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07/06/2012 | OHADA | N°051/2012

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 07 juin 2012, 051/2012


Le Traité OHADA donne à la CCJA compétence pour statuer dès lors que le litige soulève des questions relatives à l’application des Actes uniformes ou des règlements prévus au Traité. Ainsi, la CCJA est compétente pour connaître d’un recours portant sur l’injonction de payer, quand bien même à côté des moyens de cassation ayant trait à l’AUPSRVE, d’autres moyens soulevés portent sur le droit interne (pourvois mixtes).
Doit être considérée comme faite à la personne de la débitrice, s’agissant d’une personne morale, la signification d’une ordonnance d’i

njonction de payer faite à la secrétaire assistante de son représentant légal qui a reçu e...

Le Traité OHADA donne à la CCJA compétence pour statuer dès lors que le litige soulève des questions relatives à l’application des Actes uniformes ou des règlements prévus au Traité. Ainsi, la CCJA est compétente pour connaître d’un recours portant sur l’injonction de payer, quand bien même à côté des moyens de cassation ayant trait à l’AUPSRVE, d’autres moyens soulevés portent sur le droit interne (pourvois mixtes).
Doit être considérée comme faite à la personne de la débitrice, s’agissant d’une personne morale, la signification d’une ordonnance d’injonction de payer faite à la secrétaire assistante de son représentant légal qui a reçu et déchargé l’acte en déclinant son identité. Ainsi, la date à prendre en considération comme point de départ du délai de quinze jours pour former opposition est celle ladite signification. Dès lors, l’opposition intervenue 45 jours après la signification sous prétexte qu’elle n’a pas été faite à personne est irrecevable comme tardive.
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage C.C.J.A, arrêt n° 051/2012 du 07 juin 2012 Affaire : Gérard POULALION S.A (Conseil : Maître Ariette NGOULLA FOTSO, Avocat à la Cour) contre JUTRANS SARL(Conseil : Maître KAMAKO Martin, Avocat à la Cour). Recueil de jurisprudence de la CCJA n° 18, Janvier - Juin 2012, p. 105.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Deuxième chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 07 juin 2012 où étaient présents :
Messieurs :
Maïnassara MAÏDAGI, Président, rapporteur Namuano Francisco DIAS GOMES, Juge Madame Flora DALMEIDA MELE, Juge Et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 27 avril 2009 sous le n°041/2009/PC et formé par Maître Ariette NGOULLA FOSTO, Avocat à la Cour, BP 4389 Douala, 111, rue du Tribunal, cabinet sis immeuble ancien Centre Culturel Français, Douala- Bonanjo, agissant au nom et pour le compte de la Société Gérard POULALION, dont le siège social est à DARVAUT, Route MONTEREAU, 77 140 DARVAUT, agissant poursuites et
diligences de ses représentants légaux, dans la cause l’opposant à la Société JUTRANS SARL, dont le siège social est à Douala, BP 638 Douala et ayant pour conseil Maître KAMAKO Martin, Avocat à la Cour, BP 2643 Douala,
En cassation de l’Arrêt n°004/C rendu le 18 janvier 2008 par la Cour d’appel du Littoral et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale en appel et en dernier ressort ;
EN LA FORME :
Reçoit les appels ;
AU FOND :
Infirme le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau, dit la société Gérard POULALION non fondée en son action et l’en déboute ;
Condamne la société Gérard POULALION aux dépens distraits au profit de Me KAMAKO, Avocat aux offres de droit. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les trois moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Premier Vice-Président Maïnassara MAÏDAGI ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que la société Gérard POULALION, estimant être créancière de la Société JUTRANS SARL a saisi et obtenu du Président du Tribunal du Wouri à Douala l’Ordonnance n°216/03-04 enjoignant à la Société JUTRANS SARL de lui payer la somme de 11.500.000 F CFA en principal et celle de 1.500.000 en frais de procédure et accessoires ; que cette ordonnance a été signifiée à la Société JUTRANS SARL par exploit d’huissier de justice en date du 26 avril 2004 ; que le 28 mai 2004, la Société Gérard POULALION a obtenu du greffe du Tribunal de première instance du Wouri un certificat de non opposition ; que le 10 juin 2004 la société JUTRANS SARL a formé opposition et par Jugement n°707/CIV du 16 juin 2006, le Tribunal de grande instance du Wouri a déclaré irrecevable ladite opposition pour forclusion ; que sur appel de la Société JUTRANS SARL, la Cour d’appel du Littoral a rendu le 18 janvier 2008 l’Arrêt n°004/C dont pourvoi ;
Sur la compétence de la Cour de céans
Vu l’article 14 alinéas 3 et 4 du Traité institutif de l’OHADA ;
