L’acte notarié de vente d’un bien immobilier vaut jusqu’à inscription de faux ; en l’état de la procédure cette pièce n’ayant pas été arguée de faux, continue de faire foi. Les articles 78 et 91 [respectivement devenus 110 et 123 de l’AUDCG] et suivants de l’AUDCG ne trouvent application que si le preneur a été diligent. Le preneur qui, au lieu de solliciter le renouvellement de son bail entre les mains du nouvel acquéreur, l’a fait plutôt entre celles de son ancien bailleur, qui n’avait plus la qualité de bailleur et dont les actes ne pouvaient nullement être opposables au nouveau propriétaire, ne peut se prévaloir de sa propre turpitude et soutenir que son bail a été renouvelé dans les formes et délais prescrits par la loi. Le preneur déchu de son droit au renouvellement du bail, ne peut prétendre à aucune indemnité d’éviction. ARTICLE 78 AUDCG [DEVENU ARTICLE 110 AUDCG] ARTICLE 91 AUDCG [DEVENU ARTICLE 123 AUDCG] ARTICLE 94 AUDCG [DEVENU ARTICLE 126 AUDCG] ARTICLE 1108 CODE CIVIL GABONAIS ARTICLE 1583 CODE CIVIL GABONAIS ARTICLE 438 CODE DE PROCEDURE CIVILE GABONAIS ARTICLE 34 REGLEMENT DÉCRET N°77/PR/MF.DE DU 06 FÉVRIER 1967 RÈGLEMENTANT L’OCTROI DES CONCESSIONS ET LOCATIONS DES TERRES DOMANIALES AU GABON CCJA, Assemblée plénière, Arrêt n° 139/2014 du 11 novembre 2014 ; Pourvoi n°175/2012/PC du 28/12/2012 : Monsieur HASSAN Salman c/ Monsieur ANTCHOUE Zaouil Fouad.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Assemblée plénière, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique foraine tenue le 11 novembre 2014 à Libreville Gabon) où étaient présents :
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Messieurs Marcel SEREKOÏSSE SAMBA, Président Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier Vice-président Madame Flora DALMEIDA MELE, Seconde vice-Président Messieurs Namuano Francisco Dias GOMES, Juge, Rapporteur Victoriano OBIANG ABOGO, Juge Idrissa YAYE, Juge Djimasna N’DONINGAR, Juge et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef,
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 28 décembre 2012 sous le n°175/2012/PC et formé par Maîtres ITCHOLA & AGBANRIN, Avocats au Barreau du Gabon, agissant au nom et pour le compte de Monsieur HASSAN Salman, Directeur de Société, demeurant au quartier Glass, BP 5652 Libreville, dans la cause l’opposant à Monsieur ANTCHOUE Zaouil Fouad, ayant pour conseil Maitres RETENO-N’DIAYE et AGONDJO RETENO avocats à la Cour,
en cassation de l’Arrêt rendu le 15 novembre 2012 par la 6ème chambre civile et
commerciale de la Cour d’Appel Judiciaire de Libreville, dont le dispositif est le suivant : « Statuant publiquement contradictoirement en matière commerciale et en dernier
ressort ; Déclare recevable l’appel interjeté par ANTCHOUE Zaouil Fouad ; AU FOND Infirme l’ordonnance du 03 février 2012 en toutes ses dispositions ; STATUANT A NOUVEAU Ordonne l’arrêt des travaux et l’expulsion de HASSAN Salman de la parcelle n° 164
section D du plan cadastral de Libreville sous astreinte de 1.000.000 FCFA par jour de retard, à compter de la signification de la présente décision ;
Ordonne l’exécution sur minute et avant enregistrement de la présente décision
nonobstant toute voie de recours ; Condamne HASSAN Salman aux dépens ; »
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils
figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge ; Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
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Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier de la procédure que par acte notarié en date du 03 octobre 2011, ANTCHOUE Zaouil Fouad a acquis des héritiers KAPITHO la parcelle N° 164 section D du plan cadastral de Libreville ; que HASSAN Salman locataire de cette parcelle a été avisé du transfert du fait que son bail avec le vendeur devait expirer le 31 décembre 2011 ; que HASSAN Salman qui contestait la vente et qui continuait à payer les loyers aux héritiers de son premier bailleur, ne prenait aucune disposition en vue de renouveler son contrat de bail ; qu’ainsi le nouvel acquéreur l’assignait aux fins d’expulsion ; que le Président du Tribunal de première instance de Libreville par l’Ordonnance de référé n°261/2011-2012, se déclarait incompétent à connaître des mérites de cette affaire ; que sur appel de cette ordonnance, la 6ème Chambre civile et commerciale de la Cour d’appel judiciaire de Libreville rendait le 15 novembre 2012 l’arrêt infirmatif qui ordonnait l’expulsion de Monsieur HASSAN SALMAN de la parcelle n°164 section D ; Arrêt dont pourvoi ;
Sur le premier moyen de cassation tiré de la violation et la mauvaise application des articles 1108 et 1583 du Code civil ancien, violation de l’Article 34 du Décret n°77/PR/MF.DE du 06 Février 1967 règlementant l’octroi des concessions et locations des terres domaniales au Gabon et partant de l’article 438 du Code de procédure civile gabonais.
