Etat du siège de l’Institution. Il s’ensuit que le Secrétaire Permanent, qui en application de l’accord de siège, a retenu les sommes dues au titre de l’impôt par un agent de l’OHADA de la nationalité du pays d’accueil, n’a pas violé les textes susvisés. Conformément à l’article 9.5 du Règlement n°001/2007/CM/OHADA du 27 juillet 2007 portant statut du personnel de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, les retenues opérées trouvent leur base légale dans ledit Règlement portant statut du personnel en vigueur au moment des faits. La coutume internationale n’est applicable qu’en l’absence de tout texte. Les impôts ayant un caractère autoritaire et régalien, leur paiement ne peut être affecté par le coefficient prévu à l’article 177 de l’AUPSRVE déterminé, en l’espèce, à l’article 5.4.13.5 du Règlement portant statut du personnel de l’OHADA, ces textes étant inapplicables en matière de fiscalité. En l’espèce, seule la retenue opérée par le Secrétariat Permanent au titre du crédit automobile consenti à la requérante est susceptible d’être affectée par les textes susvisés ; ladite retenue n’atteignant pas le coefficient légal de 33%, le moyen est mal fondé.

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L’exigibilité d’un titre exécutoire n’est pas fondée et aucun titre exécutoire n’est dû pour le recouvrement obligatoire d’une dette fiscale au profit de l’Etat, la retenue ayant été opérée au titre du crédit automobile consenti à une employée du Secrétariat Permanent de l’OHADA et librement accepté par elle.
Les dispositions de l’article 174 de l’AUPSRVE ne sont pas applicables pour le recouvrement obligatoire d’une dette fiscale au profit de l’Etat, la retenue ayant été opérée au titre du crédit automobile consenti à une employée du Secrétariat Permanent de l’OHADA et librement accepté par elle. Aucune discrimination sur le traitement salarial de la requérante, inférieur à celui de ses collègues de même catégorie, ainsi que des retenues fiscales à son préjudice et non effectuées pour ses collègues de même catégorie et sans indemnité compensatoire en violation des articles 23.2 et 5.1.2 du Règlement du Personnel de l’OHADA ne peuvent valablement être reprochés au Secrétariat Permanent. Il en est ainsi car même à supposer ce grief fondé, la retenue résulte d’un contrat accepté par la requérante au moins tacitement et elle ne produit, à l’appui de ses allégations, aucun élément permettant à la Cour de juger de leur bien fondé. En outre le critère de la nationalité est suffisant pour écarter son premier moyen et justifier les retenues fiscales dont elle est assujettie, de même que l’élément d’expatriation peut notamment justifier l’allocation d’un traitement diffèrent aux agents employés pour servir ailleurs que dans leur pays d’origine. Attendu que la requérante, à l’appui de ce moyen, se fonde sur le fait que son salaire de base initialement fixé à 1.100.000 FCFA en 2006, a été unilatéralement ramené à 787.500 FCFA suivant une notification du 30 juin 2008, puis confirmée par une note du 31 octobre 2008, puis revu à 937.125 FCFA à partir du 1er janvier 2011 et sur la rétrogradation de son contrat à durée indéterminée en contrat à durée déterminée intervenue en décembre 2010 pour invoquer le non respect du principe de ses droits acquis ;
Un employé du Secrétariat Permanent de l’OHADA dont la rémunération a connu des variations et qui s’est abstenu de former un recours depuis son recrutement est supposée avoir acquiescé, au moins tacitement, audites variations de son salaire de base qui ne peuvent dès lors justifier sa démission intervenue plusieurs années après, d’autant plus que la transformation de son contrat de travail de durée indéterminée à durée déterminée a fait l’objet d’une compensation, qu’elle a acceptée à l’instar des autres fonctionnaires de l’Organisation qui étaient dans la même situation. Les moyens excipés par la requérante pour justifier sa démission de contrainte et forcée ayant été déclarés inopérants et rejetés, il y a lieu de qualifier son acte de démission volontaire pour convenances personnelles et dire en conséquence qu’elle ne peut avoir droit qu’aux seules indemnités dues en pareille circonstance. Ainsi, le paiement des indemnités réclamé par la requérante en application de l’article 6.15.2 du Règlement n°001 précité portant statut du personnel de l’OHADA, à savoir les demandes de paiement de l’indemnité compensatrice de préavis, de l’indemnité de congés payés et de l’indemnité légale minimum de licenciement, qui ne sont dues qu’en cas de licenciement abusif, ne peuvent lui être allouées à la requérante. Il en est de même de la demande de paiement de dommages et intérêts, de l’indemnité de cessation de contrat, du paiement des manques à gagner dus à la discrimination salariale, du reliquat du salaire de base baissé, du reliquat de la retraite complémentaire. Les seules indemnités dues à la requérante sont les indemnités de transport

