Les articles 299, 308 et 313 de l’AUPSRVE sont applicables aux incidents de la saisie immobilière et inapplicables en l’espèce, s’agissant d’une adjudication. Le débiteur saisi et les autres cohéritiers lui ayant délivré une procuration ne peuvent en application de l’article 296 de l’AUPSRVE et de l’article 820 du code des personnes et de la famille du Burkina Faso, compromettre la part des biens indivis des autres coindivisaires sans leur consentement qui n’est pas établi en l’espèce. La violation alléguée des articles 293 de l’AUPSRVE et 51 de la loi susvisée ne peut prospérer pour les mêmes raisons, la qualité de tiers, d’une partie au moins des ayants droit, ayant été largement démontrée. Les doivent être rejetés.
ARTICLE 296 AUPSRVE ARTICLE 299 AUPSRVE ARTICLE 308 AUPSRVE ARTICLE 313 AUPSRVE ARTICLE 820 DU CODE DES PERSONNES ET DE LA FAMILLE DU BURKINA FASO CCJA, Assemblée plénière, Arrêt n° 066/2014 du 25 avril 2014 ; Pourvoi n° 104/2010/ PC du 08/11/2010 : 1) Banque Internationale du Burkina (BIB SA), 2) KARANTAO Maïmouna c/ SAWADOGO Minata et 07 autres tous Ayants-droit de feu OUEDRAGO Harouna.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), en Assemblée plénière, a rendu l’Arrêt suivant en son audience foraine tenue le 25 avril 2014 à Porto-Novo-Bénin où étaient présents :
Messieurs Marcel SEREKOISE SAMBA, Président
Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier Vice-président Madame Flora DALMEIDA MELE, Seconde Vice-présidente Messieurs Namuano F. DIAS GOMES, Juge
Victoriano OBIANG ABOGO, Juge Mamadou DEME, Juge Idrissa YAYE, Juge, rapporteur Djimasna N’DONINGAR, Juge
et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 08 novembre 2010 sous le n°104/2010/PC et formé par la SCPA KARAMBIRI-NIAMBA, Avocats à la Cour, Boulevard Charles de GAULLE, face Direction des transports, porte 1982, 01 BP 3470/2476 Bobo-
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Dioulasso 01, agissant aux noms et pour les comptes de la Banque Internationale du Burkina, dite BIB SA, au capital de 12 000 000 000 FCFA, ayant son siège social au 1340, Avenue Dimdolobsom, 01 BP 362 Ouagadougou 01, représentée par son Directeur général et de Madame KARANTAO Maïmouna, commerçante demeurant au 01 BP 211 Bobo-Dioulasso 01, dans la cause les opposant à SAWADOGO Minata et 07 autres, tous Ayants droit de feu OUEDRAGO Harouna et demeurant à Bobo-Dioulasso,
en cassation de l’Arrêt n°17 rendu le 19 avril 2010 par la Cour d’appel de Bobo-
Dioulasso et dont le dispositif est le suivant : « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile, et en dernier ressort :
- Déclare l’appel recevable ; - Annule le jugement n°212 du 21 juin 2006 rendu par le Tribunal de grande instance de
Bobo-Dioulasso en ce qu’il a statué infra petita.
Statuant à nouveau et par évocation : - Rejette les fins de non recevoir tirées du défaut de qualité du cabinet d’avocats
SAWADOGO- OUEDRAGO, de l’autorité de chose jugée, de la déchéance des ayants droit de feu OUEDRAGO Harouna à agir.
