Les jugements rendus en audience éventuelle ne sont susceptibles d’appel que dans les conditions limitativement énumérées par l’article 300 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution. Par conséquent, doit être déclaré irrecevable tout appel qui n’est pas conforme aux exigences de ce texte.
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage C.C.J.A, ARRET N° 014/2012 du 08 mars 2012, Affaire : SOUMALEZ Angèle Marguerite épouse LAUBHOUET Vally Gilles (Conseil : Maître BLESSY Jean Chrysostome, Avocat à la Cour) Contre Banque Internationale pour le Commerce et l’industrie de la Côte d’Ivoire dite BICICI SA (Conseils : SCPA DOGUE Abbé YAO & Associés, Avocats à la Cour)
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Première Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 08 mars 2012 où étaient présents :
Messieurs :
Antoine Joachim OLIVEIRA, Président Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge Marcel SEREKOÏSSE SAMBA, Juge, rapporteur Et Maître MONBLE Jean Bosco, Greffier ;
Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, devant la Cour de céans de l’affaire SOUMALEZ Angèle Marguerite épouse LAUBHOUET contre la Banque Internationale pour le Commerce et l’industrie de la Côte d’Ivoire dite BICICI-SA par Arrêt n° 245/09 du 09 avril 2009 de la Chambre judiciaire de la Cour Suprême de Côte d’Ivoire, saisie d’un pourvoi formé le 16 juillet 2008 par Maître BLESSY Jean Chrysostome, Avocat à la Cour, demeurant à Abidjan Biétry, Rue des Majorettes, Résidence Bimbois, 1er étage à gauche, Appartement A3, 22 B.P. 1241 Abidjan 22, agissant au nom et pour le compte de Dame SOUMALEZ Angèle Marguerite épouse LAUBHOUET contre l’Arrêt n°407 rendu le 20 mai 2008 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est ainsi énoncé :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
Déclare irrecevable l’appel relevé par madame SOUMALEZ épouse LAUBHOUET du Jugement n° 2345 rendu le 26 novembre 2007 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan ;
La condamne aux dépens ... » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi un moyen unique de cassation tel qu’il figure à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Marcel SEREKOÏSSE-SAMBA ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu que la Banque Internationale pour le Commerce et l’industrie de la Côte d’Ivoire (BICICI) avait consenti des crédits à la Société INTERTRANSIT, bénéficiant pour la garantie de sa créance de la caution solidaire de divers administrateurs de la société, notamment Messieurs Gilles LAUBHOUET, Francis DESCLERCS, KONATE Lassina et AMAN KADIO Frédéric ; que les débiteurs n’ayant pas honoré leurs engagements, la BICICI a obtenu dans un premier temps le 25 septembre 1992 une Ordonnance de la juridiction présidentielle du Tribunal d’Abidjan lui permettant de prendre une inscription d’hypothèque conservatoire sur les Titres Fonciers n° 20.376 et 39.332 de la Circonscription foncière de Bingerville appartenant respectivement à Francis DESCLERS et Gilles LAUBHOUET et son épouse née SOUMALEZ.
Que sur opposition des débiteurs, le Tribunal de Première Instance d’Abidjan, par jugement n°18/Civl du 05 mars 1998, a condamné les débiteurs susnommés à payer à la BICICI la somme de 742.454.243 FCFA et a ordonné l’inscription définitive d’hypothèque sur les titres fonciers n° 28.376, 39.332 et 27.266 de la Circonscription Foncière de Bingerville ; que sur appel, la Cour d’Appel d’Abidjan, par arrêt n°888 du 23 juillet 1999 a confirmé en toutes ses dispositions le jugement sus évoqué ;
Attendu qu’en exécution de cet arrêt, la BICICI a fait délivrer en date des 16 et 17 Août 2006 aux époux LAUBHOUET un commandement aux fins de saisie de leur immeuble objet du titre foncier n°39.332 pour obtenir paiement de la somme 749.935.560 FCFA en principal, intérêts et frais ; que du fait de l’inaction des époux LAUBHOUET, la BICICI a fait transcrire le commandement à la conservation foncière par acte n° 84/07 du 01er octobre 2007 et a déposé au greffe du Tribunal un cahier de charges qu’elle a rédigé, contenant les conditions et modalités de vente de l’immeuble saisi ; que deux jours plus tard (Ie 03 octobre), la BICICI, tout en saisissant le Tribunal en instance de validité, a fait délivrer par exploit d’huissier aux époux LAUBHOUET, parlant à la personne de dame SOUMALEZ épouse LAUBHOUET qui a refusé de signer la décharge, « une sommation de prendre communication du cahier des charges et d’y insérer leurs dires et observations pour l’audience éventuelle forcée du 12 novembre 2007, l’audience des criées devant avoir lieu le 17 décembre 2007 » ;
