La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Assemblée plénière a rendu l’arrêt suivant, en son audience foraine tenue le 23 avril 2014 à Lomé-Togo où étaient présents :
Messieurs Marcel SEREKOÏSSE-SAMBA, Président
Abdoulaye Issoufi TOURE, Premier Vice-président, Madame Flora DALMEIDA MELE, Seconde Vice-présidente, Messieurs Namuano F. DIAS GOMES, Juge,
Victoriano OBIANG ABOGO, Juge, Mamadou DEME Juge, rapporteur Idrissa YAYE, Juge, Djimasna N’DONNINGAR, Juge,
et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef ; Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans sous le n°089/2011/PC le 14
octobre 2011 et formé par Maître Galolo SOEDJEDE, Avocat à la Cour, 3469, Boulevard du 13 janvier, B.P 3893 Lomé-Togo, agissant au nom et pour compte de l’Association des Propriétaires Terriens Expropriés de Bado, dite APTEB, représentée par Monsieur AWOUTEY Kokouda Aziambou, dans la cause l’opposant à la Société West African Cement SA dite WACEM SA, à la Société FORTIA CEMENT SA ayant toutes deux leur Siège Social dans la ville de Tabligbo-Togo, route d’Aného, BP 41, à Monsieur Montaparti Siva Ramavara PRASAD pris tant en sa qualité de Directeur Général desdites Sociétés, qu’en son nom personnel, ayant tous trois pour Conseil, Maître KOMLAN Ahlin, Avocat à la Cour, 37, Boulevard Félix HOUPHOUËT BOIGNY, Kpehenou n°1, BP BP 13471 Lomé-Togo, à la Banque Atlantique Togo ayant son Siège Social, Rue de la Gare et angle Rue Akiko Palako Lomé-Togo, à l’Etat Togolais représenté par le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice chargé des Relations avec les Institutions de la République dont les bureaux sont situés au 596, Rue de l’OCAM, BP 121 Lomé-Togo, à l’Etat de Côte d’Ivoire pris en la personne du Ministre de
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l’Economie et des Finances, représenté par l’Agence Judiciaire du Trésor, demeurant à Abidjan-Plateau et enfin à l’Etat du Ghanéen, représenté par « the Attorney General, Ministry of Justice, located at Minstries Po Box M60 Accra-Ghana »,
en cassation de l’Ordonnance de référé sur assignation n°022/11 rendue le 16 février 2011 par le Président de la Cour d’appel de Lomé, dont le dispositif est le suivant:
« Au principal, renvoyons les parties à mieux se pourvoir ainsi qu’elles aviseront ; Mais dés à présent, vu l’urgence ; Confirmons notre ordonnance de sursis provisoire n°04/2011 du 05 janvier 2011 ; Réservons les dépens » ; Les demandeurs invoquent à l’appui de leur pourvoi les trois moyens de cassation tels
qu’ils figurent à leur requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de Monsieur Mamadou DEME, Juge ; Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en
Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA ; Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que par Jugement n°195/10
rendu le 22 décembre 2010, le Tribunal de première instance de troisième classe de Tabligbo a condamné la Société WACEM SA à payer à l’APTEB la somme totale de 3 637 854 600 FCFA, à titre d’indemnisation de ses membres dont les parcelles ont été l’objet d’une expropriation, sous le bénéfice de l’exécution provisoire ; que la WACEM qui a interjeté appel contre ce jugement, a sollicité et obtenu le sursis à l’exécution provisoire du jugement, suivant ordonnance 04/11 rendue le 5 janvier 2011 par le Président de la Cour d’appel de Lomé ; que sur l’assignation servie par l’APTEB en rétractation de cette ordonnance, le Président de la Cour d’appel a rendu l’ordonnance confirmative frappée du pourvoi ;
Sur la compétence de la CCJA
Attendu que suivant mémoire en réponse en date du 16 janvier 2012, la WACEM
soulève in limine litis l’incompétence de la Cour ; qu’elle fait valoir que l’affaire qui lui est soumise ne soulève aucune question relative à l’application des Actes uniformes ou des Règlements prévus au Traité, au sens de l’article 14 alinéas 3 et 4 de ce texte ;
Attendu que les demandeurs invoquent en réplique la violation des articles 1er, 31, 33-1,
39, 49 dernier alinéa et 216 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, 85-4 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général, 17 alinéa 2 du décret n°45-2016 et 10 du Traité OHADA, pour conclure au rejet de l’exception ;
Mais attendu qu’il résulte des dispositions de l’article 14 alinéas 3 et 4 du Traité que
« Saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions
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relatives à l’application des Actes uniformes et des règlements prévus au présent Traité, à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats parties dans les mêmes contentieux » ;
Attendu que le Jugement n°195/10 du 22 décembre 2010 a statué sur la demande d’indemnisation présentée par les membres de l’APTEB à la suite d’une procédure d’expropriation dont leurs parcelles auraient été l’objet ; qu’il n’a ni interprété, ni appliqué un quelconque Acte uniforme ou Règlement prévu au Traité ;
Attendu que l’ordonnance objet du pourvoi, qui a confirmé l’ordonnance n°04/2011 du 05 janvier 2011 par laquelle la même juridiction présidentielle avait ordonné le sursis à l’exécution du jugement précité, a été rendue en application des articles 215 et suivants du décret n°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile du Togo, qui donnent compétence au Président de la Cour d’appel, au cours de l’instance d’appel, d’ordonner sur requête toutes mesures urgentes relatives à la sauvegarde des droits d’une partie ou des tiers et au besoin, de rétracter ou de modifier son ordonnance ; que les dispositions du Traité et de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution invoquées par les demandeurs ne sont pas applicables en l’espèce, aucune exécution forcée au sens de ces textes n’ayant été initiée à la date de l’ordonnance ; qu’il s’ensuit que la Cour doit se déclarer incompétente pour statuer sur le recours ;
Attendu que l’APTEB qui a succombé doit être condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ; Se déclare incompétente ; Condamne l’APTEB aux entiers dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé : Le Président Le Greffier en chef