La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2011 | OHADA | N°031/2011

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 06 décembre 2011, 031/2011


� En l’absence dans le dossier, d’une demande de régularisation prévue à l’article 28-5 du Règlement de Procédure restée sans suite, l’omission de la mention « certifiée conforme » sur les copies des pièces produites par une partie ne peut à elle seule, justifier l’irrecevabilité du recours et ce, d’autant plus que les pièces dont s’agit ont été déposées, communiquées et discutées contradictoirement, aussi bien en instance qu’en appel, sans être contestées tant dans leur forme que dans leur substance, et il n’est dénoncé aucune fraude derrière cette

omission.
L’argument suivant lequel le mandat de représentation de la STEL n’a pas été dél...

� En l’absence dans le dossier, d’une demande de régularisation prévue à l’article 28-5 du Règlement de Procédure restée sans suite, l’omission de la mention « certifiée conforme » sur les copies des pièces produites par une partie ne peut à elle seule, justifier l’irrecevabilité du recours et ce, d’autant plus que les pièces dont s’agit ont été déposées, communiquées et discutées contradictoirement, aussi bien en instance qu’en appel, sans être contestées tant dans leur forme que dans leur substance, et il n’est dénoncé aucune fraude derrière cette omission.
L’argument suivant lequel le mandat de représentation de la STEL n’a pas été délivré par une personne habilitée à la représenter, conformément à l’article 28-4 du Règlement susvisé, n’est pas fondé, dans la mesure où il ressort des pièces du dossier que, le signataire dudit mandat, a dûment été habilité à cet effet par le représentant légal de STEL.
Enfin, il ne saurait être reproché à une partie à une procédure devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, d’avoir produit des pièces en anglais, dès lors que depuis l’adoption du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique, le 17 octobre 2008 à Québec, l’article 42 a été modifié et l’anglais est, au même titre que le français, l’espagnol et le portugais, une langue de travail de l’OHADA. Il y a lieu en conséquence, de rejeter ces exceptions et de déclarer le recours recevable.
� Aux termes des dispositions combinées des articles 12 et 14 de l’Acte uniforme susvisé, le juge saisi de l’opposition à injonction de payer connaît de l’entièreté du litige et rend, en cas d’échec de la tentative de conciliation des parties, une décision qui se substitue à l’ordonnance d’injonction de payer, en examinant tous les aspects du litige et, sans méconnaître les caractères de certitude, de liquidité et d’exigibilité de la créance, peut en arrêter le montant au regard des pièces et des textes applicables. En conséquence, en fondant sa décision de réformation sur une différence du montant de la créance retenu dans l’ordonnance d’injonction de payer et dans le jugement d’instance, l’arrêt incriminé a violé les textes suscités ; il échet en conséquence, de casser l’arrêt sus référencé.
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.), Arrêt n° 031/2011 du 06 décembre 2011, Audience publique du 06 décembre 2011, Pourvoi n° 106/2009/PC du 29/10/2009, Affaire : SOCIETE TRIGON ENERGY LTD (Conseils : SCPA Jurifis Consult, Avocats à la Cour) contre BANQUE COMMERCIALE DU SAHEL (BCS SA) (Conseils : SCPA Ex aequo Droit Mali, Avocats à la Cour). – Recueil de Jurisprudence n° 17 (Juillet – Décembre 2011), p. 133. Juris Ohada, 2011, n° 4, octobre-décembre, n° 4, p. 28.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Troisième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant, en son audience publique du 06 décembre 2011, où étaient présents :
Messieurs Ndongo FALL, Président, rapporteur, Abdoulaye Issoufi TOURE, Juge, Victoriano OBIANG ABOGO, Juge,
Et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans, le 29 octobre 2009 sous le n° 106/2009/PC et formé par la SCPA Jurifis Consult, Avocats à la Cour, au nom et pour le compte de la Société TRIGON ENERGY Ltd, ayant son siège social à Africa Ind., Bldg Valco Rd, Heavy Ind. Area, PMB Comm, I Tema (République du Ghana), représentée par son directeur général, dans la cause sus référencée,
en cassation de l’Arrêt n° 49 rendu le 08 juillet 2009 par la Cour d’Appel de Bamako (Mali), et dont le dispositif est le suivant :
« La Cour statuant publiquement, contradictoirement, ... en matière commerciale et en dernier ressort :
En la forme :
- Reçoit les appels ... ;
- Annule l’Ordonnance d’injonction de payer n° 321/07 en date du 15 novembre 2007 du Président du Tribunal du Commerce de Bamako ;
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes ... » ;
La requérante invoque à l’appui dudit pourvoi, deux moyens tels qu’ils figurent dans sa requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Ndongo FALL :
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que, dans le cadre de leurs relations d’affaires, la Société NDIAYE et Frères SA (en abrégé SNF) a, par lettre en date du 18 décembre 2006, sollicité de la Banque Commerciale du Sahel (BCS SA), au profit de la Société TRIGON ENERGY LTD (en abrégé STEL), l’ouverture d’un crédit documentaire pour l’achat de 1.089.116 MT de gasoil d’un coût total de 665.450,00 dollars US ;
Qu’après la mise en place dudit crédit, la STEL a, comme convenu, livré à la SNF, qui l’a régulièrement réceptionnée, la totalité du produit commandé et a présenté pour paiement à la BCS, la facture accompagnée des documents afférents au crédit documentaire ;
Qu’en dépit de la demande expresse de la SNF, faite par lettre du 31 mai 2007, d’effectuer le paiement en faveur de la STEL, la BCS a estimé ne pas devoir payer, motif pris de ce que certains documents n’étaient pas conformes ;
Que pour vaincre ce refus de la BCS, la STEL a sollicité et obtenu, le 15 novembre 2007, l’ordonnance d’injonction de payer les sommes de 344.394.690 FCFA en principal et de 57.990.689 FCFA à titre de frais et accessoires ;
Que sur opposition de la BCS à ladite ordonnance, le Tribunal de Commerce de Bamako a rendu, le 30 juillet 2008, le Jugement n° 403 dont le dispositif suit : « ... En la forme : reçoit l’opposition ; Au fond : dit que l’ordonnance d’injonction de payer de céans sortira ses plein et entier effets pour la somme de FCFA 306.327.700 .... » ;
Que la BCS a relevé appel de cette décision et appelé en intervention forcée, la SNF devant la Cour d’Appel, qui a rendu l’arrêt attaqué par la STEL, et dont le dispositif est ci-dessus énoncé ;
Sur la recevabilité du recours
Attendu que la BCS soulève l’irrecevabilité du recours de STEL, en ce que les pièces annexes au recours de la STEL qui lui a été notifié, ne comportent ni la mention « certifiée conforme », comme prescrit à l’article 27 alinéa 1er du Règlement de Procédure de la Cour, ni la preuve que le mandat donné à l’avocat de la STEL a été régulièrement établi par un représentant qualifié de celle-ci, comme l’exige l’article 28 alinéa 4, et en ce que des documents, notamment des statuts de société, sont établis en langue anglaise et que, non traduits en français, sont inexploitables pour elle ;
