Est recevable, en l’état, l’exception d’irrecevabilité soulevée in limine litis par les
défenderesses au pourvoi sur le caractère nouveau de la demande, dès lors qu’elle ne peut être appréciée au début de la procédure puisqu’ayant une similitude avec le moyen unique de cassation et que d’autre part, le jugement dont se prévalent les défenderesses n’ayant pas acquis force exécutoire ne peut produire aucun effet.
Un moyen nouveau, mélangé de fait et de droit, est irrecevable. Il en est ainsi dès lors
que le moyen unique, fondé sur l’article 159 de l’AUSCGIE (régissant les rapports entres associés d’une même société et portant sur l’expertise de gestion) est différent de celui exposé devant les juges du fond ayant pour objet la nomination d’un administrateur judiciaire. ARTICLE 159 AUSCGIE ARTICLE 28 RÈGLEMENT DE PROCÉDURE DE LA CCJA
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, 1ère ch., Arrêt n° 037/2013 du 02 mai 2013 ; pourvoi n° 012/2010/ PC du 16 février 2010 : 1) Monsieur Dénis Daniel François ROZAND, 2) Madame Latré Kayi Tassito LAWSON-HELOU c/ 1) Société FULLCAT AFRIQUE DE L’OUEST (FAO) SARL, 2) Société BOKAMION SARL, Recueil de jurisprudence n° 20, Vol. 1, janvier – décembre 2013, p. 47-49.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 02 mai 2013 où étaient présents :
M. Marcel SEREKOÏSSE SAMBA, Président Mme Flora DALMEIDA MELE, Juge, rapporteur M. Idrissa YAYE, Juge et Maître MONBLE Jean Bosco, Greffier ; Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 16 février 2010 sous le
n°012/2010/ PC et formé par Monsieur Dénis Daniel François ROZAND et Madame Latré Kayi Tassito LAWSON-HELOU, domiciliés respectivement à la rue Kouyoya, Tokoin Protestant à Lomé et au 34 rue Santa-Maria, Tokoin hôpital à Lomé ayant pour conseils Maître EDORH-KOMAHE, Avocat à la Cour, y demeurant, rue SAHOUDE (Doulassamé Amoutivé), Maître Gilles Kokou ANANI, Avocat à la Cour, demeurant angle boulevard Félix Houphouet Boigny, rue TABINDE, quartier Bè kpéhénou, BP 4115 Lomé, et Maître AFO IZETOU, Avocat à la Cour, demeurant, Rue de l’Ogou Nyékonakpoé, BP 30347 Lomé, dans la cause les opposant à la Société FULLCAT AFRIQUE DE L’OUEST (FAO) SARL, ayant son siège social à Lomé, route de l’aviation, 06 BP 62220, représentée par son gérant, Monsieur Patrice Antoine COLLOMB et à la Société BOKAMION SARL, dissoute et mise en liquidation, représentée par son syndic Monsieur AWOUTE Yao, Expert comptable, demeurant à Lomé, 12 rue Koumoré, immeuble de l’Habitat, BP 13085, ayant son siège social à Lomé, 39, route de l’aviation, BP 4285 Lomé, ayant pour conseil Maître Euloge A.
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EDORH, Avocat à la Cour, y demeurant, angle 71 boulevard Félix Houphouet Boigny et 88 rue des Mélisses, Bè-Kpéhénou, 14 BP 37 Lomé-Gbonvié,
en cassation de l’Arrêt n°112/09 rendu le 21 juillet 2009 par la Cour d’appel de Lomé
et dont le dispositif est le suivant : « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en appel ; En la forme Reçoit l’appel ; Au fond Le déclare mal fondé ; Confirme en conséquence l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ; Condamne les appelants aux dépens ; » ; Les requérants invoquent à l’appui de leur pourvoi le moyen unique de cassation tels
qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de Madame Flora DALMEIDA MELE, Juge ; Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des
affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de
l’OHADA ; Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que Monsieur Dénis Daniel
François ROZAND et Madame Latré Kayi Tassito LAWSON-HELOU ont créé la société BOKAMION SARL ayant pour objet la vente de matériel roulant élargi par la suite à la vente de matériels de travaux publics dont Monsieur Jacques COLLOMB a été le fournisseur exclusif ; que face à l’endettement croissant de la société à hauteur de la somme de un milliard FCFA et des opportunités du marché, ils ont cédé 51% des parts sociales à leur créancier, Monsieur Jacques COLLOMB devenu ainsi associé majoritaire et son fils, Patrice COLLOMB, nommé gérant ; que les COLLOMB ont constitué parallèlement à la première société une Sarl dénommée FULLCAT TOGO devenue FULLCAT Afrique de l’Ouest ayant la même activité et le même gérant que celui de la société BOKAMION ; que courant octobre 2007, le gérant a délibérément fait cesser les activités de la société BOKAMION sans en aviser les associés minoritaires ; qu’estimant qu’il y a confusion dans la gestion des deux sociétés, Monsieur Dénis Daniel François ROZAND et Madame Latré Kayi Tassito LAWSON-HELOU ont saisi le juge des référés de Lomé aux fins de désignation d’un administrateur judicaire ayant pour mission de faire la transparence entre lesdites sociétés ; que par Ordonnance n°0965/08 du 12 novembre 2008, le juge des référés a rendu la décision ci-après : « …constatons en outre que lors de l’assemblée générale des associés tenue le 28 juin 2008 tous les associés ont à l’unanimité désigné le Cabinet EFORGEC pour l’audit des comptes de la société BOKAMION ; disons que les travaux de l’expert constituent un
