La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), en Assemblée plénière, a rendu l’Arrêt suivant en son audience foraine tenue le 23 avril 2014 à Lomé-Togo où étaient présents :
Messieurs Marcel SEREKOISE SAMBA, Président
Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier Vice-président Madame Flora DALMEIDA MELE, Second Vice-président Messieurs Namuano F. DIAS GOMES, Juge
Victoriano OBIANG ABOGO, J uge Mamadou DEME, Juge Idrissa YAYE, Juge, rapporteur Djimasna N’DONINGAR, Juge et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 23 décembre 2011 sous le
n°122/2011/PC et formé par les ayants droit de AKAKPO et autres, ayant pour conseil Maître Galolo SOEDJEDE, Avocat à la Cour, 3473, Boulevard du 13 janvier, BP 3893 Lomé-Togo,
2
agissant au nom et pour le compte des Ayants droit de feu AKAKPO HOALO, représenté par Monsieur KPODAR Tekovi, feu DEGBEY Damgban représentés par AKAKPO Koffi Agbenouvi, feu DEGBEY Togbe représentés également par Monsieur AKAKPO Koffi Agbenouvi, feu ATTIOGBE Dossah, feu SEKPONA Kossi représentés par Messieurs KONDO Etsin et KAMEKPO Kodjo, feu ASSIOBO Agossi représentés par ASSAGBA Messan, feu AMEDOWOU Kossi représentés par Monsieur DJIKOU Komlan et les nommés ASSAGBA Sogneameto, ASSAGBA Kodjo et ADOTEVI Samuel, dans la cause les opposant à l’Union des Assurances du Togo UAT IARD SA, dont le siège social est au 812, Boulevard du 13 janvier, Immeuble UAT, BP 495 Lomé-Togo, représentée par Monsieur LOCOH Kodjo, Directeur Général, ayant pour Conseils la SCPA AGBOYIBO-MONNOU & Associés, Avocats à la Cour, 32, Avenue Augustino De Souza, BP 62296 Lomé-Togo,
en cassation de l’Ordonnance de référé n°205/2011 rendue le 19 octobre 2011 par le
Vice-président de la Cour d’appel de Lomé et dont le dispositif est le suivant :
« Au principal, renvoyons les parties à mieux se pourvoir ainsi qu’elles en aviseront ; Mais dès à présent, vu l’urgence ; Déclarons la juridiction présidentielle de la Cour d’appel compétente à connaitre du
présent sursis à statuer en matière des voies d’exécution en ce sens que le contentieux principal est en instance devant la Cour d’appel ;
- Rétractons l’ordonnance de sursis provisoire à exécution n°474/2011 du 25 août
2011 par laquelle le Président de la Cour d’appel a suspendu la mainlevée de saisie des comptes bancaires de l’UAT ;
- Disons que l’ordonnance n°583/2011 rendue le 23 août 2011 par le Président du tribunal continue de produire ses effets de mainlevée de saisie de comptes bancaires de l’UAT ;
- Disons qu’il n’y a lieu à ordonner une consignation en faveur des requérants ; - Rejetons tous les autres chefs de demande des parties comme superfétatoires ; - Réservons les dépens ; » ;
Les requérants invoquent à l’appui de leur pourvoi les quatre moyens de cassation tels
qu’ils figurent dans leur requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de Monsieur Idrissa YAYE, Juge ; Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des
affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA ; Attendu que l’Union des Assurances du Togo dite UAT IARD SA a été condamnée
par le Tribunal de première instance d’Aného, suivant Jugement n°209/87 en date du 20 août 1987, à garantir une condamnation d’un montant de 22 398 905 FCFA aux victimes et ayants droit de victimes d’un accident de la circulation ; que lesdits bénéficiaires ont assigné UAT IARD SA devant le Tribunal de première instance de Lomé en paiement d’indemnité de
3
retard à titre de dommages et intérêts ; que ledit Tribunal par Jugement n°280/92 du 27 mars 1992 a condamné l’UAT IARD SA à leur payer la somme de 24 877 782FCFA ;
