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02/05/2013 | OHADA | N°032/2013

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 02 mai 2013, 032/2013


Il est constant, dans la jurisprudence de la CCJA, que cette dernière reste seule
compétente en application de l’article 14 du Traité relatif à l’OHADA, pour assurer l’interprétation et l’application uniformes du Traité ainsi que des Règlements pris pour son application, des Actes uniformes et des décisions, peu importe que le recours soit également fondé sur des textes nationaux (pourvoi mixte). Les décisions de la CCJA, en application de l’article 16 dudit Traité, s’imposent aussi aux hautes juridictions nationales de l’espace OHADA. En l’espèce, c’est en v

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Il est constant, dans la jurisprudence de la CCJA, que cette dernière reste seule
compétente en application de l’article 14 du Traité relatif à l’OHADA, pour assurer l’interprétation et l’application uniformes du Traité ainsi que des Règlements pris pour son application, des Actes uniformes et des décisions, peu importe que le recours soit également fondé sur des textes nationaux (pourvoi mixte). Les décisions de la CCJA, en application de l’article 16 dudit Traité, s’imposent aussi aux hautes juridictions nationales de l’espace OHADA. En l’espèce, c’est en violation flagrante du traité relatif à l’OHADA que la juridiction nationale de cassation s’est déclarée compétente ; l’arrêt attaqué est nul et non avenu car l’affaire qui y a donné lieu soulève bien des questions relatives à l’application de l’AUPSRVE et que du reste, la juridiction nationale de cassation, pour casser l’arrêt d’appel déféré devant elle, a soulevé d’office un moyen tiré de la violation de l’article 9 dudit Acte uniforme.
Après l’annulation de l’arrêt rendu par une juridiction nationale de cassation en
violation de la compétence de la CCJA, les parties doivent être renvoyées à se conformer aux dispositions de l’article 52.4 du Règlement de procédure de la CCJA.
Les dépens doivent être réservés lorsque l’affaire opposant les parties n’a pas été
tranchée au fond par la CCJA. ARTICLE 13 TRAITÉ OHADA ARTICLE14 TRAITÉ OHADA ARTICLE 18 TRAITÉ OHADA ARTICLE 52.4 RÈGLEMENT DE PROCÉDURE DE LA CCJA
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, 1ère ch., Arrêt n° 032/2013 du 02 mai 2013 ; Pourvoi n° 091/2008/PC du 03 octobre 2008 : Amour John WOFA KYEI c/ ECOBANK BURKINA, Recueil de jurisprudence n° 20, Vol. 1, janvier – décembre 2013, p. 62-65.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 02 mai 2013 où étaient présents :
M. Marcel SEREKOÏSSE SAMBA, Président Mme Flora DALMEIDA MELE, Juge M. Idrissa YAYE, Juge, rapporteur et Maître MONBLE Jean Bosco, Greffier ; Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans sous le n° 091/2008/PC en date
du 03 octobre 2008 et formé par Maître KOHOU LEBAILLY Gisèle, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Monsieur Amour John WOFA KYEI, domicilié à
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Abidjan Cocody II plateaux Vallon, ayant pour Conseil Maître BOTY BILIGOE, Avocat à la Cour, demeurant Boulevard ANGOULVANT, Immeuble CROZET, 3ème étage, 04 B.P. 428 Abidjan 04, dans la cause l’opposant à la Société ECOBANK BURKINA SA, siège social 633 rue MAURICE BISHOP à Ouagadougou BP 145, ayant pour conseils la SCPA « ASSISTANCE-CONSEIL-REPRESENTATION », Avocats à la Cour, sis à l’Appartement 68 de l’Immeuble V de la Cité An III Ouagadougou, rue 56, Avenue de la Liberté, 01 BP 3988 Ouagadougou 01,
en annulation de l’Arrêt n° 007/2008 rendu le 10 janvier 2008 par la Chambre
commerciale de la Cour de cassation du Burkina Faso et dont le dispositif est le suivant : « La cour : En la forme Reçoit le pourvoi ; Au fond Rejette l’exception d’incompétence ; Annule et casse sans renvoi, l’arrêt n°85/05 du 19/08/2005 de la cour d’appel de
Ouagadougou ; Met les dépens à la charge du défendeur. » ; Le requérant invoque à l’appui de son recours le moyen unique d’annulation tel qu’il
figure à la requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de Monsieur Idrissa YAYE, Juge ; Vu les dispositions des articles 13, 14 et 18 du Traité relatif à l’harmonisation du droit
des affaires en Afrique ; Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et
d’Arbitrage de l’OHADA ; Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que suivant Ordonnance
n°555/2004 en date du 27 décembre 2004, le Président du Tribunal de grande instance de Ouagadougou a autorisé monsieur Amour John WOFA KYEI, représentant les Etablissements INCO, à faire signifier à ECOBANK BURKINA une injonction de payer la somme de 64.600.000FCFA en principal sans préjudice des intérêts, honoraires et frais divers ; Que le 12 janvier 2005, ECOBANK a formé opposition contre ladite ordonnance ;
Attendu que par Jugement n°108 en date du 16 mars 2005, le Tribunal de grande
instance de Ouagadougou a débouté la Société ECOBANK BURKINA SA de son opposition comme étant non fondée ; Que le 24 mars 2005, ECOBANK a interjeté appel contre ce jugement ;

