La CCJA est compétente pour le pourvoi relatif à une décision rendue à la suite de l’appel formé contre le jugement ayant homologué un concordat préventif, qui relève de l’AUPCAP. Aux termes de l’article 23 de l’AUPCAP (ancien), seule la voie d’appel est autorisée dans les quinze jours du prononcé de la décision relative au règlement préventif. L’Acte uniforme n’a prévu aucune autre disposition pour recourir à l’appel contre une décision de règlement préventif et en se fondant sur l’article 23 du règlement intérieur du Conseil de l’ordre des Avocats du Burkina Faso pour déclarer irrecevable l’appel régulièrement formé le 26 novembre 2009 contre le jugement en cause, la cour d’appel a violé le texte sus visé et exposé son arrêt à la cassation. Le règlement préventif tend à éviter la cessation de paiements ou d’activité de l’entreprise par la formalisation d’un concordat qui ne peut être homologué qu’à la suite du rapport d’un expert. En l’espèce, il ressort des conclusions du rapport de l’expert sur la situation économique et financière de la société en cause qu’elle dispose d’un niveau suffisant d’actifs disponibles et réalisables à court terme pour couvrir ses dettes exigibles à court terme ; que le niveau et la qualité de ses actifs lui permettent de maintenir la continuité de l’exploitation dans de bonnes conditions en dépit de quelques difficultés liées à la crise financière ayant entrainé la chute des cours de matière première dont l’acier et que le concordat proposé est viable.
En application des articles 15.2 2 et 3eme alinéas, et 18 de l’AUPCAP, tous les créanciers sont tenus d’accepter le concordat préventif homologué par les premiers juges qui ont fait une bonne application de la loi. Confirmation du jugement initial.
ARTICLE 14 TRAITE OHADA ARTICLE 487 AUSCGIE CCJA, Assemblée plénière, Arrêt n° 064/2014 du 25 avril 2014 ; Pourvoi n° 029/2010/ PC du 16/03/2010 : Société F.J ELNSER Trading GMBH, Société STEEL RESSOURCES c/ Société Industrielle de Tubes d’Acier dite SITACI, Société STEEL LINK, Société TRADESCA, Conseil de l’Ordre des Avocats du Burkina Faso.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Assemblée plénière, a rendu
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l’arrêt suivant en son audience foraine tenue le 25 avril 2014 à Porto-Novo-Bénin où étaient présents :
Messieurs Marcel SEREKOÏSSE-SAMBA, Président
Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier Vice-président Madame Flora DALMEIDA MELE, Seconde Vice-présidente, Messieurs Namuano F. DIAS GOMES, Juge
Victoriano OBIANG ABOGO, Juge, rapporteur Mamadou DEME, Juge Idrissa YAYE, Juge Djimasna N’DONINGAR, Juge et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef ; Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans le 16 mars 2010 sous le
n°029/2010/PC et formé par Maîtres, Ali NEYA Avocat au Barreau de Burkina Faso, cabinet sis au 1200 logements, rue TUEFFO AMORO, porte 346, secteur 14, 06 BP 10228 Ouagadougou 06 et Adama SORO Avocat au Barreau de Côte d’Ivoire, demeurant Cocody les II Plateaux, Rue des Jardins, villa 2160, 28 BP 1319 Abidjan 28, agissant au nom et pour le compte de la société F.J. ELNSER Trading GMBH dont le siège social est à AM HEUMARKT 10, 1030 Vienna-Australie, agissant aux poursuites et diligences du Dr Slegfried Purrer, Gérant, et la société STEEL RESSOURCES dont le siège social se trouve à 9155 South Dadeland Blvd. Penthouse 2, suite 1800 Miami, Floride 33156 USA, aux poursuites et diligences de son Gérant, Monsieur Carlos R. Charur, dans la cause les opposant à la société Industrielle de Tubes d’Acier dite SITACI, dont le siège social est à la Rue RAAM-zone industrielle de Kossodo, 01 BP 247 Ouagadougou 01, représentée par son Administrateur général, Monsieur Dib Chawki ATTIE, ayant pour Conseils, Maître Mamadou SAMASSI, Avocat à la Cour, 17, Avenue Marchand, Immeuble Longchamp, 05 BP 982 Abidjan 05-Côte d’Ivoire et le Cabinet SAGNON-ZAGRE, Avocats associés, 02 BP 5720 Ouagadougou 02- Burkina Faso, la société STEEL-LINK dont le siège social se trouve à Netherland vat, n°NL 2873403 B01, agissant aux poursuites et diligences de son représentant légal, la Société TRADESCA dont le siège social est au 6, Rue Paul Baudry – 75008 Paris-France, agissant aux poursuites et diligences de son représentant légal et le Conseil de l’Ordre des Avocats du Burkina Faso, 01 BP 1773 Ouagadougou 01, agissant aux poursuites et diligence du Bâtonnier de l’Ordre des Avocats, Maître Issouf BAADHIO, Avocat à la Cour, 01 BP 2100 Ouagadougou 01,
en cassation de l’Arrêt n° 006/2010 rendu le 15 janvier 2010 par la Cour d’appel de
Ouagadougou et dont le dispositif est le suivant : « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier
ressort :
En la forme Déclare la constitution de Maître Ali NEYA irrégulière ; En conséquence déclare l’appel interjeté par Maître Ali NEYA au profit des sociétés F.J. ELSNER Trading GMBH et STEEL Ressources irrecevable ;
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Mettons les dépens à la charge des appelants.» ;
La requérante invoque à l’appui de son recours les quatre moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Victoriano OBIANG ABOGO, Juge ; Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des
affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA ; Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que la société Industrielle de
Tubes d’Acier dite SITACI a, par requête aux fins de règlement préventif en date du 27 juillet 2009, saisi la chambre commerciale du Tribunal de grande instance de Ouagadougou laquelle a, par Jugement n°256 rendu le 11 novembre 2009, homologué le concordat préventif après rectification des créances de TRADESCA SA et STEEL LINK et a nommé un juge commissaire pour le suivi de l’exécution du concordat ; que sur appel conjoint de la société F.J. ELSNER Trading GMBH et de la société ETEEL Ressources par le biais de Maître Ali NEYA, la Cour d’appel de Ouagadougou a rendu le 15 janvier 2010 l’Arrêt n°006 dont pourvoi ;
Sur la compétence de la Cour de céans
Attendu que dans son mémoire en réponse reçu au greffe de la Cour de céans le 30 décembre 2010, la SITACI soulève in limine litis l’incompétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage au motif que la cour d’appel a statué uniquement sur l’irrégularité de la constitution d’un avocat sans évoquer des dispositions d’un Acte uniforme ou des règlements prévus au Traité ;
Attendu que l’article 14, alinéas 3 et 4 du traité OHADA dispose « saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des Règlements prévus au présent Traité à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats Parties dans les mêmes contentieux. » ;
Mais attendu que la décision attaquée a été rendue à la suite de l’appel formé contre le Jugement n°256 du 11 novembre 2009 ayant homologué le concordat préventif qui relève de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif ; que contrairement aux assertions de la défenderesse, l’affaire soulève des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme sus indiqué ; que la Cour de céans doit se déclarer compétente ;
Sur le premier moyen Vu l’article 23 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif ;
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Attendu que les requérantes reprochent à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 23 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif en déclarant irrecevable, sur le fondement du règlement intérieur du Conseil de l’ordre des Avocats du Burkina Faso, l’appel interjeté contre le Jugement n°256 rendu le 11 novembre 2009 par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou ayant homologué le concordat alors que selon le moyen, les décisions relatives au règlement préventif peuvent faire l’objet d’un appel dans le délai de quinze jours à compter de leur prononcé et que la computation des délais obéit aux dispositions de l’article 218 du même Acte uniforme ;
Attendu qu’aux termes de l’article 23 de l’Acte uniforme précité, seule la voie d’appel
est autorisée dans les quinze jours du prononcé de la décision relative au règlement préventif ; que l’Acte uniforme n’a prévu aucune autre disposition pour recourir à l’appel contre une décision de règlement préventif ; qu’en se fondant sur l’article 23 du règlement intérieur du Conseil de l’ordre des Avocats du Burkina Faso pour déclarer irrecevable l’appel régulièrement formé le 26 novembre 2009 contre le Jugement n°256 rendu le 11 novembre 2009, la Cour d’appel a violé le texte sus visé ; qu’il échet de casser l’ arrêt attaqué sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens et d’évoquer sur le fond ;
Sur l’évocation
Attendu que les Sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL Ressources ont, par le truchement de Maître Ali NEYA, interjeté appel du Jugement n°256 susvisé par acte d’huissier du 26 novembre 2009 ; qu’elles soutiennent que prétendant être victime de la crise financière, la SITACI a saisi le tribunal pour bénéficier des dispositions relatives au règlement préventif prévu par l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif ; qu’elle a ainsi bénéficié de la suspension des poursuites individuelles pour cinq de ses gros créanciers ; qu’elles relèvent que le rapport de l’expert fait ressortir que sur les cinq créanciers cités dans l’offre de concordat préventif, seuls deux ont donné leur accord et qu’il n’a pu obtenir expressément l’accord des autres sociétés ; qu’en l’absence de consentement, le tribunal aurait dû rejeter le concordat ; que le rapport indique que le passif exigible à court terme d’un montant de 7 841 364 371 FCFA est nettement supérieur à ses créances du même terme qui sont de 1 844 283 630 FCFA ; que sur poursuite individuelle pour le recouvrement de leurs créances, la SITACI n’a pu honorer aucune d’elles et se trouve ainsi en état de cessation de paiements ; qu’elles estiment que le jugement entrepris ne devait pas être homologué dans ces conditions ; qu’en décidant d’homologuer ledit concordat, le Tribunal n’avait aucun pouvoir de modification et qu’en y apportant des rectificatifs, le Tribunal a outrepassé ses compétences ; que les Sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL Ressources demandent que l’acte d’appel soit déclaré recevable ; qu’elles demandent en outre d’infirmer le Jugement n°256, de rejeter la requête en règlement préventif, d’annuler les décisions de suspension de poursuites, de constater la cessation des paiements, subsidiairement l’absence de validité des termes du concordat, l’absence de garantie suffisante ou encore la modification des termes dudit concordat, de fixer la date de cessation des paiements et de prononcer la liquidation des biens de la SITACI ;
