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11/11/2014 | OHADA | N°136/2014

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 11 novembre 2014, 136/2014


La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Assemblée plénière, a rendu l’Arrêt suivant en son audience foraine publique tenue à Libreville (Gabon) le 11 novembre 2014 où étaient présents : Messieurs Marcel SEREKOÏSSE SAMBA, Président
Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier Vice-président Madame Flora DALMEIDA MELE, Second Vice-président Messieurs Namuano Francisco Dias GOMES, Juge, Rapporteur
Victoriano OBIANG ABOGO, Juge Idrissa YAYE, Juge Djimasna N’DONINGAR, Juge et Maître Paul LE

NDONGO, Greffier en chef,
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour d...

La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Assemblée plénière, a rendu l’Arrêt suivant en son audience foraine publique tenue à Libreville (Gabon) le 11 novembre 2014 où étaient présents : Messieurs Marcel SEREKOÏSSE SAMBA, Président
Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier Vice-président Madame Flora DALMEIDA MELE, Second Vice-président Messieurs Namuano Francisco Dias GOMES, Juge, Rapporteur
Victoriano OBIANG ABOGO, Juge Idrissa YAYE, Juge Djimasna N’DONINGAR, Juge et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef,
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans le 19 avril 2012 sous le
n°36/2012/PC et formé par l’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et
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à Madagascar, dite ASECNA, ayant son siège au 32-38 avenue Jean Jaurès, BP 3144-Dakar, agissant par l’organe de sa représentation auprès de la République centrafricaine, BP 828- Bangui, ayant pour Conseil Maître Jean-Louis Sylvestre WANGO-GBOLO, Avocat au Barreau de la Centrafrique, demeurant à proximité de l’Ecobank Port Amont à Bangui, dans la cause qui l’oppose au Collectif des ex-employés de l’ASECNA, représenté par Fulbert GUEREYORO, demeurant à Bangui, ayant pour conseils Maîtres Sylvain Adrien TABANGUE et Bruno Hyacinthe GBIEGBA, Avocats à la Cour à Bangui, BP. 889 Bangui,
en cassation de l’Arrêt n°30 rendu le 21 février 2012 par la Cour d’appel de Bangui,
dont le dispositif est le suivant : « Statuant contradictoirement à l’égard des parties, en matière de référé et en dernier
ressort ; Au principal : Renvoie les parties à mieux se pourvoir ainsi qu’elles aviseront ; Mais d’ores et déjà : confirme l’ordonnance querellée dans toutes ses dispositions ; Met les dépens à la charge de l’ASECNA Article 2» ; La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels
qu’ils figurent à sa requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de Monsieur Mamadou DEME, Juge ; Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en
Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA ; Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure qu’en exécution de l’Arrêt
n°02 rendu le 14 janvier 2010 par la Cour d’appel de Bangui, le Collectif des ex-employés de l’ASECNA (Article 2) a fait procéder à une saisie-attribution des créances de cette dernière entre les mains d’Ecobank et de la Commercial Bank Centrafrique, pour obtenir paiement de la somme de 216.490.175 francs CFA ; que par Ordonnance n°19 en date du 18 janvier 2012, le juge des référés du Tribunal de grande instance de Bangui a rejeté la demande de mainlevée de la saisie présentée par l’ASECNA ; que par l’Arrêt objet du pourvoi, la Cour d’appel de Bangui a confirmé cette ordonnance en toutes ses dispositions ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation et la mauvaise application de l’article 30 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution
Vu l’article 30 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de
recouvrement et des voies d'exécution ; Attendu qu’il est reproché à la Cour d’appel d’avoir déclaré les dispositions de ce texte
inopérantes aux motifs que l’ASECNA a plaidé sa cause devant les juridictions centrafricaines et qu’elle ne serait plus fondée à se prévaloir de son immunité qu’elle n’invoque que dans la phase d’exécution, alors que le juge saisi de l’application de l’article 30
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doit se borner à vérifier que la partie qui s’en prévaut bénéficie de l’immunité d’exécution en vertu d’une disposition de la loi nationale ou d’une convention internationale, et qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a ajouté au texte une condition supplémentaire que le législateur communautaire n’a pas prévue ;
Attendu qu’aux termes de l’article 30 de l’Acte uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « l’exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d’une immunité d’exécution » ;