- Rejette l’exception de nullité de l’acte d’assignation du 1er juin 2006, - Déclare les ayants droit de feu OUEDRAGO Harouna titulaires de droits réels
immobiliers sur les immeubles ci-après : • Parcelle A lot 2120 du secteur 11 de Bobo-Dioulasso, • Parcelle H lot 2152 du secteur 11 de Bobo-Dioulasso,
- Ordonne l’expulsion de la BIB et de Madame KARANTAO Maïmouna desdits immeubles, tant de leurs personnes, de leurs biens, que de tous occupants de leurs chefs,
- Déboute la BIB et Madame KARANTAO Maïmouna de leur demande de frais exposés et non compris dans les dépens,
- Condamne la BIB et Madame KARANTAO Maïmouna à payer aux ayants droit de feu OUEDRAGO Harouna la somme de trois cent mille francs CFA (300.000f) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
- Déboute les ayants droit de feu Ouedrago Harouna du surplus de leur demande, - Condamne la BIB ET Madame KARANTAO Maïmouna aux dépens. » ;
Les requérantes invoquent à l’appui de leur pourvoi les trois moyens de cassation tels
qu’ils figurent dans leur requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Idrissa YAYE, Juge ; Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des
affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA ; Suivant courriers avec accusé de réception en date des 23 décembre 2010 et 18 octobre
2011, le Greffier en chef de la Cour de céans a signifié aux défendeurs au pourvoi, le recours initié par les pourvoyants et leur a imparti le délai de trois mois pour produire leur mémoire en réponse, lesdits accusés étant retournés avec la mention « non réclamé », le principe du contradictoire ayant ainsi été observé, il échet de passer outre et de statuer au fond ;
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Attendu que le 05 octobre 1995 et le 19 août 1996, les ayants droit de feu OUEDRAGO
Harouna ci-après OUEDRAGO Boukary, agissant en son nom personnel, Fatimata, suivant procuration et les héritiers mineurs suivant Salam, Alizèta, Ali et Oumarou, tous suivant procurations versées au dossier en date du 24 novembre 1994 et du 23 août 1996 délivrées par leur mandataire légal OUEDRAGO Tiemoko Boukary, ont constitué deux hypothèques portant respectivement sur la parcelle A du lot 2120 objet du PUH n°1674b et la parcelle H du lot 2132 bis objet du PUH n°12074 au profit d’un des ayants droit à savoir OUEDRAGO Boukary, afin de lui permettre de bénéficier d’un prêt de 20.000.000f auprès de la BIB ;
Attendu que le débiteur n’ayant pas satisfait à ses engagements, la BIB a sollicité et
obtenu du Tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso l’Ordonnance d’injonction de payer n°0070/99 du 23 février 1999 ; que ladite ordonnance a été notifiée au débiteur par acte d’huissier en date du 26 février 1999, lequel n’a pas exercé de voie de recours ; que la BIB ayant signifié au saisi trois commandements aux fins de saisies immobilières, restés aussi sans suite, a poursuivi la procédure ayant abouti à la vente à la BIB des deux immeubles objets de la saisie suivant Jugement d’adjudication n°10 du 16 janvier 2002 du Tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso, que la BIB a revendu un des immeubles à Madame KARANTAO Maïmouna ;
Attendu que le 1er juin 2005, SAWADOGO Minta et 7 autres Ayants-droit de feu
OUEDRAGO Harouna ont assigné OUEDRAGO Boukary, la BIB et KARANTAO Maïmouna devant le Tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso aux fins de se voir déclarer titulaires des droits réels sur les immeubles en cause, d’ordonner aux recourantes de ne point troubler leur jouissance sur lesdits immeubles, d’ordonner leur expulsion tant de leurs personnes, de leurs biens que de tous occupants de leur chef, d’ordonner enfin l’exécution provisoire du jugement à intervenir ; que le Tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso a accédé à leurs demandes suivant Jugement n°212 du 21 juin 2006 ;
Que sur appel de la BIB, la Cour d’appel de Bobo-Dioulasso a rendu l’Arrêt n°17 du 19
avril 2010, dont pourvoi ;
Sur les trois moyens de cassation réunis
Attendu que les recourantes font grief à la Cour d’appel de Bobo-Dioulasso, d’avoir, d’une part, violé les dispositions des articles 296, 299, 308 et 313 de l’Acte uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; qu’elles reprochent ainsi à ladite Cour d’avoir écarté la déchéance et la prescription prévues par les articles 299, 308 et 313 de l’Acte uniforme précité, motifs pris de ce que ces textes ne sont applicables qu’aux parties à la saisie à l’exclusion des tiers qui ne peuvent se les voir appliquer ; elles estiment qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a fait une fausse application de l’article 296 dudit Acte uniforme, car selon elles, les ayants droits de OUEDRAGO Harouna ne possèdent aucunement la qualité de tiers mais bien celle de partie à la saisie ;