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et de fin de contrat, payées en l’espèce suivant bulletin de solde de tout compte versé au dossier et dont les montants alloués à ces titres ne sont pas discutés. ARTICLE 49 TRAITE OHADA ARTICLE 173 AUPSRVE ARTICLE 174 AUPSRVE ARTICLE 177 AUPSRVE ARTICLE 23.2 DECLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L’HOMME ARTICLE 164 AUPSRVE CCJA, Ass. plén., Arrêt n° 032/2015 du 23 avril 2015 ; Pourvoi n° 176/2012/ PC du 28/12/ 2012 : Dame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse c/ Secrétariat Permanent de l’OHADA.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), en Assemblée plénière, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 23 avril 2015 où étaient présents :
Messieurs Marcel SEREKOÏSSE-SAMBA, Président Madame Flora DALMEIDA MELE, Seconde Vice-présidente Messieurs Namuano F. DIAS GOMES, Juge
Victoriano OBIANG ABOGO, Juge Mamadou DEME, Juge Idrissa YAYE, Juge, rapporteur Djimasna N’DONINGAR, Juge
et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef ;
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans le 28 décembre 2012 sous le
n°176/2012/PC et formé par Maître KONTCHOU Gabriel, Avocat à la Cour, Cabinet BRAIN TRUST LAW CHAMBERS, BP 5305 Douala Cameroun, agissant au nom et pour le compte de Madame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse, demeurant à Douala, Cameroun, dans la cause l’opposant au Secrétariat Permanent de l’OHADA, agissant aux poursuites et diligences de son représentant légal, Monsieur le Professeur Dorothé Cossi SOSSA, Secrétaire Permanent de l’OHADA, dont le siège est à Yaoundé, Cameroun, BP 10071, ayant pour conseil Maître AMOUSSOU C. Bertin, Avocat à la Cour, demeurant à Carré 294, Avenue Van Vallen Hoven, 03-554 Cotonou, Bénin,
en contestation d’une décision de rejet implicite d’un recours et en réclamation de ses droits sociaux ;
La requérante invoque à l’appui de son recours les huit moyens d’annulation tels qu’ils figurent dans sa requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Idrissa YAYE, Juge ; Vu le Traité de Port Louis (Ile Maurice) du 17 octobre 1993, tel que révisé à Québec le
17 octobre 2008 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;