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document permettant de faire la lumière sur la situation patrimoniale de BOKAMION ; ordonnons que le rapport du Commissaire aux comptes soit soumis à l’approbation des associés qui seront convoqués sur simple ordonnance du Président du Tribunal ; rejetons la demande de nomination d’un administrateur judiciaire comme mal fondée… » ; que sur appel de Monsieur Dénis Daniel François ROZAND et Madame Latré Kayi Tassito LAWSON- HELOU, la Cour d’appel de Lomé a, par Arrêt n°112/09 du 21 juillet 2009 dont pourvoi, confirmé l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Sur la recevabilité du recours Attendu que dans leur mémoire en réponse reçu au greffe de la Cour de céans le 02
août 2010, les sociétés FULLCAT AFRIQUE de l’OUEST et BOKAMION ont soulevé au principal, in limine litis, l’irrecevabilité du recours au motif que la demande de désignation d’un expert de gestion sur le fondement de l’article 159 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, introduite non pas au préalable devant les juridictions nationales mais devant la Cour de céans, est nouvelle d’une part et d’autre part, l’irrecevabilité pour violation des articles 28 et 30 du Règlement de procédure de la Cour de céans et 201, alinéas 2 et 3, 230 à 233 de l’Acte uniforme sus indiqué aux motifs que la société BOKAMION, défenderesse au pourvoi, n’a pas qualité et intérêt à agir en défense devant la Cour de céans en raison de sa dissolution par Jugement n°158/2010 du 22 janvier 2010 ; qu’au surplus, elles ont soulevé la nullité de l’acte de saisine pour violation des articles 224 et 230 de l’Acte uniforme précité prévoyant la fin des pouvoirs des gérants en cas de liquidation assurés désormais par le liquidateur et que la mention du nom de Monsieur Patrice COLLOMB comme représentant légal de la société BOKAMOIN liquidée a entaché la validité du pourvoi entrainant ainsi sa nullité ;
Mais attendu qu’en l’état, l’exception d’irrecevabilité soulevée in limine litis par les
défenderesses au pourvoi sur le caractère nouveau de la demande, ne peut être appréciée au stade actuel de la procédure puisqu’ayant une similitude avec le moyen unique de cassation d’une part et d’autre part, que le jugement dont elles se prévalent n’ayant pas acquis force exécutoire ne peut produire aucun effet ; qu’il s’ensuit de déclarer irrecevables, en l’état, les exceptions soulevées ;
Sur le moyen unique Attendu que les demandeurs au pourvoi reprochent à l’arrêt attaqué d’avoir violé
l’article 159 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique en ce que, les juges du fond n’ont pas fait droit à la demande de désignation d’un expert de gestion, empêchant ainsi les associés minoritaires de faire ouvrir une enquête sur la gestion des sociétés BOKAMION et FULLCAT AFRIQUE de L’OUEST qui sont en mésintelligence alors, selon le moyen, qu’un ou plusieurs associés représentant au moins le cinquième du capital social, peuvent demander au président de la juridiction du siège social, la désignation d’un expert chargé de présenter un rapport sur les opérations de gestion ;
Mais attendu qu’il ressort tant des énonciations de l’arrêt attaqué que de la décision du
premier juge que les demandeurs au pourvoi ont sollicité la nomination d’un administrateur provisoire ayant pour mission de gérer les sociétés BOKAMION et FULLCAT AFRIQUE de L’OUEST conformément à l’Acte uniforme relatif aux sociétés commerciales ; que le moyen unique, fondé sur l’article 159 de l’Acte uniforme suscité régissant les rapports entres associés d’une même société et portant sur l’expertise de gestion est différent de celui exposé devant
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les juges du fond ayant pour objet la nomination d’un administrateur judiciaire ; que ce moyen nouveau, mélangé de fait et de droit, est irrecevable ; qu’il échet de le rejeter ;
Attendu qu’ayant succombé, Monsieur Dénis Daniel François ROZAND et Madame
Latré Kayi Tassito LAWSON-HELOU doivent être condamnés aux dépens ;
PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Déclare irrecevables en l’état, les exceptions d’irrecevabilité soulevées par les sociétés
BOKAMION et FULLCAT AFRIQUE de L’OUEST ; Rejette le pourvoi; Condamne solidairement Monsieur Dénis Daniel François ROZAND et Madame Latré
Kayi Tassito LAWSON-HELOU aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jours, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président Le Greffier