Attendu que la Société JUTRANS SARL, défenderesse au pourvoi, demande à la Cour de céans de se déclarer incompétente à connaître du présent pourvoi au motif que la demanderesse au pourvoi a retenu trois moyens de cassation qui sont un mélange tant des prétendues violations de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution que des questions relevant du droit interne camerounais et que les dispositions des articles 14 du Traité institutif de l’OHADA et 28 du Règlement de procédure de la présente Cour ne donnent pas l’occasion à la partie demanderesse au pourvoi d’associer ces questions à d’autres relevant d’une autre compétence ;
Attendu qu’aux termes de l’article 14 alinéas 3 et 4 du Traité susvisé, « saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des règlements prévus au présent traité à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats Parties dans les mêmes contentieux » ;
Attendu que l’affaire objet du présent pourvoi est relative à une procédure d’injonction de payer introduite devant le Président du Tribunal du Wouri à Douala, laquelle procédure est régie par les articles 1er à 18 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; qu’il s’ensuit que le présent recours relève de la compétence de la Cour de céans bien que la demanderesse au pourvoi ait soulevé des moyens de cassation portant à la fois sur les dispositions tant du droit OHADA que du droit interne camerounais ; qu’il y a donc lieu de rejeter l’exception d’incompétence soulevée par la Société JUTRANS SARL ;
Sur le premier moyen
Vu l’article 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 10 de l’Acte uniforme susvisé en ce que ledit arrêt a fait une mauvaise application dudit article en recevant l’opposition tardive de la société JUSTRANS alors que l’Ordonnance d’injonction de payer n°216/03-04 rendue le 14 avril 2004, a été signifiée le 24 avril 2004 par exploit d’huissier de justice à la société JUTRANS et que cette dernière avait l’obligation de former opposition devant la juridiction compétente avant le 13 mai 2004 ; que toute opposition faite après ce délai ne saurait être recevable ;
Attendu qu’aux termes de l’article 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « l’opposition doit être formée dans les quinze jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer. Le délai est augmenté, éventuellement, des délais de distance.
Toutefois, si le débiteur n’a pas reçu personnellement la signification de la décision portant injonction de payer, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration du délai de quinze
jours suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens du débiteur. » ;
Attendu que s’agissant d’une société, personne morale, doit être considérée comme signification à personne, celle qui est faite à son représentant légal, à un fondé de pouvoir ou à toute personne habilitée à cet effet ; qu’en l’espèce, il ressort de l’exploit de signification en date du 26 avril 2004 que c’est « Melle NGOUAMBE KOUAKAM Béatrice, Secrétaire Assistante » qui a reçu copie de l’exploit de signification ainsi que « l’expédition de l’ordonnance d’injonction de payer n°216/03 -04 rendue le 14 avril 2004 par le Président du Tribunal de grande Instance du Wouri au bas d’une requête datée du 22 mars 2004 », a signé sur l’exploit de signification et apposé le cachet de la Société JUTRANS SARL BP 15790 Douala ; que Mademoiselle NGOUAMBE KOUAKAM Béatrice doit être considérée comme une personne habilitée à recevoir l’exploit de signification au nom de la Société JUTRANS SARL ; qu’il y a lieu, en conséquence de relever que la signification de l’Ordonnance d’injonction de payer n°216/03-04 du 14 avril 2004 a été faite personnellement à la Société JUTRANS SARL et que le point de départ du délai de quinze jours pour former opposition doit courir à compter du 26 avril 2004 ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel du Littoral à Douala a violé, par mauvaise application, les dispositions susénoncées de l’article 10 de l’Acte uniforme susvisé ; qu’il y a lieu, en conséquence, de casser l’arrêt attaqué et d’évoquer sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
Sur l’évocation
Attendu que par requête en date du 12 juillet 2006 adressée à Monsieur le Président de la Cour d’appel du Littoral à Douala et enregistrée le 13 juillet 2006 au greffe de ladite Cour sous le N°1104, la société JUTRANS SARL a interjeté appel du Jugement civil n°707 rendu le 16 juin 2006 par le Tribunal de grande instance du Wouri dont le dispositif est ainsi conçu :
« Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en matière civile et commerciale et en premier ressort ;
Constate qu’une ordonnance d’injonction de payer n°316/03-04 rendue le 14 avril 2004 par le Président du Tribunal de grande instance du Wouri a été signifiée à la Société JUTRANS SARL le 26 avril 2004 ;
Qu’opposition contre ladite ordonnance a été formée le 10 juin 2004, soit 45 jours après la date de la signification ;
Déclare en conséquence irrecevable pour cause de forclusions l’assignation en opposition à injonction de payer introduite par la Société JUTRANS ;
Condamne la société JUTRANS SARL à payer à la SA Gérard POULALION les sommes suivantes ventilées sur l’ordonnance d’injonction de payer querellée ;