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Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Vu le Règlement n°001/2007/CM/OHADA du 27 juillet 2007 portant statut du
personnel de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires ;
Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier de la procédure que suivant contrat de travail à durée déterminée en date du 01 février 2007, Madame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse avait été recrutée au Secrétariat Permanent de l’OHADA en qualité de cadre juriste dans la catégorie de l’encadrement pour une durée de deux ans à compter du 1er novembre 2006, moyennant un salaire mensuel de 1.100.000 FCFA, déduction faite des retenues réglementaires en vigueur dans l’Etat du siège de l’Institution ; que suivant attestation de prise de service en date du 08 novembre 2006, la requérante prenait effectivement service le 1er novembre 2006 ; que par décision n°002/SP/OHADA/2008 portant engagement, Madame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse avait été engagée par un contrat à durée indéterminée en qualité de cadre juriste au Secrétariat Permanent de l’OHADA, classée dans la catégorie de l’encadrement au grade A2.2 échelon 2, et affectée à la Direction des affaires juridiques et des relations avec les Institutions ; que le 1er juin 2011, la requérante, à l’instar des autres cadres de la catégorie A de l’OHADA, voyait son contrat de travail transformé en contrat de travail à durée déterminée ; que le 10 janvier 2012, le Secrétaire Permanent lui adressait une lettre dans laquelle, il observait des irrégularités, au regard des lois fiscales et sociales de la République du Cameroun, dans le traitement de ses salaires et l’informait de ce qu’il avait ordonné au service compétent de prendre les dispositions nécessaires à la régularisation immédiate de ses situations fiscale et sociale, et l’invitait, dans le cas où elle jugerait cette décision mal fondée, de produire un acte du Gouvernement Camerounais qui la dispenserait du paiement des impôts et de l’assujettissement aux lois sur la prévoyance sociale ; que par lettre en date du 27 avril 2012, adressée à son employeur, Madame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse, l’informait de sa contrainte de cesser l’exercice de ses fonctions en raison des multiples discriminations et injustices dont elle faisait l’objet ; que par lettre en date du 07 mai 2012, le Secrétaire Permanent de l’OHADA lui accusait réception de sa lettre de démission, prescrivait la période de préavis et la liquidation légale et concertée de son solde de tout compte ; que par lettre en date du 08 mai 2012, elle informait la Présidente en exercice du Conseil des Ministres de l’OHADA de sa démission du poste de juriste senior ; que le 25 mai 2012, elle adressait une lettre au Secrétaire Permanent de l’OHADA, dans laquelle, elle qualifiait sa démission de rupture du fait de l’employeur et présentait ses droits légaux s’élevant à la somme totale de 31.470.041 FCFA ; qu’en réponse, le Secrétaire Permanent, par lettre en date du 21 juin 2012, estimait sa démission comme étant donnée expressément, purement et simplement pour convenances personnelles, lui répondait qu’il n’était pas en mesure d’appliquer les droits légaux exigibles revendiqués outre, ceux qui, au regard des textes applicables, sont dus en cas de démission ; que suivant lettre en date du 03 septembre 2012, elle saisissait le Conseil des Ministres de l’OHADA aux fins de voir constater que son départ contraint s’analysait en réalité en un licenciement déguisé et donc abusif, et aux fins de voir payer ses droits sociaux ; que n’ayant reçu aucune réaction, elle introduisait, par les soins de son conseil, la présente requête en contestation d’une décision de rejet implicite d’un recours et en réclamation des droits sociaux d’un agent d’encadrement de l’OHADA ;
Attendu que le Conseil des Ministres de l’OHADA, tenu à Ouagadougou les 13 et 14
juin 2013, saisi de ses réclamations, avait, dans ses délibérations, instruit de laisser la

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procédure y relative et actuellement pendante devant la Cour de céans, suivre son cours normal ;
Sur la requalification de la démission en licenciement abusif
Attendu que la requérante invoque à l’appui de son recours un certain nombre de discriminations et injustices dont la minoration de son salaire de 2006 fixé dans un premier temps à 1.100.000 FCFA tandis que ses pairs en service à la CCJA avaient un salaire d’environ 1.700.000 FCFA, la diminution unilatérale de son salaire de base ramené de 1.100.000 FCFA à 787.500 FCFA en août 2008, des retenues fiscales opérées sur son salaire au mépris du Traité de l’OHADA et des autres dispositions applicables ; que ces incriminations constituent des fautes lourdes commises par l’employeur dans l’exécution du contrat de travail qui l’ont contrainte à démissionner ; qu’elle sollicite la requalification de sa démission forcée en licenciement abusif ;
Attendu qu’en réplique, le Secrétariat Permanent de l’OHADA, dans son mémoire en
réponse et en duplique déposés à la Cour de céans respectivement le 28 août 2013 et le 03 mars 2014, conclut au débouté de toutes les demandes formulées par Madame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse comme étant mal fondées ;
Attendu que pour statuer sur la nature de cette rupture du lien contractuel, il y a lieu de
statuer successivement sur chacun des moyens invoqués par la requérante pour qualifier sa démission de contrainte ;
Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article 49 du Traité OHADA et de
l’article 27 du code général des impôts du Cameroun Attendu que la requérante allègue à l’appui de ce moyen que de novembre 2006 à
décembre 2010, puis en exécution de la décision unilatérale du Secrétaire Permanent, du 10 janvier 2012, pendant les six mois qui ont précédé son départ, le Secrétaire Permanent de l’OHADA a opéré des retenues sur ses salaires pour des raisons fiscales ; que l’accord de siège et les lois fiscales et sociales du Cameroun, invoqués à l’appui de ces retenues, ont une valeur juridique inférieure au Traité qui prévoit en son article 49 une immunité fiscale au profit des fonctionnaires internationaux de l’OHADA ; que selon les termes de l’article 27 du code général des impôts du Cameroun, les agents diplomatiques, auxquels sont assimilés les fonctionnaires internationaux, bénéficient ipso facto de l’immunité ;
Mais attendu que l’immunité diplomatique conférée par l’article 49 du Traité de
l’OHADA, tel que révisé à Québec le 17 octobre 2008, aux fonctionnaires et employés de l’OHADA, n’a pas un caractère absolu ; que son étendue dépend de la convention bilatérale ou de l’accord de siège qui les établit ; qu’au demeurant, l’impôt défini, par le Lexique des termes juridiques 2011, 18e édition, comme une : « Prestation pécuniaire requise autoritairement des assujettis selon leurs facultés contributives par l’Etat, les collectivités territoriales et certains établissements publics, à titre définitif et sans contrepartie identifiable, en vue de couvrir les charges publiques ou d’intervenir dans le domaine économique et social. », est une prérogative régalienne de l’Etat ; que du reste, l’accord de siège intervenu entre la République du Cameroun et l’OHADA le 30 juillet 1997, expressément rendu applicable par l’article 2.4.2 à la gestion du personnel de l’OHADA, en son article 17, ne prévoyait l’exonération des impôts sur les traitements et émoluments du fait de leur activité que du Secrétaire Permanent, son adjoint et leurs collaborateurs non camerounais ; qu’en