que sur appel d’UAT IARD SA, la Cour d’appel de Lomé a, par l’Arrêt infirmatif n°082/2000 du 23 mars 2000, ramené le montant de ladite condamnation à la somme de 34 901 147 FCFA ; qu’après le rejet du pourvoi exercé contre ladite décision devant la Cour suprême du Togo, un itératif commandement a été délaissé à UAT IARD SA par exploit d’huissier de justice par lesdits ayants droit et victimes en réclamation de la somme de 1 430 029 449 FCFA ; que l’UAT IARD SA a formé opposition suivant exploit d’huissier de justice du 16 mai 2011 ;
Attendu que suivant procès-verbal de saisie-attribution de créances en date du 05 août 2011, les requérants au pourvoi ont fait pratiquer une saisie-attribution sur les avoirs bancaires de l’UAT IARD SA, dénoncée le 10 août 2011 ; que l’UAT IARD SA a formé une contestation contre cette saisie suivant exploit d’huissier en date du 10 août 2011 par-devant le Président du Tribunal de première instance de Lomé statuant conformément à l’article 49 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; que par Ordonnance de référé n°0583/2011, le juge de l’exécution a fait droit à la contestation élevée par l’UAD IARD SA ; que sur appel des requérants au pourvoi contre ladite ordonnance, ces derniers ont signifié à l’UAT IARD SA une Ordonnance de sursis à exécution n°474/2011 du 26 août 2011, obtenue sous la condition d’assigner en confirmation dans un délai de 15 jours, Ordonnance rétractée par le Président de la Cour d’appel suivant Ordonnance de référé n°205/2011 du 19 octobre 2011, objet du présent pourvoi en cassation ;
Sur les exceptions d’irrecevabilité du mémoire en réplique
Vu les articles 25-1, 28 et 30-1 du Règlement de procédure de la Cour de céans et l’article 1er de la décision n°002/99/CCJA du 04 février 1999 ;
Attendu que les requérants invoquent dans leur mémoire en duplique en date du 1er
août 2012, enregistré au greffe de la Cour de céans le 08 août 2012, l’irrecevabilité formelle du « mémoire en réplique » de l’UAT IARD SA, d’une part, pour avoir été déposé hors délai, estimant qu’il a été présenté au greffe plus de 3 mois après la notification de la requête afin de pourvoi, et d’autre part, pour défaut de qualité de Monsieur LOCOH Kodjo, Directeur Général Adjoint de l’UAT IARD SA, n’ayant pas qualité et concluent à l’irrecevabilité dudit mémoire ;
Mais attendu qu’aux termes de l’article 30-1 du Règlement de procédure de la Cour de
céans : « Toute Partie à la procédure devant la juridiction nationale peut présenter un mémoire en réponse dans un délai de trois mois à compter de la signification du recours. » ;
Attendu cependant qu’aux termes des dispositions de l’article 1er de la décision
n°002/99/CCJA du 04 février 1999 : « Sauf si les parties ont leur résidence habituelle en Côte d’Ivoire, les délais de procédure sont augmentés, en raison de la distance, comme suit :
- en Afrique centrale : de vingt et un jours, - en Afrique de l’ouest : de quatorze jours, - en République Fédérale Islamique des Comores et autres pays : trente jours. » ;
4
Attendu en plus qu’en application de l’article 25-1 in fine du Règlement : « Le jour au cours duquel survient cet acte, cet événement, cette décision ou cette signification n’est pas compris dans le délai. » ;
Attendu en l’espèce qu’il résulte bien de l’analyse des pièces versées au dossier que la requête afin de pourvoi a été notifiée le 10 janvier 2012 ; que cette notification a été réceptionnée le 16 janvier 2012, point de départ du délai de 03 mois ; que le mémoire en réplique n’a été reçu à la Cour de céans que le 17 avril 2012 ; D’où en application des textes susvisés, le délai de trois mois expire le 18 avril 2012 ; qu’à cette date à laquelle, la défenderesse résidant au Togo, il faut augmenter le délai de distance de 14 jours ;
Qu’il s’en suit que ledit mémoire en réplique, reçu au greffe de la Cour de céans le 17