Que pour des raisons de force majeure, l’audience éventuelle forcée a été retenue le 26 novembre 2007 à laquelle le Tribunal de Première Instance d’Abidjan a pris la décision n°2345 ainsi libellée :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort ;
Constate que toutes les formalités légales requises pour parvenir à la vente de l’immeuble saisi sur les époux LAUBHOUET Vally ont été régulièrement accomplies ;
En donne acte à la BICICI, créancière poursuivante ;
Valide en conséquence le commandement aux fins de saisie en date des 13 et 17 Août 2007 ;
Renvoie la cause et les parties à l’audience des criées fixée au 14 janvier 2008 ;
Réserve les dépens ... » ;
Attendu que sur appel de dame SOUMALEZ épouse LAUBHOUET, la Cour d’Appel d’Abidjan a rendu l’arrêt sus énoncé, objet du présent pourvoi devant la Cour de céans ;
Attendu que le 16 juillet 2008, dame SOUMALEZ épouse LAUBHOUET s’est pourvue en cassation devant la Chambre judiciaire de la Cour Suprême de la Côte d’Ivoire qui, par arrêt n° 245/09 du 09 avril 2009 ;
« Se dessaisit du dossier de la procédure de pourvoi en cassation ;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA compétente ;
Dit que l’ensemble du dossier ainsi qu’une copie du présent arrêt de renvoi seront transmis à ladite Cour ;
- Laisse les dépens à la charge du Trésor Public ;
Ordonne la transcription du présent arrêt sur les registres du greffe de la Cour d’Appel d’Abidjan ainsi que sur la minute de l’arrêt entrepris
Vu les articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de la loi, notamment de l’article 300 de l’Acte uniforme portant organisation des voies d’exécution ou erreur dans l’application ou interprétation de ce texte ;
Attendu que la requérante fait grief à l’arrêt de la Cour d’Appel d’Abidjan qui, « pour déclarer irrecevable son appel, a décidé que le fondement de son appel ne figurait pas parmi les conditions énumérées par l’article 300 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution (AUPSRVE) », alors qu’aux termes de l’article 300 de l’Acte uniforme précité, les décisions judiciaires rendues en matière de saisie immobilière « ne peuvent être frappées d’appel que lorsqu’elles statuent sur le principe même de la créance ou sur des moyens de fond tirés de l’incapacité d’une des parties, de la propriété, de l’insaisissabilité ou de l’inaliénabilité des biens saisis » ;
Attendu que devant la Cour d’Appel, les époux LAUBHOUET reconnaissent que « leur appel ne repose pas sur l’un des cas d’ouverture limitativement énumérés par la loi parce que n’ayant pas eu connaissance de la procédure, ils n’ont pas pu faire valoir leurs
moyens de défense devant le Tribunal et que leur appel ne pouvait donc reposer sur les moyens prévus à l’article 300 de l’Acte uniforme relatif aux voies d’exécution » ;
Attendu en effet qu’en l’espèce, les époux LAUBHOUET ne contestent pas le principe de la créance de la BICICI ; qu’ils ne font pas état de leur quelconque incapacité ; que leur qualité de propriétaire sur l’immeuble saisi n’est mise en cause, et qu’aucune preuve n’est rapportée de l’insaisissabilité ou de l’inaliénabilité de cet immeuble ; qu’ainsi leur recours ne rentre dans aucun des cas limitativement énumérés par l’article 300 de l’Acte uniforme relatif aux voies d’exécution ; que partant, la Cour d’Appel d’Abidjan a fait une saine application de l’article 300 sus énoncé et leur pourvoi doit être rejeté comme non fondé, sans qu’il soit nécessaire de considérer les autres aspects du moyen ;
Attendu que Dame SOUMALEZ épouse LAUBHOUET ayant succombé, elle doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
En la forme
Déclare recevable le recours introduit par Dame SOUMALEZ épouse LAUBHOUET ;
Au fond
Le déclare non fondé et le rejette ;
Condamne la requérante aux dépens.