Attendu que le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats, intervenant dans l’intérêt de la
profession, a soulevé in limine litis la nullité de l’appel pour irrégularité de la constitution de Maître Ali NEYA pour le compte des Sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL Ressources invoquant le non respect par l’Avocat constitué de l’article 23 du règlement intérieur du Conseil de l’Ordre des Avocats selon lequel « tout Avocat qui reçoit l’offre d’une clientèle ou d’un dossier doit s’assurer, avant d’accepter cette offre, qu’aucun confrère n’a été préalablement chargé des intérêts du client comme défenseur ou comme conseil et dans
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l’affirmative, s’assurer que celui-ci a été complètement désintéresser. Il ne pourra accepter cette clientèle ou ce dossier qu’après désintéressement du confrère qui l’a précédé. S’il ne se conforme pas aux prescriptions ci-dessus, l’Avocat s’expose à être déclaré par le Bâtonnier personnellement débiteur. » ; que le cabinet BAADHIO et Maître Abdoul OUEDRAOGO respectivement conseils des sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL Ressources et le cabinet SAGNON-ZAGRE et Maître SOMBA K. Augustin, conseils de la SITACI demandent que soit déclaré nul l’acte d’appel formalisé par Maître Ali NEYA pour non désintéressement des Avocats de leurs honoraires d’une part et d’autre part pour défaut de mandat valable ; que Maître LOMPO O. Frédéric soutenait qu’il est créancier au même titre que les appelants et demandait au nom de son client, l’irrecevabilité de l’action des appelants pour défaut d’intérêt ;
Sur la recevabilité de l’appel formé par les requérants au pourvoi Attendu que pour les mêmes motifs que ceux ayant prévalu à la cassation de l’Arrêt,
l’appel formé par les requérants au pourvoi est recevable ; Sur la demande de règlement préventif Attendu que le règlement préventif tend à éviter la cessation de paiements ou d’activité
de l’entreprise par la formalisation d’un concordat qui ne peut être homologué qu’à la suite du rapport d’un expert ; qu’il ressort des conclusions du rapport de l’expert sur la situation économique et financière de la SITACI qu’elle dispose d’un niveau suffisant d’actifs disponibles et réalisables à court terme pour couvrir ses dettes exigibles à court terme ; que le niveau et la qualité de ses actifs lui permettent de maintenir la continuité de l’exploitation dans de bonnes conditions en dépit de quelques difficultés liées à la crise financière ayant entrainé la chute des cours de matière première dont l’acier ; que le concordat proposé est viable ;
Attendu qu’aux termes de l’article 15.2 2e et 3e alinéas de l’Acte uniforme portant
organisation des procédures collectives d’apurement du passif, « la juridiction compétente homologue le concordat préventif si les délais consentis n’excèdent pas trois ans pour l’ensemble des créanciers …dans le cas où le concordat préventif comporte une demande de délai n’excédant pas deux ans, la juridiction compétente peut rendre ce délai opposable aux créanciers qui ont refusé tout délai et toute remise sauf si ce délai met en péril l’entreprise de ces créanciers » ; que le concordat prévoyait un étalement des paiements sur un délai de 15 mois ; que de surcroit, l’article 18 du même Acte uniforme prescrit que « l’homologation du concordat préventif rend celui-ci obligatoire pour tous les créanciers antérieurs à la décision de règlement préventif, que leurs créances soient chirographaires ou garanties par une sûreté ... » ; qu’en application des articles sus indiqués, les Sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL Ressources sont tenues d’accepter le concordat préventif homologué par les premiers juges qui ont fait une bonne application de la loi ; qu’il echet donc de confirmer le Jugement n°256 rendu par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou le 11 novembre 2009 ;
Sur les demandes des Sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL Ressources Attendu que le jugement des premiers juges étant confirmé, il échet de débouter les
requérants de toutes leurs demandes comme non fondées ; Attendu qu’ayant succombé, les sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL
Ressources doivent être condamnées aux dépens ;
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PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Se déclare compétente ;
Casse l’Arrêt n°006 rendu le 15 janvier 2010 par la Cour d’appel de Ouagadougou ;
Evoquant et statuant sur le fond,
Déclare recevable l’appel formé par les Sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL Ressources ;
Confirme le Jugement n°256 rendu le 11 novembre 2009 par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou ;
Condamne les sociétés F.J ELNSER Trading GMBH et STEEL Ressources aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président Le Greffier