Mais, attendu d’une part, qu’en l’absence dans le dossier, d’une demande de régularisation prévue à l’article 28-5 du Règlement de Procédure restée sans suite, l’omission de la mention « certifiée conforme » sur les copies des pièces produites par une partie ne peut à elle seule, justifier l’irrecevabilité du recours et ce, d’autant plus que les pièces dont s’agit ont été déposées, communiquées et discutées contradictoirement, aussi bien en instance qu’en appel, sans être contestées tant dans leur forme que dans leur substance, et qu’il n’est dénoncé aucune fraude derrière cette omission ;
Que l’argument suivant lequel le mandat de représentation de la STEL n’a pas été délivré par une personne habilitée à la représenter, conformément à l’article 28-4 du Règlement susvisé, n’est pas fondé, dans la mesure où il ressort des pièces du dossier que, le signataire dudit mandat, Stéphanie DIAKITE, a dûment été habilité à cet effet par le représentant légal de STEL ;
Qu’enfin, il ne saurait être reproché à une partie à une procédure devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, d’avoir produit des pièces en anglais, dès lors que depuis l’adoption du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique, le 17 octobre 2008 à Québec, l’article 42 a été modifié et l’anglais est, au même titre que le français, l’espagnol et le portugais, une langue de travail de l’OHADA ;
Attendu qu’il y a lieu en conséquence, de rejeter ces exceptions et de déclarer le recours de la STEL, qui a été introduit dans les forme et délai prévus, recevable ;
Sur le second moyen du recours
Attendu que la STEL fait notamment grief à l’arrêt, dont pourvoi, d’avoir méconnu les dispositions des articles 12 et 14 de l’Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution, en se fondant sur la différence existant entre le montant mentionné dans l’ordonnance d’injonction de payer et celui retenu dans le jugement rendu sur opposition, en relevant qu’il est passé de 344.394.690 FCFA « avec intérêt au taux légal majoré » à 306.327.700 FCFA dans le jugement sur opposition, sans que ne soit précisé ni « le pourcentage appliqué, ni la période de référence », pour en conclure que la créance ne répond pas aux critères exigés par l’Acte uniforme susvisé, alors qu’en allouant la somme de 306.327.700 FCFA, le juge d’instance indique expressément dans ses motifs, qu’il a appliqué au montant du crédit documentaire, qui est de 658.506,39 dollars US, un taux de change du dollar US estimé à 450 FCFA, ce qui permet d’avoir 296.327.700 FCFA en principal, auquel il a souverainement ajouté le montant des frais, avant de débouter la STEL de ses autres prétentions, « notamment 1es intérêts légaux, les intérêts majorés, les pénalités de retard » non prouvés ;
Attendu qu’aux termes des dispositions combinées des articles 12 et 14 de l’Acte uniforme susvisé, « la juridiction saisie sur opposition procède à une tentative de conciliation ... [et] statue immédiatement sur la demande en recouvrement, même en l’absence du débiteur ayant formé opposition, par une décision qui aura les effets d’une décision contradictoire [et qui] ... se substitue à la décision portant injonction de payer » ;
Qu’ainsi, le juge saisi de l’opposition à injonction de payer connaît de l’entièreté du litige et rend, en cas d’échec de la tentative de conciliation des parties, une décision qui se substitue à l’ordonnance d’injonction de payer, en examinant tous les aspects du litige et sans méconnaître les caractères de certitude, de liquidité et d’exigibilité de la créance, peut en arrêter le montant au regard des pièces et des textes applicables ;
Qu’en conséquence, en fondant sa décision de réformation sur une différence du montant de la créance retenu dans l’ordonnance d’injonction de payer et dans le jugement d’instance, l’arrêt incriminé a violé les textes suscités ;
Attendu qu’il échet en conséquence, sans qu’il y ait besoin d’examiner le premier moyen du pourvoi, de casser l’arrêt sus référencé et d’évoquer ;
Sur l’évocation
Attendu que la STEL a sollicité dans l’instance d’appel, la confirmation en toutes ses dispositions, du Jugement n° 403 du 30 juillet 2008 du Tribunal de Commerce de Bamako, dont le dispositif est le suivant : « ... Dit que l’ordonnance d’injonction de payer de céans sortira ses plein et entier effets pour la somme de 306.327.700 FCFA ... », tandis que la BCS a conclu à son infirmation ;
Attendu qu’il apparaît à l’examen des faits soumis à l’appréciation de la juridiction saisie sur opposition tels qu’énoncés ci-dessus, que la créance ayant une cause contractuelle, est matérialisée dans un crédit documentaire dont la réalisation était subordonnée à la production de documents afférents à l’opération de vente ;
Qu’en dépit de la remise desdits documents approuvés expressément par la SNF par lettre en date du 31 mai 2007, la BCS s’est abstenue de payer, au motif que certains de ces documents n’étaient pas conformes aux « Règles et Usances Uniformes 500 » de la Chambre de Commerce Internationale, sans démontrer en quoi cette non-conformité mettait en doute le caractère de certitude, de liquidité et d’exigibilité de la créance, comme l’a relevé la juridiction statuant sur opposition ;
Attendu toutefois, que même si les motifs du jugement sur opposition sont pertinents au regard du caractère certain, liquide et exigible de la créance de la STEL, la formulation retenue dans ce jugement, consistant à vouloir faire sortir à l’ordonnance d’injonction de payer, « son plein et entier effet », est inadéquate au regard des dispositions combinées des articles 12 et 14 sus énoncées, qui prévoient que, « la juridiction saisie sur opposition … statue ... par une décision qui aura les effets d’une décision contradictoire [et qui] … se substitue à la décision portant injonction de payer » ;
Qu’il échet en conséquence, de réformer le jugement entrepris sur ce point et statuant à nouveau, condamner la BCS à payer la somme de 306.327.700 FCFA à la STEL ;
Sur les dépens
Attendu qu’il y a lieu de condamner la BCS, qui succombe, aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
- Déclare recevable le pourvoi de la société TRIGON ENERGY Ltd ;
- Casse l’Arrêt n° 49 en date du 08 juillet 2009 de la Cour d’Appel de Bamako (République du Mali) ;
Evoquant,
Et réformant le Jugement n° 403 en date du 30 juillet 2008 du Tribunal du Commerce de Bamako,
- Condamne la Banque Commerciale du Sahel à payer la somme de trois cent six millions trois cent vingt sept mille sept cent (306.327.700) FCFA à la société TRIGON ENERGY Ltd ;
- La condamne également aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président Le Greffier en Chef