Que d’autre part, la BIB et Madame KARANTAO fondent leur second moyen de cassation sur la fausse application de l’article 820 du code des personnes et de la famille du Burkina Faso, estimant que contrairement aux allégations de l’arrêt attaqué, il ne s’est nullement agi de la poursuite et de la vente de part d’un héritage dans une succession mais de la vente de biens indivis ayant fait l’objet de convention hypothécaire par l’ensemble des héritiers, excluant l’application de l’article 820 du code précité ;
Qu’enfin, les recourantes fondent leur troisième moyen de cassation sur la violation des
articles 293 de l’Acte uniforme précité et 51 de la loi n°014/96/ADP portant réforme agraire et foncière au Burkina Faso, estimant en effet qu’en recevant et en faisant droit à l’action des
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ayants droit de OUEDRAGO Harouna et alors que ceux-ci ne sont pas des tiers à la saisie immobilière réalisée le 16 janvier 2002, la Cour d’a ppel n’a pas donné d’assise juridique à sa décision ; que selon elles, à l’expiration du délai du recours en annulation de l’article 313 dudit Acte uniforme, les ayants droit ont perdu la possibilité de tout recours contre le jugement d’adjudication et que ladite adjudication a transféré la propriété des immeubles vendus ; qu’il s’ensuit que la Cour a violé l’article 51 de la loi précitée en reconnaissant aux ayants droit de OUEDRAGO Harouna des droits réels sur des immeubles sortis de leur patrimoine de par leur volonté ;
Mais attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 296 de l’Acte uniforme précité :
« L’adjudication, même publiée au bureau de la conservation foncière, ne transmet à l’adjudicataire d’autres droits réels que ceux appartenant au saisi. » ; qu’en application des dispositions de l’article 820 du code des personnes et de la famille, applicable en matière de poursuite contre un bien indivis : « Les créanciers personnels d’un des héritiers ne peuvent poursuivre la saisie et la vente de la part indivise de leur débiteur dans la succession ou de l’un des biens dépendants de la succession » ;
Attendu en l’espèce, qu’il est incontestable comme résultant des pièces du dossier,
versées par les recourantes, que les immeubles objets des saisies immobilières sont des biens indivis appartenant à l’ensemble des ayants droit de feu OUEDRAGO Harouna ; qu’il résulte des affectations hypothécaires et des procurations ayant servi à les établir que SAWADOGO Minata, âgée d’une cinquantaine d’années au moment de ces constitutions d’hypothèque, GANAME Aoua, âgée de plus de 38 ans à ce moment et OUEDRAGO Limata, majeure également au même moment , tous ayants droit de OUEDRAGO Harouna, n’y ont pas consenti ni personnellement ni par mandataire ; que dès lors, la Cour d’appel de Bobo-Dioulasso, nonobstant ses déclarations inexactes sur les articles 299, 308 et 313 de l’Acte uniforme précité, applicables aux incidents de la saisie immobilière et inapplicables en l’espèce, n’a en rien violé ces dispositions et au contraire a fait une bonne application des dispositions de l’article 296 de l’Acte uniforme susvisé ; qu’en l’espèce, le saisi et mêmes les autres cohéritiers lui ayant délivré une procuration ne peuvent en application de l’article 296 de l’Acte uniforme précité et de l’article 820 du code précité, compromettre la part des biens indivis des autres coindivisaires sans leur consentement qui n’est pas établi en l’espèce ; qu’enfin la violation alléguée des articles 293 de l’Acte uniforme précité et 51 de la loi susvisée ne peut prospérer pour les mêmes raisons, la qualité de tiers, d’une partie au moins des ayants droit, ayant été largement démontrée ; qu’il échet en conséquence de rejeter les trois moyens de cassation réunis comme étant non fondés ;
Attendu qu’ayant succombé, il y a lieu de condamner la BIB et Madame KARANTAO
aux dépens ;
PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, après en avoir délibéré, En la forme : Déclare recevable le recours de la BIB et de Madame KARANTAO Maïmouna ; Au fond : Le rejette comme étant non fondé ; Condamne la BIB et Madame KARANTAO aux dépens.
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Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier en chef