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outre, il ne ressort pas des termes de l’article 27 du code général des impôts du Cameroun que les nationaux camerounais ayant la qualité d’agents diplomatiques bénéficient de l’exonération fiscale ; qu’enfin, il résulte des termes même de l’article 4 du contrat de travail les liant que son salaire est dû, déduction faite des retenues réglementaires en vigueur dans l’Etat du siège de l’Institution ; qu’il échet dès lors de dire et juger que le Secrétaire Permanent, qui en application de l’accord de siège, a retenu les sommes dues au titre de l’impôt par un agent de l’OHADA de la nationalité du pays d’accueil, n’a pas violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen tiré de la violation de la coutume internationale
Attendu que la requérante fait grief au Secrétariat Permanent d’avoir fondé les retenues fiscales exclusivement sur sa nationalité et sans aucune compensation en violation du principe de l’égalité de traitement énoncé par la convention n°19 de l’OIT et des pratiques courantes dans la fonction publique internationale selon lesquelles s’agissant des Etats membres dont les ressortissants fonctionnaires sont soumis à l’impôt sur les revenus, ce montant est remboursé par l’Organisation sous forme de prime compensatoire à l’instar de la dotation d’ajustement fiscal proposée par le Cabinet BEKOLO & PARTERNS et approuvé par le Conseil des Ministres de décembre 2010 à Lomé ;
Mais attendu qu’aux termes de l’article 5.9 du Règlement précité : « Il ne peut être
opéré de retenues sur les émoluments et autres sommes dues par une Institution de l’Organisation à un membre du personnel qu’à l’un des titres ci-après :
i) impôts et taxes sur les revenus salariaux applicables ;
cotisations sociales applicables ; ii) autres cotisations prévues dans le présent règlement du personnel ; iii) remboursement de dettes et obligations envers l’institution ;
remboursement de versements faits par erreur au membre du personnel par l’Organisation dans les deux ans précédant la retenue ;
iv) décision de justice ; v) avec l’autorisation écrite du membre du personnel, pour d’autres raisons. » ;
qu’ainsi les retenues opérées trouvent leur base légale dans ledit Règlement portant statut du personnel en vigueur au moment des faits ; qu’il est constant que la coutume internationale, invoquée à tort par la requérante, n’est applicable qu’en l’absence de tout texte ; qu’il échet dès lors, au vu de tout ce qui précède, de rejeter ce moyen comme étant mal fondé ;
Sur le troisième moyen tiré de la violation des dispositions combinées des articles
177 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution et 5.4.13.5 du Règlement n°001/2007/CM/OHADA portant statut du personnel de l’OHADA
Attendu que la requérante se fonde sur les dispositions des articles 177 de l’Acte
uniforme et 5.4.13.5 du Règlement précités pour dénoncer les retenues opérées sur son salaire qui représente, selon elle, près de 70% ;
Mais attendu que les impôts ayant un caractère autoritaire et régalien, leur paiement ne peut être affecté par le coefficient prévu à l’article 177 de l’Acte uniforme précité et