avril2012, l’a été dans le délai requis ; Attendu qu’il résulte des pièces versées au dossier que Monsieur LOCOH Kodjo, est
plutôt Directeur Général de l’UAT IARD SA ; qu’en application de la jurisprudence constante de la Cour de céans le Directeur Général est bien le représentant légal de la Société Anonyme ; qu’il échet dès lors de rejeter cette exception également ; d’où il y a lieu d’écarter par conséquent les exceptions d’irrecevabilité du mémoire en réplique soulevées par les demandeurs comme étant non fondée ;
Sur l’exception d’incompétence de la Cour de céans
Vu les articles 13 et 14 du Traité de l’OHADA ; Attendu que la défenderesse dans son mémoire en réplique en date du 12 avril 2012 et
enregistré au greffe de la Cour de céans le 17 avril 2012, soulève l’incompétence de la Cour à se prononcer sur un pourvoi formé contre l’Ordonnance de référé n°205/2011 du 19 octobre 2011, au motif que l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution n’a pas organisé de procédure de sursis à l’exécution d’une décision rendue en matière de contestation de saisie-attribution de créances ;
Attendu qu’il résulte des pièces versées au dossier et notamment de l’ordonnance dont
pourvoi que saisi d’une contestation de saisie-attribution de créance, le juge de l’article 49 de Lomé a tranché la contestation en ordonnant la mainlevée de la saisie sous astreinte et a assorti sa décision de l’exécution provisoire ; que les demandeurs au pourvoi, pour empêcher toute mainlevée de ladite saisie pratiquée, ont relevé appel de ladite ordonnance et le dossier au fond pendant devant la Cour d’appel de Lomé ; qu’en application du droit processuel togolais les demandeurs ont saisi parallèlement le Président de la Cour d’appel de Lomé, juge des référés afin de le voir confirmer l’Ordonnance de sursis provisoire n°474/2011 du 26 août 2011, lequel, par l’Ordonnance n°205/2011 du 19 octobre 20011 dont pourvoi, a refusé de faire droit à cette requête en rappelant que le fond du contentieux de la saisie-attribution de créances est déféré à la Cour d’appel dans sa formation collégiale ;
Attendu que l’Acte uniforme précité ne prévoit pas de procédure spécifique contre les décisions assorties de l’exécution provisoire qui doivent être traitées en même temps que le fond du contentieux ;
Attendu que c’est le droit processuel togolais qui prévoit une telle procédure conduite
devant le juge des référés d’appel à l’exclusion de l’application de tout Acte uniforme ;
5
qu’une telle procédure ne viserait, en application de l’article 215 du Code de procédure civile du Togo, qu’à prescrire toutes mesures urgentes relatives à la sauvegarde de droits d’une partie ou d’un tiers lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement ;
Attendu qu’en application des articles 13 et 14 du Traité de l’OHADA, le contentieux
relatif à l’application des Actes uniformes est réglé en première instance et en appel par les juridictions des Etats Parties, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage n’intervenant qu’en cassation ;
Attendu qu’en l’espèce, la Cour d’appel de Lomé saisie du fond de l’appel ne s’est pas
encore prononcée et que l’ordonnance critiquée ne s’est bornée qu’à statuer sur l’opportunité du maintien ou non du sursis provisoire ordonné à pied de requête n°474 du 25 août 2011 et cela en application du droit national ; qu’il échet en conséquence de déclarer la Cour de céans incompétente pour connaitre d’un tel recours ;
Attendu qu’ayant succombé, il y a lieu de condamner les requérants aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Se déclare incompétente ;
Condamne les requérants aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier en chef