En principal : 11.500.000 F CFA Frais de procédure : 1.500.000 F CFA
Soit au total 13.000.000 F CFA (Treize millions de francs CFA) ;
Déboute JUTRANS SARL de sa demande reconventionnelle ;
Condamne JUTRANS SARL aux dépens distraits au profit de Maître NGOULLA FOTSO, Avocat aux offres de droit. » ;
Attendu qu’à l’appui de son appel, la Société JUTRANS SARL soutient que pour faire échec à l’opposition formulée par elle, le premier juge a soulevé la forclusion de son action, violant par cette occasion les dispositions de l’article 10 alinéa 2 de l’Acte uniforme OHADA n°6 alors qu’il est démontré que la prétendue signification a été faite à une personne inconnue d’elle ; que par ailleurs, c’est au greffe de la juridiction d’instance qu’elle a découvert l’ordonnance incriminée ; que par conséquent les dispositions de l’article 10 alinéa 2 susindiqué s’appliquent au cas d’espèce ; que le premier juge les ayant ignorées, sa décision mérite en conséquence annulation ; que la décision d’irrecevabilité supposant ignorer les arguments de fond soulevés à savoir les violations des dispositions des articles 1, 2 et 8 de l’Acte uniforme susindiqué, il y a lieu de rappeler que le recouvrement d’une créance par le biais de la procédure d’injonction de payer fait obligation au créancier de disposer d’une créance certaine, liquide et exigible, que ladite créance ait une origine contractuelle et enfin que l’exploit de signification de l’ordonnance d’injonction de payer doit contenir, entre autres, les sommes précises pour lesquelles réclamation est faite ;
Attendu que l’appelante a formé une demande reconventionnelle et, en application de l’article 14 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, sollicite la condamnation de l’intimée au paiement de la somme de vingt et un millions trois cent soixante dix mille quatre cent soixante onze (21.370.471 ) F CFA résultant du préjudice subi par elle du fait de la livraison par la société Gérard POULAIN de marchandises hors d’usage dont la dernière illustration est matérialisée par deux camions d’occasion livrés dans un état de délabrement total, état constaté par exploit d’huissier ;
Attendu que la société Gérard POULALION, intimée, sollicite de la Cour :
En la forme
Dire ce qu’il appartiendra sur la recevabilité de l’appel ;
Au fond
Constater que l’ordonnance d’injonction de payer n°216/03-04 en date du 14 avril 2004 a été signifiée à la société JUTRANS par exploit d’huissier du Ministère de Maître BALENG MAAH et date du 26 avril 2004 ;
Constater que ladite société a formé opposition le 10 juin 2004 soit 45 jours après la signification ;
Constater que l’opposition est faite hors délai ;
Dire que le juge d’instance a rendu une bonne et saine décision ;
En conséquence
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement n°707 rendu le 16 juin 2006 par le Tribunal de grande instance du Wouri ;
Condamner l’appelante aux dépens distraits au profit de Maître Ariette NGOULLA FOTSO, Avocat aux offres de droit ;
Sur la recevabilité de l’opposition formée par la Société JUTRANS SARL Attendu que pour les mêmes motifs que ceux pour lesquels l’arrêt attaqué a été cassé, il y a lieu de déclarer que l’opposition faite le 10 juin 2004 par la société JUTRANS SARL, à la suite d’une signification de l’Ordonnance d’injonction de payer en date du 26 avril 2004, est faite hors délai et qu’il s’ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions ;
Sur la demande reconventionnelle de la société JUTRANS SARL Attendu que l’opposition formée par la société JUTRANS SARL ayant été déclarée hors délai, il y a lieu de dire et juger que sa demande reconventionnelle est également irrecevable ;
Attendu que la société JUTRANS SARL ayant succombé, il échet de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Casse l’Arrêt n°004/C rendu le 18 janvier 2008 par la Cour d’appel du Littoral à Douala ; Evoquant et statuant sur le fond,
Dit que l’exploit de signification en date du 10 juin 2004 de l’Ordonnance d’injonction de payer a été délivré personnellement à la Société JUTRANS SARL ;
Déclare l’opposition formée contre ladite ordonnance le 26 avril 2004 hors délai et, en conséquence, irrecevable ;
Déclare irrecevable la demande reconventionnelle formée par la société JUTRANS SARL ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne la société JUTRANS SARL aux dépens.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 051/2012
Date de la décision : 07/06/2012

Analyses

COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D'ARBITRAGE - LITIGE METTANT EN CAUSE DES RÈGLES DE L'AUPSRVE ET DE DROIT INTERNE - POURVOI MIXTE - COMPÉTENCE DE LA CCJA INJONCTION DE PAYER - ORDONNANCE SIGNIFIÉE À LA SECRÉTAIRE ASSISTANTE DE LA REPRÉSENTANTE D'UNE PERSONNE MORALE - DÉLAI DE QUINZE JOURS POUR FORMER OPPOSITION À L'ORDONNANCE - OPPOSITION FORMÉE PLUS DE QUINZE JOURS APRÈS LA SIGNIFICATION - OPPOSITION TARDIVE


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2012-06-07;051.2012 ?
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