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déterminé, en l’espèce, à l’article 5.4.13.5 du Règlement portant statut du personnel de l’OHADA ; qu’au demeurant ces textes sont inapplicables en matière de fiscalité ;
Attendu au surplus que seule la retenue opérée par le Secrétariat Permanent au titre du
crédit automobile consenti à la requérante est susceptible d’être affectée par les textes susvisés ; que ladite retenue n’atteint pas le coefficient légal de 33% ; qu’il échet dès lors de déclarer ce moyen mal fondé et de le rejeter ;
Sur le quatrième moyen tiré de la violation de l’article 173 de l’Acte uniforme
portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
Attendu qu’à l’appui de ce moyen, la requérante invoque la violation de l’article 173
de l’Acte uniforme précité, en plaidant que les retenues susvisées l’ont été sans titre exécutoire ;
Mais attendu que cet argumentaire ne résiste pas non plus à l’analyse car, s’agissant de
la retenue opérée au titre du crédit automobile consenti à la dame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse et librement accepté par elle, l’exigibilité d’un titre exécutoire n’est pas fondée, tout comme aucun titre exécutoire n’est dû s’agissant du recouvrement obligatoire d’une dette fiscale au profit de l’Etat ; qu’il y a lieu dès lors de déclarer ce moyen inopérant et de le rejeter également comme non fondé ;
Sur le cinquième moyen tiré de la violation de l’article 174 de l’Acte uniforme
portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution et de l’article 68 alinéa 3 du code de travail camerounais
Attendu que la requérante invoque la violation de l’article 174 de l’Acte uniforme
précité et de l’article 68 alinéa 3 du code de travail camerounais, en ce que le Secrétaire Permanent a procédé à la retenue de ses salaires sans avoir demandé, encore moins obtenu l’autorisation du juge et sans avoir procédé au préalable obligatoire de conciliation ;
Mais attendu que pour les raisons amplement développées pour écarter les précédents
moyens ci-dessus, les dispositions de l’article 174 de l’Acte uniforme précité ne sont pas applicables en l’espèce ; qu’il en est de même de l’article 68 alinéa 3 du code de travail camerounais, car la retenue critiquée était intervenue en dehors de toute rupture du contrat de travail ; qu’il échet également de rejeter ce moyen comme non fondé ;
Sur le sixième moyen tiré de la violation de l’article 8.2 de la convention n°95 de
l’OIT
Attendu que la requérante à l’appui de ce moyen allègue le fait que les retenues litigieuses aient été faites avant même qu’elle ne soit informée pour conclure à la violation de l’article 8.2 de la convention n°95 de l’OIT ;
Mais attendu qu’elle n’a apporté aucune preuve à l’appui de ses allégations ; qu’il
apparaît à la lecture des pièces versées au dossier qu’elle en a été informée par lettre des retenues fiscales et que la retenue portant sur le remboursement de son crédit automobile est de nature contractuelle qu’elle ne pouvait ignorer ; qu’il échet dès lors d’écarter aussi ce moyen comme mal fondé ;