Attendu que Monsieur HASSAN Salman fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé et fait
une mauvaise application des articles 1108 et 1583 du Code Civil ancien, violé l’article 34 du Décret n°77/PR/MF.DE du 6 Février 1967 règlementant l’octroi des concessions et locations des terres domaniales au Gabon, et partant, violé l’article 438 du Code de procédure civile Gabonais aux motifs que d’abord le consentement de certains héritiers n’a pas été acquis dans cette affaire ou a été surpris, ensuite les parties n’ont jamais été d’accord sur l’objet et sur le prix de vente et enfin l’abandon des droits en l’espèce, si abandon des droits, il y a eu effectivement, n’est pas régulier et n’est surtout pas conforme aux dispositions de la réglementation gabonaise ;
Mais attendu que l’acte de vente qui a conféré la propriété à ANTCHOUE Zaouil
Fouad est un acte notarié qui vaut jusqu’à inscription de faux ; qu’en l’état de la procédure cette pièce n’ayant pas été arguée de faux, continue de faire foi ; qu’il n’y a donc aucune violation des dispositions visées au moyen ;
Sur le second moyen de cassation tiré de la violation des articles 110, 123 et suivants anciennement 78, 91 et suivants de l’Acte uniforme sur le Droit commercial général et manque de base légale.
Attendu que Monsieur HASSAN Salman fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les
dispositions des articles 110, 123 et suivants anciennement 78, 91 et suivants de l’Acte uniforme sur le Droit commercial général et manqué de base légale en retenant que premièrement son contrat de bail venant à expiration, il n’a pas manifesté sa volonté, par acte extra judiciaire, de le voir renouvelé dans le délai de trois mois avant cette expiration ; alors qu’il a effectivement sollicité auprès de la succession le renouvellement de son contrat de bail, à un moment où il n’avait encore rien reçu du prétendu nouvel acquéreur, et deuxièmement, la Cour d’appel de Libreville lui a dénié tout droit à une indemnité d’éviction, alors même que ledit acquéreur lui a écrit pour lui signifier qu’il ne comptait pas renouveler le contrat de bail, ayant l’intention de démolir le bâtiment, sans autre précision ;
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Mais attendu que ces dispositions ne trouvent application que si le preneur tenant compte de l’acte de vente était conformé au transfert de la propriété ; qu’en l’occurrence au lieu de solliciter le renouvellement de son contrat de bail entre les mains du nouvel acquéreur sieur ANTCHOUE ZAOUIL Fouad, HASSAN Salman l’a fait plutôt entre celles de Feu KAPITHO Guy Oscar, qui n’avait plus la qualité de bailleur et dont les actes ne pouvaient nullement être opposables au nouveau propriétaire ; que HASSAN Salman ne peut donc se prévaloir de sa propre turpitude et soutenir que son bail a été renouvelé dans les formes et délais prescrits par la loi ;
Attendu en outre que l’article 94 de l’Acte uniforme du 1er octobre 1997 sur le Droit
commercial général dispose que « Le bailleur peut s’opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée en réglant au locataire une indemnité d’éviction. » ; que HASSAN Salman, étant déchu du droit au renouvellement du bail, ne pouvait plus prétendre à une quelconque indemnité d’éviction ; que donc la Cour d’appel n’a pas violé les dispositions suscitées de l’Acte uniforme relatif au Droit commercial général ni manqué de donner une base légale à sa décision ; que le moyen doit être écarté ;
Attendu que le pourvoi étant mal fondé il échet de le rejeter ;
Attendu que sieur HASSAN SALMAN ayant succombé, il y a lieu de le condamner
aux dépens. PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Rejette le pourvoi Condamne sieur HASSAN SALMAN aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier en chef
Pour copie exécutoire établie en quatre pages par Nous, Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef de ladite Cour.
Fait à Libreville, le 11 novembre 2014 Maître Paul LENDONGO