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Attendu que par Arrêt n°85/05 en date du 19 août 2005, la Chambre civile et commerciale de la Cour d’appel de Ouagadougou a confirmé ce jugement rendu sur opposition ;
Attendu que le 15 décembre 2005 ECOBANK a saisi le premier Président de la Cour
de cassation du BURKINA FASO d’une requête à fin de sursis à exécution de l’Arrêt n°85/05 contre lequel elle a formé le 18 octobre 2005 un pourvoi en cassation devant la même haute juridiction nationale ;
Attendu que par Ordonnance n°003 du 20 janvier 2006/G.C/C.CASS, le Premier
Président de la Cour de cassation du BURKINA-FASO a ordonné le sursis à exécution de l’Arrêt n°85/2005 ; Que cette ordonnance de référé a, sur recours de Monsieur JOHN WOFA- KYEI AMOUR, été annulée par la Cour de céans par Arrêt n°013/2008 du 27 mars 2008 ;
Attendu que par l’Arrêt n° 007/2008 en date du 10 janvier 2008, objet du présent
recours en annulation, la Chambre commerciale de la Cour de Cassation du BURKINA FASO a, nonobstant l’exception d’incompétence soulevée devant elle par Monsieur Amour John WOFA KYEI, cassé et annulé sans renvoi l’Arrêt n°85/2005 du 19 août 2005 de la Cour d’appel de Ouagadougou ;
Sur l’annulation de l’Arrêt n°007/2008 du 10 janvier 2008 Attendu que le requérant demande à la Cour de céans de déclarer nul et de nul effet
l’Arrêt n° 007/2008 en date du 10 janvier 2008 de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du Burkina Faso sur le fondement des articles 13, 14, 15, 16 et 18 du Traité de l’OHADA au motif que, rejetant l’exception d’incompétence qu’il a soulevée devant elle, ladite Chambre a rendu la décision attaquée prétextant qu’il s’agit en l’espèce d’un recours mixte non prévu par aucune disposition du Traité, d’un Acte uniforme ou d’un Règlement ; Que pour lui, la Cour de cassation devait se déclarer incompétente car il s’agit en l’espèce d’un recouvrement de créances suivant la procédure d’injonction de payer régi par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution et que par conséquent le recours en cassation est de la compétence exclusive de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage conformément aux articles précités ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier notamment de l’arrêt querellé que,
Monsieur Amour John WOFA KYEI a soulevé l’exception d’incompétence de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation du Burkina Faso ; Que celle-ci a rejeté cette exception d’incompétence en motivant son arrêt comme suit :
« Mais attendu que s’il est constant qu’aux termes des dispositions combinées des
articles 13 et 14 du Traité OHADA, seule la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage est compétente en matière de pourvoi en cassation contre les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions des Etats parties, dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des Règlements prévus par le Traité, cette compétence de la CCJA est contenue dans les limites définies à l’article 2 du Traité qui vise les matières harmonisées ou à harmoniser ;
Que dans le cas du pourvoi mixte, où le requérant invoque à la fois dans son acte de
pourvoi, la violation des dispositions d’un Acte uniforme (articles1 et 2 de l’Acte uniforme relatif aux voies d’exécution) et des règles de droit national comme en l’espèce (l’article 597
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du code de procédure civile) ; qu’une telle situation non prévue par aucune disposition du Traité, ni d’un Acte uniforme ou d’un Règlement, les articles 13 et 14 invoqués ne peuvent trouver une application ;
Que dans ce cas, la Cour de cassation recouvre toute sa plénitude de compétence pour
trancher le litige. Qu’ainsi l’exception d’incompétence soulevée est à rejeter. » ; Attendu qu’aux termes de l’article 18 du Traité susvisé : « Toute partie qui, après avoir
soulevé l’incompétence d’une juridiction nationale statuant en cassation estime que cette juridiction a, dans un litige la concernant, méconnu la compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, peut saisir cette dernière dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision contestée ;