Attendu que pour déclarer ces dispositions « inopérantes », le juge d’appel a retenu en
substance que l’ASECNA a tacitement renoncé au bénéfice de son immunité d’exécution en comparaissant devant les Tribunaux centrafricains et assuré sa défense sans se prévaloir de son immunité de juridiction, lors de la procédure judiciaire préalable à l’exécution ;
Mais attendu qu’il résulte de l’article 5 de l’Accord d’établissement passé le 9 juin
2004 entre l’ASECNA et la République Centrafricaine que : « 1- L’Agence, ses biens et avoirs jouissent de l’immunité de juridiction sauf dans la
mesure où l’Agence y aurait renoncé expressément ; 2- Les biens et avoirs de l’Agence sont exempts de perquisition, confiscation,
réquisition et d’expropriation et de toute forme de contrainte…. » ; Attendu que ces dispositions confèrent sans équivoque ni restriction à l’ASECNA une
double immunité : de juridiction lui permettant de se soustraire à la compétence d'un Tribunal centrafricain, et d’exécution qui empêche toute mesure d'exécution forcée sur ses biens ;
Attendu qu’aucune renonciation expresse à son immunité de juridiction n’est invoquée contre l’ASECNA ; qu’au surplus, le consentement à l'exercice de la juridiction par les Tribunaux centrafricains n'implique pas le consentement à l'exécution forcée, qui nécessite un consentement exprès distinct ;
Attendu qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a méconnu le texte visé au
moyen ; Qu’il échet de casser l’arrêt et d’évoquer ; Sur l’évocation
Attendu que par requête reçue au greffe de la Cour d'appel de Bangui le 25 janvier
2012, l’ASECNA a relevé appel de l’Ordonnance n°19 rendue le 18 janvier 2012 par le Juge des référés du Tribunal de première instance de Bangui, dont le dispositif est le suivant :
« Statuant contradictoirement à l’égard des parties en matière de référé et en premier
ressort; Au principal, Renvoie les parties et la cause à mieux se pourvoir ainsi qu’elles aviseront ; Mais d’ores et déjà,
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Vu l’urgence, Rejette la demande de l’ASECNA Article 2 comme mal fondée ; Ordonne l’exécution sur minute de cette décision nonobstant toutes voies de recours ; Met les dépens à la charge de l’ASECNA Article 2 » ;
Attendu qu’il échet de déclarer cet appel recevable en la forme ; Au fond :
Attendu que l’ASECNA poursuit l’annulation de la saisie-attribution de créances pratiquée contre elle par certains de ses ex-employés, suivant exploit du 05 janvier 2012, en exécution de l’Arrêt n°02 rendu le 14 janvier 2010 par la Cour d’appel de Bangui ; qu’elle invoque le bénéfice des dispositions de l’article 5 de l’Accord d’établissement du 9 juin 2004, par lequel la République Centrafricaine lui a conféré l’immunité d’exécution, et celles de l’article 30 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, qui proscrivent toute exécution forcée contre les personnes bénéficiant d’une telle immunité ;
Attendu que le Collectif des ex-employés de l’ASECNA Article 2 s’oppose à cette prétention, au motif que l’ASECNA qui a comparu devant les juridictions centrafricaines et assuré sa défense sans invoquer le bénéfice de son immunité de juridiction, ne peut se prévaloir de son immunité d’exécution uniquement dans la phase d’exécution ;
Mais attendu que pour les mêmes motifs que ceux ayant conduit à la cassation, il y a
lieu de faire droit à la requête et d’ordonner la mainlevée de la saisie ; Attendu que le Collectif des ex-employés de l’ASECNA Article 2 qui a succombé doit
être condamné aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ; Casse l’Arrêt n°030 rendu le 21 février 2012 par la Cour d’appel de Bangui ; Evoquant et statuant sur le fond, Annule l’Ordonnance n°19 rendue le 18 janvier 2012 par le Juge des référés du
Tribunal de première instance de Bangui ; Ordonne la mainlevée de la saisie-attribution de créances pratiquée le 05 janvier 2012
contre l’ASECNA Article 2 ; Condamne le Collectif des ex-employés de l’ASECNA Article 2 aux entiers dépens ; Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
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Le Président
Le Greffier en chef
Pour expédition copie conforme établie en six pages par Nous, Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef de ladite Cour
Fait à Libreville, le 11 novembre 2014
Paul LENDONGO


Synthèse
Numéro d'arrêt : 136/2014
Date de la décision : 11/11/2014

Analyses

IMMUNITÉ - ENTITÉ JOUISSANT D'UNE IMMUNITÉ DE JURIDICTION ET D'EXÉCUTION - RENONCIATION : NÉCESSITÉ D'UNE RENONCIATION EXPRESSE, LA SIMPLE PARTICIPATION À UNE PROCÉDURE JUDICIAIRE N'ÉQUIVALANT PAS À UNE RENONCIATION - CASSATION DE L'ARRÊT CONTRAIRE - MAINLEVÉE DE LA SAISIE INITIÉE


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2014-11-11;136.2014 ?
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