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Sur le septième moyen tiré de la violation de l’article 23.2 de la Déclaration
Universelle des Droits de l’Homme et de l’article 5.1.2 du Règlement n°001 précité portant statut du personnel
Attendu qu’à l’appui de ce moyen, la requérante reproche, au Secrétariat Permanent de
l’OHADA, une discrimination sur son traitement salarial qui est inférieur à celui de ses collègues de même catégorie, et d’avoir opéré à son préjudice des retenues fiscales non effectuées pour ses collègues de même catégorie et sans indemnité compensatoire en violation des articles 23.2 et 5.1.2 précités qui consacrent le principe d’égalité dans le traitement du personnel ;
Mais attendu qu’en plus du fait que le grief fait au Secrétariat Permanent, même à le
supposer fondé, date du contrat de 2007, accepté par la requérante au moins tacitement, elle ne produit non plus, à l’appui de ses allégations, aucun élément permettant à la Cour de juger de leur bien fondé ; qu’en outre le critère de la nationalité est suffisant, tel que admis pour écarter son premier moyen et justifier les retenues fiscales dont elle est assujettie, tout comme l’élément d’expatriation, peuvent, notamment, justifier l’allocation d’un traitement diffèrent aux agents employés pour servir ailleurs que dans leur pays d’origine ; qu’enfin, l’article 5.1.2 invoqué à tort ne vise que l’harmonisation du régime de rémunération de l’OHADA avec celui des autres organisations similaires ; qu’il est échet dès lors d’écarter ce moyen comme non fondé ;
Sur le huitième moyen tiré de la violation de l’article 9 du contrat de travail, des
articles 23 alinéa 1er du code de travail du Cameroun, de l’article 1134 du code civil du Cameroun et des articles 2.4.2 et 5.7.1 du Règlement n°001 précité portant statut du personnel de l’OHADA
Attendu que la requérante, à l’appui de ce moyen, se fonde sur le fait que son salaire
de base initialement fixé à 1.100.000 FCFA en 2006, a été unilatéralement ramené à 787.500 FCFA suivant une notification du 30 juin 2008, puis confirmée par une note du 31 octobre 2008, puis revu à 937.125 FCFA à partir du 1er janvier 2011 et sur la rétrogradation de son contrat à durée indéterminée en contrat à durée déterminée intervenue en décembre 2010 pour invoquer le non respect du principe de ses droits acquis ;
Mais attendu que les griefs ainsi faits au Secrétariat Permanent n’ont fait l’objet
d’aucun recours de la part de la requérante depuis son recrutement ; qu’elle est donc supposée avoir acquiescé, au moins tacitement, à ses variations de son salaire de base qui ne peuvent dès lors justifier sa démission intervenue plusieurs années après ; qu’au demeurant la transformation de son contrat de travail de durée indéterminée à durée déterminée a fait l’objet d’une compensation, qu’elle a acceptée à l’instar des autres fonctionnaires de l’Organisation qui étaient dans la même situation ; qu’il échet de rejeter également ce moyen comme mal fondé ;
Sur les réclamations liées à la rupture du contrat de travail et au caractère abusif du licenciement
Attendu qu’il résulte dès lors, de tout ce qui précède, que les moyens excipés par la
requérante pour justifier sa démission de contrainte et forcée ayant été déclarés inopérants et rejetés, il y a lieu de qualifier son acte de démission volontaire pour convenances personnelles

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et dire en conséquence qu’elle ne peut avoir droit qu’aux seules indemnités dues en pareille circonstance ;
Attendu qu’ainsi le paiement des indemnités réclamé par la requérante en application
de l’article 6.15.2 du Règlement n°001 précité portant statut du personnel de l’OHADA, à savoir les demandes de paiement de l’indemnité compensatrice de préavis, de l’indemnité de congés payés et de l’indemnité légale minimum de licenciement, qui ne sont dues qu’en cas de licenciement abusif, ne peuvent être allouées à la requérante ; qu’il en est de même de la demande de paiement de dommages et intérêts, de l’indemnité de cessation de contrat, du paiement des manques à gagner dus à la discrimination salariale, du reliquat du salaire de base baissé, du reliquat de la retraite complémentaire, les sommes retenues au titre des impôts, toutes infondées en l’espèce et sans base légale ;
Que dès lors, les seules indemnités dues à la requérante sont les indemnités de transport et de fin de contrat, payées en l’espèce suivant bulletin de solde de tout compte de juin 2012, versé au dossier, dont les montants alloués à ces titres ne sont pas discutés ;
Attendu que l’indemnité d’attente jusqu’au paiement des frais de transport n’est aussi
pas due, en ce sens que cette indemnité a été payée suivant ledit bulletin de solde de tout compte ;
Attendu que Madame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse ayant
succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré, En la forme : Déclare recevable le recours introduit par Madame DJOUMESSAP MOTSEBO
Jacqueline Clarisse ; Au fond : Déboute Madame DJOUMESSAP MOTSEBO Jacqueline Clarisse de toutes ses
demandes ; La condamne aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier en chef


Synthèse
Numéro d'arrêt : 032/2015
Date de la décision : 23/04/2015

Analyses

IMMUNITÉ DIPLOMATIQUE - FONCTIONNAIRES ET EMPLOYÉS DE L'OHADA - CARACTÈRE RELATIF ET NON ABSOLU DÉLIMITE PAR LA CONVENTION DE SIEGE QUI L'ÉTABLIT COUTUME INTERNATIONALE - CONDITION D'APPLICATION : ABSENCE DE TOUTE TEXTE IMPÔT - CARACTÈRE RÉGALIEN - RECOUVREMENT - RETENUE SUR RÉMUNÉRATION - TITRE EXÉCUTOIRE NON NÉCESSAIRE - INAPPLICATION DES ARTICLES 174 ET 177 DE L'AUPSRVE - ABSENCE DE VIOLATION DE L'ARTICLE 23 DE LA DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L'HOMME ET DU RÈGLEMENT APPLICABLE AU PERSONNEL DE L'OHADA


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2015-04-23;032.2015 ?
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