La cour se prononce sur sa compétence par arrêt qu’elle notifie tant aux parties qu’à la
juridiction en cause. Si la Cour décide que cette juridiction s’est déclarée compétente à tort, la décision rendue par cette juridiction est réputée nulle et non avenue. » ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que, l’affaire ayant donné
lieu à l’Arrêt n° 007/2008 en date du 10 janvier 2008 de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du Burkina Faso soulève bien des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; Que du reste, la Cour de cassation du Burkina-Faso pour casser l’arrêt de la Cour d’appel de Ouagadougou déféré devant elle, a soulevé d’office un moyen tiré de la violation de l’article 9 dudit Acte uniforme ;
Attendu au demeurant que la Cour de céans a déjà tranché à travers sa jurisprudence
constante (Arrêt n°031/2004 du 04 novembre 2004 et n°055/2005 du 15 décembre 2005), qu’elle reste seule compétente en application de l’article 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique pour assurer l’interprétation et l’application uniformes du Traité ainsi que des Règlements pris pour son application, des Actes uniformes et des décisions, et ses décisions en application de l’article 16 dudit Traité s’impose aussi aux hautes juridictions nationales de l’espace OHADA ;
Attendu qu’il résulte de tout ce qui précède que l’affaire ayant donné lieu à l’Arrêt n°
007/2008 en date du 10 janvier 2008 soulève sans conteste des questions relatives à l’application et à l’interprétation d’un Acte uniforme ; Que la Chambre commerciale de la Cour de cassation du Burkina Faso s’étant déclarée compétente à tort, en l’espèce en violation flagrante du Traité susvisé, sa décision est réputée nulle et non avenue en application des dispositions de l’article 18 in fine dudit Traité ;
Attendu que Monsieur Amour John WOFA KYEI demande à la Cour de céans après
avoir cassé et annulé l’arrêt entrepris, de condamner la Société ECOBANK-Burkina SA à lui payer la somme de 64.600.000FCFA et ce, sous astreinte comminatoire de 5.000.000FCFA par jour de retard à compter de la date de signification de l’Arrêt n°013/2008 du 20 avril 2008 ;
Mais attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 52.4 du Règlement de
procédure de la Cour de céans : « Si la cour décide que la juridiction nationale s’est déclarée compétente à tort, la décision rendue par cette juridiction est réputée nulle et non avenue.
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Toute partie devant ladite juridiction peut dans les deux mois de la signification du jugement de la Cour saisir cette dernière d’un recours en cassation contre la décision du juge du fond dans les conditions prévues à l’article 14 du Traité et aux articles 23 à 50 du présent Règlement. » ; Qu’il échet en conséquence de renvoyer les parties à s’y conformer ;
Sur les dépens Attendu que l’affaire opposant les parties n’ayant pas été tranchée au fond par la Cour
de céans, il y a lieu de réserver les dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement après en avoir délibéré ; Dit que la Chambre commerciale de la Cour de cassation du Burkina Faso s’est
déclarée compétente à tort pour examiner le pourvoi en cassation formé par ECOBANK BURKINA SA ;
Déclare en conséquence nul et non avenu l’Arrêt n°007 du 10 janvier 2008 rendu par
la Chambre commerciale de la Cour de cassation du Burkina Faso ; Dit qu’il n’y a pas lieu à évocation en l’état et renvoie les parties à se conformer aux
dispositions de l’article 52.4 du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Réserve les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président Le Greffier


Synthèse
Numéro d'arrêt : 032/2013
Date de la décision : 02/05/2013

Analyses

COMPÉTENCE DE LA CCJA : POURVOIS MIXTES - COMPÉTENCE EXCLUSIVE DE LA CCJA - NULLITÉ DE TOUTE DÉCISION RENDUE PAR UNE JURIDICTION SUPRÊME NATIONALE RENDUE EN VIOLATION DE LA COMPÉTENCE DE LA CCJA - OBLIGATION DE SAISIR LA CCJA D'UN NOUVEAU POURVOI APRÈS L'ANNULATION


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2013-05-02;032.2013 ?
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