Synthèse
Numéro d'arrêt : 031/2011
Date de la décision : 06/12/2011

Analyses

PIÈCES DÉPOSÉES AU DOSSIER DU RECOURS EN CASSATION - ABSENCE DE CERTIFICATION CONFORME DES PIÈCES PRODUITES - PIÈCES AYANT INCONTESTABLEMENT SERVI EN PREMIÈRE INSTANCE ET EN APPEL - RECEVABILITÉ DU RECOURS AU REGARD DES ARTICLES 27 ALINÉA 1ER ET 28-5 DU RÈGLEMENT DE PROCÉDURE DE LA COUR DE CÉANS : OUI PIÈCES PRODUITES EN ANGLAIS - RECEVABILITÉ : OUI - ANGLAIS LANGUE DE TRAVAIL - ARTICLE 42 DU TRAITE RECOURS EN CASSATION FORME PAR UNE PERSONNE MORALE - MANDAT DE REPRÉSENTATION DUMENT SIGNE PER UN REPRÉSENTANT DE LA PERSONNE MORALE - POURVOI RECEVABLE OPPOSITION - POUVOIR DU JUGE DE L'OPPOSITION DE STATUER EN TOUTE SOUVERAINETÉ EN SUBSTITUANT SA DÉCISION À CELLE DU JUGE DE L'ORDONNANCE - VIOLATION DES DISPOSITIONS DES ARTICLES 12 ET 14 DE L'ACTE UNIFORME PORTANT ORGANISATION DES PROCÉDURES SIMPLIFIÉES DE RECOUVREMENT ET DES VOIES D'EXÉCUTION : CASSATION


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2011-12-06;031.2011 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award